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ABSOUTE, substantif féminin.

Publié le 28/09/2015

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ABSOUTE, substantif féminin.  

LITURGIE.  

1. Anciennement.  Absolution publique et solennelle qui, dans l'Église romaine, se donnait autrefois au peuple le Jeudi-Saint (ou la veille du Jeudi-Saint). 

2.  Cérémonie faite notamment de prières terminant l'office des morts et se faisant autour du cercueil ou du catafalque; exceptionnellement, la même cérémonie en dehors de l'office des morts (exemple 1) : 

Ø 1.... devant nous s'avançait, couverte d'un simple drap mortuaire, la bière, objet de la vénération universelle; la garde nationale d'un côté, la ligne de l'autre, formaient la haie, derrière laquelle une foule se tenait immobile, silencieuse, découverte; (...) je n'ai pas entendu prononcer une parole par cette multitude durant tout le trajet jusqu'à l'église : nous y sommes arrivés précédés d'une musique douce et grave, puis on a célébré l'absoute.

ANDRÉ-MARIE AMPÈRE, JEAN-JACQUES AMPÈRE, Correspondance, tome 2, 1848, page 167. 

Ø 2. —  « (...) Quant à la raison canonique, et il regarda Mérodack, ce serait la messe de Requiem que j'ai dite pour un suicidé.

—  « C'est donc moi qui serait cause... » fit le jeune homme consterné.

—  « Non frère! » dit le moine, « je comprends que vous ne m'ayez rien dit. N'ai-je pas prononcé aussi l'absoute d'une suicidée? »

JOSÉPHIN PÉLADAN, Le Vice suprême,  1884, page 330. 

Ø 3. Le prêtre dit pater noster. Il encense et il asperge le corps pour l'embaumer pour l'éternité : cette absoute est le dernier adieu. Puis il dit une oraison où il fait mémoire des morts, appelle la miséricorde sur eux et le tout se termine par le requiescant in pace.

MAURICE BARRÈS, Mes cahiers, tome 7, 1908, page 112. 

Ø 4. Quand on nous aura mis dans une étroite fosse, Quand on aura sur nous dit l'absoute et la messe, Veuillez vous rappeler, reine de la promesse, Le long cheminement que nous faisons en Beauce.

CHARLES PÉGUY, La Tapisserie de Notre-Dame,  1913, page 686. 

Ø 5. Il donna l'absoute. L'encensoir poussait une fumée âcre. Impossible de s'y tromper : Thomas était prêtre. Il lançait les invocations latines avec la sûreté d'un vieux recteur, il corrigeait d'un geste les erreurs des enfants de choeur comme s'il eût donné l'absoute toute sa vie.

HENRI QUEFFÉLEC, Un Recteur de l'île de Sein,  1944, page 177. 

Remarque : 1. Le prêtre donne l'absoute (exemple 5), dit l'absoute (exemple 4), prononce l'absoute (exemple 2), célèbre l'absoute (exemple 1). 2. Le pluriel indique qu'il existe plusieurs types d'absoute (le jour des funérailles en présence du corps, à une messe d'anniversaire, pour un laïc, un membre du clergé, un évêque, un enfant ou un adulte, pour tous les défunts, etc.) (exemple 6). Dans l'exemple 7, emploi original de absoute pour qualifier une personne (absoute étant construit en opposition) : 

Ø 6. La messe se termine, le célébrant disparaît et, de même qu'au moment où le mort entra, le clergé, précédé par les suisses, s'avance vers le cadavre, et, dans le cercle enflammé des cierges, un prêtre en chape profère les puissantes prières des absoutes.

GEORGES-CHARLES, DIT JORIS-KARL HUYSMANS, En route, tome 1, 1895, page 22. 

Ø 7. Aujourd'hui, je le reconnais, c'est moi qui ai tous les bénéfices. Ma mère elle-même, l'éternelle absoute, comme je l'appelle dans l'intimité, par cela même, ne manque pas de droits à ma gratitude.

PAUL LÉAUTAUD, In memoriam,  1905, page 205. 

STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 32. 

 

Forme dérivée du verbe \"absoudre\"

 absoudre

ABSOUDRE, verbe transitif.  

I.—  THÉOLOGIE PENITENTIELLE CATHOLIQUE.  Pour un confesseur, remettre, au nom de Dieu, les péchés du pénitent par la formule et le geste de l'absolution. Par extension.  Pardonner les péchés, en parlant du jugement de Dieu après la mort (exemple 2) : 

Ø 1. Eudore leva vers le ciel ses bras chargés de chaînes (...). Cyrille prononça sur lui ces paroles : « Fidèle, je t'absous par la miséricorde de Jésus-Christ qui délie dans le ciel tout ce que ses apôtres délient sur la terre. »

FRANÇOIS-RENÉ DE CHATEAUBRIAND, Les Martyrs ou le Triomphe de la religion chrétienne, tome 3, 1810, page 153. 

Ø 2. Que tu meures absous ou damné, marmottait Scarbo cette nuit à mon oreille, tu auras pour linceul une toile d'araignée,...

LOUIS BERTRAND, DIT ALOYSIUS BERTRAND, Gaspard de la nuit,  1841, page 118. 

Ø 3. Il fut administré, purifié, absout [sic] , au milieu de ses amis et de ses serviteurs agenouillés, sans qu'un seul mouvement de son visage révélât qu'il vivait encore.

GUY DE MAUPASSANT, Contes et nouvelles, tome 1, 1889, page 262. 

Ø 4. Ainsi donc, c'est fini, réglé? Pas plus difficile que ça? Si j'avais la foi, je serais, ce soir, absous, blanchi, purgé? Deux pater et deux ave. Eh bien! Non! Non! (...) ce vieil homme peut me pardonner si ça lui plaît; moi, je ne me pardonne pas. Deux pater et deux ave! C'est quand même trop commode.

GEORGES DUHAMEL, Journal de Salavin,  1927, page 158. 

Remarque : D'une façon générale, le prêtre remet au nom de Jésus-Christ les péchés du pénitent, qui doit avoir les dispositions requises pour être pardonné (exemple 4). L'absolution est publique aux premiers temps de l'Église (exemple 1). Actuellement, elle s'applique aussi à un malade, à une personne sur le point de mourir; dans ce cas, elle accompagne souvent l'extrême-onction (exemple 3, administré). 

II.—  Par extension et dans le langage ordinaire.  Pardonner, excuser, faire grâce, disculper : 

A.—  Emploi absolu : 

Ø 5. Il caresse, il menace, il punit, il absout.

ABBÉ JACQUES DELILLE, L'Homme des champs ou les Géorgiques françaises,  1800, page 59. 

Ø 6. J'ose le croire, je serais absous aux yeux des autres et, en tout cas, je serai irréprochable à mes propres yeux.

BENJAMIN HENRI CONSTANT DE REBECQUE, Journaux intimes,  avril 1804, page 82. 

B.—  [Le complément désigne une personne] :

Ø 7. Elle lui avoit pardonné, M. de Montivers l'avoit absous, elle ordonnoit, par ses regards, à tout homme, de les imiter...

HONORÉ DE BALZAC, Annette et le criminel, tome 4, 1824, page 169. 

Ø 8.... je m'accusais généreusement d'une faute, ce qui à mes yeux m'absolvait presque...

RODOLPHE TOEPFFER, Nouvelles genevoises,  1839, page 79. 

—  Emploi pronominal : 

Ø 9. Si, dans l'intention de m'absoudre, j'excuse mes malheurs par la fatalité, je me soumets à la fatalité. Si je les excuse par la trahison, je me soumets à la trahison. Mais si je prends la faute en charge, je revendique mon pouvoir d'homme.

ANTOINE DE SAINT-EXUPÉRY, Pilote de guerre,  1942, page 369. 

C.—  [Le complément désigne un inanimé] :

Ø 10. Jusque-là, les déchirements sont nécessaires, et, bien que condamnables dans l'appréciation analytique des faits, ils sont légitimes en somme. L'avenir les absoudra, en les blâmant, comme nous absolvons la grande révolution, tout en déplorant ses actes coupables et en stigmatisant ceux qui les ont provoqués.

ERNEST RENAN, L'Avenir de la science,  1890, page 327. 

Remarque : Dans plusieurs exemple la connotation religieuse reste sensible (exemple 7, 8, 10); dans d'autres exemples la connotation serait plutôt juridique (exemple 5). Mais on se souviendra que dans le langage religieuse on parle du tribunal de la pénitence, etc. 

III.—  DROIT.  emploi improprement mais très usité.  Déclarer innocent, acquitter : 

Ø 11. En effet, si Louis peut être encore l'objet d'un procès, Louis peut être absous; il peut être innocent.

MAXIMILIEN DE ROBESPIERRE, Discours, Sur le jugement de Louis XVI, 1792, page 122. 

Ø 12. Le jury, sorte de machine intermédiaire entre le juge et le coupable, et qu'il faut faire jouer, ne peut que condamner sur des faits consommés, ou absoudre sur des intentions présumées. Le juge, instrument de la loi et non pas son ministre, s'attache servilement à une lettre qui tue ou qui absout.

LOUIS-GABRIEL A. DE BONALD, Législation primitive considérée dans les derniers temps par les seules ténèbres de la raison, tome 2, 1802, page 85. 

Ø 13. Il est reconnu innocent, absous, et meurt à l'audience.

ALFRED DE VIGNY, Le Journal d'un poète,  1832, page 970. 

Ø 14. En 1899, toujours à propos de Dreyfus, qui venait d'être recondamné et qu'il s'agissait de faire absoudre à tout prix, la lutte s'engageait entre l'important service des renseignements, organe de la défense nationale, et la sûreté générale, qui ne défendait que la république.

CHARLES MAURRAS, Kiel et Tanger,  1914, page 64. 

IV.—  DROIT CRIMINEL.  Renvoyer de l'accusation une personne coupable, mais dont le crime ou le délit n'est pas qualifié punissable par la loi. (Dictionnaire de l'Académie Française). 

—  Vieilli.  Dégager, décharger une personne de ses responsabilités : 

Ø 15.... tous leurs gens, vassaux, sujets et serviteurs présens et à venir, étaient absous et quittes de tout serment de féauté, de toute promesse ou obligation de service envers eux et leurs successeurs.

PROSPER DE BARANTE, Histoire des ducs de Bourgogne de la maison de Valois, tome 4, 1824, page 328. 

Remarque : Ce sens très particulièrement (confer historique), dont la documentation n'a fourni qu'un seul exemple pour le XIXe.  siècle, mais dans un contexte formulaire, a disparu au XXe.  siècle. 

—   Noter également 2 écarts légers par rapport à l'usage reçu, avec recours (dans le contexte) au vocabulaire religieux : 

Ø 16. Chantez! Un chant de femme attendrit la souffrance;

Aimez! Plus que l'amour la haine fait souffrir.

Donnez! La charité relève l'espérance :

Tant que l'on peut donner on ne veut pas mourir!

Si vous n'avez le temps d'écrire aussi vos larmes,

Laissez-les de vos yeux descendre sur ces vers.

Absoudre, c'est prier. Prier, ce sont nos armes.

Absolvez de mon sort les feuillets entr'ouverts!

MARCELINE DESBORDES-VALMORE, Élégies, Élégies à celles qui pleurent, 1859, page 65. 

Ø 17. Les médecins sont les prêtres du démon. Ils confessent les malades, les consolent, et les absolvent à leur manière, leur donnent enfin la communion des ténèbres.

LÉON BLOY, Journal,  1894, page 128. 

STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 480. Fréquence relative littéraire : XIXe.  siècle : a) 1 000, b) 538; XXe.  siècle : a) 628, b) 522. 

 

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