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ALLAIS Charles Alphonse : sa vie et son oeuvre

Publié le 14/11/2018

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ALLAIS Charles Alphonse (1854-1905). Humoriste, poète à ses heures, Allais est né à Honfleur, et, qui pis est, dans une pharmacie : cela ne semblait pas le destiner immanquablement à la carrière d’amuseur. C’est pourtant ce qui se passe : après avoir montré tout jeune son sens de la blague, il passe son bac, fréquente au cours de quelques stages les Homais de la capitale, « fait son armée », s’inscrit enfin à l’Ecole de pharmacie et y passe quelques examens.

Le potard s'émancipe

Là s'arrêteront les études du bon jeune homme. Allais, qui dès 1876 adressait à sa sœur un petit feuilleton épis-tolaire (le Petit Marquoir), choisit en effet d’écrire : à cette époque, il a déjà rencontré Charles Cros et Sapeck, une figure célèbre du quartier Latin — surtout, il a participé dès 1878 à la société des Hydropathes : il écrit d’ailleurs dans l’organe du « mouvement » avant de se séparer de celui-ci, ainsi que Sapeck, pour fonder l’école fumiste. Allais publie aussi des textes dans les Ecoles, le Tintamarre et même l'Anti-Concierge!

En 1884, il participe à un Salon des incohérents, qui est une sorte de charge contre les écoles esthétiques du moment : on y « entendra », entre autres, une Marche funèbre composée pour les funérailles d’un grand homme sourd (une sublime série de mesures vides). En 1885, il devient le rédacteur en chef du Chat-Noir : il était déjà l’un des animateurs principaux du cabaret lancé par R. Salis. Quelques monologues publiés entre 1887 et 1891 précèdent A se tordre (1891), le premier d’une longue série de recueils. Les œuvres « anthumes » comprennent en effet Vive la vie! (1892), le Parapluie de P escouade (1893), Pas de bile (1893), Rose et Vert-Pomme (1894), Deux et deux font cinq (1895), On n'est pas des bœufs (1896), le Bec en Pair (1897), Amours, délices et orgues (1898), Pour cause de fin de bail (1899), Ne nous frappons pas (1900), le Captain Cap (1902), où Allais rassemble les meilleures de ses chroniques — celles, par exemple, du Journal, auquel il collabore en même temps qu’au Sourire.

Entre deux mystifications et trois apéritifs, Allais trouve encore le temps de faire représenter plusieurs pièces, de voyager aux Etats-Unis et au Canada, de se marier enfin — tout cela dans la seule année 1894. Par la suite, il quitte Paris en 1900 pour habiter dans le Midi, d'où il envoie ses articles chaque semaine. Cette vie plus calme ne lui rend pourtant pas une santé depuis longtemps compromise puisqu’il meurt en 1905.

« apoplectiques au bord de la mer Rouge, entre autres, mérite de rester.

Les jeux de mots (laids) La satire, la folie douce; ces deux mamelles du comi­ que allaisien remontent, si l'on peut dire, à une source commune : la fantaisie verbale, tout un travail sur le langage, subverti avec allégresse; brusquement l' équi vo­ que s'installe comme dans ces poèmes holorimes dont notre auteur s'est fait une spécialité : Alphonse Allais de l'âme erre et se f...

à l'eau Ah! l'fond salé de la me r! Hé! Ce foui Halle .

Ces vers ne sont pas qu'une plaisanterie, ils montrent que le véritable humoriste est aussi un poète; Allais joue avec les mots et les significations; il crée, disait Renard, à chaque instant.

Chez lui, par exemple, le calembour n'est pas la« fiente de l'esprit >>, il en devient le ressort principal : Allais met en boîte l'occultisme fin de siècle avec le sâr Jean de Ville (allusion au sâr Péladan) ou le faux mage de Livarot, évoque ce moment « donné >> qu'il faut rendre, cet appartement «à louer» qu'il couvre d'éloges, ces choses qui marchent comme sur Déroulède ou encore le célèbre curaçao de Reichshoffen.

« Al la is ia n a » : Il obtint sa main et en profita pour l'é po use r.

C'était l'été dernier, sur une petit e plag e, dont je citerai volontiers le nom quand elle se décid era à payer sa publicité.

J'ai connu bien des filles de joie qui avaient pour père un homme de peine.

La preuve que Sha ke spea re n'a pas écrit lui-même ses pièces, c'est qu' il s'appelait Willy.

La statistique a dém ontré que la mortalité dans l'armée augmente sensiblement en temps de guerre.

Le tic-tac des horloges, on dirait des s ou ris qu i grignotent le temps.

Plus restreint encore, le nom propre offre des ressour­ ces insoupçonnées (vieux style).

A.

Jakovsky a évoqué Sarah Vigott, Cornélie Huss née Pausse et Harry Covayre; il est bon aussi de connaître le général Sakapharine, le marquis de Lachaize-Persay, lady Namitt ou Nini Novgorod.

Le cœur à l'aise, Allais est allé jus­ qu' au bout de sa rhétorique saugrenue : il ne recule pas devant 1' oncle incarné ou devant cette hypothèse sur la ville natale du grand poète grec qui ferait venir Homère d' Ala u re .

Un texte tout entier peut même être construit pour aboutir à un calembour, dépendre dans sa structure de la pirouette finale : c'est le cas dans ce récit, par exemple, où un vétérinaire, qui enlève leurs ovaires aux cochonnes, se fait émasculer -tout ça parce qu'il ne faut pas faire aux truies ce que vous ne voulez pas qu'on vous fasse.

On ne fera pas d'A se tordre le texte fondateur de toute la modernité littéraire; on doit pourtant remarquer à quel point la liberté d'Allais le rend proche de ceux qui lui ont succédé -de Breton, par exemple.

C'est que l'humour allaisien n'a que faire de la saine raison et du bon goût, il n'est pas inoffensif, et l'on y trouve des échappées vers l'humour le plus noir : passe encore qu'à la fête de Neuilly le narrateur découvre que les serpentins sont des ténias roulés, mais que dire de ce cocu « veuf» qui gagne au jeu parce que sa fiancée est déterrée puis violée? Une telle férocité ne doit pas étonner; elle révèle qu'Allais n'est pas seulement «plaisant» : sa drôlerie est, en fait, moins gaie, plus acide qu'on ne le croit; elle fait rire et peut inquiéter, aussi, en installant 1' absurde dans les univers les mieux réglés.

BIBLIOGRAPHIE A se tordre.

Vive la vie.

Pas de bile!; le Capitaine Cap; Deux et deux fo nt cinq.

On n'est pas des bœufs, U.G.E., coll.

10118, 1985; A.

Jakovsky, A.

Allais, le tueur à gags, les Q uatr e Jeud is, 1955; Œuvres anthumes et posthumes, édition établie par F.

Caradec, Paris, R.

Laffont, «Bouquins>>, 1989.

A.

PREISS. »

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