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Recourir au langage, est-ce renoncer à la violence ?

Publié le 03/01/2004

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Les adolescents caractérisés comme violents vivent dans une logique d'immédiateté. Ils situent, le plus souvent, à l'extérieur d'eux-mêmes l'origine des événements désagréables de leur vie et sont incapables de nommer et d'identifier leurs émotions et leurs sentiments en situation de frustration.     

c. Le langage devrait ainsi permettre d'atténuer des tensions, des impulsions passionnelles. Dialoguer peut ainsi avoir cette vertu de résoudre par la raison des situations critiques. L'histoire de la politique nous a montré qu'il était possible d'arranger des états de crise par le dialogue. Ainsi, on affirme que Kennedy a plutôt bien fait, dans un moment extrêmement critique de la guerre froide, d'avoir eu recours au téléphone rouge. Le téléphone rouge désigne une ligne de communication directe établie le 30 août 1963 entre les États-Unis et l'Union soviétique après que la crise des missiles ait mené le monde au bord de la guerre mondiale en 1962. Toutefois, si le langage peut-être l'expression d'une faiblesse, ou d'un désir d'arrangement, n'est-il pas aussi le moyen le plus dissimulé pour l'assujettissement d'autrui ?

Le langage est une fonction d’expression et de communication liée à la pensée, spécifiquement humaine. Le fait de parler ne se réduit pas aux dispositifs neurobiologique et organique : « L’invention de l’art de communiquer nos idées dépend moins des organes qui nous servent à cette communication que d’une faculté propre à l’homme [la pensée], qui lui fait employer ses organes à cet usage « (Rousseau, début d’Essai sur l’origine des langues). La pensée a donc besoin d’un intermédiaire, le langage, pour être communiquée, extériorisée. Toutefois, le langage extériorisé caractérise plus la parole, car on peut parler d’un langage intérieur, qui ne se laisse pas forcément percevoir par autrui. Aussi au sens le plus large, le langage est un système de signes servant de moyen de communication : on peut évoquer ainsi le langage des gestes, du corps, en ce sens que tous les organes des sens peuvent servir à créer un langage. Mais communiquer, c’est toujours en quelque sorte imposer son être, affirmer ses idées, et pouvoir ainsi orienter ou déstabiliser son interlocuteur. Comment comprendre, dès lors, cette fonction inhérente au langage qui a pour fins de dominer autrui ? 

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« guérir un malade, mais à faire entrer dans l'ordre du langage le discours non formulé qui constitue l'inconscient.

Enfait, marxistes et psychanalystes rejoignent parfois le pessimisme existentiel d'un Sartre pour lequel (dans L'Être et le Néant ) chaque conscience se propose, dans la relation à autrui, d'asservir une liberté.

Aussi, au sein de chaque société, tous ne maîtrisent pas le même « niveau » de langue et l'on sait bien que toutes les façons de s'exprimer nese valent pas, au sens où les unes favorisent bien plus que d'autres l'accès à des positions et à des devoirsprivilégiés.

b.

Les mots peuvent être utilisés à des fins personnelles.

On retrouve le thème du langage et de la domination qui en résulte dans le Gorgias de Platon .

Gorgias est un rhéteur, il utilise le langage afin de persuader « les juges au tribunal, les sénateurs dans le Conseil, les citoyens dans l'assemblée du peuple et dans toute autre réunion qui soitune réunion de citoyens » (451 d – 452).

Le langage est pour lui un pouvoir permettant de faire de chacun sonesclave. La rhétorique est la maîtrise du discours persuasif, qui ne se soucie guère de connaître ce dont elle parle.

Elle rendl'orateur plus convaincant sur un sujet que celui qui connaît à fond ce sujet, et ferait presque prendre l'âne pour uncheval.

En ce sens, la rhétorique se confond avec la sophistique.

Le sophiste prétend à un savoir universel ; experten l'art de rendre habile à parler sur tout, il ne rend pas véritablement savant sur tout, mais en donne l'apparence.

La sophistique, comme la rhétorique, est une flatterie, imitation néfaste d'arts utiles fondés sur un véritable savoir: législation, justice.

La sophistique, comme la rhétorique, veut, sans souci de justice, montrer parla parole et parl'action le plus d'efficacité dans les affaires de l'État. On retrouve cette utilisation, dans un cadre comique, chez Molière , lorsque Dom Juan éconduit adroitement le marchand vis-à-vis duquel il est endetté ( Dom Juan , IV, 2-3). c.

Les mots ont un très grand pouvoir.

C'est à partir d'eux que se constitue la perception de l'univers dans lequel nous vivons.

Le langage peut aussi manifester malgré soi des pensées ou des désirs inconscients.

Ainsi le lapsus, quiconsiste à émettre un mot alors qu'on pensait à autre, est selon Freud la marque du langage inconscient. L'inconscient se manifeste par le biais du langage, et c'est la psychanalysequi utilise cet instrument à des fins thérapeutiques.

Par ailleurs, mêmepolitiquement, le langage est au service du pouvoir.

On se rappellera Hitlerqui, lors d'un plébiscite en 1933, a su par son éloquence faire applaudir desjournalistes pourtant méfiant du parti nazi.

Socialement aussi le langageasservit les hommes.

Deleuze et Guattari parleront du « mot d'ordre », en ce sens que le langage, loin d'être un simple moyen d'expression, commandeet ordonne.

Ce qui paraît exprimer un simple conseil, ou une simple volonté,se voit à l'insu du sujet désigner un ordre, une manière incontestable de secomporter ( Capitalisme et schizophrénie 2 ). Conclusion On a vu que le langage permettait l'expression des passions de l'hommeavec Rousseau.

La communication de l'intériorité devait ainsi être révélée àautrui.

Mais on voit aussi que la violence utilise le langage et indique plus unefaiblesse, une frustration, une difficulté à s'exprimer avec justesse.

En cesens la maîtrise de la violence par un bon usage du langage peut porter sesfruits.

Mais on s'aperçoit qu'en dehors des aléas de l'expression de l'individu,le langage est instrumentalisé à des fins personnelles ou idéologiques.

Si laviolence physique s'estompe, la violence qu'impose le langage en tant qu'il estune modalité de contrôle sur l'individu ne peut laisser indifférent.

On pourraittout aussi bien dire « non » à un langage orienté vers des intérêts précis.

Mais le langage alors, ne serait-il pas,quel que soit ce qu'il veut exprimer, un jeu de la violence avec elle-même ?. »

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