Le personnage de BRÜNHILD

Mais, contraint par une loi supérieure qu’il déteste, impuissant à épargner à sa fille le châtiment, Wotan sait bien que c’est de sa propre âme, de son « meilleur moi » qu’il doit se séparer en condamnant Brunhild. Celle-ci ne saurait appartenir à un lâche : autour de la Walkyrie endormie, le dieu fait donc jaillir une flamme ardente, infranchissable a quiconque connaît la peur. Seul pourra conquérir la vierge le héros libre, le rédempteur du monde qui s’identifie à l’attente mystérieuse de Wotan. Après avoir franchi le barrage de feu et réveillé Brünhild, Siegfried s’unit à la fille de Wotan, qui lui révélé la science divine et n’a plus d’autre ambition désormais que de vivre en lui, d’être l’âme de ses actions : au calme divin, elle a préféré le dévouement absolu à un seul. Mais, lorsque le héros, ayant bu des mains de Gudhrun le « breuvage d’oubli », conquiert pour Gunther, et par ruse, la main de sa propre épouse, Brünhild est prise d’une soii de vengeance aussi violente que son amour était sublime. Elle révèle à Hagen où et comment Siegfried

propre destin et le mystère du monde. Écartant Gudhrun et s’affirmant comme la véritable épouse de Siegfried et son héritière légitime, elle va dénouer la double tragédie de la volonté et de la fatalité. En rendant aux flots du Rhin l’anneau purifié par le feu, elle délivre le monde de la malédiction de l’or et de la puissance qui pesait sur lui. En suivant Siegfried dans la mort, elle expie et rachète la dernière faute, celle que la fatalité lui avait imposée : « Je vous lègue le trésor le plus sacré de mon savoir : ni bien, ni or, ni splendeur divine, ni magnificence seigneuriale, ni le lien trompeur des tristes traités, ni la dure loi de mœurs hypocrites ne donnent le bonheur. Félicité dans la joie et la peine nous vient de l’amour seul. » Tel est le dernier mot de la sagesse de Brünhild, mais aussi de la sagesse protonde de Wotan et enfin de la pensée wagnérienne.