Devoir de Philosophie

Introduction Ce texte de Bergson, extrait du chapitre IV de L’Evolution créatrice, a pour objet d’exposer la racine d’une illusion trop répandue en ce qui concerne notre rapport au réel.

Publié le 07/10/2019

Extrait du document

bergson
Introduction Ce texte de Bergson, extrait du chapitre IV de L’Evolution créatrice, a pour objet d’exposer la racine d’une illusion trop répandue en ce qui concerne notre rapport au réel. On peut d’ores et déjà préciser que cette genèse, en même temps qu’elle sera la déconstruction de cette illusion, en sera le redressement. Ainsi la question centrale du texte, qui revient à se demander pourquoi les philosophes se trompent inéluctablement quand ils spéculent sur le réel, revient aussi à nous imposer la véritable nature du réel (et, en conséquence, la manière vraie de le saisir " tel qu’il est "). Le texte est donc de nature à la fois ontologique et épistémologique. Bergson veut ainsi montrer qu’il est possible de connaître l’absolu, si l’on se débarrasse toutefois de l’illusion dénoncée, puisqu’alors, on aura reconnu comment le réel est connaissable. Afin de bien dégager l’argumentation du texte, nous l’étudierons en trois parties. En effet, nous avons distingué, respectivement, la position d’une thèse (que l’on dira double), lignes 1 à 8 ; de là, Bergson nous décrira la situation " courante " et opposée à cette thèse (lignes 8 à 17) ; enfin, nous aurons (lignes 18 à 27) la description génétique et la définition de l’illusion des philosophes (qui découlera de la description de notre mécanisme usuel de connaissance). Première partie : la thèse : quelle est la nature de la réalité ? Et comment la connaissons-nous ? Le texte commence par l’exposé de la thèse de Bergson, qui peut être dite double (voire triple). En effet, elle se rapporte à deux questions : 1) quelle est la nature de la réalité ? ; 2) comment pouvons-nous la saisir (si c’est possible) ? En fait, Bergson commence par nous dire ce qui existe, ou ce qu’on doit admettre comme réel. Toutefois, il nous faut préciser que la question ne sera pas, dans ce texte, celle des constituants ultimes de la réalité, mais, comme nous l’avons dit, celle de la nature de la réalité. Ce qui revient aussi à tenir pour accordée l’existence de ce qui sera admis ici comme réel. Bergson pose donc (ligne 1) l’existence de deux types de réalité. On peut dire que, selon lui, la réalité est double, puisque ce à quoi réfère le mot " réalité " est aussi bien la matière que l’esprit. Il convient de préciser que Bergson ne dit pas que la réalité réfère à la matière et l’esprit ; il relie en effet ces deux réalités par un " ou ". Ce " ou ", selon nous, serait à rapprocher du " ou " logique, qui peut être à la fois exclusif ou inclusif. C’est-à-dire que matière et esprit sont irréductibles entre eux, mais qu’ils sont chacun (ou tous les deux) une partie de la réalité. Ils sont donc différents mais en même temps, de même nature. Toutefois, la thèse de Bergson est loin d’être un dualisme. En effet, il ne dit jamais que la nature de la réalité est la matière et/ ou l’esprit : pour cela, il aurait fallu dire que la réalité est " matière ou esprit ". Pour Bergson, ce qui fait la nature de la réalité, c’est le qualificatif de " perpétuel devenir "(ligne 1). Ce qualificatif, qui connote la manière d’être du réel, est donc ce qui fait du réel, qu’il est réel. D’où, finalement, une thèse métaphysique ou ontologique, qui revient à dire que tout ce qui est, est de même nature (donc, si on tient vraiment à ranger la thèse de Bergson sous un nom en –isme, ce qu’il ne voudrait pas, il faudrait choisir le mot de " monisme "). Ainsi, si différence il y a entre matière et esprit, elle sera de degré. On peut dire que Bergson rompt ici radicalement avec la philosophie traditionnelle. En effet, pour lui, ce qui fait de l’être qu’il est être, c’est qu’il est en devenir perpétuel. Cela choquera bon nombres d’esprits (mais nous verrons justement pourquoi !) puisque, traditionnellement, le devenir, connotant le domaine des apparences (trompeuses) s’oppose au stable, qui est, lui, la véritable réalité. Mais on peut se demander comment Bergson a pu être amené à faire une telle découverte. Car, comme il le dit, la réalité " (nous) est apparue … " (ligne 1) comme étant telle. Le terme d’apparaître connote quelque chose de l’ordre de l’expérience, et de la vision. Ce qui explique pourquoi Bergson ne nous dit pas que la réalité est un perpétuel devenir, mais qu’elle lui est apparue " comme un perpétuel devenir ". Il emploie une métaphore, et ce, afin de nous suggérer ce qu’est la structure ultime de la réalité. C’est-à-dire que la vérité de la thèse de Bergson ne se démontre pas. Elle est de l’ordre de l’expérience, et non de la déduction : elle s’éprouve, elle se vit. Bergson innove donc, dans ce texte, non seulement par le contenu de sa thèse, mais aussi par la méthode : sa métaphysique est une métaphysique de l’expérience. Ce qui implique qu’elle est possible (et que l’absolu sera connaissable !). Mais qu’est-ce que cela signifie, que la réalité soit " comme " un perpétuel devenir ? Il nous faut, pour y répondre, regarder les lignes 2 et 3, qui sont une explicitation de la thèse de Bergson. En quelque sorte, nous avons là une description de la réalité. La réalité est comme un perpétuel devenir, c’est-à-dire, qu’ " elle se fait ou elle se défait, mais elle n’est jamais quelque chose de fait ". Le " ou " nous semble ici connoter l’alternative : ou bien la réalité se fait (c...
bergson

« Mais qu’est -ce que cela signifie, que la réalité soit " comme " un perpétuel devenir ? Il nous faut, pour y répondre, regarder les lignes 2 et 3, qui sont une explicitation de la thèse de Bergson.

En quelque sorte, nous av ons là une description de la réalité.

La réalité est comme un perpétuel devenir, c’est -à-dire, qu’ " elle se fait ou elle se défait, mais elle n’est jamais quelque chose de fait ".

Le " ou " nous semble ici connoter l’alternative : ou bien la réalité se fait (c’est -à-dire, est en train de se faire, en voie de formation), ou bien elle se défait (c’est -à-dire, adopte un mouvement inverse), mais, en tout cas, elle n’est jamais quelque chose d’achevé, de déjà formé (d’ailleurs, elle n’est pas une chose, un ceci ou un cela, mais un flux). Nous avons là une conception résolument dynamique du réel : la réalité est toujours " se faisant ", elle est sans cesse en train de changer, et la stabilité serait pour elle une perte de réalité.

Le réel a, chez Bergson, horreur de l’immobile… La réalité est mouvante et peut adopter des mouvements inverses, différents ; ces mouvements sont des sortes de changements de direction que prendrait la réalité.

Mais ce que semble ici nous suggérer Bergson, c’est que le seul " inerte " qu e l’on peut prêter à la réalité, sera une sorte de " détente ", c’est -à-dire que ce sera toujours du mobile.

Car une chose est sûre : changer, ou ne pas être, telle serait finalement la thèse de Bergson. Et nous voilà encore menés à dire que Bergson invers e le rapport être -devenir de la philo classique, car ce n’est plus, on le voit, le devenir qui est une diminution d’être et appelle donc un jugement de valeur négatif : au contraire, c’est ce que les philosophes appellent " être " qui se voit dépourvu de t oute réalité.

Pour Bergson, le stable s’oppose à l’être véritable.

La réalité est mouvante, ou elle n’est pas réelle, tel sera le présupposé latent du texte de Bergson.

Ainsi devons -nous préciser que si Bergson ne dit pas que la réalité est en perpétuel de venir, c’est pour ne pas exprimer le contraire de sa thèse (car cela reviendrait à " chosifier " la réalité).

Nous devrons nous garder de voir en Bergson un disciple d’:éraclite, pour qui cette formule signifiait que ce qui nous apparaît est en perpétuel écoulement et que, par conséquent, il fallait chercher l’être, le réel, ailleurs (mais nous y reviendrons).

Bergson n’a pas pour préoccupation de fonder le devenir ; au contraire, il voudra nous montrer que le devenir est l’être profond des choses. Reste à voir, justement, comment s’appréhende la réalité.

L’absolu est -il, vraiment, connaissable ? Revenons à ce que dit Bergson au début du texte : il dit que la réalité lui est " apparue ".

Le choix du mot laisse entendre, déjà, que ce n’est pas par un acte de connaissance au sens habituel du terme que nous pouvons la " connaître " : comme nous l’avons vu, elle s’expérimente. Bergson va donc maintenant nous exposer (lignes 3 à 8) comment il faut s’y prendre, pour voir l’absolu.

Ou, en d’autres termes, comment il est possible d’appréhender que la réalité est véritablement telle qu’il la soutient.

Et, comme il y a deux faces de la réalité, il nous montre comment on saisit, d’un côté, que l’esprit est bien se faisant, et de l’autre, que la matière l’est aussi.

Pour saisir, donc, que l’esprit est bien se faisant, il faut avoir recours à l’intuition (ligne 3).

Celle -ci consiste en une purification, car elle est, comme nous le montre Bergson, un dévoilement.

En effet, il faut écarter " le voile qui s’interpose entre not re conscience et nous ".

Ce qui présuppose bien entendu que la réalité de l’esprit est voilée.

Mais, plus encore, cela présuppose que cet absolu qui est l’objet de notre recherche est en nous (et non " d’ailleurs "), mais qu’il est, donc, caché, par des mé diations " interposées " entre notre esprit et nous -mêmes. On notera ici l’importance du temps employé, à savoir, le présent, qui connote l’effectif.

En effet, on peut dire que la présentation de l’intuition que nous fait Bergson (" telle est l’intuition … ") se ramène à nous dire ceci : que la réalité soit telle que je vous le dis, c’est ce que chacun de nous peut expérimenter en lui -même (c’est sans doute ainsi qu’elle sera apparue à Bergson lui -même, qui nous ferait part ici de son expérience originelle… ).

L’expérience (immédiate, comme nous le verrons) de la conscience fait donc figure de donnée indubitable (quant à la nature de la réalité) et témoigne de ce que l’absolu est connaissable.

En effet, on peut comprendre ici (lignes 3 à 5) que, comme la pris e de possession de l’esprit par soi -même est possible, c’est que l’intuition existe ; c’est -à-dire, que non seulement l’absolu est en nous, mais encore, il est saisissable (du dedans, et de façon immédiate, puisqu’il faut alors annuler les médiations).

La métaphysique reprend ses droits, et n’a plus besoin de s’envoler vers d’autres cieux… Mais il nous reste à voir la matière " se faisant " (il est nécessaire qu’elle le soit puisque non seulement elle est une partie de la réalité, mais encore, ce qui fait d ’elle qu’elle est réelle, c’est justement qu’elle est se faisant).

Cependant, nous allons sûrement ici rencontrer un problème, car la phrase est au conditionnel.

L’emploi du conditionnel implique que l’on a, cette fois, quelque chose de non effectif, c’est un idéal, quelque chose qu’il est difficile, voire impossible, d’accomplir ; c’est ce que l’on peut appeler un passage à la limite.

Mais voyons donc comment il faudrait. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles