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UBU ROI d'Alfred Jarry

Publié le 05/11/2018

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UBU ROI. Drame en cinq actes et en prose d'Alfred Jarry (1873-1907), publié à Paris dans la revue le Livre d'art en avril et mai 1896, repris en volume au Mercure de France en 1896, et créé à Paris au théâtre de l'Œuvre le 10 décembre de la même année.

 

Le seul nom d'Ubu a fait davantage pour rendre célèbre Alfred Jarry que tout l'ensemble de son œuvre, et le personnage a depuis longtemps acquis une existence autonome, dépassant le champ de la littérature. Son origine et l'usage qu'en fit Jarry ne sauraient d'ailleurs en aucun cas être réduits à la dimension littéraire, dont il est aussi la négation et la parodie.

 

Venant de Saint-Brieuc, le jeune Alfred Jarry arriva au lycée de Rennes en octobre 1888, en classe de première ; il y devint l'ami d'Henri Morin, l'un de ses condisciples, qui lui fit connaître un ensemble de textes dont le héros était M. Hébert, professeur de physique au lycée de Rennes depuis 1881 et victime constante de terribles chahuts. Les élèves avaient en outre inventé une vaste littérature dont M. Hébert, surnommé (entre autres) le père Heb ou père Ébé, était le héros : drames, épopées, chansons, vantaient sa gloire dérisoire et ses exploits ridicules. De cette production abondante recueillie par Charles Morin, frère aîné

 

d'Henri, Jarry retint plusieurs textes, dont un drame, les Polonais, où l'on voit le père Heb devenir roi de Pologne... Il en organisa des représentations sur un petit théâtre familial, dès le mois de décembre 1888, d'abord avec des marionnettes, puis en théâtre d'ombres. Quittant Rennes, Jarry conserva ces manuscrits des frères Morin et, peu à peu, transforma les documents bruts. En avril 1893, il publie Guignol dans l'Écho de Paris mensuel illustré : le père Heb, devenu père Ubu, y paraît pour la première fois, \"ancien roi de Pologne et d'Aragon, docteur en pataphysique\" . Puis Jarry publie le texte d'Ubu roi au printemps 1896, avant de le faire jouer en décembre de la même année au théâtre de l'Œuvre, haut lieu de l'avant-garde, dans une fiévreuse atmosphère de scandale qui, du jour au lendemain, rendit célèbre le nom de Jarry et, plus encore, celui d'Ubu. Le manuscrit des Polonais du lycée de Rennes n'étant pas connu, il est difficile de savoir si, comme le prétend Jarry, il a \"restitué dans son intégrité\" le drame scolaire ou bien s'il l'a resserré, lui donnant son étonnante et abrupte concision.

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« roi», 1921) ont voulu dénoncer le « vol » commis par Jarry, tout en souli­ gnant le peu d'intérêt de l'objet volé.

Mais il y a effectivement un « mys­ tère » Ubu -le gouffre entre cette pro­ duction lycéenne et l'importance mythique prise par la pièce et le per­ sonnage.

Ubu est l'officier de confiance de Venceslas, roi de Pologne.

Pleine d'ambition, la mèr e Ubu lui suggè re de tuer le roi et de pr endre le pou voir.

Ubu reçoit des invités à dîn er et leur donne de la « merdre » à manger.

Un complo t s'orga nise : Ubu s'allie au capitaine Bordure pour tuer le roi penda nt la revue (Acte 1).

Ayant fait un songe prémonitoire, la reine tente de découra ger Vencesla s d'aller à la revue, mais il refuse de l'en tendre.

Il est tué par Ubu et Bordure, cepen dant que la reine et son fils, le jeune Bougrelas, parvie nnent à s'échapper .

Réfugiée dans une caverne, la reine meurt d'épuisement.

Bougrelas, enc oura gé par les ombres de ses aïeux, décide de se venger.

Pour fêter son avènement, Ubu, ma lgré sa ladr erie, distribue de l'or au peuple (Acte Il).

Ubu refuse les conseils de modéra tion de la mè re Ubu : pour s'emparer de leurs biens, il fait passer tous les nobles à la trappe, puis c'est le tour des magistrats et des financiers.

Ubu part alors récolter les impôts chez les paysans avec son «voitu rin à phyn ances » ; sa cruauté engen dr e la révolte et le ralliement populaire à Bougre las.

Outré du manque de reconnaissance d'Ubu, son ancien comp lice le capitaine Bordure va en Russie s'allier avec le tsar Alexis, qui décide d' envahir la Pologne et de rétablir Bougrelas sur le trôn e.

Le père Ubu part donc faire la guerre, laissant la régence à la mè re Ubu (Acte Ill).

À Varsovie, Bougrelas et ses partisans chassent la mèr e Ubu.

En Ukraine, l'armée d'Ubu se prépare à aff ron ter les Russes.

La batail le a lieu, la lâcheté d'Ubu conduit ses trou pes à la déb andade.

Il se réfugie dans une caverne (Acte IV).

Dans cette même caverne paraît la mèr e Ubu en fuite depu is qua tre jours.

Malgr é l'obscur ité, elle reco nnaît Ubu et déc ide de lui donner une leçon : lors qu'il s'éve ille, elle feint d'être une appar ition surnaturelle et lui fait la mor ale ; mais la clarté du jour levant la trahit.

Ubu la bat.

Bou grelas et ses fidèles survienn ent, ma is les Ubu parvie nnent à s'enf uir.

La derni ère scène montre Ubu et sa bande sur le pont d'un navire, faisant route vers la France (Acte V).

Les effets du lancement provocateur réalisé par Jarry -le > sonore, premier mot d'Ubu roi, jeté à la face du Tout-Paris symboliste -sont depuis longtemps retombés.

Si la pièce peut aujourd'hui encore fasciner, et imposer le père Ubu, c'est d'abord par sa langue où se mêlent l'argot scolaire, la parodie des classiques et un réalisme élémen­ taire, portés par une extraordinaire énergie et transfigurés par le traitement théâtral proposé par Jarry, qui refuse et détourne les conventions dramatiques du x1xe siècle.

L'élément parodique est particulièrement important, puisque presque constamment Ubu roi renvoie à des scènes célèbres du théâtre classi­ que, en particulier le Macbeth de Sha­ kespeare.

En outre, le langage singulier du héros, déformant les mots : > ou >, et multipliant les effets de style : « De par ma chan­ delle verte >> ou le fameux >, facilement imités, a rendu populaires sa monstrueuse silhouette et son verbe tonitruant.

Ce sont là quelques-unes des raisons de la surprenante efficacité scénique d'Ubu roi; il y en a d'autres, parfois paradoxales.

Même retourné, mutilé, piétiné, le théâtre classique porte encore la pièce, qui en reproduit les schémas les plus solides, assurant le fonctionnement dramatique de l'œuvre : la lutte pour le pouvoir, la conquête du trône, le complot se maté­ rialisant scéniquement avec autant de succès que chez Corneille ou Victor Hugo.

L'origine guignolesque d'Ubu roi laisse aussi des traces, à travers des épi­ sodes à grand spectacle traités de façon caricaturale : la revue où paraît l'> (Il, 2), la scène de la trappe (Ill, 2) ou le bateau sur la mer au dernier acte proposent des effets dignes du Châtelet.

Quant à l'appari­ tion de la mère Ubu en spectre (V, 1), elle joue encore d'un procédé classi­ que.

Ainsi Jarry se sert-il de cela même. »

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