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Sartre: L'Être et le Néant — L'existence d'autrui chapitre Le Regard.

Publié le 11/02/2011

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sartre

« S'il y a un Autre, quel qu'il soit, où qu'il soit, quels que soient ses rapports avec moi, sans même qu'il agisse autrement sur moi que par le pur surgissement de son être, j'ai un dehors, j'ai une nature; ma chute originelle c'est l'existence de l'autre; et la honte est — comme la fierté — l'appréhension de moi-même comme nature, encore que cette nature même m'échappe et soit inconnaissable comme telle. Ce n'est pas, à proprement parler, que je me sente perdre ma liberté pour devenir une chose, mais elle est là-bas, hors de ma liberté vécue, comme un attribut donné de cet être que je suis pour l'autre. Je saisis le regard de l'autre au sein même de mon acte, comme solidification et aliénation de mes propres possibilités. «    Sartre    L'Être et le Néant — L'existence d'autrui chapitre Le Regard.

• L'idée générale du texte est la suivante : Autrui représente « la part du diable «; avec la médiation de son regard, une métamorphose s'opère dans mon être profond, je reconnais alors que je suis « tombé « dans le monde et je m'appréhende comme objet devant une transcendance et une liberté. Par le regard de l'Autre, mon exsistence m'échappe et se fige. C'est le drame de ma transcendance piégée que Sartre donne à voir en ces lignes.  Le problème posé dans ce texte est donc celui de l'existence devant Autrui. Que suis-je pour autrui quand ii me regarde ou, d'une manière plus générale, quand il entre en relation avec moi?    • Quelle est la structure du texte? Il se divise assez nettement en deux parties, la première partie énonçant la thèse sartrienne, la seconde nuançant cette thèse avec beaucoup de subtilité. Cette première partie va de « S'il y a un autre « jusqu'à « comme telle « et se subdivise en trois sous-parties (1 - S'il y a un autre... nature - 2 - ma chute originelle c'est l'existence de l'autre - 3 - et la honte... comme telle). La seconde partie s'organise, elle aussi, en trois sous-parties : 1 - Ce n'est pas... chose - 2 - mais elle est là-bas... pour l'autre - 3 - Je saisis... propres possibilités.   

sartre

« 2.

Étude ordonnée A) Première partie.

S'il y a...

comme telle. Dans toute cette première partie, Sartre décrit, dans sa brutalité, le drame du pour-soi envisagé dans sa relationavec autrui.

Il dégage du concept « Autre » les diverses notions qui semblent y être contenues.

C'est cetemboîtement de notions qui paraît fondamental.

Du concept d'Autre surgit celui de nature, puis de chute, enfin uneexplication de la honte étudiée comme appréhension et saisie d'une nature donnée.

Examinons ces différentsaspects. La première sous-partie va donc jusqu'à « une nature ».

D'emblée, en ce début de texte, Sartre examine la notion,non pas exactement d'Autrui, mais d'Autre.

C'est donc la catégorie de VAltérité qu'il envisage, de manière, nousallons le voir, très dramatique.

Qu'est-ce que l'Autre? C'est (latin alter : autre) originellement, ce qui n'est pas lesujet, ce qui n'est pas moi, ce qui s'oppose au même que moi.

Dans l'existentialisme, cet Autre est synonymed'Autrui et nous pouvons, à la limite, prendre ces deux termes comme équivalents.

L'Autre, c'est ce qui diffère deMoi.

Qu'est-ce à dire? L'Autre, c'est un moi qui n'est pas moi, selon l'expression célèbre de Sartre.

Ce que je reçoisen ma conscience, c'est l'Autre de ma conscience, c'est le Moi différent de moi. Or d'emblée, ce moi qui n'est pas moi, cet Autre, ce différent, surgit avec des modalités universelles dessinant unecondition humaine globale.

Dans toutes les circonstances, la présence d'Autrui se manifeste avec un ensemble decaractères remarquables que je ne puis mettre entre parenthèses.

Il existe donc un drame lié au pour-Autrui, dramefaisant partie de la structure de toute situation humaine.

Il existe donc une universalité de condition. Ainsi, quelle que soit la nature de ce Moi qui n'est pas Moi, quel que soit le lien existentiel où s'engage la relationavec Autrui et indépendamment du type de rapport qui se noue, Autrui me métamorphose et agit sur Moi.

Cettemétamorphose s'opère dans tous les cas, qu'il y ait haine, amour, ou simplement indifférence.

Autrui, dit Sartre,exerce une action sur moi simplement à travers son surgissement.

Il agit sur moi.

Prenons agir au sens fort duterme.

Il produit un effet sensible, il exerce une action et ceci par son surgissement même, c'est-à-dire par sapropre apparition dans le monde. Quel est cet acte (magique) que nous mettrons au compte de la présence d'Autrui? En s'introduisant dans monunivers, Autrui crée pour moi un Dehors, c'est-à-dire un aspect extérieur, une apparence externe, une manifestationobjective.

En somme, il fait de moi un Pour-soi (une conscience) En-soi (objective).

Il extériorise et objective maconscience.

Bien plus : il crée, dit Sartre, une essence, puisque, par Autrui, j'ai une nature, c'est-à-dire unensemble de propriétés et de caractères qui me définissent, de déterminations figées.

Autrui est donc celui qui meconfère une essence, ce qui n'est pas sans paradoxe, puisque - ne l'oublions pas - aux yeux de Sartre, l'homme estprécisément celui qui échappe à toute essence.

Tout se passe donc comme si, avec l'apparition d'Autrui, surgissaitle scandale. Le drame se déroule comme si l'Autre que moi faisait de moi une « quasi-chose » et une quasi-essence ».

J'ai une essence et je suis objectivé : le membre de phrase suivant, correspondant à la deuxième sous-partie (« machute originelle, c'est l'existence de l'autre») tire rapidement les conséquences de cette objectivation.

Autrui, dèslors, me fait choir, m'écrouler, et ceci de manière première, fondamentale.

Cette chute, il faut la concevoirconcrètement : je tombe véritablement dans le monde par les maléfices du regard de l'Autre.

Je m'écroule au milieudes choses parce que je sombre dans une objectivité sans défenses.

Cette chute « originelle » pourrait faire songerau péché «originel», à quelque état initial et premier par lequel s'appréhendent mon objectivation, ma quasi-nuditédevant le tout puissant regard de l'autre. Dès lors, la troisième sous-partie, devant ce constat de chute au milieu du monde, en tant que « quasi-chose »,peut expliciter le sens de la honte.

Ici la honte se définit tout simplement comme le sentiment originel de la chute aumilieu des existants (et la honte...

comme telle).

C'est une tonalité à la fois affective et métaphysique, une sorte desentiment ontologique, où je m'appréhende, sous cette «faux» du regard d'Autrui, comme nature, quasi-objet,essence, réalité objectivée, encore que, bien sûr, cet ensemble de déterminations m'échappe totalement.

Autrui faitde moi une chose, un demi-objet, dont je ne puis comprendre à .quoi il correspond exactement.

Notons ici leparallèle avec la fierté : par ce sentiment élevé de la dignité, de l'honneur, j'appréhende également mon essence,tout un ensemble de déterminations objectives dont je tire orgueil; je me saisis alors comme nature objectivable.Dans les deux cas, c'est un ensemble de propriétés qui est visé, mais la fierté me renvoie au simple champ du «pour-soi » s'objectivant lui-même, alors que la honte me voue aux maléfices de l'Autre, à la part du Diable. B) Deuxième partie.

(Ce n'est pas...

possibilités. Sartre explicite le sens de cette métamorphose par le regard d'Autrui, de manière à rejeter toutes les interprétaitions par trop caricaturales de sa pensée.

Quelle est exactement la signification de cette chute par laquelle «je^tombe » dans le monde, et semble être « chose » parmi les choses? Dans la première sous-partie (ce n'est pas.,,chose), Sartre souligne précisément que je ne vais pas vraiment (et pour cause!) posséder le statut d'objet:l'immédiate puissance sur moi de mon semblable ne saurait me dépouiller de ma liberté, c'est-à-dire de ma négativitéinfinie, de ma transcendance, de mon pouvoir de dépassement permanent qui est, en quelque sorte, consubstantiel. »

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