Devoir de Philosophie

DU CONTRAT SOCIAL ou Principes du droit politique. Traité de Jean-Jacques Rousseau (résumé de l'oeuvre & analyse détaillée)

Publié le 24/10/2018

Extrait du document

droit
DU CONTRAT SOCIAL ou Principes du droit politique. Traité de Jean-Jacques Rousseau (1712-1778), publié à Amsterdam chez Marc-Michel Rey en 1762.
 
Ce texte n'est selon Rousseau qu'un extrait d'un vaste ouvrage intitulé Institutions politiques qu'il n'a jamais conduit à bien. L'entreprise était considérable : persuadé que tout tient à la politique, convaincu que le droit politique est encore à naître et que peut-être il ne verra jamais le jour, le « citoyen de Genève » n'a pu produire que le « petit traité » du Contrat social. Dans les finalités foisonnantes du propos, un fil conducteur têtu anime le texte : peut-on légitimer l'obligation politique et l'état civil en ce qu'il rassemble les hommes qui vivent isolés à l'état de nature ? Comment les hommes, et pourquoi, ont-ils pu abandonner leur indépendance naturelle et se soumettre à l'obéissance à des lois ? Comment comprendre que l'homme né libre par nature soit « partout dans les fers » (livre I, chap. 2) ? Le texte a pour projet d'examiner ce que peut et doit être l'état civil, et à quelles conditions a été pervertie sa forme droite. Il entrelace l'examen des concepts fondamentaux qui étayent la théorie politique de Rousseau et la critique radicale de tout système qui justifierait en quelque façon un droit à l'oppression, à la limitation de la liberté de l'homme dans l'état civil. Rousseau, dans ce traité dont on a trop dit qu'il est sec et abstrait, parle à la première personne. Mais ce «je» n'est pas celui d'un auteur singulier : c'est le sujet qui écrit universellement, au nom de l'Homme.
 
Quatre livres constituent ce texte dont l’objet fondamental est de dégager s’il existe dans l’ordre civil (socio-politique) quelque chose de légitime. Le «Livre premier» met en lumière que la force n’a aucun droit à constituer la société des hommes, et que seul l’accord libre et
voulu par tous peut instaurer par un contrat la vie en commun. Le « Livre deuxième » met au jour les conditions de possibilité de cette convention contractuelle : elle repose sur la souveraineté, puissance inhérente à la volonté générale, qui représente en chaque homme la rationalité en ce qu'elle est capable de faire les lois. Le « Livre troisième » expose une théorie du gouvernement, c’est-à-dire de la puissance exécutrice qui peut prendre diverses formes selon que le pouvoir est entre les mains de quelques-uns, d’un seul, de tous. Toute forme de gouvernement n’est que l’expression de la volonté géné-rale ; reste que tout gouvernement tend à l’abus de pouvoir, et en ce sens tend à dégénérer. Le « Livre quatrième » réaffirme qu’en dépit de la tentation de tout gouvernement à se perdre en perdant tous les hommes, la volonté générale est indestructible ; il pose également les principes d’une religion civile, comportant parmi ses dogmes la « sainteté du contrat social et des lois ».
 
Le souci de Rousseau est de fonder la légitimité de l'état civil et d'en dégager l'origine, inséparablement. Ce souci peut paraître trivial à une époque où se déploient diverses théories du contrat social pour rendre compte de l'existence des hommes en communauté juridico-politique. Un des postulats essentiels de ces théories consiste à affirmer qu'à l'état de nature (pré-civil) les hommes jouissent d'une égalité et d'une liberté naturelles, mais sont toujours susceptibles d'entrer en conflit. Qu'ils soient en guerre perpétuelle par appétit de domination et de gloire selon Hobbes, qu'ils n'aient aucune garantie quant à leurs biens selon Locke, la nécessité de sortir de l'état de nature s'impose : le contrat est cette convention par laquelle les atomes individuels s'unissent en vue de garantir la paix ou leurs possessions. Ces atomes sont déjà des hommes tout faits, doués de raison et de volonté, conditions requises pour contracter en toute égalité. Dès lors, la notion de contrat est susceptible de développements quasi miraculeux : le contrat d'association fondateur de l'état civil rend possible le contrat d'obéissance et celui, plus subtil, de soumission (voir Du droit de la nature et des gens de Puffen-dorf, 1673). Puisque tout contrat implique l'engagement libre des volontés en présence, rien n'empêche qu'une volonté accepte de se vendre à une autre. Ainsi l'esclavage peut-il être justifié comme un banal contrat d'échange, de vente, d'achat. La volonté libre est puissance de s'aliéner elle-même, et l'individu conçu comme source de la souveraineté devient librement la source de sa propre servitude (voir en particulier Grotius, Du droit de la guerre et de la paix, 1625).
 
Les théories du contrat social sont aux yeux de Rousseau, qui ne nuance ni ne diversifie, des armes faussement philosophiques au service de despotismes bien réels. En fait, elles s'inclinent devant la force brute du pouvoir qu'elles justifient. Mais la force est impuissante à rendre compte de soi, alors même qu'elle l'exige. La force ne peut se passer du droit qu'elle nie. Elle apprête une légitimité qui la refuse. Quant à la légitimation menteuse de l'esclavage, elle repose sur un sophisme : car on ne peut vendre sa liberté à un autre ; on ne vend que des biens ; la liberté n'est pas un bien, elle est l'être même de l'homme. Ici est radicalement récusée la notion de contrat. À ce niveau son sens n'est qu'économique. On ne peut échanger son être : car alors qui serait l'agent de la transaction ?
 
Le passage à l'état civil est, selon Rousseau, rendu nécessaire quand la conservation de l'espèce ne peut plus être assurée par la pure nature. Le contrat ou pacte est acte conventionnel par excellence : entendons par là qu'il est l'œuvre des hommes qui, renonçant chacun à l'indépendance naturelle, s'unissent à tous. Dans cet abandon voulu, chacun retrouve, dans le corps social, sa liberté, en égalité
avec les autres. Il s'agit là d'un acte de complète réciprocité, qui constitue le tout social. Le contrat n'est pas constitué par un peuple d'individus atomisés ; c'est le contrat qui instaure le peuple comme totalité. Cet acte fondateur implique l'accord des volontés singulières. Cet accord n'est cependant pas la simple sommation de singularités en accord contingent : car il fait surgir en un acte de naissance primordial la « volonté générale », principe actif qui anime le corps politique. Cette volonté a une fonction politique qui s'enracine dans la réalité ontologique de l'homme ; elle exprime, de l'homme et en lui, ce que chacun est universellement : la liberté. C'est bien pourquoi l'abandon de l'état de nature - l'heureuse immédiateté inconsciente - pour passer à l'état civil, « d'un animal stupide et borné, fit un être intelligent et un homme » (livre I, chap. 8). Mais si l'homme n'accède à l'humanité que par le pacte civil, que faire de l'individu qui voudrait se soustraire à la volonté générale ? On rencontre ici une aporie; sans doute, l'individu peut-il théoriquement, non en fait, retourner à l'état de nature. La solution de Rousseau prête à méditation : « On le forcera d'être libre » (livre I, chap. 7).
 
La volonté générale qui engendre par contrat le corps politique constitue le « souverain », être collectif, un et indivisible, dont le but est le bien commun. La volonté générale souveraine se pose d'elle-même, s'autofonde. Ce qu'elle est se confond avec ce qu'elle doit être. Dans cette identité de l'être et du devoir, Rousseau dégage l'essence même du politique. On conçoit dès lors que la souveraineté est inaliénable, car pas plus que la liberté elle n'est un bien. L'aliénation de la souveraineté, ou le renoncement de la volonté générale à soi-même, est la destruction pure et simple du corps politique. 


droit

« sible le contrat d'obéissance et celui, plus subtil, de soumission (voir Du droit de la nature et des gens de Puffen­ dorf, 1673).

Puisque tout contrat impli­ que l'engagement libre des volontés en présence, rien n'empêche qu'une volonté accepte de se vendre à une autre.

Ainsi l'esclavage peut-il être justifié comme un banal contrat d'échange, de vente, d'achat ..

La volonté libre est puissance de s'aliéner elle-même, et l'individu conçu comme source de la souveraineté devient libre­ .

ment la source de sa propre servitude (voir en particulier Grotius, Du droit de la guerre et de la paix, 1625).

Les théories du contrat social sont aux yeux de Rousseau, qui ne nuance ni ne diversifie, des armes faussement philosophiques au service de despotis­ mes bien réels.

En fait, elles s'inclinent devant la force brute du pouvoir qu'elles justifient.

Mais la force est impuissante à rendre compte de soi, alors même qu'elle l'exige.

La force ne peut se passer du droit qu'elle nie.

Elle apprête une légitimité qui la refuse.

Quant à la légitimation menteuse de l'esclavage, elle repose sur un sophisme : car on ne peut vendre sa liberté à un autre ; on ne vend que des biens; la liberté n'est pas un bien, elle est l'être même de l'homme.

Ici est radicalement récusée la notion de contrat.

À ce niveau son sens n'est qu'économique.

On ne peut échanger son être : car alors qui serait l'agent de la transaction ? Le passage à l'état civil est, selon Rousseau, rendu nécessaire quand la conservation de l'espèce ne peut plus être assurée par la pure nature.

Le contrat ou pacte est acte convention­ nel par excellence : entendons par là qu'il est l'œuvre des hommes qui, renonçant chacun à l'indépendance naturelle, s'unissent à tous.

Dans cet abandon voulu, chacun retrouve, dans le corps social, sa liberté, en égalité avec les autres.

Il s'agit là d'un acte de complète réciprocité, qui constitue le tout social.

Le contrat n'est pas consti­ tué par un peuple d'individus atomi­ sés; c'est le contrat qui instaure le peu­ ple comme totalité.

Cet acte fondateur implique l'accord des volontés singu­ lières.

Cet accord n'est cependant pas la simple sommation de singularités en accord contingent : car il fait surgir en un acte de naissance primordial la «volonté générale >>, principe actif qui anime le corps politique.

Cette volonté a une fonction politique qui s'enracine dans la réalité ontologique de l'homme ; elle exprime, de l'homme et en lui, ce que chacun est universelle­ ment : la liberté.

C'est bien pourquoi l'abandon de l'état de nature -l'heu­ reuse immédiateté inconsciente- pour passer à l'état civil, «d'un animal stu­ pide et borné, fit un être intelligent et un homme >> (livre 1, chap.

8).

Mais si l'homme n'accède à l'humanité que par le pacte civil, que faire de l'indi­ vidu qui voudrait se soustraire à la volonté générale ? On rencontre ici une aporie ; sans doute, l'individu peut-il théoriquement, non en fait, retourner à l'état de nature.

La solution de Rousseau prête à méditation : « On le forcera d'être libre >> (livre 1, chap.

7).

La volonté générale qui engendre par contrat le corps politique constitue le «souverain>>, être collectif, un et indivisible, dont le but est le bien commun.

La volonté générale souve­ raine se pose d'elle-même, s'autofonde.

Ce qu'elle est se confond avec ce qu'elle doit être.

Dans cette identité de l'être et du devoir, Rousseau dégage l'essence même du politique.

On conçoit dès lors que la souveraineté est inaliénable, car pas plus que la liberté elle n'est un bien.

L'aliénation de la souveraineté, ou le renoncement de la volonté générale à soi-même, est la destruction pure et simple du corps politique.

Indivisible, la volonté ne. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles