Est-il vrai qu'on ne peut pas discuter des goûts?
Publié le 01/10/2012
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dans l'élaboration d'un nouveau concept, il demeure en quelque sorte ouvert,
puisque le beau est ce qui plaît universellement sans concept; • simultanément, le jugement de goût doit apprécier l'unification, dans l'œuvre d'art, d'éléments hétérogènes: l'œuvre est appréhendée comme si
elle révélait une finalité interne.
Dès lors, son sujet apparent perd de l'importance au profit de sa construction.
- Semblablement, lorsque Hegel fournit de l'œuvre d'art une définition -la
manifestation sensible d'une idée -cela indique un critère de sélection pour le goût: ni l'idée pure ni le sensible pur ne peut le satisfaire, mais seulement leur
union (selon les trois versions- symbolique, classique et romantique- qu'en distingue historiquement l'Esthétique).
- A partir de quoi il apparaît que le jugement de goût, lorsqu'il est positif,
équivaut à signifier que l'œuvre jugée correspond bien à
ce qu'elle doit être
(mouvement de totalisation dans la version kantienne, expression du spirituel
dans la version hegelienne).
A l'inverse, dire ce tableau ne me plaît pas, c'est dire ,, cette surface peinte ne correspond pas à ce que j'attends d'un tableau en fonction
de la définition que j'en ai,, (qui peut être kantienne ou hegelienne, même sans le savoir- mais qui peut également être tout autre, y compris insuffisante).
Ce qui est alors en jeu dans
le goût, c'est une certaine conception de l'art, en tant que telle éventuellement discutable: discuter des goûts, c'est donc tenter de
dépasser une approche purement intuitive pour expliciter un concept de l'art.
III.
Éléments formateurs du goût
-
Kant et Hegel participent d'une esthétique normative.
Or, l'évolution des arts
depuis un siècle et plus a contraint l'esthétique à n'être qu'analytique ou
descriptive: elle renonce à définir ce qu'est ou doit être la beauté.
Comment, dans de telles conditions, continuer à discuter des goûts (sans critère universellement
répérable)?
- La sociologie affirme de surcroît
(cf La distinction de Pierre Bourdieu) que
les jugements de goût sont socialement déterminés: on privilégie le mobilier
Louis XV ou le design inspiré du Bauhaus en fonction du milieu dont on est issu,
de celui auquel on veut accéder, des éléments culturels que l'on maîtrise, de
l'image que l'on veut donner de soi, des personnages sociaux dont on est prêt à
reconnaître la compétence, etc.
Dans de telles conditions, si le goût n'est en effet
rien de plus que le résultat d'un certain nombre de déterminismes sociaux, il
semble devenir impossible d'en discuter puisque la discussion n'a aucune chance d'aboutir à un accord pour peu que mon interlocuteur ne s'inscrive pas dans le
même champ social et intellectuel que moi.
-
On notera toutefois que prendre connaissance de telles déterminations et les
comprendre, c'est déjà les dépasser, et trouver plus légitimes des goûts d'abord
perçus comme irrecevables.
Reste à savoir si la discussion ou confrontation des
goûts qui redevient possible peut ambitionner
le dépassement d'une simple
circulation des opinions
à travers la hiérarchie sociale.
- Ne pas oublier une des leçons de Hegel: l'art
n'a de sens que si on le considère
dans son histoire.
Ce qui, depuis
le XI Xe siècle, signifie que le goût doit se former par la connaissance de cette dernière, où s'exhibent des formes (plastiques,
musicales, littéraires) multiples et contradictoires, parfois difficiles à juger
justifiables
si on en ignore les antécédents..
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