Définition: ATTAQUER, verbe transitif.

Définition: ATTAQUER, verbe transitif. I.— Emploi transitif. A.— [L'accent est mis sur la volonté de vaincre en réduisant l'adversaire] Porter les premiers coups, les premières atteintes à quelqu'un ou à quelque chose. Antonyme : défendre. a) [Le sujet désigne un ou plusieurs agresseurs; l'objet désigne un ou plusieurs individus] Faire violence à quelqu'un, pour le voler, le blesser, etc. Attaquer quelqu'un à main armée, au couteau, de vive force. Synonymes : agresser, frapper, molester : Ø 1. Le braconnier l'avait surpris se livrant à cette dernière occupation, et comme l'ours, surtout quand il n'est point affamé, n'attaque pas l'homme, il avait vu celui-ci prendre la fuite, gagner le ravin-noir et disparaître dans la grotte. PIERRE-ALEXIS, VICOMTE PONSON DU TERRAIL, Rocambole, les drames de Paris, tome 5, Les Exploits de Rocambole, 1859, page 452. Remarque : Attesté dans la plupart des dictionnaires généraux du XIXe. et du XXe. siècle à partir de Dictionnaire de l'Académie Française 1798. — emploi absolu. Commettre des agressions : Ø 2. Comment, s'écria-t-il [le maire] , on l'accuse d'avoir attaqué sur les grandes routes : ce n'est pas possible. LOUIS-FRANÇOIS L'HÉRITIER, Supplément aux Mémoires de Vidocq, tome 2, 1830, page 221. — Par analogie. MANÈGE. Attaquer un cheval. Le piquer vigoureusement de l'éperon pour le maîtriser et le faire obéir. · VÉNERIE. Déloger un gros gibier de sa retraite, en mettant les chiens courants sur sa trace. Remarque : Attesté dans la plupart des dictionnaires généraux du XIXe. et du XXe. siècle à partir de Dictionnaire de l'Académie Française, Compléments 1842. b) MILITAIRE. [L'objet désigne une personne, une armée, une entité territoriale, etc.] Engager l'offensive contre; prendre l'initiative d'une bataille. Attaquer un pays; attaquer par terre, par mer; attaquer l'ennemi de front. Synonymes : affronter, assaillir : Ø 3. La barricade du faubourg du Temple, défendue par quatre-vingts hommes, attaquée par dix mille, tint trois jours. Le quatrième, on fit comme à Zaatcha et à Constantine, on perça les maisons, on vint par les toits, la barricade fut prise. VICTOR HUGO, Les Misérables, tome 2, 1862, page 414. SYNTAXE : Attaquer une ville, un État; attaquer à l'improviste, par surprise, de flanc, de dos. — emploi absolu. Donner l'ordre d'attaquer; il n'y a pas lieu d'attaquer. Remarque : Attaquer, c'est engager, commencer le combat, porter les premiers coups. On attaque de diverses manières : vivement, bravement, noblement, adroitement, etc. Assaillir, c'est attaquer d'une manière particulière, qui est vive, rapide, imprévue en se jetant sur l'objectif (d'après DICTIONNAIRE UNIVERSEL DES SYNONYMES DE LA LANGUE FRANÇAISE (FRANÇOIS GUIZOT), 1864). — Emplois particuliers. · ARMÉE. vieux. Saisir vivement le fusil au cours des différents exercices. Remarque : Attesté dans les dictionnaires généraux du XIXe. siècle de Dictionnaire de l'Académie Française, Compléments 1842 à DICTIONNAIRE DE LA LANGUE FRANÇAISE (ÉMILE LITTRÉ. · MARINE. Attaquer une île, un cap, la terre. Se diriger tout droit vers le point, ou s'en approcher pour le reconnaître, ou atterrir. Remarque : Attesté dans la plupart des dictionnaires généraux du XIXe. et du XXe. siècle à partir de DICTIONNAIRE UNIVERSEL DE LA LANGUE FRANÇAISE (LOUIS-NICOLAS BESCHERELLE) 1845. c) SPORTS. familier. [Dans certains sports collectifs] Déployer une offensive en vue de marquer un but, un essai. Les avants attaquent. · [Dans certains sports individuels] S'efforcer de distancer ses adversaires. Le coureur attaque. B.— Emplois métaphoriques. [L'idée d'une agression reste plus ou moins sous-jacente] 1. [L'accent est mis sur la volonté de vaincre] Chercher à surmonter un obstacle, une difficulté ou chercher à obtenir la supériorité sur quelqu'un ou quelque chose. Attaquer une difficulté; attaquer le mal dans sa source, dans ses racines; attaquer quelqu'un par son côté faible, dans ses derniers retranchements. Synonymes : affronter, braver. — Locution figurée. Attaquer, prendre le taureau par les cornes, ou attaquer quelque chose par les cornes. Résoudre avec méthode et énergie une difficulté, un problème : Ø 4. Dans le temps, il nous avait dit qu'il fallait attaquer les scènes dangereuses par les cornes, mais au lieu de l'attaquer par les cornes, il me fait l'effet de l'attaquer par le bout de la queue, avec une peur de tous les diables. EDMOND DE GONCOURT, JULES DE GONCOURT, Journal, 1886, page 608. Remarque : Attesté dans Grand dictionnaire universel du XIXe. siècle (Pierre Larousse), Nouveau Larousse illustré, DICTIONNAIRE ALPHABÉTIQUE ET ANALOGIQUE DE LA LANGUE FRANÇAISE (PAUL ROBERT. 2. [L'accent est mis sur le mal causé à l'objet de l'attaque] Modifier quelque chose dans son état physique en en détériorant la qualité. a) [Le sujet désigne une personne ou un objet tenu par une personne] Chercher à entamer, entailler, ruiner. Attaquer quelque chose dans ses fondations; attaquer un tronc d'arbre. b) [Le sujet désigne un phénomène naturel, un agent inanimé (l'accent étant mis sur le caractère inévitable de son action destructrice)] La rouille attaque le fer, la maladie attaque un organe. Synonymes : affecter, altérer, corroder : Ø 5.... Depuis long-temps, dit-il, je ne me sens pas bien; Cette herbe est mal-saine et me tue. Ce treffle est sans saveur, cette onde est corrompue, L'air qu'on respire ici m'attaque les poumons; Bref, je meurs si nous ne partons. JEAN-PIERRE CLARIS DE FLORIAN, Fables, Le Cheval et le poulain, 1792, page 83. Ø 6. À ce moment, l'émail formé est assez dur pour résister ensuite à l'attaque de l'acide. La plaque est prête pour la morsure au perchlorure de fer. Le mordant va attaquer le cuivre partout où il est mis à nu par le départ de l'albumine soluble. Il n'attaque pas les régions couvertes d'émail correspondant aux blancs du négatif, c'est-à-dire aux noirs du sujet. La civilisation écrite (sous la direction de Julien Cain) 1939, page 1004. Remarque : Dictionnaire de l'Académie Française 1932 reprenant quelques exemples de Dictionnaire de l'Académie Française 1835 et 1878 ajoute : on dit plutôt atteindre*, ce qui n'est pas confirmé par l'usage. — Spécialement. CHIMIE. souvent au passif. Provoquer une réaction dans un corps en le soumettant à l'action corrosive d'un autre. Le sodium est attaqué par l'eau. Remarque : Attesté dans DICTIONNAIRE ENCYCLOPÉDIQUE QUILLET 1965. — Par métaphore : Ø 7. Le mur [de l'Église] , comme un fruit que l'on entaille, partout où le fer l'attaque, fait paraître les semences de vie engagées dans son tissu. PAUL CLAUDEL, Art poétique, 1907, page 213. 3. [L'accent est mis sur la critique publique des torts ou insuffisances, etc., d'une personne ou d'une chose] a) DROIT. — [Le complément désigne une personne] Attaquer quelqu'un en justice. Le poursuivre devant les tribunaux pour s'en prendre publiquement à ses actions : Ø 8.... vous viendrez à ma vente, et vous achèterez quelque chose, car si je mettais de côté le moindre objet pour vous et qu'on l'apprît, on serait capable de vous attaquer en détournement d'objets saisis. ALEXANDRE DUMAS FILS, La Dame aux camélias, 1848, page 34. — [Le complément désigne soit un acte, soit une décision juridictionnelle ou administratif] Chercher à faire casser ou annuler en contestant la validité. Attaquer un décret, un testament : Ø 9. 504. Après la mort d'un individu, les actes par lui faits ne pourront être attaqués pour cause de démence, qu'autant que son interdiction aurait été prononcée ou provoquée avant son décès; à moins que la preuve de la démence ne résulte de l'acte même qui est attaqué. Code civil des Français (ou Code Napoléon) 1804, page 92. Remarque : Le jugement déféré à une cour d'appel n'est pas dit « attaqué » mais « entrepris ». b) [Souvent avec un 2e. complément introduit par dans, sur, indiquant le point sur lequel porte la critique] Contester énergiquement, et le plus souvent ouvertement, la valeur intellectuelle, morale, pratique etc. de quelqu'un, de quelque chose (le plus souvent un inanimé abstrait). Attaquer quelqu'un ou ses actes, dans son honneur; attaquer le gouvernement, attaquer des idées. Synonymes : blâmer, critiquer : Ø 10. — Pécuchet ricana. — « Pourquoi riez-vous? — C'est qu'un diplôme n'est pas toujours un argument! » Le docteur était attaqué dans son gagne-pain, dans sa prérogative, dans son importance sociale. GUSTAVE FLAUBERT, Bouvard et Pécuchet, tome 1, 1880, page 74. — Proverbial, vieux. Bien attaqué, bien défendu. La riposte est aussi vigoureuse que l'attaque. Remarque : Attesté dans les dictionnaires généraux du XIXe. et du XXe. siècle de Dictionnaire de l'Académie Française 1798 à Dictionnaire de l'Académie Française 1932. C.— Emplois figurés. 1. [L'accent est mis sur la réponse ou la réaction que l'on attend de quelqu'un ou de quelque chose] Entrer en contact avec quelqu'un ou quelque chose. Attaquer quelqu'un sur un sujet, sur ses intentions. Attaquer quelqu'un de conversation (vieilli). a) Spécialement. MARINE TÉLÉCOMMUNICATIONS. Engager une liaison par signaux. Remarque : Attesté dans Nouveau Larousse illustré, Grand Larousse encyclopédique en dix volumes, DICTIONNAIRE ENCYCLOPÉDIQUE QUILLET 1965. — MUSIQUE. Attaquer une corde. La pincer pour la faire vibrer : Ø 11. «... je puis, en changeant de mode, faire naître des idées plus riantes dans ton esprit. » Et Satou attaqua les cordes de sa harpe avec une énergie joyeuse et sur un rythme vif que le tympanon accentuait de coups pressés;... THÉOPHILE GAUTIER, Le Roman de la momie, 1858, page 200. Remarque : Attesté dans la plupart des dictionnaires généraux du XIXe. et du XXe. siècle de Dictionnaire de l'Académie Française 1835 à DICTIONNAIRE ENCYCLOPÉDIQUE QUILLET 1965. b) Argot, vieilli. Attaquer une femme. Entreprendre de la courtiser, lui faire des avances : Ø 12. La soirée agonisait; déjà la salle était presque vide. André sentait la dernière occasion lui échapper; il ignorait quand il pourrait la revoir et il perdit tout son sang-froid. Comme il bostonnait avec elle une dernière fois, à brûle-pourpoint, il l'attaqua : — Vous n'avez pas l'air de voir combien vous me faites souffrir... ROGER MARTIN DU GARD, Devenir, 1909, page 150. Remarque : Attesté dans DICTIONNAIRE DES DICTIONNAIRES (SOUS LA DIRECTION DE PAUL GUÉRIN) 1892. 2. [L'accent est mis sur le commencement d'une action difficile dont la nature est précisée ou suggérée par le complément d'objet] Commencer à faire quelque chose qui demande un effort et dont on veut vivement venir à bout. a) [Le complément désigne un obstacle naturel] Commencer à gravir, à franchir, etc. Attaquer une côte, une descente, un escalier (Confer aussi l'emploi B 1, avec lequel cet emploi se confond parfois dans le discours) : Ø 13. Un peu réchauffé, Daru retourna à la fenêtre d'où il avait, pour la première fois, aperçu les deux hommes. On ne les voyait plus. Ils avaient donc attaqué le raidillon. ALBERT CAMUS, L'Exil et le royaume, 1957, page 1610. b) [Le complément désigne une activité] Commencer l'exécution de. Attaquer un travail, un repas, une danse. — JEUX. absolument. Jouer le premier. C'est à toi d'attaquer; allez, attaque. Remarque : Attesté dans Grand Larousse encyclopédique en dix volumes, Grand Larousse de la Langue française. — MUSIQUE. Attaquer une note, un morceau. En commencer l'émission, l'exécution : Ø 14. Le premier acte à peine annoncé, toute la cour l'attend. Enfin prenant sa volonté à deux mains, il entre, se met à genoux auprès de la reine et commence son récitatif. Il attaque la note juste et cela va. Il tenait son sol, il s'y cramponnait, il s'y asseyait, il n'en voulait plus sortir. EDMOND DE GONCOURT, JULES DE GONCOURT, Journal, 1858, page 505. Remarque : Attesté dans la plupart des dictionnaires généraux du XIXe. et du XXe. siècle. — Familier. Commencer à manger. Attaquer un mets, un rôti, un poisson servi sur la table (Dictionnaire de la langue française (ÉMILE LITTRÉ)) : Ø 15. Et, après avoir bu un plein verre d'eau, il attaqua le fromage de cochon. Il en coupait des morceaux carrés, qu'il piquait de la pointe de son couteau et qu'il mangeait sur son pain, sans fourchette. ÉMILE ZOLA, Germinal, 1885, page 1228. · Bien attaquer un sujet. L'aborder de façon satisfaisante. — Argot, emploi absolu. Commencer une journée de travail : Ø 16. [Le chauffeur :] je fais la nuit. J'attaque à neuf plombes et je rentre à six. ALBERT SIMONIN, JEAN BAZIN, Voilà taxi! 1935, page 16. II.— Emploi pronominal. A.— Emploi réciproque : Ø 17. Condamnés à l'union, elles [ces deux sectes] commencèrent aussitôt une guerre acharnée, s'attaquèrent entre elles, et résistèrent à l'autorité. BENJAMIN HENRI CONSTANT DE REBECQUE, Principes de politique, 1815, page 141. B.— Emploi passif. Le poumon s'attaque. C.— Emploi subjectif. S'attaquer à. 1. [Le complément désigne un inanimé concret] Confer I B 2 : Ø 18. «... J'ai lu, dernièrement, un bon article, là dessus. » — « Celui d'Achard? » fit Antoine. Il hocha la tête : « on croit généralement que l'ypérite, contrairement aux suffocants, s'attaque aux petites bronches plutôt qu'aux alvéoles, et qu'elle altère moins profondément les échanges gazeux. (...). » ROGER MARTIN DU GARD, Les Thibault, Épilogue, 1940, page 888. 2. [Le complément désigne une personne, un inanimé abstrait] Confer I B 3. S'attaquer à plus fort, à plus faible que soi; s'attaquer à la religion, aux moeurs : Ø 19. Mais l'opposition actuelle me paraît stupide. Elle s'attaque à l'Empire, ou plutôt à l'Empereur, au lieu de s'en prendre à la question religieuse, qui est la seule importante. GUSTAVE FLAUBERT, Correspondance, 1868, page 425. 3. Affronter, se heurter à, tenter de résoudre (confer I B 1). S'attaquer à un sujet, à un problème : Ø 20. Une humeur vive et entreprenante, s'attaquant aux difficultés et aimant à se moquer de tous les ridicules ennemis, faisait considérer Madame de Constantin comme l'une des femmes du département qu'il était le plus dangereux d'offenser. HENRI BEYLE, DIT STENDHAL, Lucien Leuwen, 1836, page 270. 4. Familier, vieilli. Aborder, interpeller pour obtenir une réponse (confer I C 1). S'attaquer à quelqu'un, s'attaquer à une femme : Ø 21. Cela semble absurde, au premier abord, que de courtiser une vierge soit plus difficile que de s'attaquer à une femme qui s'est donnée et qui, sachant tout, peut mieux se défendre. PAUL BOURGET, Le Disciple, 1889, page 152. Remarque : L'emploi de la forme pronominale à la place de l'actif met l'accent sur la volonté, l'effort opiniâtre du sujet fortement engagé dans l'action (confer DICTIONNAIRE DE LA LANGUE FRANÇAISE (ÉMILE LITTRÉ), SOMMER 1882).