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L'extension du système productif

Publié le 05/11/2019

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4,7%. Depuis 1992, la part des entreprises d’Etat dans la production industrielle continue à diminuer, mais leurs investissements augmentent de 1,5%. Dans les années quatre-vingt, le gouvernement a transféré d’importantes ressources aux entreprises d’Etat par des réductions de leurs taxes sur le revenu. Ensuite, pour continuer à financer le secteur étatique, il a d’abord, au début des années 1990, lancé la vente des dettes publiques sous forme d’obligations, puis, dans la seconde moitié des années 1990, il a mobilisé les ressources bancaires. Les entreprises d’Etat ont obtenu très facilement des prêts à intérêt préférentiel. Plus récemment, le gouvernement, a créé et renforcé les marchés boursiers toujours avec l’objectif de financer ce secteur étatique. Les entreprises d’Etat profitent ainsi de ressources financières publiques inaccessibles aux entreprises dites « privées » et ont également plus facilement accès à d’autres types de ressources comme, par exemple, les centres de recherche publics et les universités28. Actuellement, la politique de promotion de géants industriels (zhuada fangxiao), qui est encore loin d’être un succès, repose essentiellement sur de très grandes entreprises publiques29.

27Les systèmes productifs que forment les entreprises d’Etat n’ont pas

utilisé leur accès privilégié aux ressources financières uniquement pour investir dans la production. Pendant les deux dernières décennies, une grande partie de leurs investissements a été réalisée dans le logement des employés, dans le financement de la protection sociale et des retraites, c’est-à-dire dans les bénéfices sociaux afin de maintenir la stabilité sociale.

• 30  Nous pensons à la multiplicité de centres de recherche et de développement technologiques. Cf. Gu S (...)

28Avec les réformes, les entreprises d’Etat ont connu des transformations importantes, mais leur nature n’a pas changé. Il n’est pas question de privatiser entièrement le secteur étatique, mais plutôt de céder certaines portions de la propriété pour assurer des sources fraîches de financement. La vente des actifs aux managers (Management Buy Out) n’a pas donné les résultats escomptés et fait l’objet de débats intenses eu égard aux possibilités d’enrichissement personnel qu’elle permet. Une partie très importante de ces systèmes productifs sont sur le déclin, et leur avenir dépend de la capacité du gouvernement à maintenir un flux financier vers ces entreprises. Les banques et la bourse ne semblent être là que pour canaliser les ressources financières vers les entreprises d’Etat. Malgré tout, les entreprises publiques ont encore accès à des ressources technologiques autrement plus importantes que les autres types d’entreprises30. Ainsi, pour une grande part, le défi pour les entreprises d’Etat est d’améliorer leurs capacités de production et d’innovation.

« ceux qui se focalisent sur la « privatisation », semblent à cet égard manquer au moins trois points : la mise à niveau des systèmes productifs les plus anciens ; le rôle de l’Etat comme promoteur et régulateur de l’activité économique ; l’efficience des systèmes productifs apparus avec la réforme.

Nous voulons aussi aborder –ne serait-ce que brièvement– les questions de la croissance et de la durabilité des structures productives.

Pour cela, nous replacerons les analyses empiriques des entreprises dans un cadre général, montrant que la croissance chinoise tient essentiellement à une économie de l’investissement (investment-driven economy) et que nous sommes encore loin d’une économie de la demande (demand -driven economy), ce qui explique un grand nombre des difficultés concrètes que rencontrent les entreprises.

La question est celle de la capacité de durer de cette nouvelle économie et de ces systèmes productifs.

Nous parlons de « systèmes productifs », c’est-à-dire de l’ensemble des machines et des hommes qui concourent à la production6.

Un système productif peut réunir plusieurs entreprises ; c’est même très souvent le cas dans les économies en développement où les entreprises sont sous-traitantes pour des donneurs d’ordre dont seul le nom apparaît sur le produit fini.

Parler d’entreprise, ce serait se focaliser sur l’organisation elle-même et notamment sur la forme de propriété.

Or tout laisse croire qu’en Chine, la question de la propriété est moins importante que celle du fonctionnement des unités de production7.

Ainsi, le concept de système productif met en avant les questions de mise en place, de développement de la production et de mise en relation des sites de production avec leurs usagers. Trois vagues d’investissements 4L’histoire de la croissance rapide chinoise se décompose en trois vagues successives d’investissements.

Ceux -ci, et la croissance qui en résulte, n’ont pas été le fruit d’une stratégie d’ensemble du gouvernement et des autorités économiques et financières ; ils sont plutôt la conséquence de la rencontre fortuite de facteurs parfaitement repérables. • 8 Cf Barry Naughton, Growing out of the Plan: Chinese Economic Reform, 1978-1993.

Cambrige, Cambrige (...) 5La première phase de croissance est le résultat de l’industrialisation des campagnes alors que la réforme est essentiellement orientée vers les campagnes. La possibilité de vendre et produire en dehors du système de planification d’état a entraîné une rapide croissance de la production agricole.

Au début des années 80, les gains issus de la vente de la production agricole ont été investis massivement dans les entreprises rurales, les « entreprises de bourgs et de villages » selon la nomenclature chinoise (xiangzhen qiye).

Cette croissance a duré 6 ans, de 1983 à 1988.

Ces investissements ont été une « divine surprise » pour les autorités et pour les plus habiles habitants des zones rurales, qui se sont trouvés dans des circonstances uniques : absence de concurrence et existence d’une demande importante jusque -là non satisfaite par l’économie planifiée.

Ce nouvel espace économique a permis le développement d’une « économie hors plan »8.

La demande de biens alimentaires, de vêtements et de biens de consommation durable des ménages a été importante.

Cette demande s’est adressée d’abord à l’industrie des biens de consommation puis s’est répercutée vers l’industrie lourde.

Les ressources agricoles furent ainsi le moteur de la croissance, et tout aussi classiquement cette période de croissance rapide a été suivie d’une période de surchauffe caractérisé par un surinvestissement.

A la fin des années 1980, la capacité d’achat des paysans se mettait à diminuer et le marché rural qui occupait 75% de la population n’a pas pu soutenir la croissance de la demande.

En même temps, toutes les familles urbaines avaient acquis les premiers biens de consommations durables, et la croissance de la demande en produits agricoles et vêtements s’est stabilisée.

Ainsi au début des années quatre-vingt-dix, la demande de consommation stabilisée ne pouvait plus être le moteur de la croissance économique.

Les investissements de la décennie précédente étaient orientés vers les industries légères, qui se caractérisent par un cycle court de produits et une rentabilité rapide.

Il s’ensuivit des surcapacités de production pour les entreprises de biens de consommation durable.

Le modèle n’était plus viable. • 9 Voir China Statistical Yearbook 2002. • 10 Les zones de développement ont été instituées dès le début années 1980, mais leur montée en puissan (...) 6Au début des années 1990, intervient une nouvelle source d’investissements, les investissements dits « étrangers » qui pour leur immense majorité provenaient de Taiwan, Hong Kong et de la Chine d’outre-mer.

En 1994, les investissements directs étrangers (IDE) représentaient 20% de l’investissement total.

En 2001, les investissements étrangers en provenance de Hong Kong, Macao et Taiwan continuaient à représenter 18% des investissements (158 milliards de yuans) et 47,5% des investissements étrangers dans la province du Guangdong (55 milliards de yuans)9.

Le gouvernement chinois a voulu profiter de cet afflux de capitaux et a établi de nombreuses zones de développement dans les régions côtières.

Partout fleurirent des « Hôtels des Chinois d’Outre -mer » pour les accueillir qui sont les moteurs de la croissance dans la première moitié de la décennie 9010. Certaines, comme Shenzhen, sont encore aujourd’hui des pôles importants d’attraction des investissements étrangers. 7Les investisseurs d'outre-mer sont attirés par des politiques favorables, une main d’œuvre et le marché chinois.

De plus, la langue, la proximité culturelle et l’habitude partagée de mélanger les relations politiques avec les affaires commerciales favorisèrent ces investissements.

Durant cette période, les deux tiers des investissements étrangers étaient le fait des petites et moyennes entreprises de Hong Kong et de Taiwan qui utilisaient des technologies intensives en main-d’œuvre, et dont la production repose sur l’assemblage de pièces importées puis réexportées vers le marché international.

Ce système reçoit la bénédiction des fonctionnaires locaux dotés grâce à cette manne d’un grand pouvoir de décision.

Ces entreprises ne concurrençaient pas directement les entreprises chinoises, que ce soient les entreprises de bourgs et de villages, les entreprises privées ou les entreprises d’Etat.

Par contre, elles contribuaient à améliorer la balance commerciale et à accroître l’emploi et les revenus.

En retour, la demande exprimée par cette main-d’œuvre faiblement rémunérée se portait sur des produits bas de gamme des entreprises des entreprises de bourgs et de villages, et des entreprises d’Etat.

Celles-ci profitèrent –et continuent à le faire– de la croissance de la demande interne.

Les entreprises de bourgs et de villages et les entreprises d’Etat produisant des marchandises à bien des égards déjà obsolètes ont donc survécu durant cette période (voir figure 1). • 11 Pas totalement, loin s’en faut.

Les coûts salariaux des autres pays d’Asie sont plus élevés qu’en C (...) • 12 Cf.

les travaux de Guilhem Fabre qui indique toutefois que la croissance des achats immobiliers, fa (...). »

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