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RONSARD Pierre de : sa vie et son oeuvre

Publié le 28/11/2018

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ronsard

RONSARD Pierre de (1524-1585). Les mérites éclatants de certains recueils, comme ceux des Amours, ont nui à leur auteur. On se représente mal l’ampleur et la variété de l’œuvre de Ronsard, capable d’écrire d’amour, mais aussi de politique et de philosophie; légèrement ou gravement, selon les exigences de l'heure. On a peine à concevoir l’étonnant ascendant qu’il exerça sur une époque, fascirée, subjuguée, parfois irritée par l’audace, l’assurance, voire la morgue de ce poète-né qui était aussi gentilhomme.

 

Le gentilhomme, le Vendômois et le poète

 

Seul des grands poètes de la Renaissance française (mis à part d’Aubigné), Ronsard a rédigé, à l’intention d’un de ses amis, un fragment d’autobiographie. Texte mineur, à bien des égards, et qui s'arrête à la date où Ronsard l’écrit : 1554, mais également très significatif. Le poète, en effet, écrit sa vie par rapport à celle de ses rois.

 

Il naît l’année même, selon le calendrier julien alors en vigueur, de la bataille de Pavie puis il passe une partie de son enfance et de sa jeunesse au service des dauphins de France, jusqu’au moment où un coup du destin, la

 

surdité précoce, lui interdit la carrière des armes et de la Cour, à laquelle il songeait. Dès lors, sa vie n’aura pas l’imprévu et les risques qu’il lui souhaitait; et il le regrette, car, pour ce noble, fier de ses origines (en partie légendaires), le métier des armes reste plus prestigieux que celui des lettres. Puisqu’il n’est plus en mesure de servir directement le roi et la France, il peut du moins, en servant les Muses, illustrer la grandeur de son pays.

 

S’il faut l’en croire, il a entendu très tôt (quinze ou douze ans selon les textes), dans les paysages de son Vendômois natal, l’appel de la Muse. Quelques rencontres décisives : celle de Peletier du Mans, en 1543, puis celle de Dorât, au collège de Coqueret, en 1545, lui permettent de prendre une part active à la renaissance de la poésie souhaitée par une « brigade » de jeunes poètes. En 1550, avec la publication des Quatre Premiers Livres des Odes, il fait figure de chef d’école incontesté. Dès lors, sa vie s'écoulera d'une façon relativement monotone. Plus de grands voyages comme ceux qu’il fit en 1537 et 1539 en Écosse. Parfois, pour suivre une Cour souvent itinérante, il se déplace en province, comme lors de ce « tour de France » de Charles IX en 1564-1566. Mais il n’est jamais allé dans les pays dont il a tant rêvé : l’Italie et surtout la Grèce, peut-être de peur de voir son rêve se briser à l’épreuve de la réalité.

 

Sa vie se partage entre deux pôles : Paris et ses prieurés du Vendômois (Croix-Val, Saint-Gilles-de-Montoire) et de Touraine (Saint-Cosme-lez-Tours, qu’il reçoit en 1565). A Paris, il fréquente poètes, humanistes, fonctionnaires, gens de Cour. Il participe, de plus ou moins bonne grâce, à la vie des premiers salons et à l’activité de l’Académie de poésie et de musique créée par Antoine de Baïf. Mais la surdité autant qu’un penchant « saturnien » font de lui un être assez peu sociable. Quand Henri III succède en 1574 à Charles IX, le roi-ami, il prend la Cour en haine et se réfugie de plus en plus souvent dans les prieurés que sa qualité de clerc (il n’a jamais été prêtre) lui a permis d’obtenir et où il partage ses journées, comme le montre une page célèbre de la « Response », entre la lecture, la poésie, les travaux de jardinage et les promenades dans la campagne. C’est d’ailleurs à Saint-Cosme que la mort vient le prendre. Une célébration solennelle à sa mémoire eut lieu deux mois après, à Paris, au collège de Boncourt. Ronsard échappait donc, par le lieu de sa mort, à ceux-là mêmes — les humanistes — qu’il avait si souvent fréquentés et qui firent de lui, dans les discours officiels, un champion de la foi et du catholicisme.

 

Ce partage entre les lieux, on le retrouve dans l’œuvre, où il se thématise. Ronsard, hésitant entre la nature et l’histoire, a toujours tenté de trouver à la poésie une voie bien à elle.

 

Humanisme et poésie

 

L’humanisme a d’abord révélé à Ronsard ainsi qu’aux jeunes poètes de la « Brigade » — la future Pléiade — des cultures et des civilisations; avant tout, celles de la Grèce et de Rome. Avec Dorât et d’autres maîtres, Ronsard a été initié (le mot n’est pas trop fort) aux textes les plus importants et parfois les plus difficiles des littératures grecque et latine. Mais Ronsard n’est pas seulement ce poète érudit qui feuillette « de main nocturne et jour-nelle » Pindare ou l’Anthologie grecque (et qui parfois utilise, pour aller plus vite, des Florilèges et des carnets de citations!); la Grèce est aussi le pays de son galop poétique, comme il la présente dans l’« Epître au lecteur » des Odes de 1550, le pays où il vit en imagination, et à des époques d’ailleurs très différentes. Tantôt c’est la Grèce archaïque et mythique qui oriente ses rêves, avec Orphée et ceux que la tradition néo-platonicienne appelle, au xvic siècle, les « poètes divins ». Sous leur patronage, il évoque l’époque sacrée où le poète comprenait les voix de la nature et commandait à celle-ci grâce à la puissance de son chant. Tantôt c’est la cité grecque qui le retient, telle qu’elle se forme à l’âge classique, avec sa philosophie de la mesure, son autonomie vis-à-vis des dieux et ses grandes liturgies collectives. Tantôt enfin il admire le sens de l’art que possédaient les Alexandrins. Rome, qui séduisait tant les humanistes italiens du xve siècle, surtout dans sa période républicaine, ne l’attire pas autant. Il en connaît, certes, les héros et les gloires, mais les « poètes romains » représentent déjà pour lui un degré inférieur de la poésie, l’art et le labeur plus que l’« inspiration ». Dans l’histoire de Rome, Ronsard détache surtout une période, celle du règne d’Auguste, symbole de paix universelle, mais plus encore moment unique de l’harmonie parfaite entre le poète et le prince, entre Virgile et l’empereur. Tel est d’ailleurs le modèle qu’il proposera à ses rois, sans que ceux-ci prennent jamais vraiment conscience du rôle que peut jouer un poète dans l’histoire.

 

Le poète et son public

 

A l’époque de Ronsard, et sous l’influence de l’humanisme, le poète refuse qu’on le considère comme un

 

arrangeur de mots, si doué soit-il. De grandes ambitions l’animent, qui viennent, pour l’essentiel, de la tradition néo-platonicienne, renouvelée et réinterprétée par Mar-sile Ficin, à Florence, dans la seconde moitié du xve siècle. Comme presque tous ses amis de la Pléiade, Ronsard pense que la poésie n’est rien si un dieu ne l’anime; que le poète n’est rien si un enthousiasme ou, pour reprendre le vocabulaire du temps, une « fureur » divine ne l’a saisi. Certains de ses contemporains font de cette « fureur » le gage d’une véritable connaissance et pour l’homme, être déchu, celui d’une réconciliation avec le divin. Ronsard ne la voit pas exactement ainsi, car il est plus soucieux d’indiquer, en se servant de cette doctrine, les privilèges du poète que sa primauté dans l’ordre de la connaissance. Aussi bien place-t-il au sommet de son « échelle mystique » non pas l’amour, comme le faisaient les néo-platoniciens, mais la poésie.

 

Ce poète auréolé de prestige métaphysique inaugure un nouveau dialogue avec le roi. Il revendique d’abord le droit de le conseiller, comme par le passé. Mais il possède aussi l’arme du discours, écrit ou oral, capable de mobiliser les énergies de la cité en faveur du prince : c’est dire l'importance de la spéculation sur la rhétorique et sur son rôle dans la vie des cités. Au poète enfin l’intuition de l’histoire et le sens des mythes collectifs dont une nation a besoin pour vivre et entreprendre, mythes que le poète doit savoir retrouver et, dans certains cas, forger. Le roi devrait donc écouter ces poètes qui succèdent aux prêtres à ses côtés, car ils sont plus à même que ceux-ci de proférer les leçons de la prudence moderne. Et, pour qu’ils puissent assumer leur rôle, il doit aussi les décharger de tout souci matériel, éloigner d’eux le spectre de la pauvreté : « Troque pour troc », écrit Ronsard. Si le roi comprend ses devoirs, il trouvera le poète près de lui pour le célébrer, l’aider, le conseiller. Sinon, il devra admettre que l’art du poète mérite, comme tout autre art, un salaire.

 

Le dialogue entre Ronsard et ses rois, souvent difficile, parfois rompu mais pour être bientôt repris, n’est qu'un aspect privilégié de sa relation à la société. Il a fallu au poète conquérir peu à peu son public, et souvent avec violence. A coup sûr, dans un premier temps, la Cour lui fut hostile, préférant la musique « doux-coulante » des poètes marotiques à ces accents hautains et parfois rudes. Ronsard sut la gagner, du moins en partie, lorsque, changeant de style, il écrivit les poèmes des Amours de Marie. Mais elle lui échappa plus tard lorsque Desportes importa d’Italie un nouveau langage amoureux. Il n’est pas même certain qu’elle ait goûté les divertissements que Ronsard imagina pour elle. Les plus fervents admirateurs du poète se trouvaient, d’une part parmi ses amis écrivains, et d’autre part dans la noblesse de robe et parmi les « officiers » nourris d'humanisme qui lui restèrent fidèles jusqu’au xviie siècle. A vrai dire, cependant, Ronsard ne cessa de songer à un public infiniment plus large, celui qui lirait par exemple son grand poème de la Franciade, ou encore celui qui vibrerait unanimement à l’écoute de ses chansons d’amour. Public introuvable, bien sûr, et qu’il situa pour cette raison dans une postérité enfin reconnaissante, énonçant par là même la loi nouvelle du génie incompris de son temps mais qui sera reconnu après sa mort.

 

Le plaisir de l'œuvre

 

Ronsard lègue à la postérité une œuvre étonnamment diverse et la plus importante de toutes celles de la Pléiade. On sait maintenant que cette œuvre comprend, outre les Amours et les Discours sur les misères de ce temps, dont les extraits figurent dans toutes les anthologies, des Hymnes philosophiques et des poèmes rustiques. Mais qui lit de nos jours, pour son plaisir, les grandes odes des débuts ou les nombreux poèmes, parfois un peu négligés mais souvent admirables, que Ronsard écrivit pour des fêtes de Cour? Les choix opérés encore aujourd’hui dans l’œuvre du poète manifestent la persistance des préjugés romantiques : on valorise ce qui est censé exprimer une émotion personnelle — amoureuse ou politique, par exemple. Mais Ronsard, comme d’ailleurs Du Bellay, concevait la poésie d'une façon toute différente. L’émotion poétique était pour lui beaucoup plus l’effet que la source du poème. Les mythes et les idées peuvent engendrer l’émotion au même titre qu’un spectacle de la nature, comme en témoignent bien des passages des Hymnes.

 

Ronsard lui-même a placé son œuvre sous le signe esthétique de la varietas : une œuvre belle est une œuvre variée. Parce que le monde, que mime la poésie, tient sa beauté de sa variété. Presque toutes les métaphores de l’œuvre — celle, par exemple, de la prairie émaillée de vives couleurs — célèbrent la variété. Une telle esthétique ne fut pas acceptée par tout le monde, comme le montre l'étonnement de certains lecteurs (protestants, notamment) qui ne pouvaient comprendre que des folas-tries gaillardes puissent sortir de la même plume que des poèmes savants, voire sévères, et qui, surtout, demandaient au poète de mettre un peu d'ordre dans sa poésie. Cela, Ronsard refuse de l'imposer à sa Muse, parce qu’elle est avant tout caprice et fantaisie. Il ne saurait donc se plier à l’idée d'une poésie dominée par un seul projet ou par un seul genre.

 

La question de l’ordre est aussi, peut-être même sur

 

tout, celle de la disposition des Œuvres complètes. Très tôt (à trente-cinq ans), Ronsard publie une première édition collective, rassemblement de tout ce qu’il avait déjà publié soit sous forme de recueils, soit encore — le cas se présente — d'une façon isolée. Cinq autres éditions collectives suivront, qui ne cesseront de s'enrichir des productions du poète. Elles sont le lieu d’un étonnant travail : Ronsard d’abord en repense constamment la disposition selon le sens qu’il veut donner à son œuvre; il déplace aussi ses poèmes, et les range sous des rubriques différentes; enfin, au fur et à mesure qu'il vieillit et que se fortifie en lui un goût déjà classique, il corrige impitoyablement ses pièces, n’hésitant pas. dans certains cas, à les retrancher. Il est bien le maître d’une œuvre dont il dispose souverainement — et parfois cavalièrement, quand il change le nom de tel ou tel dédicataire.

 

En dépit de tout ce travail sur son œuvre. Ronsard éprouve une certaine insatisfaction. Il ne peut faire en effet que ne subsiste une poussière de poèmes « hors recueil » — les poèmes de circonstance, en particulier. Au centre de l'édition de 1584 — qui sera celle que nous suivrons en présentant les différentes parties de l’œuvre (avec quelques modifications dues à un souci de clarté) — figure donc une section dont le titre : « Bocage royal », évoque bien la dissémination poétique, l’indépendance du poème qui ne peut se fondre dans une unité supérieure; cette unité que Ronsard avait recherchée en écrivant la Franciade, car l'épopée, pour cette époque, n’était pas seulement un chant héroïque. C'était aussi le « grand Tout », où se résorbent toutes les différences.

ronsard

« ·-----·---- il a tant rêvé: l'llalie et surtout la Grèce, peut-être de peur de voir son rêve se briser à l'épreuve de la réalité.

Sa vie se partage entre deux pôles : Paris et ses prieu­ rés du Vendômois (Croix- Val, Saint-Gilles-de-Montoire) et de Touraine (Saint-Cosme-lez-Tours, qu'il reçoit en 1565).

A Paris, il fréquente poètes, humanistes, fonction­ naires, gens de Cour.

Il participe, de plus ou moins bonne grâce, à la vie des premiers salons et à l'activité de J'Académie de poésie et de musique créée par Antoine de Baïf.

Mais la surdité autant qu'un penchant «satur­ nien » foot de lui un être assez peu sociable.

Quand Henri Ill succède en 1574 à Charles IX, le roi-ami, il prend la Cour en haine et se réfugie de plus en plus souvent dans les prieurés que sa qualité de clerc (il n'a jamais été prêtre) lui a permis d'obtenir et où il partage ses journées, comme le montre une page célèbre de la « Response », entre la lecture, la poésie, les travaux de jardinage et les promenades dans la campagne.

C'est d'ailleurs à Saint-Cosme que la mort vient le prendre.

Une célébration solennelle à sa mémoire eut lieu deux mois après, à Paris, au collège de Boncourt.

Ronsard échappait donc, par le lieu de sa mort, à ceux-là mêmes - les humani ste s - qu'il avait si souvent fréquentés et qui firent de lui, dans les discours officiels, un champion de la foi et du catholicisme.

Ce partage entre les lieux, on le retrouve dans J'œuvre, où il se thématise.

Ronsard, hésitant entre la nature et l'histoire, a toujours tenté de trouver à la poésie une voie bien à elle.

Humanisme et poésie L'humanisme a d'abord révélé à Ronsard ainsi qu'aux jeunes poètes de la « Brigade» -la future Pléiade - des cultures et des civilisations; avant tout, celles de la Grèce et de Rome.

Avec Dorat et d'autres maîtres, Ron­ sard a été initié (le mot n'est pas trop fort) aux textes les plus importants et parfois les plus difficiles des littératu­ res grecque et latine.

Mais Ronsard n'est pas seulement ce poète érudit qui feuillette «de main nocturne et jour­ nelle » Pindare ou J'Anthologie grecque (et qui parfois utilise, pour aller plus vite, des Florilèges et des carnets de citations!); la Grèce est aussi le pays ,de son galop poétique, comme il la présente dans l'« Eprtre au lec­ teur » des Odes de J 550, le pays où il vit en imagination, et à des époques d'ailleurs très différentes.

Tantôt c'est la Grèce archaïque et mythique qui oriente ses rêves, avec Orphée et ceux que la tradition néo-platonicienne appelle, au xvr" siècle, les «poètes divins».

Sous leur patronage, il évoque 1 'époque sacrée où le poète compre­ nait les voix de la nature et commandait à celle-ci grâce à la puissance de son chant.

Tantôt c'est la cité grecque qui le retient, telle qu'elle se forme à J'âge classique, avec sa philosophie de la mesure, son autonomie vis-à­ vis des dieux et ses grandes liturgies collectives.

Tantôt enfin il admire le sens de l'art que possédaient les Alexandrins.

Rome, qui séduisait tant les humanistes ita­ liens du xv• siècle, surtout dans sa période républicaine, ne 1' attire pas autant.

Il en connaît, certes, les héros et les gloires, mais les « poètes romains » représentent déjà pour lui un degré inférieur de la poésie, l'art et le labeur plus que l'« inspiration ».

Dans l'histoire de Rome, Ron­ sard détache surtout une période, celle du règne d'Au­ guste, symbole de paix universelle, mais plus encore moment unique de l'harmonie parfaite entre le poète et le prince, entre Virgile et l'empereur.

Tel est d'ailleurs le modèle qu'il proposera à ses rois, sans que ceux-ci prennent jamais vraiment conscience du rôle que peut jouer un poète dans 1' histoire.

Le poète et son public A l'époque de Ronsard, et sous l'influence.

de l'huma­ nisme, le poète refuse qu'on le considère comme un arrangeur de mots, si doué soit-il.

De grandes ambitions l'animent, qui viennent, pour l'essentiel, de la tradition néo-platonicienne, renouvelée et réinterprétée par Mar­ sile Ficin, à Florence.

dans la seconde moitié du xv• siè­ cle.

Comme presque tous ses amis de la Pléiade, Ronsard pense que la poésie n'est rien si un dieu ne l'anime; que le poète n'est rien si un enthousiasme ou, pour reprendre le vocabulaire du temps, une «fureur>> divine ne l'a saisi.

Certains de ses contemporains font de cette «fureur» le gage d'une véritable connaissance et pour l'homme, être déchu, celui d'une réconciliation avec le divin.

Ronsard ne la voit pas exactement ainsi, car il est plus soucieux d'indiquer, en se servant de cette doctrine, les privilèges du poète que sa primauté dans l'ordre de la connaissance.

Aussi bien place-t-il au sommet de son «échelle mystique» non pas l'amour, comme le fai­ saient les néo-platoniciens, mais la poésÎ!e.

Ce poète auréolé de prestige métaphysique inaugure un nouveau dialogue avec le roi.

Il revendique d'abord le droit de le conseiller, comme par le passé.

Mais il possède aussi 1' arme du discours, écrit ou oral, capable de mobiliser les énergies de la cité en faveur du prince: c'est dire l'importance de la spéculation sur la rhétorique et sur son rôle dans la vie des cités.

Au poète enfin l'intuition de l'histoire et le sens des mythes collectifs dont une nation a besoin pour vivre et entreprendre, mythes que le poète doit savoir retrouver et, dans cer­ tains cas, forger.

Le roi devrait donc écouter ces poètes qui succèdent aux prêtres à ses côtés, car ils sont plus à même que ceux-ci de proférer les leçons de la prudence moderne.

Et, pour qu'ils puissent assumer leur rôle, il doit aussi les décharger de tout souci matériel, éloigner d'eux le spectre de la pauvreté : «Troque pour troc», écrit Ronsard.

Si le roi comprend ses devoirs, il trouvera le poète près de lui pour le célébrer, l'aider, le conseiller.

Sinon, il devra admettre que l'art du poète mérite, comme tout autre art, un salaire.

Le dialogue entre Ronsard et ses rois, souvent diffi­ cile, parfois rompu mais pour être bientôt repris, n'est qu'un aspect privilégié de sa relation à la société.

II a fallu au poète conquérir peu à peu son public, et souvent avec violence.

A coup sûr, dans un premier temps, la Cour lui fut hostile, préférant la musique «doux­ coulante >> des poètes marotiques à ces accents hautains et parfois rudes.

Ronsard sut la gagner, du moins en partie, lorsque, changeant de style, il écrivit les poèmes des Amours de Marie.

Mais elle lui échappa plus tard lorsque Desportes importa d'Italie un nouveau langage amoureux.

Il n'est pas même certain qu'elle ait goûté les divertissements que Ronsard imagina pour elle.

Les plus fervents admirateurs du poète se trouvaient, d'une part parmi ses amis écrivains, et d'autre part dans la noblesse de robe et parmi les. »

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