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Gaston Bachelard, la Formation de l’esprit scientifique

Publié le 31/01/2020

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Gaston Bachelard, la Formation de l’esprit scientifique
La notion d'obstacle épistémologique peut être étudiée dans le développement historique de la pensée scientifique et dans la pratique de l’éducation. Dans l’un et l’autre cas, cette étude n’est pas commode. L’histoire, dans son principe, est en effet hostile à tout jugement normatif. Et cependant, il faut bien se placera un point de vue. normatif, si l’on veut juger de l’efficacité d’une pensée. Tout ce qu’on rencontre dans l’histoire de la pensée scientifique est bien loin de servir effectivement à l’évolution de cette pensée. Certaines connaissances même justes arrê-tént trop tôt des recherches utiles. L’épistémologue doit donc trier les documents recueillis par l’historien. Il doit les juger du point de vue de la raison et même du point de vue de la raison évoluée, car c’est seulement de nos jours que nous pouvons pleinement juger les erreurs du passé spirituel. ' .
. D’ailleurs, même dans les sciences expérimentales, c’est toujours l’interprétation . rationnelle qui fixe les faits à leur juste place. C’est sur l’axe expérience-raison et dans le sens de la rationalisation que se trouvent à la fois le risque et le succès. H n’y a que la raison qui dynamise la recherche, car c’est la seule qui suggère, au-delà de l’expérience commune (immédiate et spécieuse), l’expérience scientifique (indirecte et féconde). C’est donc l’effort de rationalité et de construction qui doit retenir l’épistémologue. On peut voir ici ce qui distingue le métier de l’épistémologue de celui de l’historien des sciences. L’historien des sciences doit prendre les idées comme des faits. L’épistémologue doit prendre les faits comme des idées, en les insérant dans un système de pensées. Un fait mal interprété par ■ une époque resté un fait pour l’historien. C’est, au gré de l’épistémologue, un obstacle, une contre-pensée. .
Vrin, collection « Bibliothèque des textes philosophiques », 1990, p. 17.

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COMMENTAIRE DE TEXTE épistémologique» (ligne 1).

Par« obstacle épistémologique», il faut entendre toute opinion (sur la nature ou sur les causes d'un phénomène) susceptible d'entraver le développement de la connaissance scientifique de ce phénomène.

Par exemple, la croyance en la colère des dieux est un obstacle épistémologique grossier, mais réel, à la compréhension physique de la foudre et du tonnerre.

Notons que les obstacles épistémologiques ne sont pas des entraves seulement pour les scientifiques« pro­ fessionnels », mais aussi pour les simples étudiants.

Eux aussi sont victimes de conceptions qui empêchent la bonne intelligence des explications scientifiques.

Bachelard fait allusion à ces entraves intellectuelles lorsqu'il évoque la « pratique de l'éducation » (ligne 2).

Les professeurs ont constamment à vaincre ce type de résistances chez leurs élèves.

Or, l'étude des obstacles épistémologiques se heurte, selon Bachelard, à d'importantes difficultés.

La plus importante d'entre elles tient aux caractéristiques de l'histoire des sciences (lignes 2-3).

lhistoire est une discipline par essence des­ criptive.

Elle s'efforce de rapporter avec le plus de précision possible ce qui a été.

Elle doit, sous peine de perdre toute crédibilité, renoncer à porter des jugements de valeur sur son objet.

Elle ne se réfère donc pas à des normes pour apprécier ce qu'elle examine.

En ce sens, elle est« hostile à tout jugement normatif» (ligne 4).

L'.épistémologie se différencie d'elle par le recours à des critères de jugement.

Elle a pour but d'évaluer la fécondité scientifique d'une thèse, c'est-à-dire sa capa­ cité à produire des énoncés vrais.

C'est ce que Bachelard nomme son « efficacité » (ligne 5).

En somme, l'histoire des sciences doit ignorer la différence entre les obstacles épistémologiques et les hypothèses qui entraînent un progrès des connaissances.

Elle analyse tous les éléments des théories passées sans exception, alors que l'épistémologie met en évidence ce qui favorise les découvertes ultérieures et condamne ce qui les gène.

Elle est normative justement parce qu'elle accepte la notion d'obstacle épistémologique.

Elle juge l'histoire à la lumière des derniers déve­ loppements de la scien~e pour distinguer les obstacles des adjuvants.

Le paradoxe est que les obstacles ne sont pas toujours là où on les attend.

Parfois une« connaissance juste» ou plutôt que l'on redécouvre comme telle bien après (ligne 7-8) met un point d'arrêt à la recherche.

Elle agit comme un obstacle malgré sa vérité.

Par exemple, la théorie épicurienne des atomes semble préfigurer les connaissances contemporaines sur la composition de la matière.

Pourtant, aux yeux de Bachelard, les Épicuriens entravent les recherches sur l'atome en restant prisonniers de schèmes purement imaginatifs et sensoriels (ils croient par exemple, à des atomes crochus ou lisses) qui empêchent l'étude rationnelle et abstraite des atomes.

La rationalité sert de critère de jugement au regard rétrospectif que porte l'épistémologue sur le passé scientifique (ligne 11).

C'est en cela qu'elle ressemble à la science elle-même.

Dans le second paragraphe du texte, Bachelard signale en effet que la logique de la démarche scientifique réclame une épistémologie rationaliste et. »

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