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Les rapports établis entre la demeure et son habitant. Quelle place y tient l'influence possible de l'architecte ?

Publié le 10/03/2011

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   Plan    I. Échange affectif : demeure/habitants.    II. Un nouveau phénomène : l'urbanisme.    Devoir rédigé    On trouve parallèlement dans cette page d'Emile Aillaud deux formules fort intéressantes. « C'est un conditionnement psychologique que doit créer une ville« affirme-t-il, opinion qu'une autre phrase aussi bien frappée vient compléter : « Les murs forment les individus à leur image. « Or ces affirmations sont destinées à être méditées par les architectes qui savent bien d'autre part combien aussi les habitants transmettent une partie d'eux-mêmes aux demeures où ils séjournent. C'est donc un triple courant qui s'établit d'abord entre l'habitation et l'homme ce qui a été constaté depuis longtemps, mais aussi - insiste E. Aillaud - avec l'architecte. Ce dernier élément serait-il particulier à notre XXe siècle?     

« *** C'est pourquoi, en architecte confronté à de telles difficultés, parce que l'époque moderne a multiplié lesconstructions systématiques et qu'elle s'est brusquement penchée sur les problèmes ainsi soulevés et laconcentration citadine qui les avait provoqués, Emile Aillaud affirme que « la démarche » du créateur, surtout de «logements sociaux », doit être « psychologique », et qu'« il...

importe avant tout de créer...

des situationsarchitecturales ».

Mais que faut-il entendre par ces belles formules? et l'architecte - troisième élément nouvellementsurgi au milieu des rapports habitant/habitat - est-il réellement un « deus -ex-machina ».

Le désir d'adapterl'architecture aux mœurs est, tout d'abord, une idée neuve.

Car autrefois les créations architecturales de typenouveau étaient, en quelque sorte, l'aboutissement d'une évolution naturelle.

C'est la profondeur de croyancesincère, c'est l'élan de la foi de tout un peuple vers Dieu qui font s'élancer vers le ciel les fines dentelures gothiquesdes tours et clochers des églises médiévales.

Tout un siècle ainsi pouvait se trouver porté par un goût déterminé quise reflétait dans son architecture.

Tel le XIXe siècle, qui « fut un siècle d'archéologie » (Jean Ache) et que sonenthousiasme devant les révélations de l'histoire poussa à imiter les anciens avec une soumission finalement trèspeu originale, dans son illusion qu'il n'était pas possible de trouver mieux.

La Madeleine, bâtie en pseudo-temple grecen est un exemple ! Même admiration au XVIIe siècle pour l'architecture antique; mais en même temps, ce siècleclassique porte bien ancrée en lui - autant que dans le cœur de son prince - la foi dans certaines valeurs créatricesde l'art même de son époque.

Aussi le château de Versailles (on a écrit à son propos que « Louis XIV à Versaillesfaisait du Louis-XIV ») n'est-il pas seulement né du désir du Roi, mais d'une volonté générale des artistes classiqueset même de l'atmosphère générale, de métamorphoser les modèles antiques en les transposant et adaptant.

C'estpourquoi fut obtenu, non une copie, mais un chef-d'œuvre original. Donc selon l'affirmation de l'historien Lucien Febvre « un monument n'est pas une masse inerte de pierre et de bois,isolée dans le temps et dans l'espace ».

Un immeuble, une maisonnette même, non plus.

Tout le monde sait quecertaines demeures ont une âme parce qu'elles ont des recoins inattendus, des murs « chauds », « parlants »,qu'elles savent entourer l'homme d'une atmosphère quiète, humaine en quelque sorte, tandis que d'autres sontraides, froides, sans rapports réels avec ceux qui s'y trouvent, de passage si l'on peut dire.

C'est alors que lesarchitectes modernes, partant de cette influence, réelle bien qu'impondérable, des aîtres sur leurs habitants, ontdécidé de trouver les éléments qui devaient rendre les maisons vivantes.

« Entre une terre et le peuple qui l'habite,entre l'homme et l'étendue, la figure, le relief, le régime des eaux, le climat, la faune, la flore, la substance du sol, seforment peu à peu des relations réciproques qui sont d'autant plus nombreuses et entremêlées que le peuple est fixédepuis plus longtemps sur le pays », constatait Valéry au début du XXe siècle.

Or c'est dès le modem style quicommence à l'aube de ce même siècle, particulièrement avec la découverte dominatrice du béton armé (voir lesPerret et leur théâtre des Champs-Elysées) que les architectes réalisent clairement - mais en dégagent souvent desattitudes doctrinaires - cette réelle réciprocité de relations établies entre la construction et l'homme.

Mais ils vont,trop vite peut-être, en dégager - à partir de 1945 ils seront tous ou presque directifs en ce sens - la croyance nonseulement qu'il faut absolument que les immeubles nouveaux soient humains, mais qu'il leur faut, eux architectes,trouver puis imposer tel ou tel type de construction pour obtenir ce résultat.

Le texte de Aillaud donne, à ce sujet,des exemples précis tirés de son expérience personnelle : immeubles-miroirs à Chanteloup, immeubles « quiserpentent » à la Grande-Borne, tours « dont certaines auront 100 m de haut » à Nanterre..., toutes intentions etdirections parfaitement louables puisqu'il pense que, de cette adaptation de styles aux lieux et milieux naîtra lameilleure atmosphère due à chaque groupe différencié.

Certes il faut replacer de tels efforts dans le contexte desconstructions pléthoriques de tous ces promoteurs peu consciencieux qui, au cours spécialement des 25 dernièresannées, bâtissaient n'importe quoi pourvu que « cela » aille vite, coûte le moins possible et leur rapporte par contredes bénéfices sans limites.

L'architecte qui, face à de semblables excès, réfléchit aux problèmes des habitants, etdésire en priorité mieux que leur bien-être : leur bonheur -, fait preuve d'un intéressant désir altruiste de bien faire.Mais, en forçant ainsi ses constructions à la suite d'a-priori, d'idées trop préconçues, ne risque-t-il pas de parvenirà un résultat fort lointain de ce que l'évolution lente et naturelle des mœurs au fil des siècles obtenaitprogressivement.

Car un bâtiment, un monument, sont « le produit réalisé en un certain lieu avec des matériauxdéterminés, de la mentalité d'un peuple, à une époque donnée de l'histoire» (L.

Febvre).

Or le désir d'adapter lesinventions - car les révolutions de la technique ont provoqué une rupture dans les méthodes de construction quis'est répercutée dans les manières de vivre - d'abord ne s'est manifesté que par poussées : architecturefonctionnaliste de l'entre-deux-guerres, recherches et découvertes de Le Corbusier et sa « cité radieuse » àMarseille (1947-1950), politique urbaine et urbaniste, cités techniques et cités humaines dont on établit les nuancesdepuis 1950/1960.

Mais tout s'est trop souvent passé « comme s'il avait fallu imposer les nouveautésarchitecturales par contrainte » (Bernard Champigneulle).

Ainsi ce que l'on gagnait d'une part ne le perdait-on pasde l'autre? * * * L'homme d'aujourd'hui comme celui d'hier aime l'entassement joyeux des boutiques de la rue commerçante, il aimeaussi retrouver les vieux palais, les villes anciennes aux « atmosphères enchantées ».

Or la concentration urbaine,dont le XIXe siècle croyait qu'elle apporterait le bonheur au genre humain, fait paraître de nos jours les méfaits deses cités bétonnières et sans âmes par les stigmates que portent trop souvent les nerfs et les visages de noscontemporains.

Il a fallu construire avec rapidité d'énormes immeubles dont chacun seul abrite la population de toutun petit bourg d'autrefois.

La lente métamorphose des mœurs et rythmes de vie qui apportait à l'habitat sesinventions, ses styles, ses modes, ses venelles sinueuses ou rues hétéroclites rassemblées autour des clochers,beffrois ou hôtels particuliers n'existe plus dans les grands ensembles, sortes d'expédients hâtivement conçus pourloger les foules qui déferlent vers les villes.

Ainsi est né l'urbanisme, science toute neuve et son état-major de. »

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