Devoir de Philosophie

Sommes-nous responsables des actions d'autrui ?

Publié le 18/02/2004

Extrait du document

La responsabilité est une notion fondamentale de la vie morale, dans laquelle se retrouvent, comme conditions, l'existence de l'homme en tant qu'être conscient et ayant capacité de se « rendre compte « de ses actes, et aussi sa liberté comme agent et auteur de son action. Je suis responsable, parce que je suis libre.  Suis-je responsable des actions d'autrui ? Et si oui, dans quelle mesure ? Question paradoxale, puisque autrui, comme moi-même, est libre de ses actes, et d'autre part, on ne voit pas très bien pourquoi je devrais supporter les conséquences des actions commises par autrui. Pourtant, dans les faits, nous sommes souvent, directement ou indirectement, dans des situations où il nous faut supporter les conséquences des actes d'autrui. Dans l'enceinte des tribunaux, la responsabilité d'autrui intervient. Tel criminel est puni moins sévèrement parce qu'il a subi une mauvaise influence. Un père est condamné, comme responsable, à la suite de dégradations commises par ses enfants.

« La responsabilité est une notion fondamentale de la vie morale, dans laquelle se retrouvent, comme conditions, l'existence de l'homme en tant qu'êtreconscient et ayant capacité de se « rendre compte » de s es actes, et aussi sa liberté comme agent et auteur de son action.

Je suis responsable, parce queje suis libre.Suis-je responsable des actions d'autrui ? Et si oui, dans quelle mesure ? Q uestion paradoxale, puisque autrui, comme moi-même, est libre de ses actes, etd'autre part, on ne voit pas très bien pourquoi je devrais supporter les conséquenc es des actions commises par autrui.

Pourtant, dans les faits, noussommes s ouvent, directement ou indirectement, dans des situations où il nous faut supporter les conséquences des actes d'autrui.

Dans l'enceinte destribunaux, la responsabilité d'autrui intervient.

T el criminel est puni moins sévèrement parce qu'il a subi une mauvaise influence.

Un père est condamné,comme responsable, à la suite de dégradations commises par ses enfants. * * * Dans les sociétés primitives, constituées en communautés, la responsabilité est à la fois collective, puisque le crime retombe sur tous les membres de lacommunauté à laquelle appartient le criminel, et attachée à l'individualité de celui-ci, c omme agent de l'acte.Le criminel peut être homme, animal, ou chose, et des sanctions diverses peuvent être appliquées.

Dans son évolution, le droit a individualisé la notion deresponsabilité, et du même coup, individualisé la sanction sociale.Cependant, en responsabilité civile, c'est toujours le dommage causé, le résultat de l'acte qui est au centre des préoccupations.

« T out fait quelconque del'homme qui cause à autrui un DOMMAGE oblige celui qui l'a causé à le réparer » (article 1384, C ode Civil).On peut admettre qu'autrui cause un dommage, et qu'il ne soit pas respons able, et qu'on lui substitue un autre responsable, qui, assurément, n'a pas étél'agent de cet acte dommageable.Les trois exemples cités par le Code C ivil sont : l'élève et le maître, l'artisan et l'ouvrier, les animaux et leur propriétaire.

Dans ces trois cas, notreresponsabilité de maître, d'artisan, de propriétaire est marquée par un rapport de dépendance.

C elui-ci tient, pour le premier cas, à l'âge : l'enfant est mineuret soumis à l'autorité du maître.

P our le second cas, dans l'organisation sociale, entraîne que l'ouvrier est socialement dépendant de l'entrepreneur (que leCode C ivil de 1802 appelle l'artisan).

D ans le dernier cas, on allègue que les animaux ne sont pas doués de raison.Nous sommes donc d'abord responsables des actions d'autrui, quand et dans la mesure où autrui est dépendant de nous, par un lien objectif.

Ainsi laresponsabilité d'autrui paraît se limiter aux rapports familiaux (la communauté familiale), aux rapports professionnels (socialement organisés), en somme, àune certaine proximité d'autrui.

Elle entraîne l'obligation de réparer le dommage comme si nous l'avions nous-mêmes causé. * * * Le Code C ivil ne se place — volontairement — qu'au point de vue du dommage causé.

La sanction découle des besoins de la vie en société.

Mais la loi aspireà une certaine rationalité, rationalité dont elle se réclame explicitement dans la Déclaration des Droits de l'Homme de 1789, par exemple.

C'est vouloir quela responsabilité civile elle-même découle d'une responsabilité plus profonde, la responsabilité morale.Il y a responsabilité morale à partir du moment où l'on c onsidère que tout homme est également respectable, soit qu'on le prenne c omme valeur, commeémanation d'un être suprême, soit, à la manière de Kant, comme pure rationalité.Dans la seconde hypothèse, qui correspond à l'inspiration de la morale classique, tout homme est une personne, c'est-à-dire une raison qui doit être traitéetoujours comme une fin, et jamais comme un moyen.

Il en résulte, en ce qui concerne la responsabilité, que tout dommage causé à un être dans le monderetarde la venue de ce ce règne purement possible des fins », ou l'aliène.

Les consciences morales sont égales et solidaires, constituant une c ommunautéhumaine.

Si bien que nous sommes plus ou moins responsables de toute l'humanité.

Une injustice, fût-elle commise à notre insu, est notre injustice.

Lamorale, sur le plan de la rationalité, retrouve une idée métaphysiquement admise par la plupart des religions, avec l'interaction des consciences : « Touthomme est responsable de tout devant tous » disait Dostoïevski.A suivre une telle conception, la responsabilité des actions d'autrui est permanente et totale.

P lacée dans une telle perspective, la conscience morale peutne plus sentir le besoin d'action.

Il n'y a rien à faire, puisque tout se fait, à mon insu, indépendamment de ma volonté.

La conscience morale n'est plus que laproie de la conscience des fautes, et la victime des vains scrupules.

C omme dans la pièce célèbre de Térence, l'homme devient le bourreau de soi-même.Cette conception de la responsabilité qui apparaît comme un approfondissement de la vie morale, comporte une réelle confus ion.

Elle paralyse toute action.A force de se sentir responsable de tout, de tous et devant tous, tout se passe comme si, en fait, nul n'était plus res ponsable, de rien ni de lui-même, devantpersonne.

La responsabilité, notion forte, se dilue dans l'univers du scrupule, notion intime et vague, et proche de l'excuse à l'immoralité.Cette conception heurte du reste le bon sens.

Notre conscience se révolte à l'idée que nous pourrions être tenus pour responsables de crimes dans lesquelsnous n'avons point trempé.Le droit, dans son évolution, a insisté sur la notion de participation raisonnée, réfléchie, effective.Un homme ne peut être tenu pour responsable que d'une c onduite dont il a évalué les conséquences, qu'il a accomplie de sa propre initiative sans subir uneinfluence étrangère à sa volonté.

Responsabilité, volonté, liberté ne se séparent pas.Il ne faut donc pas négliger le fait du crime.

Il a son objectivité.

Le dommage causé entraînera s anction réparatrice, sur le plan civil, et sanction pénale, dupoint de vue de la préservation sociale, mais dans le choix de la sanction interviendront des « circonstances atténuantes » qui tiendront compte de lavolonté de nuire des criminels.

Le C ode fait ainsi une certaine place aux impératifs de la raison, et aux conseils du bon sens qui nous enjoignent de ne paspunir de la même façon, le voleur endurci ou Jean Valjean qui subtilise un pain pour se nourrir.Les enquêtes sociologiques sur les crimes en renvoient une grande partie à la structure même de la société.

Le crime et le délit apparaissent comme dessolutions individuelles et immédiates à des problèmes généraux posés sur le plan de la vie sociale, et notamment au sein d'un système social reposant s urla propriété et son usage.L'influence sociale sur la criminalité est soulignée par la recrudescence des crimes et de la délinquance juvénile, dans les périodes de crise sociale,pendant et après les guerres par exemple.

Les crimes constituent parfois de véritables réquisitoires contre la société qui les juge, par l'intermédiaire destribunaux.

Tolstoï, dans Résurrection, retrace l'histoire d'un juge qui se trouve dans la situation de sanctionner les crimes d'une jeune fille qu'il avaitautrefois séduite, puis abandonnée.

C harlie Chaplin, dans M onsieur Verdoux, met en scène une s orte de Landru qui tue bon nombre de rentières.

La dernièreparole de Monsieur Verdoux sera pour se moquer d'une société qui condamne le criminel ce au détail » et assure de l'impunité le criminel ce en gros ». * * * On voit donc la responsabilité osciller du pôle le plus individuel, où je ne suis responsable que des actes que j'ai effectivement accomplis comme agent, aupôle le plus universel, où je suis responsable, socialement et moralement, en tant que membre de cette société, de ce qui s'y accomplit.

Si je tue malogeuse pour la voler, comme le héros de C rime et Châtiment, je suis un criminel, et responsable de cette mort.

M ais si je suis responsable immédiatement,pourrait-on dire, je suis en une autre façon responsable de la société où les étudiants sont misérables et réduits aux pires expédients.

On peut mêmeajouter qu'il serait préférable de concevoir de quel poids pèse la société sur ma conduite, ce qui me conduirait peut-être à ne pas diriger mes forces et marévolte contre la pauvre logeuse.

En conséquence, la méditation de ma propre respons abilité me commande d'être attentif à la structure de la société danslaquelle je vis, et à y déterminer mon comportement individuel, de telle sorte que mon action témoigne que je n'accepte pas la responsabilité d'injustices quine sont pas mon fait.Suis-je responsable d'autrui ? Il faut s'en persuader, et à la mesure de ma participation personnelle à cette société à laquelle je suis lié.

A utrui est d'abordmes proches, mes compagnons de travail, mais aussi l'ensemble des hommes.

Je ne puis me désintéresser, — ne pas me rendre compte, — ni de mes actes,ni des actes d'autrui, ni de ce qui se fait dans un pays qui est le mien, dans une civilisation qui est la mienne, au sein de la communauté des hommes ;comme le disait Saint-Exupéry, « responsable, de ce qui se construit de neuf, là-bas, chez les vivants ».. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles