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INCIPIT / DESINIT. (Histoire de la littérature)

Publié le 30/12/2018

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INCIPIT/DESINIT. L’incipit (première phrase ou premiers mots, voire premier hémistiche d’un vers) permet de désigner un texte — généralement un poème — qui ne comporte pas de titre. Mais cette fonction utilitaire n’est qu'un des aspects de l'incipit. Son rôle essentiel est de faire pénétrer le lecteur dans un monde imaginaire en déclenchant un discours littéraire dont le côté artificiel, sinon arbitraire, a bien été senti par un Valéry, par exemple, se demandant, au seuil de toute narration : par où commencer? A cette question, les romanciers ont apporté des solutions diverses : vastes descriptions liminaires chez Balzac, dialogues chez les Goncourt, tandis que Zola reste fidèle au début classique in médias res. Si la formule magique du type « or, dit le conte » ou « il était une fois > est abandonnée à la littérature orale, dont l’invraisemblance fait sourire plus qu'elle ne choque, la littérature réaliste, elle — ou la science-fiction, lorsqu’elle veut donner à son témoignage fictif la crédibilité d'une chronique réelle —, cherche à gommer au maximum l’arbitraire de son fonctionnement en choisissant pour point de départ de la narration non un événement isolé, fortuit, mais le moment qui semble coïncider avec le projet explicite d'un destin supérieur : ainsi Julien Sorel obéit-il à la destinée qui lui était annoncée dans les signes symbolico-prémonitoires des premières pages du Rouge et le Noir. Anna Karénine se suicidera dans la gare même où elle avait vu mourir un employé, déchiqueté par un wagon, au moment de sa première rencontre avec Vronski. La première phrase est donc initiatrice autant qu’initiale, selon le mot d'Aragon (Je n'ai jamais appris à écrire ou les Incipit, Skira, 1969). Elle introduit dans un univers d’où le hasard est exclu, où règne l’anthropomorphisme, et qui tire sa signification de la cohérence et des correspondances qui s'établissent entre les signes d’un langage spécifique.

 

Si certains genres littéraires sont interminables (on peut ajouter un nombre illimité d'apologues à un recueil de fables, de maximes à un recueil de sentences, une pensée à l'aphorisme précédent, etc.), d'autres, au contraire, obéissent à des règles, explicites ou non, qui codifient leur séquence terminale (desinit, explicit).

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