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SUEZ (crise de)

Publié le 04/03/2012

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Face au refus des États-Unis et du Royaume-Uni de financer la construction du très ambitieux barrage d'Assouan, Gamal Abdel Nasser décide, dans un grand éclat de rire (discours d'Alexandrie, 26 juillet 1956), de nationaliser la Compagnie du canal de Suez, contrôlée par les Britanniques. Anthony Eden, Premier ministre du Royaume-Uni, annonce une intervention militaire afin de contrer « ce nouvel Hitler «. La France et Israël se rallient à Londres. La première croit y trouver un moyen de neutraliser le soutien égyptien au Front de libération nationale (FLN) algérien insurgé. Le second espère maintenir et protéger ses accès maritimes, mais surtout affaiblir l'Égypte qui vient de recevoir du matériel militaire soviétique par l'intermédiaire de la Tchécoslovaquie. Malgré les appels à la conciliation de la part de l'ONU et de Foster Dulles (1888-1959), ministre des Affaires étrangères américain, les troupes israéliennes, couvertes par une armada conjointe franco-britannique, attaquent et occupent la zone du canal (29 octobre 1956). L'ONU condamne l'opération alors que l'URSS menace la coalition tripartite de « représailles massives «. Le conflit prend subitement une tournure aiguë, avec un risque inquiétant d'internationalisation. Inscrit dans le contexte de la Guerre froide, il met directement en jeu les deux puissances américaine et soviétique. Pourtant, celles-ci, via l'ONU, font pression sur les belligérants pour mettre fin à un conflit qui n'aura pas duré plus de 24 heures. Les troupes militaires se retirent de la zone du canal et les casques bleus prennent la relève. La crise de Suez constitue une victoire éclatante pour le nassérisme et le mouvement arabe. Surtout, venant après la défaite française à Dien Bien Phu (1954), elle inaugure une nouvelle période de l'histoire des relations internationales, à savoir celle de l'avènement d'un tiers monde dont le non-alignement joue sur les rapports de force entre les deux superpuissances. La crise de Suez marque la fin de l'hégémonie française et britannique : le jeu des pouvoirs est dorénavant orchestré depuis Moscou et Washington. Sandrine GAMBLIN

« Fils d'un~ des postes.

Nasser (1918-1910) fait toute sa carrière dans rarmée- Humié par 1a cl8aite arabe de 1948 face i Israel.

c.onvaincu de la mnuption et de rllljustiœ elu régime elu roi Farouk.l est le principll instipteur elu coup d'Bat elu 26 juilet 1952.

la République est proclamée en 1953, mais Nasser écarte bient6t elu pouvoir son œn.,&œ N6guib (féwier 1954) et communistes.

llcolclllialislme et r~ A 1a suite de 1a aise de Suez.

1 sait b•ISfolmer sa cNfaile militaire en vidoire politique et prend la stallft de leader elu nationalisme .abe et de champion de runité_ • parraine d'liNs la création de la ~.abeunieavec:la Syrie en 1958.

~-laaisanle cl8aile face & lsra!llors de la guerre des Six-Jcus (1967), 1 revient au piiiMJir et y res11e jusqu'& sa mort.

le 28 sepœmbre 1910.

aviations bombardent les aérodromes égyptiens, facilitant ainsi l'avance israélienne .

le 1" novembre, Nasser confisque les biens français et anglais en Égypte et.

le 3, pour bloquer le canal, il y fait "--------------~ couler des bateaux .

L'AnAQUE 15LÙUENNE n LA •CAMMGNE DU S1NAI• Comme prévu, le 29 octobre 1956 , le Premier ministre israélien David Ben Gourion donne l'ordre à son armée d'attaquer l'Égypte.

les troupes de l'État hébreu sont commandées par un général borgne à bandeau noir porté l'œil : moins de cinq jours, deux brigades israéliennes vont parcourir 300 kilomètres en territoire ennemi et occuper le Sinaï; elles ne stopperont qu'à 10 kilomètres du canal.

les troupes d'élites du maréchal égyptien Akim Amer sont enfermées dans une véritable nasse à L'INTEIVEIITION FUIICD-IIITANNIQUE Dès le 30 octobre, la France et la Grande-Bretagne, feignant de s'ériger en arbitres, présentent un ultimatum à l'Égypte et à Israël, ordonnant aux deux pays de retirer leurs troupes de part et d'autre du canal.

Paris et londres demandent également à l'Égypte de permettre sans délai l'installation, à titre provisoire, de forces franco- le 5 novembre, les troupes du général Dayan poussent jusqu'à la base de Charm el-Cheikh .

les soldats de Nasser sont en déroute , abandonnant sur place d'énormes quantités de matériel soviétique, dont de nombreux chars .

Habitués ~ marcher pieds nus, les fantassins égyptiens ont quitté leurs chaussures pour fuir plus vite, et des brodequins abandonnés gisent de toutes parts .

Malgré l'héroïsme de quelques unités , le front égyptien se disloque .

Gaza tombe à la première sommation.

!:avant-garde de Dayan est déjà sur Port-Fouad .

LE DiiiAIQUEMENT Du côté des troupes franco­ britanniques , dés le 5 novembre , le plan «Telescope» a été déclenché .

dont ils ont pris le contrOle .

A la tête des paras français, le colonel Chateau­ Jobert, dit Conan .

Un des premiers objectifs est notamment de s'emparer de l'usine de filtrage qui alimente la ville en eau douce .

D'autres parachutages préparatoires au débarquement ont lieu pour s'emparer de l'aérodrome de Gamil (sur la route Damiette-Alexandrie) et du quartier résidentiel de Port-Fouad .

le 6 novembre, jour choisi pour le débarquement.

l'armada alliée (200 navires) entre en action à 7 heures .

les objectifs sont l'orl-s.il Dans les heures qui suivent.

les ,..,_,..~ poursuivent leur progression ; la défaite militaire de l'Égypte semble totale .

LA HAmoN DES bAn-UNIS ODE L'URSS Il en va tout autrement sur le terrain diplomatique et politique .

En effet.

pour des raisons différentes , les deux super­ grands réagissent et se retrouvent d'accord pour faire pression sur Paris et londres.

On croyait l'URSS trop occupée à noyer dans le sang la révolution hongroise : le 5 novembre, Khrouchtchev menace la France, l'Angleterre et Israël de représailles atomiques si l'Intervention en Égypte n'est pas immédiatement suspendue .

les Américains, furieux d'avoir été tenus à l'écart du •complot» et craignant de voir les États arabes et de nombreux pays du tiers monde se détourner de l'Occident.

refusent de couvrir cette opération, qualifiée de • coloniale» .

le 6 novembre , ils vendent en masse des livres sterling.

entraînant ainsi la baisse de la monnaie anglaise, et ce afin de faire pression sur londres .

les réserves de change , qui ont diminué de 57 millions de dollars en septembre et de 84 millions en octobre, perdent 279 millions dans les cinq d'arrêter également le combat Au petit matin du 7 novembre, le cessez-le-feu est proclamé .

!:Assemblée générale de l'ONU, États­ Unis en tête, enjoint officiellement à Paris , londres et Tei-Aviv d 'évacuer immédiatement.

sans la moindre Nasser , qui a fait ollstnler le cftfll, rendant toute navigation impossible , ne le rouvrira que plusieurs mois plus tard , le 29 avril 1957.

Toutes les nations pourront de nouveau emprunter la voie d'eau, sauf Israël.

LES CONSÉQUENCES A l'Issue de la crise de Suez , Israël doit retirer ses troupes du Sinaï et revenir aux frontières de 1949 .

Cependant, les ~ tle fONU , installés à Gaza et à Charm el-Cheikh, lui garantissent une relative sécurité de la frontière et la liberté de navigation dans le détroit de Tiran.

Moshe Dayan fait échanger 5 000 prisonniers égyptiens contre 20 prisonniers israéliens .

POUl LA fiANCE n LA GIANDE·ImAGNE les deux États sortent considérablement affaiblis de la crise .

Celle-ci prouve que les puissances moyennes n'ont plus de liberté d'action sur la scène internationale .

le temps de la politique de la canonnière semble bel et bien révolu et, pour l'avoir cru encore possible, les deux plus vastes empires coloniaux ont dO reculer précipitamment devant les sommations des deux super-grands.

l'élimination de la France et de la Grande-Bretagne du Proche-Orient laisse désormais face-à-face les États­ Unis et l'URSS dans cette région.

En France, toutefois , ni la classe politique ni l'opinion ne tiennent rigueur au gouvernement de son échec : le 20 décembre, l'Assemblée lui donne quitus en lui renouvelant sa confiance à une majorité absolue (325 voix contre 210) .

Par ailleurs, l'événement alimente le ressentiment contre l'étranger , ami ou ennemi : l'antiaméricanisme, en particulier, y trouve un motif supplémentaire .

Pou1L'URSS les Soviétiques ne sont pas mécontents que l'intervention franco-britannique ait détourné l'attention de l'opinion internationale, au moment même où ils répriment violemment l'insurrection de Budapest en Hongrie .

En cette fin d'année 1956, ils peuvent ainsi se présenter auprès du tiers monde comme les défenseurs des peuples menacés par l'Impérialisme, et leur influence grandit en Égypte et en Syrie .

les Américains réussissent à sauvegarder leur image anticolonialiste : en janvier 1957, ils proposent une aide financière aux pays arabes qui acceptent de lutter contre la menace communiste (doctrine Eisenhower).

La Jordanie et l'Arabie Saoudite se placent sous leur protection .

les conditions sont mOres pour l'extension de la guene froide au Proche-Orient Cependant, cette dernière n'a pas lieu dans les mêmes conditions qu'ailleurs car un fait nouveau est intervenu : Nasser est non seulement le grand vainqueur de la crise de Suez Oe prestige du dirigeant égyptien est immense), mais encore, avec lui, c'est l'ensemble du tiers monde qui a ici remporté sa première victoire sur la scène internationale .

D ' un point de we strictement économique, l'affaire est juteuse pour l'Égypte : dans les années qui suivent la crise de Suez , le IIWIIc • cftfll ne cesse de croitre.

le canal reste nationalisé, même si un accord, signé à Rome le 13 avril 1958, prévoit que l'Égypte verse aux actionnaires de la Compagnie du canal de Suez une indemnité de 28 millions de livres.

Mais le transit quotidien passe de 393 000 tonnes en 1957 à 512 000 tonnes en 1961, les revenus annuels augmentant dans le même temps (sans hausse de péage) : 50,4 millions de livres en 1960 contre 31,1 millions de livres en 1955 .. »

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