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Une société peut-elle être objet de connaissance ?

Publié le 04/02/2004

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— On ne peut ici prendre le terme « objet « que dans une acception métaphorique, faute de quoi la réponse est évidente : il est impossible de considérer une société dans son ensemble comme un objet. — L'existence de la sociologie comme « science « ne permet pas de répondre de façon spontanément positive : ce qui est précisément en cause, c'est la capacité de la sociologie à apporter une connaissance. — Quels obstacles à la connaissance pouvez-vous mettre en valeur ? L' « objectivité « est-elle possible (même en prenant le terme dans un sens peu exigeant), dès lors que l'esprit qui cherche à connaître fait lui-même partie d'une société (la même que celle qu'il veut connaître, ou une autre) ?

« [III.

Connaissance ou idéologie ?] De telles utilisations de la connaissance que l'on peut avoir d'une société ne sont peut-être pas si éloignées qu'il yparaît des visées attribuées à la sociologie par Comte ou Durkheim.

Elles se situent dans l'optique d'uneconnaissance appliquée au développement de la société telle qu'elle existe. Or — on le sait au moins depuis Marx — on peut aussi concevoir la sociétécomme traversée par un clivage permanent — qu'on le nomme lutte desclasses ou autrement a peu d'importance — qu'il s'agirait, non de colmater,mais au contraire d'exacerber.

En sorte que, dès le XIXe siècle, deuxconceptions du social se contredisent, qui se retrouveront dans deuxconceptions également adverses de la sociologie ultérieure.Si l'on examine, par exemple, les méthodes et les résultats de la sociologietelle qu'elle a pu se développer, aux Etats-Unis d'une part, en Unionsoviétique de l'autre, on ne sera pas surpris de constater qu'ils sontnettement différents.

D'un côté, pour reprendre des concepts durkheimiens,c'est la solidarité organique qui est mise en avant dans le contexte d'uneexaltation de l'individualisme, alors que, de l'autre, s'affirme un renouveau dela solidarité mécanique puisque le social est conçu comme devantse diriger vers une société égalitaire.

Si l'on objecte que cette dernièreproposition ne correspond évidemment pas à la réalité historique de l'Unionsoviétique et n'en confirme que l'apparence idéologique, on peut comprendreque cette apparence doit précisément être reprise comme « vérité » dans undiscours examinant « scientifiquement » la société telle qu'elle doit être.

Ladivergence des discours de « connaissance » reproduit à son niveau unevéritable « guerre froide ».De tels différends ne sont guère possibles dans les sciences « dures » : àNew York comme à Moscou, un théorème mathématique est vérifié ou non. Quelles qu'aient pu être les outrances atteintes lorsque, sous le stalinisme, on voulut opposer la science «bourgeoise » à la science « prolétarienne », c'est l'épreuve du réel, c'est-à-dire la possibilité de vérifier etd'appliquer les vérités établies, qui suffit à montrer si l'on a affaire ou non à de la science authentique — ainsi que leprouve la débâcle, même si elle put être différée, des thèses de Lyssenko. [Conclusion] La société ne peut être un objet de connaissance comme les autres.

Non seulement parce que celui qui entreprendde la connaître en fait éventuellement partie, et se trouve directement impliqué dans son effort de connaissance,mais aussi parce qu'une société n'est pas composée que de faits bruts.

La différence entre la « chose »connaissable et le fait social, c'est que ce dernier implique, en plus de sa matérialité, des valeurs.

Une société ne vitqu'en opposant différents systèmes de valeurs, qui sont en rivalité et en conflit plus ou moins ouvert.

Uneconnaissance stricte devrait se désintéresser de ces dernières, mais elle ne décrirait qu'une société morte.. »

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