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La relation fondamentale avec autrui est-elle l'imitation, la sympathie, ou le conflit ?

Publié le 01/02/2004

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dans leur oeuvre... Le but de la camaraderie c'est ce que l'on fait ensemble, non ceux qui le font ; on pourrait dire en un sens de l'univers de la camaraderie qu'il est purement public. La vie privée n'y a aucune part»2. Au contraire, l'amitié n'est plus participation à une oeuvre extérieure au moi, mais don véritable de personne à personne (ce qui n'exclut pas la recherche commune d'un dépassement de soi ; « ils s'aiment non pour ce qu'ils sont mais pour ce qu'ils espèrent devenir l'un par l'autre»).De la même façon, il convient de bien distinguer - à la suite de Max Scheler - la sympathie véritable de la simple contagion affective (Einfuhlung). La contagion affective est une participation passive, inconsciente et involontaire aux sentiments d'autres personnes. Par exemple, en entrant dans la brasserie, je sens ma tristesse disparaître, je me mets à rire, à parler fort, à chanter comme les autres et un sentiment d'euphorie m'envahit. Cette contagion psychique n'est aucunement une « connaissance» de ce qui est éprouvé par autrui. En fait, les attitudes prises, les gestes accomplis déterminent ici presque irrésistiblement des états de conscience que j'éprouve pour mon compte sans chercher à rejoindre la personne d'autrui. Bien loin d'être un acte de la personne comme est la vraie sympathie, la contagion affective est en réalité une abdication de la personne, la démission d'un moi trop suggestible qui se laisse envahir sans contrôle par des automatismes liés à des états affectifs.

« transcende l'affectivité.

Elle est un acte de la personne qui vise la souffrance ou la joie d'une autre personne, quiles reconnaît plus qu'elle ne les éprouve.

Gide, par exemple, déclare à propos de sa femme « Par sympathie, jeparvenais à comprendre ses sentiments, je ne pouvais les partager» '.

Et Max Scheler assure que je puis «fort biencomprendre l'angoisse mortelle d'un homme qui se noie sans pour cela éprouver rien qui ressemble même de loin àune angoisse mortelle».

Bien plus, je puis comprendre selon Max Scheler des émotions que je n'ai jamais éprouvéesmoi-même.

Je lis dans ce visage une pureté, une candeur que je n'aurais pas soupçonnées auparavant.

Ce regardfurieux me signifie une qualité, une intensité de haine que jamais je n'aurais cru possibles.

Pradines écrit dans cetteperspective que « nous pouvons sympathiser même avec des sentiments que nous ne saurions éprouver soit qu'ilsnous dépassent soit au contraire que nous les dépassions, avec la tristesse de Jésus à Gethsemani ou avec lespetits chagrins d'un enfant».

La connaissance d'autrui bien loin de me renvoyer comme dans la théorie de l'analogieà des expériences familières, élargit au contraire mon horizon, m'apporte d'incessantes révélations. Le rapport avec autrui est-il fondé sur le conflit ? Comment le rapport à autrui pourrait-il être fondé sur le conflit ? Ne serait-ce pas la négation de tout rapport, et lanégation du droit, d'une nature sociale de l'homme ? Ou le droit n'a-t-il été une nécessité que pour dépasser cefondement conflictuel ? Le conflit est-il au fondement de tout rapport à autrui ? Cela suppose que le conflit estpremier et indépassable comme horizon, même si dans tel ou tel cas particulier le rapport conflictuel peut être moinsapparent.

(L'amitié est un rapport à autrui.

Est-ce qu'elle suppose comme fondement un rapport conflictuel ?) Quelpeut-être ce conflit "originaire" ? Est-ce qu'on peut simplement le déduire du fait que chacun a des intérêtsparticuliers ? Mais, dans ce cas, ce qui est au fondement, c'est notre intérêt personnel, mais pas le conflit.

On peuttrès bien imaginer que nos intérêts finissent par converger.

Donc comment définir le conflit de manière plusfondamentale ? Sartre, dans L'Être et le Néant ("Les relations concrètes avec autrui"), construit cette idée deconflit en expliquant que le sujet est à la fois sujet et objet, sujet quand il regarde l'autre, mais aussi objet pour leregard de l'autre, et que c'est cette dimension qui est originairement conflictuelle (soit sujet de mon regard, soitobjet pour le regard d'autrui comme dans l'expérience de la honte, mais jamais les deux à la fois : être vu par l'autrecomme sujet libre et non comme objet, c'est ce qui est impossible). Les rapports avec les autres sont-ils nécessairement de l'ordre du conflit ? Se demander si les rapports avec les autres sont nécessairement de l'ordre du conflit peut surprendre.

Que lacirconstance soit possible, cela s'admet.

Qu'elle soit nécessaire, cela semble excessif: la vie avec les autres n'estpas un perpétuel affrontement.

Quel est dès lors le sens d'une telle question ? Peut-être faut-il chercher du côté duconcept d'autrui, thème sous-jacent à quoi se rattachent "l'autre" ou "les autres".

Ainsi verrons-nous que si larelation à autrui se révèle nécessairement conflictuelle, les rapports avec les autres ne sauraient se réduire à cetteseule modalité. Nécessité du conflit dans la relation à autrui. Autrui : un glissement de sens marque l'histoire de ce mot. • Usuellement, il s'emploie de manière restrictive, dans des phrases telles que: "on ne doit pas nuire à autrui".

Ici lestatut d'autrui n'est pas celui d'un sujet au sens plein du terme. • Aujourd'hui autrui est parvenu à la dignité de sujet, désignant bel et bien l'autre que moi, « le moi qui n'est pas moi» (Sartre).

Ainsi la présence d'autrui ne saurait se confondre avec celle d'un simple objet : « originellement, l'Autreest le Non-moi-non-objet » dit Sartre.

Comme tel, il s'oppose donc d'emblée à moi, il m'exclut, il est ma négation. • L'expérience de la « honte » décrite par Sartre précise en quoi le conflit est nécessaire, inévitable : si je ne suismoi que par autrui, ma relation fondamentale à autrui par le regard est vécue comme destituante et aliénante, carles yeux qui se posent sur moi me réduisent à l'état d'objet. Relativité du conflit dans les rapports avec les autres. • Le conflit n'est pas le seul mode de relation au monde le regard des autres peut aussi m'être infiniment précieux s'ilexprime la sympathie ou l'amour.

Je ne suis pas qu'une cible dans l'oeil d'autrui. • Le visage de l'autre n'a-t-il pas pour Lévinas un sens hybride : à la fois incitation au conflit, à la violence, car leplus dénué, le plus exposé en l'homme, mais aussi ordre de paix, mise en respect du meurtrier possible ? « Tu netueras point est la première parole du visage » dit Lévinas. • Par ailleurs, le conflit n'est pas toujours négatif il peut aboutir à une reconnaissance réciproque (cf.

Hegel dans ladialectique du maître et de l'esclave) ou au progrès (ainsi Kant considère que l'opposition à autrui stimule et accroîtles ressources humaines). La polémique des pulsions. • N'y a-t-il pas, presque indépendamment des autres ou de moi, des pulsions fondamentales (de vie ou de mort) qui. »

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