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Considérez-vous comme légitime le statut que notre société de communication accorde aux «vedettes»?

Publié le 11/01/2020

Extrait du document

Les magazines, le cinéma, la radio et surtout la télévision, relayant et multipliant les rumeurs et les images des stades, des music-halls, sont en train de devenir les grands ordinateurs de la réussite. Les triomphateurs de la compétition, ce ne sont plus ceux qui ont d’abord le rang, l’ascendant culturel, la puissance ou l’argent et qui en tirent prestige, mais, de plus en plus, ceux qui ont le statut de vedettes. De cette promotion découlent tous les succès, y compris celui de la fortune.

Champions du sport, chanteurs en vogue, acteurs à la mode, ils deviennent les véritables modèles à qui vont toutes les faveurs. Sans doute les écrans petits et grands, les journaux illustrés font-ils quelque place aux grands noms de la politique, des arts, de la littérature ou même de la science. Mais, dans le cas des vedettes, l’ordre des confirmations est inversé. C’est parce qu’on a pu parvenir sur le devant de la scène qu’on obtient une sorte de passeport pour les voies où se récoltent tous les autres avantages que la société peut accorder aux statuts prééminents.!...]

Le statut de vedette comporte d’autres caractéristiques qui le rendent incomparable aux autres. D’abord, il ne requiert aucun titre préalable et semble arriver comme par magie. Le spectateur peut s’identifier à la vedette, car aucune barrière d’origine ou de formation ne le sépare de son idole. Sans doute faut-il souvent beaucoup de talent et de travail pour réussir dans le «show-business». Mais cela n’apparaît pas sur l’écran, et tout adolescent peut imaginer que, si la chance lui sourit, la même ascension foudroyante lui est promise. À quoi bon de longues études ? L’argent, la gloire sont à portée de la main.

Le vedettariat est d’ailleurs polyvalent. Il confère la possibilité de briller partout. Le chanteur en renom devient acteur de cinéma, et vice versa. Tout individu touché par cette grâce sera appelé à exprimer ses opinions sur les ondes, à parler de politique si cela lui fait plaisir, à devenir conseiller patenté en tous genres..

Enfin, le trait le plus remarquable de cette nouvelle aristocratie, c’est qu’elle ne suscite pas l’hostilité qui s’attache généralement à la fortune. Elle est en marge ou au-dessus de la lutte des classes, absoute de tout péché à tel point qu’il est parfois de bon ton que le chanteur milliardaire se fasse le porte-drapeau du prolétariat et de la révolte contre la société dont il est le premier privilégié. Au lieu d’être une tare, la richesse est ici facteur de popularité. Les chroniqueurs font état des villas somptueuses, des voitures de prix, des cachets fabuleux pour stimuler la dévotion des admirateurs.

Est-ce à dire que les anciennes classes dominantes sont en train de disparaître ? Elles ont seulement quitté le devant de la scène, ou n’y paraissent que secondairement. En fait, les détenteurs du pouvoir économique restent plus souvent dans l’ombre.

 

Cela n’est pas sans conséquences, car leur statut cesse d’être prestigieux pour devenir purement financier. La haute bourgeoisie n’est plus dès lors un modèle qui s’offre aux regards. C’est peut-être une des raisons pour lesquelles ses enfants en contestent la fonction sociale.

Ainsi, la stratification n’est peut-être pas profondément modifiée dans sa réalité, mais elle l’est dans le spectacle qu’elle donne. Elle ne paraît plus correspondre aux finalités et aux valeurs qui pourraient la justifier, la rendre rationnelle.

D’autre part, quand la réussite semble être consacrée ou même conférée par l’accès aux magazines et aux écrans, l’interprète éclipse le créateur. Bien mieux : on parle d’un chanson «créée» par Hallyday et d’un film «de» Belmondo. Celui qui compte, c’est celui qu’on voit. Ainsi, les valeurs esthétiques comme les valeurs sociales sont conditionnées par les communications de masse.

Cette évolution est-elle fatale, irréversible ? Elle l’est sans doute davantage dans la mesure où elle n’est pas décelée, repérée. Elle peut être freinée par une éducation du public, par un travail démystificateur et aussi peut-être par le reclassement des valeurs que produit souvent la satiété ou la retombée des modes.

Jean Cazeneuve, La Vie dans la société moderne, 1982.

Résumé (8 points)

Vous résumerez le texte en 180 mots. Une marge de 10 % en plus ou en moins est admise. Vous indiquerez, à la fin de votre résumé, le nombre de mots employés.

Vocabulaire (2 points)

Vous expliquerez le sens dans le texte, des deux expressions soulignées :

l'ascendant culturel,

- un travail démystificateur.

Discussion (10 points)

Considérez-vous comme légitime le statut que notre société de communication accorde aux «vedettes»?

Analyse du sujet

Parties du programme abordées :

- Maîtrise des techniques du Résumé - Discussion. -

- Le xxe siècle.

- Le rôle des « vedettes • médiatiques.

Analyse du sujet :

■— Thèmes : très classiques.

— Le pouvoir des médias.

- Le vedettariat excessif qu’ils suscitent.

- La modification des « valeurs » que cela engendre.

- Points d'histoire littéraire : Pour la discussion, les références littéraires sont peu nécessaires ; en revanche une bonne connaissance du cinéma (et de la télévision) est indispensable.

Conseils pratiques : Se méfier du résumé : le texte est en effet assez dense et une synthèse complète s’avère délicate.

La discussion, comme toujours, doit s’efforcer d’éviter la « banalité » ; elle vaudra par de bons exemples ; mais ceux-ci ne doivent pas remplacer une argumentation semée.

Nature du sujet ; Pointu

Difficulté du sujet : * * *

« Session de juin 1991 Champions du sport, chanteurs en vogue, acteurs à la mode, ils deviennent les véritables modèles à qui vont toutes les faveurs.

Sans doute les écrans petits et grands, les journaux illustrés font-ils quelque place aux grands noms de la politique, des arts, de la lit­ térature ou même de la science.

Mais, dans le cas des vedettes, l'ordre des confirmations est inversé.

C'est parce qu'on a pu parve­ nir sur le devant de la scène qu'on obtient une sorte de passeport pour les voies où se récoltent tous les autres avantages que la société peut accorder aux statuts prééminents.[ ...

] Le statut de vedette comporte d'autres caractéristiques qui le rendent incomparable aux autres.

D'abord, il ne requiert aucun titre préalable et semble arriver comme par magie.

Le spectateur peut s'identifier à la vedette, car aucune barrière d'origine ou de formation ne le sépare de son idole.

Sans doute faut-il souvent beaucoup de talent et de travail pour réussir dans le «Show-busi­ ness·" Mais cela n'apparaît pas sur l'écrnn, et tout adolescent peut imaginer que, si la chance lui sourit, la même ascension fou­ droyante lui est promise.

À quoi bon de longues études ? L'argent, la gloire sont à portée de la main.

Le vedettariat est d'ailleurs polyvalent.

Il confère la possibilité de briller partout.

Le chanteur en renom devient acteur de cinéma, et vice versa.

Tout individu touché par cette grâce sera appelé à exprimer ses opinions sur les ondes, à parler de politique si cela lui fait plaisir, à devenir conseiller patenté en tous genres.

Enfin, le trait le plus remarquable de cette nouvelle aristocratie, c'est qu'elle ne suscite pas l'hostilité qui s'attache généralement à la fortune.

Elle est en marge ou au-dessus de la lutte des classes, absoute de tout péché à tel point qu'il est parfois de bon ton que le chanteur milliardaire se fasse le porte-drapeau du prolétariat et de la révolte contre la société dont il est le premier privilégié.

Au lieu d'être une tare, la richesse est ici facteur de popularité.

Les chroniqueurs font état des villas somptueuses, des voitures de prix, des cachets fabuleux pour stimuler la dévotion des admirateurs.

Est-ce à dire que les anciennes classes dominantes sont en train de disparaître ? Elles ont seulement quitté le devant de la scène, ou n'y paraissent que secondairement.

En fait, les déten­ teurs du pouvoir économique restent plus souvent dans l'ombre.

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