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Spinoza: Morale et politique

Publié le 11/01/2004

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spinoza
Il est extrêmement rare que les souveraines Puissances (1) donnent des ordres d'une extrême absurdité, car, dans leur propre intérêt et afin de conserver leur pouvoir, il leur importe avant tout de veiller au bien général et de fonder leur gouvernement sur les critères raisonnables. (...) On sait que le but et le principe de l'organisation en société consistent à soustraire les hommes au règne absurde de la convoitise et à les faire avancer -autant que possible- sur la voie de la raison, de sorte que leur vie s'écoule dans la concorde et la paix. Aussitôt donc que ce principe cesserait d'être mis en oeuvre, tout l'édifice s'écroulerait. Mais seule la souveraine Puissance a la charge d'en assurer le maintien, tandis que les sujets doivent exécuter les ordres reçus et ne reconnaître d'autre droit, que celui établi par les proclamations de la souveraine Puissance. Peut-être va-t-on prétendre qu'ainsi nous faisons des sujets des esclaves, car une opinion vulgairement répandue nomme esclave celui qui agit sur l'ordre d'un autre, et homme libre celui qui se conduit comme il veut. Cette manière de voir n'est pas tout à fait conforme à la vérité. En fait, l'individu entraîné par une concupiscence personnelle au point de ne plus rien voir ni faire de ce qu'exige son intérêt authentique, est soumis au pire des esclavages. Au contraire, on devra proclamer libre l'individu qui choisit volontairement de guider sa vie sur la raison.

Ce texte de SPINOZA est au croisement de deux types de problématiques, dont SPINOZA réussit à montrer l'articulation.    Tout d'abord, quelle est la finalité de l'Etat, de l'organisation politique et du pouvoir politique ?    Ensuite, peut-on être libre et obéir en même temps ? Comment déterminer l'idée de liberté : comme capacité de faire ce que l'on veut, ou comme capacité d'agir conformément à ce que la raison conseille ?    L'enjeu de cette détermination de l'idée de liberté n'est rien moins que celui-ci : le citoyen peut-il être libre au sein de l'Etat ? En quoi consiste la liberté véritable ?  

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« Dans un deuxième moment, la raison intervient dans la définition de la liberté : est libre non celui qui fait ce qu'ilveut, mais celui qui agit sous la conduite de la raison, fût-ce en obéissant. II - ANALYSE DU PROBLEME Ce texte de SPINOZA est au croisement de deux types de problématiques, dont SPINOZA réussit à montrerl'articulation. Tout d'abord, quelle est la finalité de l'Etat, de l'organisation politique et du pouvoir politique ? Ensuite, peut-on être libre et obéir en même temps ? Comment déterminer l'idée de liberté : comme capacité defaire ce que l'on veut, ou comme capacité d'agir conformément à ce que la raison conseille ? L'enjeu de cette détermination de l'idée de liberté n'est rien moins que celui-ci : le citoyen peut-il être libre au seinde l'Etat ? En quoi consiste la liberté véritable ? III - LES GRANDES LIGNES DE RÉFLEXION On pouvait distinguer deux moments dans le devoir : celui de l'explication précise de la pensée de l'auteur dans cetextrait ; celui de la réflexion suscitée par la ou les problématiques que l'on vient de dégager. IV - UNE DÉMARCHE POSSIBLE A - L'ÉTAT ET SA RATIONALITÉ SPINOZA souligne d'abord la rareté d'un pouvoir politique gouvernant de manière absurde ou à l'encontre de l'intérêtgénéral.

SPINOZA ne pêche pas par optimisme : simplement, il s'appuie sur la rationalité propre au pouvoir politiquequi lui commande d'agir dans son intérêt et celui de sa conservation. En effet, pour SPINOZA, le droit de gouverner est toujours suspendu à une force, et le gouvernement n'est pastoujours sûr d'être le plus fort : le rapport de force est toujours possible, et peut s'inverser en faveur du peuple, cedont témoigne toute révolution aboutie. Le pouvoir étant pensé dans les termes d'un rapport de force, SPINOZA peut dire en effet que la raison et l'intérêtconseillent tous deux au pouvoir souverain de gouverner en vue du bien et de l'intérêt général. Cette rationalité spécifiquement politique, qui tient à la compréhension par ceux qui gouvernent de leur intérêt biencompris, est en même temps le vecteur par excellence d'une vie humaine raisonnable. Faute que les hommes soient spontanément guidés par la raison -on les voit plus souvent mus par leurs passions-,l'État s'emploie à les faire vivre raisonnablement en leur prescrivant d'agir selon des lois qui, elles-mêmes, pour lesraisons qu'on vient de voir, doivent avoir pour fin le bien et l'intérêt général. C'est donc par la médiation de l'État que les hommes peuvent vivre en paix, celle-ci étant la manifestation socialede la rationalité.

L'État tient lieu de raison à des individus qui en sont dépourvus. Un État qui ferait exception à ce principe général de la rationalité politique est possible, mais peu probable : c'estl'édifice même de la vie politique qui s'écroulerait. Les hommes mènent une existence politique, et il n'y a d'alternative à cette existence que la guerre, que personnene peut raisonnablement souhaiter. B - LIBERTE ET OBEISSANCE L'État est donc la condition de la paix, et celle-ci ne peut être maintenue que si tous acceptent de renoncer audroit naturel d'agir à leur guise et d'obéir au pouvoir politique et à ses représentants.

Les hommes, en effet, ne sontpas naturellement raisonnables, et la guerre ne manquerait pas de naître si on laissait chacun agir selon ses désirs. Il faut donc que chacun soit privé de ce droit pour que la paix, la vie raisonnable soient possibles.

La paix supposeque les citoyens obéissent, et renoncent au pouvoir de se déterminer eux-mêmes. Perdent-ils ainsi leur liberté ? La fin du texte s'applique à démontrer le contraire.

SPINOZA inverse la représentationordinaire de la liberté : l'opinion s'en tient à la question de savoir si l'on agit sur l'ordre d'un autre, ou de sa propreinitiative, appelant esclave le premier, libre le second.. »

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