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Chrétien de Troyes par Reto R.

Publié le 05/04/2015

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Chrétien de Troyes par Reto R. Bezzola Professeur d'Université de Zurich Au XIXe siècle, Chrétien de Troyes sort lentement de l'ombre dans laquelle il était plongé depuis la fin du Moyen Âge. Mais sa connaissance reste bornée au petit cercle des médiévistes, surtout à son éditeur enthousiaste, Wendelin Foerster, qui voit en lui un romancier à thèse, à Gaston Paris qui le considère comme un conteur aimable, élégant et un peu maniéré. Grâce à la grande monographie de Gustave Cohen et aux différentes adaptations des romans de Chrétien en français moderne, le public cultivé de nos jours fait la découverte d'un romancier de tout premier plan. Edmond Jaloux, parlant de " réalisme magique " à propos des oeuvres les plus représentatives de l'entre-deux-guerres 1919-1939, remarque que " l'équilibre des divers plans, ou tremplins, de l'oeuvre d'art, jouant à la fois sur l'immédiat et sur le médiat, a été rarement aussi bien obtenu que par ce chanteur de la Champagne ". Le sourire charmant des romans de Chrétien cache le même mystère que le sourire de l'ange de Reims et, comme dans toute oeuvre du Moyen Âge, toute aventure se double chez Chrétien d'une signification profonde, qui est l'expression symbolique de ce que le poète considère comme l'essence des choses. Tout roman de Chrétien, comme toute véritable oeuvre d'art, est une grande aventure du poète lui-même. Il en est ainsi d'Erec, de Cligès, de Lancelot ou le Chevalier à la charrette, de Guillaume d'Angleterre, d'Yvain ou le Chevalier au lion, de Perceval ou le Conte du Graal, qui nous sont conservés et qui s'échelonnent de 1155 à 1190 environ : il en était sans doute ainsi du Tristan et des contes ovidiens perdus, avec lesquels Chrétien avait débuté sa carrière dans les cours de Marie de Champagne, de Philippe de Flandre et probablement de Henri II d'Angleterre et de sa célèbre épouse, Aliénor d'Aquitaine. Depuis le XXe siècle, on s'est aperçu que non seulement la psychologie de Chrétien, mais aussi la composition de ses romans sont d'un raffinement inouï, ou plutôt qu'elles sont le résultat même de " l'aventure du poète " à la recherche du sens de la vie. Chrétien, sur les traces de l'historien génial et fantaisiste qu'était Geoffroi de Montmouth dans son Historia regum Britannia, et de son traducteur français, maître Wace, a pour ainsi dire créé de plain-pied tout ce fameux " cycle breton ", qui n'a souvent de breton et de celtique que les noms des héros et des lieux où l'action se déroule. Geoffroi de Montmouth avait inventé la fameuse cour du roi Arthur pour revendiquer aux rois normano-angevins d'Angleterre un droit moral de succession, d'un côté contre les Anglo-Saxons, de l'autre, contre les rois de France qui se paraient de la légende de Charlemagne, et les empereurs d'Allemagne qui se proclamaient successeurs de Rome. Chrétien se sert de cette cour d'Arthur et de la " table ronde " de ses chevaliers, que nous rencontrons pour la première fois chez Wace, pour créer nouveau type de communauté humaine. Ce n'est pas la communauté impériale, chrétienne et féodale qui apparaît dans les chansons de geste autour de la majestueuse figure de Charlemagne. La cour d'Arthur est uniquemen...

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