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Grand oral du bac : L'éthique

Publié le 14/11/2018

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Sartre : la liberté et l'engagement

 

À l'inverse de Schopenhauer, Sartre (1905-1980) invite à s'engager dans le monde en vue de le transformer. L'homme est un être condamné à être libre et il est responsable du sens qu'il donne à sa vie. Conformément à l'assertion qui fonde l'existentialisme, selon laquelle l'existence précède l'essence, l'homme est avant tout un homme qui se construit: ce n'est qu'au terme de son existence que l’on peut définir ce qu'il est. Il n'existe aucune définition a priori de la nature humaine : l'homme est ce qu'il fait, dans le monde et face à une situation donnée. Et même si ce monde est hostile et cause de souffrances, l'homme doit l'affronter tel qu'il est, et s’y engager pour le bouleverser et le transformer. Il doit adopter une attitude résolument active pour le rendre meilleur. Cette éthique révolutionnaire suppose un engagement total de chaque homme dans l'activité sociale et politique. De cette manière, l'homme donne sens à son existence et devient vertueux. Il est un être libre, responsable de ses actes qui, en s'engageant, engage l'humanité tout entière.

LA PHILOSOPHIE DU BONHEUR

 

L'éthique est la discipline qui se propose d'étudier les fins de l'action humaine. Présente à l'état de prémices chez les présocratiques, elle éclôt à proprement parler dans les dialogues platoniciens, qui la consacrent comme l’une des branches les plus importantes de la philosophie. Souvent considérée comme la première des sciences sociales, l'éthique ne se contente pas de définir les notions de bien et de mal de manière abstraite; elle s'applique à déterminer la façon dont les individus se situent par rapport à ces concepts, ainsi qu'à décrire les moyens qu'ils mettent en œuvre pour atteindre «leur» bien, que celui-ci soit nommé ataraxie, béatitude, paix de l'âme ou, plus simplement, bonheur.

LES FONDEMENTS DE L'ÉTHIQUE

Une philosophie pratique

 

La racine grecque du mot éthique, à savoir « éthos », se réfère à la coutume, non pas au sens de ce que dicte la tradition ou l'environnement, mais simplement comme manière de conduire son existence. Par nature donc éminemment pratique, l'éthique est d'autant plus ancrée dans le concret qu'elle apparaît en même temps que la philosophie elle-même, soit au Vesiècle avant notre ère, une époque où cette science émergente est tout entière tournée vers le politique. L'éthique, partant de l'individu, s'inscrit alors tout naturellement dans une pensée plus globale sur la meilleure manière de conduire la cité. Cette préoccupation, lier le bien particulier au bien commun, traverse l’histoire de cette discipline et ce, quelles que soient les définitions du bien, empirique ou transcendant, résultat ou point de mire de l'action, et les moyens supposés de l'atteindre.

 

Éthique et morale

 

Le langage courant opère une distinction entre l'éthique et la morale. On oppose même volontiers la première, placée dans le champ de la raison et du libre arbitre, à la seconde, comprise comme un ensemble de règles imposées de l'extérieur. Philosophiquement parlant, cette dichotomie n'est pas vraiment valide : le terme de « morale » peut se substituer à celui d'«éthique», sans que pour autant la réflexion elle-même ne change de nature.

Car de quelque manière qu'on la nomme, la discipline qui nous intéresse ne peut faire l'économie de se prononcer sur les codes qui régissent la société, sur ce qui est tenu pour bien ou pour mal par le plus grand nombre, autrement dit, sur les «mœurs». Pour autant, son but n'est pas de les édicter. Conformément au dessein général de la philosophie, retour réflexif et critique de la pensée sur elle-même, l'éthique, ou philosophie morale, se fixe pour objectif de connaître les motifs de l’action humaine, de les éclairer. Pour cette raison, elle s'est souvent opposée à l'ensemble de prescriptions et de codes sociaux ou religieux traditionnellement rassemblés sous le terme de «morale» en place.

 

Platon et le souverain Bien

 

L'histoire de la philosophie, les dialogues de Platon (427-347 av.J.-C.), eux-mêmes reflets de l'enseignement de son maître à penser, Socrate (470-399 av. J.-C.), posent les fondements de la réflexion éthique. Avant cela, les présocratiques, essentiellement auteurs de théories globales du monde, cosmogonies ou théogonies, avaient parfois évoqué la question du bien et du mal, mais rares étaient ceux qui, à l'instar de Démocrite (460-370 av. J.-C.), avaient proposé une morale à proprement parler.

 

La théorie platonicienne du souverain Bien se construit de manière fragmentaire à travers des ouvrages tels que le Corgias, le Phédon ou le Phèdre, et expose pleinement sa visée dans La République. Cette pensée se structure autour de trois grands axes. Tout d'abord, conformément à sa métaphysique, qui veut que le domaine du visible, de l'empirique, ne soit que le reflet trompeur du monde intelligible -la sphère des idées-, Platon définit le Bien comme un absolu transcendant Ce Bien, qui se confond avec le Vrai, le Juste ou le Beau, n'a pas d'existence matérielle, ni par conséquent de rapport avec les plaisirs concrets, pauvres et éphémères que les hommes peuvent espérer y trouver. Mais l'idée de Bien existe chez l'homme sous la forme d’une

« un premier renversement.

Selon K11nt {1724-1804), seule l'intention peut être définie comme absolument bonne.

La morale ne saurait en aucun cas résider dans les actions, dont aucune n'est intrinsèquement bonne, puisque tout ce que nous possédons et produisons, y compris dans la sphère de la pensée, peut être utilisé à mauvais escient ou du moins, à terme, se révéler mauvais.

Le bien est donc le domaine de !'•intention pure>�.

De la même manière, la loi morale, que chacun est libre de suivre ou non, est une détermination a priori de notre esprit.

Elle n'a pas de modèle empirique et précède toutes ses représentations sensibles.

Cette loi se présente à la raison sous la forme d'une exigence inconditionnelle, un devoir, le célèbre «impératif catégorique, kantien, dont le sujet pensant doit s'assurer qu'il souhaiterait que la maxime qui le gouverne soit valable pour tous, à la manière d'une loi universelle.

l'impératif catégorique instaure ainsi l'autonomie d'une volonté humaine libre, puisque génératrice de sa propre loi morale.

LA CONDITION HUMAINE LEs STOICIENS : UNE tTIIIQUE catégorie.

À l'inverse, la fortune, les honneurs ou la mort, sur lesquels il n'a pas de prise, doivent le laisser indifféren� car tenter d'agir sur eux provoque des souffrances inutiles.

l'homme doit donc admettre sa finitude e� pour vivre bien, opérer des choix conformes à sa nature universelle.

Souvent à tort jugé pessimiste, le stoïcisme invite plutôt à une résignation positive: il s'agit pour l'homme en quête de bonheur de connaître et d'accepter sa condition.

SPINOZA: L'HARMONIE n L'htRNirt l'éthique spinoziste a pour point de départ la place de l'homme par rapport au cosmos et à son ordre immuable.

D'après Splnoz11 (1632- 1677), le monde est constitué d'une seule substance infinie, Dieu ou la nature -c'est ce qu'on appelle une conception moniste du monde-, et c'est la connaissance de cette substance qui est le salut de l'homme.

Dans son tthique, le philosophe décrit les trois étapes du chemin intellectuel qui conduit à la sagesse et à la vertu.

Dans un premier temps, l'homme doit acquérir l'idée de sa nature propre, celle d'un être fini et singulier.

Il se perçoit ensuite dans cette universelle nécessité qu'est la nature ou Dieu.

l'ultime connaissance ==:,=�=---.,..,.---:-,.---l intervient quand il parvient à transfigurer son individualité et non le plaisir, comme principe du bonheur.

l'homme vertueux est celui qui fait usage de sa raison pour ._.

_ __ __ ....., distinguer, d'une part, ce qui dépend de lui -et peut donc faire l'objet d'un jugement moral-e� d'autre part, ce qui échappe à son contrôle- et pour cette raison n'est ni bon ni mauvais.

Les actions, les pensées ou encore les désirs, appartiennent à la première et sa finitude pour se concevoir comme partie de cette substance éternelle et infinie.

Celui qui parvient à s'envisager sous cette perspective est heureux, car il sait que ses souffrances et ses peines sont relatives: elles ne sont que les résultats du cours universel de la nature.

La vertu consiste alors à favoriser la tendance fondamentale du sujet à persévérer dans son être.

SCHOPENHAUER: L'tTIIIQUE DU RENONCEMENT Schopenh11uer {1788-1860) élabore son éthique en opposition à la morale rationnelle kantienne.

Pour lui, le monde est gouverné de manière destructrice et incohérente par une force aveugle, absurde, sans raison ni fin: la volonté.

Cette volonté est le mal inhérent à l'existence et la cause de toutes les souffrances humaines: l'homme conscient de l'absurdité de sa vie est un être nécessairement malheureux.

Pour échapper à cette condition et atteindre l'ataraxie, l'homme doit nier tout désir, tout vouloir-vivre, c'est-à-dire se soustraire à tout rapport aux choses.

En se libérant de ce principe destructeur qu'est la volonté, l'homme devient sage et a pitié de ses semblables.

Ce sentiment est précisément celui sur lequel repose la moralité: c'est la pitié, et non les commandements de la raison pratique kantienne, qui incite l'homme à agir moralement.

Philosophe de l'absurde, Schopenhauer propose ainsi une éthique pessimiste, très inspirée de la pensée hindoue: libéré de l'action nocive de la volonté et de la tyrannie de ses désirs, l'homme vertueux est un ascète qui, telle sage hindou, accède enfin à la quiétude.

SAIITRE: LA UBUrt n L'ENGAGEMENT l'inverse de Schopenhauer, Sllrtre 1980) invite à s'engager dans le monde en vue de le transformer.

l'homme est un être condamné à être libre et il est responsable du sens qu'il donne à sa vie.

Conformément à l'assertion qui fonde l'existentialisme, selon laquelle l'existence précède l'essence, l'homme est avant tout un homme qui se construit: ce n'est qu'au terme de son existence que l'on peut définir ce qu'il est.

Il n'existe aucune définition a priori de la nature humaine: l'homme est ce qu'il lai� dans le monde et face à une situation donnée.

Et même si ce monde est hostile et cause de souffrances, l'homme doit l'affronter tel qu'il e� et s'y engager pour le bouleverser et le transformer.

Il doit adopter une attitude résolument active pour le rendre meilleur.

Cette éthique révolutionnaire suppose un engagement total de chaque homme dans l'activité sociale et politique.

De cette manière, l'homme donne sens à son existence et devient vertueux.

Il est un être libre, responsable de ses actes qui, en s'engageant, engage l'humanité tout entière.

LES CRITIQUES DE L'ÉTHIQUE LE SCEPTICISME À l'instar de l'épicurisme et du stoïcisme, le scepticisme admet que l'homme peut atteindre le bonheur ou l'ataraxie.

Toutefois, il s'oppose à ces éthiques en refusant l'Idée d'un quelconque principe directeur.

Pour le sceptique, toutes les propositions qu'offre la raison sont équivalentes: il n'y a pas lieu de préférer l'une à l'autre.

Le plaisir épicurien et la vertu stoïcienne ne correspondent à rien.

Ce sont des positions dogmatiques, des affirmations purement arbitraires de la raison, que l'homme doit éviter.

En refusant ces illusions du dogmatisme et ces faux choix de la raison, il adopte alors une attitude d'Indifférence par rapport à toute chose et à tout problème, et se libère ainsi de toute souffrance.

C'est ce qu'expose Sextus Empiricus (11'-111' siècle) dans ses Hypotyposes pyrrhoniennes.

Selon lui, toutes les théories classiques du bonheur, du bien et du mal, ne sont que des théories arbitraires et vides de sens.

Est sage l'homme qui atteint le bonheur dans une perspective d'«époché>�, c'est-à-dire en refusant les certitudes de la raison comme celles de la sensation.

Le scepticisme a marqué l'histoire de la philosophie: Kant et Descartes, notammen� ont construit leur propre éthique en réponse à cette doctrine.

LA CRmQUE OBIECTIVE DE HEGEL Dans Les Prindpes de la philosophie du droit, ,., (1770-1831) critique la morale, et plus particulièrement la morale du devoir kantienne, qu'il définit comme purement formelle.

Selon lui, la morale de la raison pratique pêche par son subjectivisme: trouvant son fondement dans la raison du sujet pensan� elle échoue à saisir les exigences d'ordre supérieur, c'est-à-dire universelles et nécessaires.

Elle débouche ainsi sur une éthique relativiste, sans contenu véritable.

Pour Hegel, la •vie éthique>� est ancrée dans le social, le politique et l'économique.

À la subjectivité de la loi morale du sujet kantien, soi-disant universelle et rationnelle, il oppose la rationalité objective de la morale d'État.

l'obéissance à la loi est une manifestation objective, et non plus subjective, de l'esprit Seule l'éthique de la vie sociale incarne de manière implicite et collective la morale véritable.

l'esprit objectif est cette transmutation du monde par l'esprit même, qui donne naissance à toutes les institutions juridiques, morales ou politiques.

LA nmQuE MARXIm M11rx (1818-1883) et Engels (182o- 1895) ont vivement critiqué la morale en dénonçant son caractère répressif et sa fin supposée: maintenir l'ordre dans une société bourgeoise et un système capitaliste.

Ils dénoncent l'hypocrisie morale d'un tel système, qui méprise les masses et le prolétariat sous couvert d'une morale bourgeoise mensongère.

Selon eux, la bonne conscience bourgeoise n'a qu'un but: masquer la réalité de l'exploitation de l'homme par l'homme.

Elle n'est que l'un des instruments qui permet à la bourgeoisie de faire perdurer sa domination sur les pauvres, d'asseoir la légitimité d'une société purement capitaliste, tout en se donnant une bonne image d'elle-même.

À cette morale hypocrite, Marx et Engels opposent une morale révolutionnaire prête à se mettre au service des masses, vertueuse et exigeante dans l'abnégation.

Cette morale révolutionnaire se veut essentiellement égalitaire et non répressive.

l'éthique socialiste de Marx et Engels préfigure donc, dans une certaine mesure, l'existentialisme de Sartre: l'engagement politique et social doit permettre l'avènement d'un monde nouveau.

LA nmQUE LOGIQUE DE WmGENmiN Dans son Tradotus Jogico-phi/osophicus, le philosophe et logicien Wittgenstein (1889-1951) élabore un système selon lequel toute proposition logique est une tautologie, c'est-à-dire qu'elle reste vraie en vertu de sa forme seule, quelle que soit la valeur des vérités qui la composen� et ne renvoie à rien d'autre qu'à elle-même.

Or l'éthique est un système de propositions qui s'apparente à celui de la logique.

Posant leurs concepts -le Beau, le Bien- pour elles-mêmes, les doctrines éthiques sont purement autodésignatives.

Elles ne parlent que d'elles-mêmes et sont donc vides de sens.

Cela ne revient pas à dire que l'éthique profère des non-sens qu'elle ne «dit» rien, puisque «dire)• suppose de «désigner des objets empiriques extérieurs"· Or, le phi losophe est formel: «Ce que l'on ne peut pas dire, il faut le taire .

., En mettant en lumière la nature logique de la réflexion éthique, Wittgenstein entend donc démontrer son impossibilité même.

L1THIQUE AWOUID'HUI Contrairement aux autres branches de la philosophie traditionnelle, constituées en sciences à part entière ou progressivement tombées en désuétude, l'éthique a conservé sa spécificité.

Mieux, l'accélération du progrès technique, ces cinquante dernières années, l'a remise sur le devant de la scène.

Aujourd'hui, l'éthique est convoquée, par l'intermédiaire des fameux •comités d'éthique•, dans des domaines aussi divers et complexes que la médecine ou l'économie.

Les débats que suscitent l'euthanasie, le clonage humain, le développement durable ou le commerce équitable témoigne� si besoin est.

de la nécessité impérieuse pour l'homme de réfléchir sur les moyens et les fins de son activité.. »

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