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Je vois le meilleur et je l'approuve, je fais le pire. Comment comprendre cette citation d'Ovide ?

Publié le 06/01/2004

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ovide
Trancher cette alternative sera capital car si l'homme échoue à faire le meilleur alors même qu'il le connaît, convent seulement imaginer un autre moyen pour mobiliser sa volonté à accomplir le meilleur ? L'homme est-il alors condamné au mal sous sa forme la plus extrême, celle du pire ?Première partieLa faculté qui perçoit le meilleur est d'ordre intellectuel et non sensoriel. Pour parler de la raison, Platon utilisera une métaphore éclairante : elle est « l'oeil de l'âme » qui a pour fonction de voir les Idées : le Bien, la Vérité, la Beauté, la Justice... La vue du meilleur serait ainsi la connaissance du Bien absolu, incomparable parce qu'il transcende tous les autres biens. A la vue du meilleur, le moi y souscrit. Cette approbation du meilleur est un acte du jugement par lequel le moi reconnaît l'excellence du meilleur comme valeur régulatrice pour mobiliser la volonté à agir. Approuver le meilleur, ce n'est donc pas seulement constater que c'est le meilleur ; en approuvant, comme le note Austin, je m'engage plus ou moins directement. Il peut s'agir, dans une certaine mesure, d'un énoncé performatif.Ainsi, quand Antigone enterre son frère malgré l'interdiction de Créon, elle accomplit un commandement auquel elle ne peut résister.
ovide

« 2 ième partie. "je fais le pire", en toute lucidité, parce que je ne peux pas faire le meilleur dont pourtant j'ai l'idée.

Le pires'accomplit par impuissance à suivre la loi du meilleur.

Cette impuissance résulte de ce que le meilleur constitue unmotif d'action trop faible par rapport au plaisir ou à l'intérêt que j'aurais à commettre le pire.

La vision désintéresséedu meilleur n'est pas assez efficace pour surmonter la force des intérêts sensibles qui pousse l'homme à faire ce quilui plaît et qui petit être le pire.Il v aurait donc conflit entre un «je » rationnel et raisonnable et un « Je » passionnel et déraisonnable dont l'issueserait le triomphe de l'affectivité.

La force des sentiments l'emporterait sur celle de la raison.

Cédant ainsi à sapassion, Phèdre fait le pire en déclarant son amour à Hippolyte, son beau-fils, et en l'accusant ensuite auprès deThésée de lui avoir fait violence.

La raison a beau déployer tous ses arguments, ceux-ci restent sans effet sur sapassion.Selon Hume, « la raison est l'esclave des passions » (Traité de la nature humaine, liv.

II).

La raison n'est passeulement plus faible que la passion, elle n'exerce aucun pouvoir sur la volonté qui n'est déterminée que par unepassion.

Si la raison n'est qu'une tendance, la passion est un penchant.

Elle nous fait agir.

Lorsque nous croyonspouvoir opposer la raison à nos passions, nous nous trompons, parce que jamais la raison ne détermine l'action.

Agirraisonnablement, ce n'est qu'être mu par une passion calme, qui ne se fait pas sentir comme telle.

Ainsi, je peux voiret approuver le meilleur d'un côté et faire le pire de l'autre sans qu'il y ait pour autant contradiction car ce n'est pasla raison qui commande l'action.

La raison ne nous renseigne jamais sur ce qu'il faut faire.

Son rôle est seulementthéorique elle nous informe des fins que nous visons, mais sans nous les proscrire ou nous les proscrire et nousfournit seulement des moyens pour y atteindre.

La raison ne nous éclaire donc que sur le vrai et le faux, surl'adéquat ou l'inadéquat mais ne commande nullement à notre volonté de faire le bien ou le mal, le meilleur ou le pire.Faire le pire ou le meilleur ne résulte pas d'une détermination de la raison qui ne peut produire aucune action, maisd'une passion qui peut seule mobiliser la volonté. « Je fais le pire » parce que je ne veux pas faire le meilleur que pourtant j'approuve.

Ce n'est plus ni la faiblesse dela raison ni la force de la sensibilité qui seraient en cause, mais la toute-puissance de la volonté qui peut librementse déterminer contre le meilleur que la raison lui présente.

Kant montre ainsi que « L'histoire de la liberté commencepar le mal car elle est l'oeuvre de l'homme » (Les Conjectures sur les débuts de l'histoire humaine).

La libertés'exprime d'abord, comme libre arbitre, par la transgression des règles car l'homme croit qu'être libre, c'est pouvoirne pas être déterminé ; donc, il refuse de suivre une loi, la transgresse et se croit libre.

En ce sens, le péchéoriginel par lequel Adam mange le fruit défendu en transgressant l'interdit divin pourrait être interprété comme uneaffirmation négative de sa liberté qui consiste d'abord à pouvoir différer en refusant.

Hegel fera du mythe de laChute un moment essentiel dans l'histoire de l'humanité, et non un simple accident de parcours, le premier momentoù l'homme affirme, sur le mode négatif de l'opposition et de la désobéissance, sa liberté comme pouvoir de sedéterminer soi-même.

Si l'homme fait le pire en transgressant l'interdit divin, c'est parce qu'il est « mauvais parnature », mais s'il est mauvais c'est parce que, par nature, l'homme est esprit : « Il est impliqué dans le concept del'esprit que l'homme est mauvais par nature.Contre tout romantisme qui exalte la bonté originelle de l'homme, contre toute nostalgie de l'innocence originelle,Hegel considère le mal comme le premier acte de la vie de l'esprit qui ne peut s'affirmer d'abord qu'en sortant d'unétat d'innocence et de naïveté convenant, certes, à des êtres de nature, mais pas à l'homme en tant qu'il estesprit, c'est-à-dire libre « d'être ce qu'il est, par lui-même » (La Science de la logique, addition 3 du § 24). TRANSITION: Si la vue du meilleur ne suffit pas à son accomplissement et si la liberté s'affirme dans la transgression des règles,l'homme est-il alors condamné à faire toujours le pire ? Troisième partie: « Nul n'est méchant volontairement », disait Socrate.

Si «je fais le pire », c'est parce que, je ne vois pasparfaitement le meilleur, c'est-à-dire le Bien absolu.

Je ne vois que des biens particuliers et relatifs (cf.

ci-dessous).Dans cette ignorance du meilleur en soi, "chacun, d'après son propre sentiment, juge ou estime ce qui est bon,mauvais, meilleur, pire et enfin ce qui est le meilleur ou le pire" (Spinoza).Le meilleur résulte donc d'un jugement comparatif des biens entre eux ; pour l'homme, il ne fait sens qu'en tant quesuperlatif comparatif.

Résultant d'une comparaison, le meilleur devient relatif et variable, dépendant et des bienscomparés et de la personne qui juge.

Dans cette perspective, Antigone fait le meilleur relativement à sa consciencemorale, niais elle fait le pire pour Créon qui juge, d'après sa conscience politique, l'acte d'Antigone comme un actede désobéissance.

Le meilleur pour moi pourrait donc être le pire pour toi.Si aucune valeur ne peut s'imposer légitimement à tous comme désignant le meilleur à suivre, cette relativité dumeilleur a pour conséquence logique la relativité du pire.

Si on estime qu'Antigone a pu commettre le pire enestimant faire le meilleur, il faudrait alors admettre que les nazis, qui ont fait le pire, pourraient avoir fait le meilleur.Les nazis auraient fait le pire non pas par volonté diabolique de faire le pire pour le pire, mais parce qu'ils auraientjugé que pour eux et pour l'Allemagne, le meilleur était l'extermination de tout être qui n'était pas aryen.

Lerelativisme des valeurs conduit à justifier le pire, la violence sous toutes ses formes.

Mais comment réfuter cerelativisme si aucune affirmation ne peut prétendre à l'universalité? Faire le meilleur pourrait consister, plus humblement, à penser le pire, c'est-à-dire à déterminer un critèrepermettant de l'identifier pour le dénoncer.

Or, le pire ne résulte-t-il pas toujours de la relativité des valeurs dont. »

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