Définition: ATTENTE, substantif féminin.

Définition: ATTENTE, substantif féminin. I.— Action d'attendre*. A.— [L'accent est mis sur le (simple) écart temporel qui sépare le moment actuel de quelqu'un se trouvant en tel lieu, et le moment où quelqu'un ou quelque chose doit arriver] Action de demeurer en un lieu jusqu'à ce que quelqu'un ou quelque chose arrive (confer attendre I A) : Ø 1. Enfin, à quatre heures et demie, après d'innombrables stationnements, de faux départs, d'attentes sous des tunnels, le train, sifflant et stoppant à tous les signaux, traversa lentement la banlieue parisienne, et vint s'arrêter sur une voie sans quai, à trois cents mètres de la gare P.-L.-M. ROGER MARTIN DU GARD, Les Thibault, L'Été 1914, 1936, page 626. B.— [L'idée de comportement humain actif domine, l'accent étant mis sur la relation du sujet avec l'objet de l'attente] Attente de quelqu'un ou quelque chose. 1. Action de compter sur quelque chose ou quelqu'un. Remarque : Attesté dans la plupart des dictionnaires généraux à partir de Dictionnaire de l'Académie Française 1798. a) [L'objet désigne une personne ou une chose connue dont la venue est probable] Espoir, prévisions. Répondre à l'attente, être dans l'attente de quelque chose, décevoir l'attente : Ø 2. Cette maison, me dit-elle [Mme. G...] , son père l'avait bâtie après un examen minutieux du plan du Passy futur, et elle semblait à l'abri des démolisseurs. Puis, contre toute attente, la rue qui se fait en ce moment a changé de direction et chasse la pauvre femme de chez elle. JULIEN GREEN, Journal, 1931, page 65. Ø 3. Il faut dire aussi que la maison de Stephenson s'était transformée. Son fils Robert, né le 16 octobre 1803, qu'il avait fait instruire avec tant de conscience et de dévouement, avait pleinement répondu à son attente. PIERRE ROUSSEAU, Histoire des techniques et des inventions, 1967, page 260. — Proverbial. " Si vous prêtez de l'argent à cet homme, vous y perdrez et l'argent et l'attente " (attesté dans la plupart des dictionnaires généraux à partir de Dictionnaire de l'Académie Française 1798). · Au figuré. " Une bonne fuite vaut mieux qu'une mauvaise attente ". Synonyme : il vaut mieux abandonner une entreprise que d'en attendre inutilement le succès (Confer Dictionnaire de l'Académie Française, Compléments 1842; attesté dans la plupart des dictionnaires généraux à partir de cette date). SYNTAXE : Combler, dépasser l'attente; passer, surpasser l'attente (de quelqu'un); tromper l'attente. — Spécialement. [L'objet de l'attente est connu et ressenti comme irrémédiable] Attente de la mort. b) [L'objet désigne un nom de personne ou de chose, dont la venue est souhaitée, mais incertaine] Espoir (mêlé d'appréhension). Attente du Messie, d'un miracle. c) Emploi absolu, PHILOSOPHIE, LITTÉRATURE. [L'objet est vague, non défini, éventuellement inexistant] Attente active, passive : Ø 4. Une attente passive, contraire à la raison, contraire à elle-même, qui n'était plus désespérée mais encore moins touchée d'espoir, une simple attente, comme un sentiment durable, permanent, l'habitait. GABRIELLE ROY, Bonheur d'occasion, 1945, page 331. Ø 5. L'arrêt de conscience est un acte supérieur, acte difficile, que tous ne savent pas appeler et maintenir : l'acte de l'attente. La pensée y reste en rapport avec l'action, elle travaille sur ses messages, elle lui prépare les voies. L'arrêt de conscience est un intermédiaire actif entre deux actions. EMMANUEL MOUNIER, Traité du caractère, 1946, page 666. 2. [L'accent est mis sur le sentiment d'impatience ou l'état d'inquiétude qui accompagne l'attente] : Ø 6.... le battement régulier de l'horloge de fer emplissaient son âme de visions glorieuses et mélancoliques, l'épuisaient d'une attente impérieuse qui le consumait tout entier,... JULIEN GRACQ, Au Château d'Argol, 1938, page 109. SYNTAXE : a) Attente abominable, angoissée, anxieuse, cruelle, désespérée, dévorante, ennuyeuse, énervante, exaspérante, extatique, fébrile, fiévreuse, horrible, inlassable, irritante, merveilleuse, nostalgique, obsédante, obstinée, oisive, paisible, passionnée, paresseuse, recueillie, résignée. b) Être en proie aux émotions de l'attente (en particulier dans la littérature amoureuse); tourments, transes de l'attente; anxiété, soeur de l'attente; état d'attente. Remarque : Ce n'est qu'à partir de Grand dictionnaire universel du XIXe. siècle (Pierre Larousse) que cette nuance apparaît, les autres dictionnaires n'ayant pas jusque là distingué " action d'attendre " et " état d'âme de celui qui attend ". C.— [L'accent est mis sur le laps de temps plus ou moins grand pendant lequel toute action ou décision est suspendue] Attente longue, interminable, vaine; heures, délai, file d'attente. SYNTAXE : Prolonger, remplir l'attente; l'attente dure, se prolonge; réduire les délais d'attente. Remarque : Attesté dans la plupart des dictionnaires généraux à partir de Dictionnaire de l'Académie Française 1798. — Spécialement, dans le domaine des affaires. En attente. Placer, ranger une commande, un dossier en attente. Synonyme : en instance. II.— Emplois techniques. A.— Par métonymie. Attente (de quelque chose) 1. Temps concret pendant lequel une chose est attendue. a) MARINE. Attente de chargement. " Position d'un navire qui a terminé le débarquement de sa cargaison et qui a prévenu les chargeurs qu'il était prêt à charger " (Glossaire des termes de marine (JULIEN LE CLÈRE)). b) MARINE DE COMMERCE. domaine des relations entre armateurs et marins. Attente d'embarquement. " Temps pendant lequel un marin stabilisé dans son emploi attend une désignation pour un nouvel embarquement après expiration de ses congés " (Glossaire des termes de marine (JULIEN LE CLÈRE)). 2. Objet destiné à recevoir un complément de traitement. a) COSTUME MILITAIRE (uniquement costume d'officiers). Attentes d'épaulettes. Brides en drap, tissus brodé de cuivre, d'argent ou d'or servant à retenir les épaulettes : Ø 7. Toutes les fois que l'officier paraît avec ses attentes d'épaulettes et sans sabre dans l'après-midi, il n'est pas habillé. Le Gaulois (journal) 5 octobre 1871 (Dictionnaire de la langue française (ÉMILE LITTRÉ)) ). Remarque : Attesté dans Grand dictionnaire universel du XIXe. siècle (Pierre Larousse), DICTIONNAIRE DE LA LANGUE FRANÇAISE (ÉMILE LITTRÉ), Nouveau Larousse illustré, DICTIONNAIRE ENCYCLOPÉDIQUE QUILLET 1965, PETIT DICTIONNAIRE DE MARINE (ROBERT GRUSS) 1952, GLOSSAIRE DES TERMES DE MARINE (JULIEN LE CLÈRE) 1960. b) PHARMACOLOGIE. Attentes en flèches. Filaments rougeâtres accompagnés de petites languettes couleur d'or, sortant du calice de la fleur de safran, utilisés en pharmacie (d'après Dictionnaire des dictionnaires (SOUS LA DIRECTION DE PAUL GUÉRIN) 1892). 3. TÉLÉCOMMUNICATIONS. " signal donné sur les lignes télégraphiques pour indiquer qu'on n'est pas prêt à recevoir une transmission " (Nouveau Larousse illustré, Grand Larousse encyclopédique en dix volumes). B.— D'attente. [Expression de valeur adjectif] 1. [En parlant d'un lieu] Où l'on se tient en attendant. a) CHEMIN DE FER. Salle d'attente. Salle où les voyageurs attendent le départ des trains. b) Plus généralement. dans le domaine administratif, communautaire, hospitalier. Local où l'on attend d'être reçu à une audience, une consultation ou visite (confer également antichambre, parloir). Cabinet, pièce, salon d'attente. Remarque : Attesté de manière continue dans la plupart des dictionnaires généraux à partir de Grand dictionnaire universel du XIXe. siècle (Pierre Larousse). 2. [En parlant d'un espace de temps] Pendant lequel a lieu une opération qui en précède une autre. a) CAVALERIE MILITAIRE. Phase d'attente et position d'attente. " Phase précédant ordinairement une action de cavalerie et pendant laquelle la troupe prend soit une position de rendez-vous (colonne par pelotons, masse), soit le dispositif de combat, et fait exécuter la reconnaissance de l'ennemi par ses patrouilles de combat et les éclaireurs du terrain " (Dictionnaire des dictionnaires (SOUS LA DIRECTION DE PAUL GUÉRIN) 1892) : Ø 8.... une artillerie en position d'attente (...) est une artillerie dont les unités sont (...) disposées à l'abri, les canons sur les avant-trains attelés, (...) à proximité immédiate d'une position... LIEUTENANT-COLONEL HENRI-JULES PALOQUE, L'Artillerie de campagne, 1909, page 378. b) ÉLECTRONIQUE. Temps d'attente. Temps qui s'écoule entre le moment où une information est appelée et le moment où elle est lue (d'après Terminologie de l'exploitation électronique des informations 1959, Gestion automatisée des entreprises (G. LHOSTE, P. PÈPE) 1964, Dictionnaire de l'organisation et de la gestion (J. Tezenas) 1968). c) ORGANISATION. " Temps pendant lequel le produit ou la matière est déposé ou pendant lequel le matériel de manutention est immobilisé ou pendant lequel la main-d'oeuvre est inoccupée " (Dictionnaire de l'organisation et de la gestion (J. TEZENAS) 1968). Confer également délai, retard. · Théorie ou problème des files d'attente. " Problèmes caractérisés par des éléments se présentant à des intervalles de temps et de durée aléatoires pour recevoir un service dont la durée peut être constante ou au contraire aléatoire " (Dictionnaire de l'organisation et de la gestion (J. TEZENAS) 1968 au mot files) : Ø 9. Une étude de A. K. Erlang (1908) devait, un tiers de siècle plus tard, déboucher dans la « théorie des files d'attente » dont les applications sont innombrables : atterrissage des avions, stationnement des voitures automobiles, délais d'attente au téléphone, pannes de machines, etc., et, d'une manière générale, toutes les activités qui peuvent comporter des goulots d'étranglement. Histoire générale des sciences (sous la direction de René Taton) tome 3, volume 2, 1964, page 119. · Dans le domaine de la gestion d'une usine. Période, phases d'attente (confer Vsevolod Romanovsky, La Mer, source d'énergie, 1950, page 104). 3. [En parlant d'une opération] Qui a lieu avant une autre. a) AÉRONAUTIQUE. Circuit d'attente. " Circuit que décrivent les avions à proximité d'un aérodrome avant d'atterrir lorsque plusieurs appareils se présentent en même temps " (Grand Larousse encyclopédique en dix volumes). b) CHIRURGIE. Ligature d'attente. Ligature provisoire. (Attesté dans Dictionnaire de l'Académie Française à partir de 1835 et dans la plupart des dictionnaires généraux). 4. [Avec un nom d'objet] Qui doit recevoir plus tard un complément qui l'achève. a) [Objet concret] — ARCHITECTURE, MAÇONNERIE. Pierres d'attente. Pierres laissées en saillie à l'extrémité d'un mur dans lesquelles peuvent s'imbriquer d'espace en espace, les pierres d'un mur à construire ultérieurement. Synonymes : pierres d'arrachement*, harpes*, amorces* : Ø 10.... et, carrée, pareille à un bloc de mortier gâché grossièrement, se pourrissant et s'émiettant sous la pluie, elle [la maison] profilait sur le ciel clair, au-dessus des toits voisins, son énorme cube brut, ses flancs non crépis, couleur de boue, d'une nudité interminable de murs de prison, où des rangées de pierres d'attente semblaient des mâchoires caduques, bâillant dans le vide. ÉMILE ZOLA, L'Assommoir, 1877, page 414. Remarque : Attesté dans la plupart des dictionnaires généraux à partir de Dictionnaire de l'Académie Française 1798. · Au figuré. Personne ou groupe de personnes, chose, idée, événement qui est le commencement ou la base d'une action, d'entreprise ou d'une élaboration ultérieure : Ø 11. De même encore que le rythme, qui se reproduit constamment dans chaque vers, est retenu avant les paroles, la forme du raisonnement peut aussi devenir d'abord une habitude de la mémoire, et s'y fixer, pour ainsi dire, comme une pierre d'attente à laquelle le fonds viendra se joindre ensuite, quand il pourra... MARIE-FRANÇOISE-PIERRE GONCTHIER DE BIRAN, DIT MAINE DE BIRAN, De l'Influence de l'habitude sur la faculté de penser, 1803, page 185. Remarque : Dictionnaire de l'Académie Française 1932 donne pour synonyme position, situation d'attente attesté également dans la documentation (confer JEAN BARADAT, L'Organisation d'une préfecture, 1907, page 128). — GRAVURE, MENUISERIE, PEINTURE, SCULPTURE. Table, pierre, feuille, écu d'attente. Plaque de métal, pierre, marbre, planche, toile de peintre, où il n'y a encore rien de gravé, de sculpture ou de peinture. Remarque : Attesté dans la plupart des dictionnaires généraux à partir de Dictionnaire de l'Académie Française 1798; écu d'attente est uniquement attesté dans Grand Larousse encyclopédique. · Au figuré. Pour désigner un jeune homme à l'esprit non formé, disponible à toutes les impressions. " C'est (ce n'est qu') une table d'attente " (Dictionnaire de l'Académie Française 1798; attesté dans la plupart des dictionnaires généraux à partir de cette date). — MENUISERIE. Table d'attente. " Panneau de menuiserie en saillie au-dessus des guichets des grandes portes, sur lequel on fait des ornements de sculpture " (Grand dictionnaire universel du XIXe. siècle (Pierre Larousse)). Remarque : Ce dernier emploi est manifestement différencié de l'emploi en gravure (supra) par les lexicographes. — PLOMBERIE. Joint sur bride d'attente : Ø 12.... le joint sur bride d'attente [sert à raccorder] un tuyau de plomb avec un appareil muni d'une contre-bride. E. ROBINOT, Vérification, métré et pratique des travaux du bâtiment, tome 4, 1928, page 129. b) [Objet abstrait] Provisoire. — FINANCES. Compte d'attente. Compte représentant un avoir non transférable à l'étranger, ouvert à un non-résident sans autorisation préalable. Confer également comptes intransférables, comptes intérieurs de non-résident (d'après Dictionnaire de la banque et de la bourse 1963, au mot comptes intransférables) : Ø 13. À la fin de chaque mois, les frais généraux réels non absorbés sont à reporter aux frais généraux de fabrication; si, au contraire, les frais réels sont inférieurs aux frais répartis, la différence vient en déduction des frais généraux de fabrication, à moins qu'un compte d'attente ne soit ouvert, où sont inscrits mensuellement ces écarts. RENÉ VILLEMER, L'Organisation industrielle, 1947, page 219. STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 2 997. Fréquence relative littéraire : XIXe. siècle : a) 2 416, b) 2 548; XXe. siècle : a) 5 675, b) 5 905. Forme dérivée du verbe "attenter" attenter ATTENTER, verbe. I.— Emploi intransitif. Attenter sur (vieux) attenter contre (vieux) attenter à. A.— Commettre un attentat, faire une tentative de nature criminelle. 1. [Le complément désigne une personne ou une entité abstraite, une collectivité] a) [Une personne] Attenter à la vie de quelqu'un; attenter sur la personne de quelqu'un; attenter sur une personne (vieux) : Ø 1. « M. de Saint-Cyran me dit une fois... qu'un de ses domestiques avait voulu attenter sur sa personne, et qu'il avait été ravi d'avoir trouvé cette occasion pour pratiquer la modération envers ses ennemis. » ABBÉ HENRI BREMOND, Histoire littéraire du sentiment religieux en France, tome 4, 1920, page 65. Remarque : " On dit attenter à et attenter contre (...). Ces deux prépositions s'emploient souvent sans nuance de sens particulière. Attenter sur est vieilli " (DICTIONNAIRE DES DIFFICULTÉS DE LA LANGUE FRANÇAISE (ADOLPHE VOIR THOMAS) 1956); Grand dictionnaire universel du XIXe. siècle (Pierre Larousse) observait que " attenter à paraît être généralement préféré avec un nom de chose pour régime, et attenter sur avec un nom de personne ". b) Spécialement. Attenter sur ses jours (vieux), à ses jours; attenter à sa vie. Se suicider : Ø 2.... voyant qu'on se disposoit à user de violence pour m'empêcher d'attenter à mes jours, et que l'on vouloit me lier les mains, je feignis de me calmer; j'attribuai ma fureur au délire causé par la fièvre, je rassurai entièrement ceux qui me gardoient, bien décidé à profiter du premier moment où je ne serois pas observé, pour m'ôter une vie détestée et souillée par le plus horrible forfait. STÉPHANIE FÉLICITÉ DUCREST DE SAINT-AUBIN, COMTESSE DE GENLIS, Les Chevaliers du Cygne, tome 2, 1795, page 102. c) [Contre une entité abstraite, une collectivité, souvent dans un contexte politique] Attenter contre la liberté publique; attenter contre la sûreté de l'État, à la sûreté de l'État; c'est attenter ouvertement aux libertés publiques : Ø 3.... la « charte des journalistes » est un code d'honneur sans sanctions garanties. Pour le reste, il est difficile d'imaginer par quels moyens la discipline morale de la presse pourrait être mieux assurée sans risque d'attenter aux libertés. GÉRARD BELORGEY, Le Gouvernement et l'administration de la France, 1967, page 144. 2. [Le complément désigne un objet, une propriété, un bien matériel] : Ø 4. Le garde champêtre, gardien de la propriété et des bonnes moeurs, surgissait parfois au milieu de ces fêtes pastorales, mais il ne pouvait songer à verbaliser; il n'y a de mauvaises moeurs que celles qui attentent à la propriété ou la déprécient,... MARCEL AYMÉ, La Jument verte, 1933, page 148. 3. [Le complément désigne un inanimé abstrait (droits, principes, sentiments)] Attenter à l'honneur, à la dignité, aux privilèges de quelqu'un : Ø 5. Et n'est-ce pas attenter à l'honneur du prince lui-même, que de le représenter comme un insensé qui préfère le plaisir de commander à des esclaves, au bonheur de régner sur des hommes libres;... JEAN-PAUL MARA, DIT MARAT, Les Pamphlets, Supplément de l'Offrande à la Patrie, 1789, page 68. Ø 6. On dit : le corps des médecins, des avocats, des ingénieurs, parce qu'en effet ces corps ne sont formés que par la réunion d'hommes ayant chacun le sentiment de son droit, de sa valeur; étant chacun disposé à ne laisser en aucune circonstance, ni sous aucun prétexte, attenter à l'indépendance de ses convictions et de son caractère. EUGÈNE VIOLLET-LE-DUC, Entretiens sur l'architecture, tome 2, 1872, page 402. — Spécialement. Attenter aux moeurs, à la pudeur. Commettre un attentat aux moeurs, à la pudeur (confer attentat II). Attenter à la pudeur, à l'honneur d'une femme (Dictionnaire de l'Académie Française) : Ø 7. Célestine... vous devriez déposer contre Lanlaire... au parquet de Louviers... une plainte tapée pour outrages aux moeurs et attentat à la pudeur... Ça, c'est une idée... — Mais, capitaine, jamais Monsieur n'a outragé à mes moeurs, ni attenté à ma pudeur... OCTAVE MIRBEAU, Le Journal d'une femme de chambre, 1900, page 216. — Au figuré. Un regard qui attente aux moeurs (GABRIELLE COLLETTE, DITE COLETTE, La Jumelle noire, 1938, page 115) B.— Par extension. [Le complément désigne une valeur ou plus rarement une personne] S'attaquer à, porter atteinte à... : Ø 8. Si nous savions la culture que donne le génie au bien-aimé de sa pensée, comment ils vivent entre eux, par quelle adresse et quelle douceur, sans attenter à son originalité, il l'anime à se produire selon sa nature, nous aurions à la fois, la règle de l'art, et le modèle de l'éducation, de l'initiation civile. JULES MICHELET, Le Peuple, 1846, page 256. Ø 9. Ils accepteront toutefois que je les plaigne [les étudiants] s'ils ne sentent qu'ils attentent au plus harmonieux poète de notre théâtre [Racine] en chahutant des acteurs qui font de leur mieux pour le bien servir. (G. Pioch.) L'Œuvre. 11 avril 1941. II.— Emploi absolu, vieux " Accomplir un crime ou lui donner un commencement d'exécution " (Grand dictionnaire universel du XIXe. siècle (Pierre Larousse)). III.— Emploi pronominal, rare. Commettre un geste criminel sur soi-même : Ø 10. Et ce péché se montrait d'abord simiesque et sournois pour Durtal, au collège où chacun s'attentait et cariait les autres... GEORGES-CHARLES, DIT JORIS-KARL HUYSMANS, En route, tome 2, 1895, page 62. Remarque : Emploi non signalé dans les dictionnaires.