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WILLEMS Paul : sa vie et son oeuvre

Publié le 12/11/2018

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WILLEMS Paul (né en 1912). Écrivain belge d’expression française, il est né à Edegem, près d’Anvers. Il publie quatre romans, avant de se consacrer essentiellement au théâtre. D’une très grande originalité, indifférent aux modes, Willems crée, dès ses premiers livres, un univers marqué par l’omniprésence de la nature et par un jeu permanent de doubles et de reflets où se répondent le passé et le présent, le réel et le rêve, le vrai et le factice. Au gré de ces miroitements s’effectue une quête désespérée, mais inlassable, d’un paradis perdu ou imaginaire. Quête désespérée, parce que, aussi loin que puissent mener l’illusion et le rêve, quelles que soient les bribes du bonheur disparu qu’ils prétendent redécouvrir, la réalité finit toujours par reprendre ses droits, et avec elle la souffrance et la mort. Quête inlassable cependant, parce que sans elle l’existence deviendrait terrifiante. « Il faut faire semblant, semblant, semblant et ne jamais s’avouer la vérité », dit un personnage de la Ville à voile. « Car si on entrevoit ne fût-ce qu’un bout des choses telles qu’elles sont, telles qu’elles sont vraiment, alors tout... est insupportable ».

 

Occupant le devant de la scène, l’univers de féeries et de reflets fait souvent oublier le pessimisme foncier de cette œuvre. Ainsi, des quatre romans, seul Blessures (1945) décrit un monde marqué à l’évidence par la souffrance et par le mal. Les trois autres, Tout est réel ici (1941), l'Herbe qui tremble (1942) et la Chronique du cygne (1949), bien que teintés d’inquiétude, voire parfois de tristesse, et parsemés de brusques regards sans pitié sur la réalité de la condition humaine, n’en évoquent pas moins au premier abord un univers imprégné par la magie d’une nature purifiante et salvatrice. Ce n’est que par à-coups que le prosaïsme du réel s’y fait menaçant.

« ginaire.

Quête désespérée, parce que, aussi loin que puis­ sent mener l'illusion et le rêve, quelles que soient les bribes du bonheur disparu qu'ils prétendent redécouvrir, la réalité finit toujours par reprendre ses droits, et avec elle la souffrance et la mort.

Quête inlassable cependant, parce que sans elle l'existence deviendrait terrifiante.

« JI faut faire semblant, semblant, semblant et ne jamais s'avouer la vérité », dit un personnage de la Ville à voile.

«Car si on entrevoit ne fOt-ce qu'un bout des choses telles qu'elles sont, telles qu'elles sont vraiment, alors tout...

est insupportable».

Occupant le devant de la scène, l'univers de féeries et de reflets fait souvent oublier le pessimisme foncier de cette œuvre.

Ainsi, des quatre romans, seul Blessures (1945) décrit un monde marqué à l'évidence par la souf­ france et par le mal.

Les trois autres, Tout est réel ici (1941), l'Herbe qui tremble (1942) et la Chronique du cygne (1949), bien que teintés d'inquiétude, voire parfois de tristesse, et parsemés de brusques regards sans pitié sur la réalité de la condition humaine, n'en évoquent pas moins au premier abord un univers imprégné par la magie d'une nature purifiante et salvatrice.

Ce n'est que par à-coups que le prosaïsme du réel s'y fait menaçant.

Ainsi en va-t-il également des premières pièces, jus­ qu' à 1 'admirable Il pleut dans ma maison (1962, éd.

1963), qui fut jouée dans le monde entier.

Le Bon Vin de monsieur Nuche (1949, éd.

1954), Lamentable Julie (1949, inéd.), Peau d'ours (1951, éd.

1958), Air barbare et tendre (1952, inéd.), Off et la lune (1955, inéd.), la Plage aux anguilles (1959, éd.

J 964) plongent les specta­ teurs dans une atmosphère où le rêve et l'illusion, le factice et le reflet prennent une place prépondérante.

Un humour très caractéristique, typant les personnages à travers leur langage, y fait contrepoids à la sourde mélancolie que l'on y pressent.

Reprenant un thème déjà présent dans Tout est réel ici et dans la Chronique du cygne, Il pleut dans ma maison décrit la lutte qu'avec les armes de la fantaisie les habitants d'un domaine perdu au milieu de la nature, menacés d'avoir à sortir de ce monde qui s'est arrêté cinquante ans auparavant, mènent contre la civilisation mécanique et contraignante.

Mais précaire, fragile, cette existence protégée par le rêve et l'anachronisme, où les reflets peuvent tenir lieu et place des choses, ne semble plus subsister que par miracle.

Si la comédie musicale le Marché des petites heures ( 1964, inéd.) présente encore ce climat relativement heu­ reux, les dernières grandes pièces de Willems et sans doute ses chefs-d'œuvre, Warna ou le Poids de la neige (1962, éd.

1963), la Ville à voile (1967), les Miroirs d'Ostende (1974), Nuit avec ombres en couleurs (1983), mettent en scène un univers plus âpre, où les illusions se trouvent cette fois définitivement anéanties.

Voulant figer à jamais l'existence de tout ce qui l'entoure et continuer à vivre de l'illusion d'un amour depuis long­ temps révolu, la comtesse Warna ne peut qu'assister à la fissuration de son refuge, puis à sa débâcle.

Revenu dans l'Anvers de sa jeunesse et de ses rêves pour y retrouver son passé et le revivre, le riche Josty, dans la Ville à voile, finira par partir pour sa mort, sans avoir rien pu reconstituer de ce qu'il espérait.

Quant au vieux couple des Miroirs d'Ostende, c'est en vain qu'il s'efforce d'exorciser une existence ratée en projetant de vivre par procuration l'amour de deux jeunes gens.

Les personna­ ges de ces pièces sont beaucoup plus marqués par la cruauté de la vie que ceux des spectacles précédents.

Chacun y apparaît rivé à sa solitude; ils n'échangent plus que de faux dialogues, et les répliques se croisent sans se rencontrer, selon les lois d'une architecture subtile où tout progresse par jeux de miroirs et d'oppositions.

L'écriture de Willems est remarquable, tan� par sa concision et ses images que par sa créativité.

Ecrivain tlamand de langue française, écrivant dans une langue qui n'est pas celle du milieu qui l'entoure, il doit peut­ être à cette particularité de s'être forgé petit à petit un langage éminemment personnel, où abondent créations de mots et tours spécifiques.

Tout au long de ses livres et de ses pièces, mais aussi dans des conférences (Un arrière-pays, 1989) une réflexion sur le langage se découvre d'ailleurs, sans cesse reprise, allégorisée, mêlée aux autres thèmes dominants : qu'il s'agisse, par exemple, des « quatre sens que possède chaque mot à cause des quatre saisons et des quatre vents >> de la Chro­ nique du cygne, recherche symbolique d'un langage naturellement pluriel émanant d'un monde originaire; qu' i 1 s'agisse de la saveur et des connotations suggérées dans Peau d'ours par les «combinaisons admirables>> quand on parle pour ne rien dire ( « cataracte de chin­ chilla!»), ou qu'il s'agisse encore de tout le système d'analogies et de reflets que provoquent «les mots qui signifient autre chose que ce qu'ils signifient » dans Il pleut dans ma.

maison.

Travail sur le langage qui engen­ dre cette suggestion si particulière des choses, mêlant 1' objet et son reflet, le dehors et le dedans, suggestion du magique et du rêve, présente d'un bout à l'autre de J'œuvre, tels de brusques et constants «retournements de volets ouverts sur la lumière » (l'Herbe qui tremble).

[Voir aussi BELGIQUE.

Littérature d'expression française].

P.

ÉMOND BIBLIOGRAPHIE Numéro spécial de la revue Texryles, 5, 1988.. »

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