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Bac Bmanc

Publié le 01/06/2015

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Objet d'étude : Ecriture poétique et quête du sens, du Moyen-Age à nos jours. Textes : Texte A : Victor Hugo, « J'aime l'araignée », Les Contemplations, Livre III, « Les luttes et les rêves », XXVII (1856). Texte B : Lautréamont, « Le Pou », Les Chants de Maldoror, chant 11, 9 (1869). Texte C : Tristan Corbière, « Le Crapaud », Les Amours jaunes (1873). Texte D : Germain Nouveau, « Le Peigne », Valentines (1887). Texte A - Victor Hugo (1802-1885), « J'aime l'araignée », Les Contemplations, Livre III, « Les luttes et les rêves », XXVII (1856). J'aime l'araignée et j'aime l'ortie, Parce qu'on les hait ; Et que rien n'exauce et que tout châtie Leur morne souhait ; Parce qu'elles sont maudites, chétives, Noirs êtres rampants ; Parce qu'elles sont les tristes captives De leur guet-apens ; Parce qu'elles sont prises dans leur oeuvre ; O sort ! fatals noeuds ! Parce que l'ortie est une couleuvre, L'araignée un gueux ; Parce qu'elles ont l'ombre des abîmes, Parce qu'on les fuit, Parce qu'elles sont toutes deux victimes De la sombre nuit. Passants, faites grâce à la plante obscure, Au pauvre animal. Plaignez la laideur, plaignez la piqûre, Oh ! plaignez le mal ! Il n'est rien qui n'ait sa mélancolie ; Tout veut un baiser. Dans leur fauve horreur, pour peu qu'on oublie De les écraser, Pour peu qu'on leur jette un oeil moins superbe, Tout bas, loin du jour, La mauvaise bête et la mauvaise herbe Murmurent : Amour ! Texte B - Lautréamont (1846-1870), « Le Pou », Les Chants de Maldoror, chant II, strophe 9 (1869). (...) Pour moi, s'il m'est permis d'ajouter quelques mots à cet hymne de glorification, je dirai que j'ai fait construire une fosse, de quarante lieues carrées, et d'une profondeur relative. C'est là que gît, dans sa virginité immonde, une mine vivante de poux. Elle remplit les bas-fonds de la fosse, et serpente ensuite, en larges veines denses, dans toutes les directions. Voici comment j'ai construit cette mine artificielle. J'arrachai un pou femelle aux cheveux de l'humanité. On m'a vu me coucher avec lui pendant trois nuits consécutives, et je le jetai dans la fosse. La fécondation humaine, qui aurait été nulle dans d'autres cas pareils, fut acceptée, cette fois, par la fatalité ; et, au bout de quelques jours, des milliers de monstres, grouillant dans un noeud compact de matière, naquirent à la lumière. Ce noeud hideux devint, par le temps, de plus en plus immense, tout en acquérant la propriété liquide du mercure, et se ramifia en plusieurs branches, qui se nourrissent, actuellement, en se dévorant elles-mêmes (la naissance est plus grande que la mortalité), toutes les fois que je ne leur jette pas en pâture un bâtard qui vient de naître, et dont la mère désirait la mort, ou un bras que je vais couper à quelque jeune fille, pendant la nuit, grâce au chloroforme. Tous les quinze ans, les générations de poux, qui se nourrissent de l'homme, diminuent d'une manière notable, et prédisent elles-mêmes, infailliblement l'époque prochaine de leur complète destruction. Car, l'homme, plus intelligent que son ennemi, parvient à le vaincre. Alors, avec une pelle infernale qui accroît mes forces, j'extrais de cette mine inépuisable des blocs de poux, grands comme des montagnes, je les brise à coups de hache, et je les transporte, pendant les nuits profondes, dans les artères des cités. Là, au contact de la température humaine, ils se dissolvent comme aux premiers jours de leur formation dans les galeries tortueuses de la mine souterraine, se creusent un lit dans le gravier, et se répandent en ruisseaux dans les habitations, comme des esprits nuisibles. Le gardien de la maison aboie sourdement, car il lui semble qu'une légion d'êtres inconnus perce les pores des murs, et apporte la terreur au chevet du sommeil. Peut-être n'êtes-vous pas, sans avoir entendu, au moins, une fois dans votre vie, ces sortes d'aboiements douloureux et prolongés. Avec ses yeux impuissants, il tâche de percer l'obscurité de la nuit ; car, son cerveau de chien ne comprend pas cela. Ce bourdonnement l'irrite, et il sent qu'il est trahi. Des millions d'ennemis s'abattent ainsi, sur chaque cité, comme des nuages de sauterelles. En voilà pour quinze ans. Ils combattront l'homme, en lui faisant des blessures cuisantes. Après ce laps de temps, j'en enverrai d'autres. Quand je concasse les blocs de matière animée, il peut arriver qu'un fragment soit plus dense qu'un autre. Ses atomes s'efforcent avec rage de séparer leur agglomération pour aller tourmenter l'humanité ; mais, la cohésion résiste dans sa dureté. Par une suprême convulsion, ils engendrent un tel effort, que la pierre, ne pouvant pas disperser ses principes vivants, s'élance d'elle-même jusqu'au haut des airs, comme par un effet de la poudre, et retombe, en s'enfonçant solidement sous le sol. Parfois, le paysan rêveur aperçoit un aérolithe fendre verticalement l'espace, en se dirigeant, du côté du bas, vers un champ de maïs. Il ne sait d'où vient la pierre. Vous avez maintenant, claire et succincte, l'explication du phénomène. Si la terre était couverte de poux, comme de grains de sable le rivage de la mer, la race humaine serait anéantie, en proie à des douleurs terribles. Quel spectacle ! Moi, avec des ailes d'ange, immobile dans les airs, pour le contempler. Texte C - Tristan Corbière (1845-1875), « Le Crapaud », Les Amours jaunes(1873). Le Crapaud Un chant dans une nuit sans air... - La lune plaque en métal clair Les découpures du vert sombre. ... Un chant ; comme un écho, tout vif Enterré là, sous le massif... - Ça se tait : Viens, c'est là, dans l'ombre... - Un crapaud ! -Pourquoi cette peur, Près de moi, ton soldat fidèle ! Vois-le, poète tondu, sans aile, Rossignol de la boue... -Horreur ! - ... Il chante. -Horreur !! -Horreur pourquoi ? Vois-tu pas son oeil de lumière... Non : il s'en va, froid, sous sa pierre. ......................................................... Bonsoir -ce crapaud-là c'est moi. (Ce soir, 20 juillet) Texte D - Germain Nouveau (1851-1920), « Le Peigne», Valentines(1887). Le peigne La serviette est une servante, Le savon est un serviteur, Et l'éponge est une savante ; Mais le peigne est un grand seigneur. Oui, c'est un grand seigneur, Madame, Des plus nobles par la hauteur Et par la propreté de l'âme. Oui, le peigne est un grand seigneur ! Quoi ? l'on ose dire à voix haute Sale comme un... Du fond du coeur Que l'on réponde ! À qui la faute ? Mais le peigne est un grand seigneur ! Oui, s'il n'est pas propre, le peigne, À qui la faute ? À son auteur ? N'est-ce pas plutôt à la teigne ! Car... le peigne est un grand seigneur. La faute, elle est à qui le laisse S'épanouir dans sa hideur. C'est la faute... à notre paresse. Lui, le peigne est un grand seigneur. Oui, notre main est sa vassale, Et s'il est sale, par malheur, II se f...iche un peu d'être sale, Car le peigne est un grand seigneur. II ne veut nettoyer la tête, Que si la main de son brosseur Lui fait les dents ; je le répète, Oui, le peigne est un grand seigneur. Oui, c'est un grand seigneur, le peigne ; Sans être rogue ou persifleur, Sa devise serait : « Ne daigne. » Car le peigne est un grand seigneur. Grand seigneur, son dédain nous cingle, Porteur d'épée, il est railleur, Or, cette épée est une épingle, Si le peigne est un grand seigneur. Cette épingle, adroite et gentille, Le rend propre comme une fleur, Aux doigts de la petite fille Dont le peigne est un grand seigneur. Donc que je dise ou que tu dises Qu'il est sale, mon beau parleur, II laisse tomber les bêtises, Car le peigne est un grand seigneur. Pour moi, je ne veux pas le dire : Cela manquerait... de saveur, Et puis cela ferait sourire ; Non..., le peigne est un grand seigneur. Sur vos dents fines et sans crasse, Chaque matin j'ai cet honneur, Mon beau peigne, je vous embrasse, Et je suis votre serviteur. I- Après avoir lu tous les poèmes du corpus, vous répondrez d'abord à la question suivante (4 points) : En quoi ces poèmes sont-ils modernes et provocateurs ? Vous justifierez votre réponse à l'aide d'éléments précis pris dans les différents textes. II. Vous traiterez ensuite, au choix, l'un des sujets suivants (16 points) : Commentaire Vous ferez le commentaire du poème de Lautréamont. Dissertation La laideur peut-elle être une source d'inspiration pour un poète au même titre que la beauté ? Vous répondrez dans un développement organisé, en vous appuyant sur les textes du corpus, les poèmes étudiés en classe et vos lectures personnelles. Invention Les Chants de Maldoror ont été mal accueillis à leur parution. Dans un courrier de lecteurs, un admirateur d'une telle esthétique du laid défend l'idée qu'il n'existe pas d'objet poétique privilégié. Vous rédigerez cette lettre.

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