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En quoi consiste la communication des consciences ?

Publié le 23/03/2004

Extrait du document

Eux aussi ont dirigé sur moi leur regard inquisiteur et adapté leur comportement à ce qu'ils ont cru découvrir. Nous sommes là un groupe de personnes nous traitant comme des personnes et non comme des choses. Je souhaite vraiment que toutes obtiennent la place désirée et je ne suis plus hypnotisé par la seule préoccupation de moi. Néanmoins, il s'en faut qu'il y ait entre nous cette compénétration des esprits que constitue la communication des consciences.Parfois, cependant, dans certains cas exceptionnels, nous avons, au cours d'une de ces conversations fortuites, l'impression subite d'avoir rencontré comme un autre nous-même : il nous semble lire dans ses yeux comme nous lisons en nous et nous lui portons un intérêt analogue à celui que nous nous portons à nous-mêmes. Il y a eu alors un commencement de communication des consciences.B. La communication des consciences. - Ce phénomène est paradoxal, car, d'une part, il implique l'unité des consciences et, d'autre part, non seulement exige leur pluralité ou plutôt leur dualité, mais encore l'accuse.Pour expliquer cette mystérieuse pénétration d'une conscience par une autre ou plutôt pour l'éclairer par un fait analogue, nous sommes obligés de recourir à la connaissance que nous avons de nous-mêmes par introspection : la communication des consciences parait se faire par intuition.

« II.

- PHILOSOPHIE DE LA COMMUNICATION DES CONSCIENCES Dans ces moments privilégiés où nous lisons dans le regard d'autrui, tout se passe, avons-nous dit, comme si était levée la barrière qui sépare le moi du toi,comme si nous avions de la vie intime de l'autre une vue aussi intuitive que celle que nous donne l'introspection.

Il faut revenir sur cette impression et voirsi elle n'est pas trompeuse. A.

Ce qu'elle n'est pas.

— On ne peut pas expliquer la communication des consciences par une intuition véritable qui suppose l'unité du sujet et de l'objet,ou du moins l'absence de tout intermédiaire entre eux.

En effet, sans intermédiaire, il ne s'établira jamais aucune communication entre moi et l'autre : il yfaut des paroles, des attitudes, le regard...

Sans doute, la suspension momentanée de cet intermédiaire semble approfondir la communication au lieu del'arrêter : c'est le silence, souvent, qui fait sentir ou deviner ce que les mots n'ont pu dire.

Mais c'est toujours sur ce qui a été vu ou entendu qu'on se fondemême quand on le dépasse : le silence tire toute sa signification des paroles qui l'ont précédé et des circonstances qui l'entourent.On objecte que l'extériorisation de certains états d'âme n'est pas pour moi un signe que j'aie besoin d'interpréter : je vois la colère de celui qui a un visageirrité, je ne la conclus pas.

Mais en réalité je ne vois qu'un visage irrité ; de l'irritation je n'ai qu'une connaissance indirecte et sujette à erreurs :l'expression des sentiments varie avec les civilisations, et bien souvent elle ne correspond pas à ce qu'on éprouve.

Je vois, ou plutôt je sais, que moninterlocuteur est en colère â peu près comme je sais que celui dont le journal annonce la mort est maintenant froid et raide sur son lit ou dans sa bière.Il nous semble également inutile d'en appeler à une sorte de faculté naturelle ou d'instinct, à un sens spécial qui prend différentes formes bien analysées parles psychologues allemands, en particulier par Max Scheler : « Einfühlung », « Mitfühlung », « Miteinanderfühlung »...

Le recours â un instinct ou à unefaculté spéciale est une explication paresseuse dont l'esprit ne peut se satisfaire.

Il y a deux modes de connaissance : la connaissance directe ou intuitiveet la connaissance indirecte ou discursive.

Si, dans la communication des consciences, nous ne trouvons pas d'intuition véritable, ces faits s'expliquent parle jeu de la pensée discursive. B.

Ce qu'elle est.

— La communion des consciences est une connaissance par « discours », c'est-à-dire par le détour (discursus) ou l'intermédiaire de faitssensibles qui sont pour nous les signes d'un état d'âme : un regard n'est parlant pour moi que par tout un passé de conversations qu'il me rappelle ou grâceaux circonstances qui me permettent de l'interpréter ; aussi, dans certains cas, ai-je l'impression d'un regard qui veut me dire quelque chose que je neparviens pas à deviner par défaut de données objectives.

C'est toujours par l'intermédiaire des objets que nous parvenons à pénétrer la subjectivité desautres.Mais ce discours est implicite et non explicite.

Il n'y a pas de raisonnement véritable, et c'est directement que je vois la colère sur un visage irrité.

Onn'observe pas un premier moment qui consisterait dans la perception du signe et qui se distinguerait d'un second moment où serait perçue la signification.Les choses se passent dans le cas envisagé comme lorsque je lis dans le journal une nouvelle du genre de celle-ci : le gouvernement est démissionnaire.Normalement, je ne commence pas par percevoir les lettres et les mots pour se rendre compte ensuite du fait qui est annoncé : c'est le fait lui-même qui estvu dans la ligne en caractères gras qui tirent l'oeil.Mais nous n'apprenons pas à lire sur le visage des autres comme l'enfant apprend à lire dans un livre.

Avant sa première leçon de lecture, celui-ci connaîtbien des choses et bien des mots ; il s'agit seulement pour lui d'apprendre à transcrire en signes visuels les signes phonétiques qu'il connaît déjà : laconnaissance des choses précède celle des signes.

Au contraire, dans le domaine psychologique, la connaissance des choses et celle des signes se fait enmême temps : il n'y a pas d'abord une connaissance introspective de la colère, puis une prise de conscience des signes qui la manifestent et qui nouspermettraient de la reconnaître sans la voir.

A l'aspect d'un visage irrité, j'ai une impression plus vive de voir la colère elle-même qu'il ne me semble voir, àla lecture d'un titre du journal, le fait même qui est annoncé : la connaissance des états de conscience est si fortement associée à celle de leurs signes quela vue des signes nous donne un incoercible sentiment d'avoir une intuition des états de conscience.Ce sentiment provient de ce que, plus ou moins consciemment, nous réalisons en nous les états d'âme dont nous percevons les signes extérieurs.

Dès lors,nous avons bien une véritable intuition, mais de notre conscience et non de celle d'autrui.

Le fait est particulièrement sensible quand nous avons affaire à unde nos intimes ; connaissant bien, d'une part, ses pensées habituelles, ses sentiments, ses désirs et, d'autre part, vivant en sympathie avec lui, tout ce quise passe dans sa conscience a son écho dans la nôtre ; entendant cet écho, nous avons l'impression d'entendre la voix qui lui correspond.Dans les autres cas, la connaissance que nous donne la vue des signes extérieurs des mouvements de l'âme est beaucoup moins éclairante : c'est uneconnaissance plus affective qu'intellectuelle ; je sens que cet inconnu que je vois discuter avec violence est en colère et que ce n'est pas à lui que je doisdemander ma route, mais je serais bien en peine de dire quel est le genre de colère qu'il éprouve.

D'ailleurs, même dans ce cas, si je me sens détourné delui, c'est que, réalisant en moi l'état dans lequel il se trouve, je sens qu'il ne faudrait pas m'approcher. Conclusion. — Pour la philosophie moderne, l'esprit humain était enfermé en lui-même, menant une vie intérieure dont il avait une conscience claire, tandis que tout le reste échappait h la connaissance immédiate.

Les contemporains ont fortement réagi contre cette conception systématique.

L'esprit n'est pasune monade sans portes ni fenêtres : il est dans le monde et ne serait rien sans son insertion dans le monde, et en particulier dans le monde desconsciences.Mais la réaction, comme il arrive à l'ordinaire, est allée plus loin qu'il ne convenait et que les faits ne semblent le demander.

Si nous communiquons avec lesconsciences d'autrui, cette communication n'a pas l'immédiateté de celle que nous pouvons avoir avec nous-mêmes et c'est par le détour de notreintériorité que nous parvenons à ces vues si éclairantes sur l'intérieur des autres. RAPPEL: LA MONADE CHEZ LEIBNIZCe terme renvoie à l'unité spirituelle élémentaire dont tout ce qui existe est composé.

La monade est à lamétaphysique ce que le point est à la géométrie à la fois unique et en nombre infini.

Il n'y a pas chez Leibniz dedualisme (d'un côté l'âme et de l'autre l'esprit).

Mêmes les minéraux ou les végétaux possèdent une dimensionspirituelle ! Il y a des monades douées de mémoire chez les animaux, des monades douées de raison comme chez leshommes.

Aucune monade ne ressemble à une autre.

Chacune d'elles représente le monde de manière toujoursparticulière et plus ou moins claire, à la manière de miroirs plus ou moins bien polis.

A la faveur de la bonté et del'omniscience divines, toutes les monades constituent un tout harmonieux, car chacune est comme un monde fermé,sans portes ni fenêtres, cad sans communication.. »

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