Devoir de Philosophie

Le réel est-il signifiant ?

Publié le 12/03/2004

Extrait du document

Le réel est-il signifiant ?

Pour le poète, l'astrologue ou le numérologue, il y a dans le monde des signes qui ne demandent qu'à être lus. Ces signes permettent de comprendre le monde, de soigner les hommes, de découvrir leur destin. MAIS, Le réel est quelque chose de singulier, qui ne se répète jamais. Il est à la fois déterminé et indéterminé. C'est pourquoi il est impossible d'appréhender le réel avec des mots sans le trahir.

« Dans le même ordre d'idée, Bergson dira que le langage sert à chaque individu pour trouver son rôle et sa place dans la société.

Les signes du langage sont à la fois généraux et mobiles.

Ilspermettent aux objets de passer de l'ombre à la lumière, ils les font devenirchoses.

Mais pratiquant le langage, l'intelligence applique des formes qui sontcelles-mêmes de la matière inorganisée.

Le langage pétrifie le monde, le durciten le découpant en fonction de nos besoins et de nos habitudes.

De par sagénéralité, il use des mêmes vocables, pour ce qui, chez chacun, est pourtantun état psychologique ou un sentiment unique.

Chacun de nous a sa manièrepropre d'aimer et de haïr, et pourtant, nous sommes obligés de parler tous lemême langage.

Il ne peut donc que fixer l'aspect objectif et impersonnel del'amour, ou de tout sentiment qui nous traverse.

La pensée authentique demeuredonc incommensurable au langage, dans lequel nous associons nos idées en lesjuxtaposant les unes aux autres, sans pouvoir exprimer leur compénétration nileur lien intime.

Alors que les idées s'engendrent les unes des autres de manièrevivante, le langage ne peutfaire autrement que les accoler les unes derrière les autres.

A l'égard du monde,les mots sont comme des étiquettes que l'on collerait sur les objets, et qui touten les nommant, les dissimulent.

Tous les mots, à l'exception des noms propresdésignent des genres, soit des généralités. Le réel est à la fois déterminé et indéterminé Pour que le hasard se produise, il faut qu'il soit déterminé, car «si tout est indifféremment chemin, rien n'estchemin», dit Rosset.

En même temps, le réel, pour être, doit être déterminé.

Cette qualité du réel d'être à la foisdéterminé et indéterminé est ce que Rosset appelle «l'insignifiance du réel». C'est-à-dire que les choses n'ont pas de sens.

Aucun sens ne peut m'être dispensé avec l'être.

Trois livresdécrivent parfaitement cette insignifiance (L'anti-nature, Logique du pire et Le Réel, traité de l'idiotie).Le hasard yest vu comme impossibilité pour l'être de se donner comme loi, sens, raison, cause, nécessité sans l'appoint del'homme.

Je le disais, il n'est pas de sens et de nécessité qui ne soit le fruit d'une volonté de faire parler un réel quine peut qu'être muet.Cependant, « toute indétermination cesse au seuil de l'existence .» Une réalité advenue cesse d'être hasardeuse,non pas qu'elle soit immuable, soustraite au devenir.

Mais ici et maintenant, une réalité est nécessairement quelquechose et nécessairement ce qu'elle est et rien d'autre.

Nécessairement hasardeuse parce que le hasard constituel'essence du réel ; hasardeusement nécessaire parce que, fruit du hasard, une chose ne peut néanmoins pas êtren'importe quoi.

Nécessité pour être d'être quelque chose et donc quelconque.

Rosset convoque l'exemple du Consulde Au-dessous du volcan de Malcom Lowry.

Le réel y est dit comme à la fois anyhow et somehow, de toute façond'une certaine façon.

Pour être il faut être quelque chose et si possible quelque chose de déterminé.

Là est bienl'insignifiance du réel qui est de toujours être signifiant, quel qu'il soit, aussi absurde nous semble-t-il.

Il se signifielui-même et rien d'autre et c'est cela qui fait son insignifiance, le fait qu'il ne puisse être rapporté à aucun systèmede sens.

Signifiant d'un signifié qui n'est autre que lui-même.

Il ne veut rien dire d'autre que le fait qu'il est.

Il y adonc une antinomie insurmontable entre hasard et modification : si ce qui existe est essentiellement hasard, ils'ensuit que ce qui existe ne peut être modifié par aucun aléa, aucun «événement».

Jamais le hasard ne serachangé par le hasard.

D'où miracle permanent et monotonie absolue ! Sans nature, tout étant est un miracle mais sitout est miracle rien n'est miracle et tout est donc mono-tone, qui ne parle que d'une voix.La coïncidence du nécessaire et du non-nécessaire, qu'un chose soit et demeure sans raison d'être et de demeurer,est un fait troublant : elle est sans motivation et donc implacable parce que sans motivation.

On ne rompt pas unechaîne causale inexistante.

Pour la même raison la joie ne peut être interrompue puisqu'elle aussi est sans causeassignable.

Ce qui n'a pas de cause ne peut cesser d'être, du moins nulle cause ne peut le faire se lasser d'être.

Onne peut m'invoquer une raison qui contredirait ma raison d'être joyeux puisque je n'ai justement qu'un non-sens aufondement de ma joie! Il faudrait retirer le réel à la joie pour l'épuiser.

La joie n'est en effet pas le contentement.Les deux s'opposent comme le non-sens inépuisable et le contenu, limité et précaire.Le sens est une "valeur ajoutée".

Toute lecture du réel est donc un faux dans la mesure où elle ne le lit que pourdonner une valeur ajoutée à ce qu'elle croit lire.

Valeur sans valeur au contraire du réel qui lui, pour être sansvaleur, est justement doté d'une valeur inépuisable puisqu'inassignable. Le réel constitue une idiotie"Idiotie", du grec idiotes, renvoie à ce qui est simple, particulier, unique.

Voilà pourquoi Le Réel est sous-titré Traitéde l'idiotie.

C'est de cette «idiotie» - et non d'une quelconque bêtise - que Rosset entend parler.

L'irréductiblesingularité du réel est une dimension ignorée par la plupart des philosophes qui transforment le réel en conceptsabstraits, lui substituent des interprétations, et finissent par le nier. L'idiot comme le témoigne son étymologie simple, unique.

Stupide, sans raison, comme l'est l'infinité des possibles,mais aussi simple, unique, comme l'est la totalité du réel.

« La vie est une histoire racontée par un idiot pleine debruit et de fureur et qui ne signifie rien.

»Le réel est imitable à merci sans jamais rien imiter soi-même.

Or il faut craindre le double puisque au réel rien nemanque.

Il suffit à notre bonheur, tout nous y est donné.

Pour parler comme Kant il ne s'agit pas de se demander sile bonheur est possible puisqu'il existe.

Il s'agit de se demander comment il est possible.

Mais aussi comment il estpeut-être rendu sinon impossible du moins ardu.

Car s'il y a bien une réalité omniprésente et tragique par excellence,. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles