Définition du terme: DAME1, DAM2, substantif féminin et interjection.

Définition du terme: DAME1, DAM2, substantif féminin et interjection. DOMAINE DE LA PERSONNE ET/OU DE L'ACTIVITÉ HUMAINE. I.— Substantif féminin. A.— Personne adulte du sexe féminin. 1. [Par opposition à homme, personne adulte du sexe masculin] Femme adulte mariée ou non. a) SOCIÉTÉ CIVILE et MILITAIRE. Femme d'un certain rang social ou accomplissant certaines tâches sous la direction ou au service de dames d'un certain rang. a ) HISTOIRE et SOCIÉTÉ. — Membre de la noblesse. Dame châtelaine, dame du château. Comme une dame et un seigneur de l'ancien temps (ÉMILE ZOLA, Le Rêve, 1888, page 50 ). Tout roulait entre gens des montagnes, loin du curé, du magister et des dames de domaine (HENRI POURRAT, Gaspard des Montagnes, 1922, page 226) : Ø 1. Pauvre innocente qui se croit déjà dame et châtelaine, avec des comtes et des barons, et un page pour lui porter la queue de sa robe!... GEORGES BERNANOS, Sous le soleil de Satan, 1926, page 71. [Avec possessif] Notre dame la duchesse demande à parler à notre seigneur le duc (VICTOR HUGO, Lucrèce Borgia, 1833, 2, partie 1, 1, page 80 ). La dame de... (suivi du nom du lieu dont elle est suzeraine). Elle, cette dame de Beaumont, cette comtesse de Beaumont (elle était comtesse) (JULES BARBEY D'AUREVILLY, Memorandum pour l'A... B..., 1864, page 438 ). La dame du lieu (confer François-René de Chateaubriand, Le Génie du christianisme, tome 2, 1803, page 73 ). · HISTOIRE. [En parlant des filles du roi de France] Synonyme : Madame. Le roi avait au bal prétendu donner le pas à Mlle. de Lorraine sur des dames de France (JEAN GUÉHENNO, Jean-Jacques, 1952, page 280) : Ø 2.... et le faisant lever, elle le mena à la reine sa mère. Les ambassadeurs furent charmés de la manière, de la contenance, de la grâce et de l'esprit de cette jeune fille de France : ils disaient entre eux qu'elle serait une noble et excellente dame. PROSPER DE BARANTE, Histoire des ducs de Bourgogne de la maison de Valois, tome 2, 1821-24, page 142. [Par opposition au sens ancien du terme demoiselle A 1] On l'appelle mademoiselle, quoiqu'elle ait été mariée. Le nom de dame était encore réservé aux femmes nobles. Et elle reste demoiselle (JULES MICHELET, L'Insecte, 1857, page 395 ). · [Noblesse du XIXe. siècle et noblesse contemporaine] Femme de haute naissance chargée de certaines fonctions auprès de la reine, des princesses royales. Dans sa maison, entourée de ses gentilshommes et de ses dames, elle [la princesse de la maison de France] fait observer l'étiquette la plus rigoureuse (ANATOLE-FRANÇOIS THIBAULT, DIT ANATOLE FRANCE, Le Lys rouge, 1894, page 137 ). Dame d'atour(s). Dame chargée de la toilette. Telle dame d'atour de Madame soeur (GERMAINE NECKER, BARONNE DE STAËL, Considérations sur les principaux événements de la Révolution française, tome 2, 1817, page 228 ). Dame de compagnie. Le bon neveu René chambellan du prince Louis, sa femme dame de compagnie de la princesse, etc. (AURORE DUPIN, BARONNE DUDEVANT, DITE GEORGE SAND, Histoire de ma vie, tome 2, 1855, page 81 ). Dame d'honneur. Première dame de la suite de la souveraine et des princesses royales. Il [l'empereur] nous a nommé quelques-unes des personnes qu'on lui avait proposées pour dames d'honneur : la princesse de Vaudémont; une Mme. de la Rochefoucauld (EMMANUEL DIEUDONNÉ, COMTE DE LAS CASES, Le Mémorial de Sainte-Hélène, tome 1, 1823, page 195) : Ø 3.... James nous conduisit chez deux de ses amis locaux, qui auraient pu être une dame d'honneur et un chambellan pauvre de la reine Victoria réduits à l'indigence. JACQUES-ÉMILE BLANCHE, Mes modèles, 1928, page 181. Dame du palais. J'ai raconté à l'empereur l'anecdote de sa nomination de dame du palais (EMMANUEL DIEUDONNÉ, COMTE DE LAS CASES, Le Mémorial de Sainte-Hélène, tome 1, 1823page 642 ). · Par extension. [Usage commun à la haute bourgeoisie et à la noblesse] Dame du monde. Me voyant extrêmement riche, le but de ma vie était de devenir une dame titrée (HENRI BEYLE, DIT STENDHAL, Lucien Leuwen, tome 3, 1836, page 400 ). Depuis quand voit-on la suivante avoir la préséance sur la dame? (THÉOPHILE GAUTIER, Le Capitaine Fracasse, 1863, page 87 ). Quelques ouvrages de dévotion pour dames du monde (CHARLES MAURRAS, L'Avenir de l'intelligence, 1905, page 49 ). Femme qui se comporte comme une dame de la haute société. Oh! oh! la Rate est fringuée en dame (GABRIELLE COLLETTE, DITE COLETTE, L'Entrave, 1913, page 95 ). Dans son idée, je dois devenir une dame (GEORGES BERNANOS, Journal d'un curé de campagne, 1936, page 1250 ) Faire de quelqu'une une dame. Lui permettre d'accéder au rang de dame. Le seul voisinage de l'or paternel (...) a fait des dames de ces campagnardes (GUY DE MAUPASSANT, Mont-Oriol, 1887, page 86 ). Emploi adjectival. En cotillon de dessous, elles avaient un air très républicain, sauf de visage qui restait très dame sous la coiffure (JEAN GIONO, Le Hussard sur le toit, 1951, page 220 ). — Par analogie. · Personne exerçant une profession d'un certain rang ou dans des maisons d'un certain rang : Ø 4. Je sais qu'une indiscrétion a été faite alors que j'étais au front et, naturellement, par une femme, ma femme trop heureuse de soumettre au maître les plaquettes que j'avais publiées, (...) et de papoter et d'intriguer (...) avec l'amie de Rémy de Gourmont, sa vieille égérie de toujours et sa plus récente inspiratrice, Mme de C... et miss B... (...) et d'intéresser de si grandes dames de lettres au sort de son mari-soldat. BLAISE CENDRARS, Bourlinguer, 1948, page 320. [Suivi du nom du métier] Les plus connues de ces dames de théâtre (GUY DE MAUPASSANT, Contes et nouvelles, tome 2, Le Masque, 1889, page 1165 ). Ces dames les institutrices sont très aimables (GABRIELLE COLLETTE, DITE COLETTE, Claudine à l'école, 1900, page 42 ). [Suivi du nom d'une institution] Une de ses dernières affections fut pour Mademoiselle Verrières, dame de l'Opéra (AURORE DUPIN, BARONNE DUDEVANT, DITE GEORGE SAND, Histoire de ma vie, tome 1, 1855, page 33 ). Le ministre avait cédé la place à une dame de la Comédie Française (MAURICE DRUON, Les Grandes familles, tome 1, 1948, page 107 ). Dame de compagnie. Femme au service d'un particulier (homme ou femme) pour lui tenir compagnie et faire les honneurs de la maison. Nous ne réussissons pas à trouver une dame de compagnie pour ma pauvre maman! (GUSTAVE FLAUBERT, Correspondance, 1872, page 17 ). Elle se dépensa sans compter, tint la maison de ses parents, à Meudon puis à Paris, se fit gouvernante, infirmière, majordome, dame de compagnie, servante, sans pouvoir désarmer l'agacement muet de sa mère (JEAN-PAUL SARTRE, Les Mots, 1964, page 10 ). Par extension. Dame de comptoir (vieilli). Femme chargée de la caisse et de la vente dans certains établissements. La dame de comptoir du café qu'il fréquentait (GUSTAVE FLAUBERT, La Première éducation sentimentale, 1845, page 185 ). Je prenais, sur l'offre d'une des dames du comptoir, un bonbon extrait d'un des vases de verre entre lesquels elles trônaient (MARCEL PROUST, Le Temps retrouvé, 1922, page 826 ). Dame de vestiaire, de lavabo. Préposée au vestiaire, aux toilettes. On ne répond pas, dit la dame du lavabo (PAUL NIZAN, La Conspiration, 1938, page 12 ). Elsa (...) parla très fort à la dame du vestiaire (FRANÇOISE SAGAN, Bonjour tristesse, 1956, page 146 ). · [En parlant d'une personne à qui l'on s'adresse sous l'appellation Madame] Cette dame. On demande au Marquis, par quel hasard cette dame, qu'il appelle madame la Duchesse, attend dans la cour sans entrer (GABRIEL SÉNAC DE MEILHAN, L'Émigré, 1797, page 1625 ). La dame en question est Mme. Adam. D'Osmoy m'a dit qu'elle était plus puissante que tous les ministres (GUSTAVE FLAUBERT, Correspondance, 1878, page 84 ). — En particulier. Femme du monde qui consacre une partie de son temps à des oeuvres pieuses ou charitables. Il en est une [passion] surtout que nos dames de paroisse déguisent assez mal sous les apparences de dévotion dont elles cherchent à les couvrir (VICTOR-JOSEPH ÉTIENNE, DIT DE JOUY, L'Hermite de la Chaussée-d'Antin, tome 2, 1812, page 30 ). Un petit salut de protection comme en ont, à l'adresse des malheureux, les dames des bonnes oeuvres (ANDRÉ BRETON, Les Manifestes du Surréalisme, 2e. Manifeste, 1930, page 124 ). · Dame de charité. L'actrice se présenta avec la juste mesure d'aisance, avec la distinction accomplie d'une jeune dame de charité introduite chez une personne de son rang (EUGÈNE MELCHIOR, VICOMTE DE VOGÜÉ, Les Morts qui parlent, 1899, page 327 ). · Dame patronnesse. Dame patronnesse de trois crèches et de douze oeuvres recommandées par le cardinal-archevêque (ANATOLE-FRANÇOIS THIBAULT, DIT ANATOLE FRANCE, L'Orme du mail. 1897, page 63) : Ø 5.... on apprit que Mme Charmet était dame de charité, dame patronnesse de plusieurs oeuvres de bienfaisance, et qu'elle était chargée de distribuer aux pauvres les revenus d'une grande fortune. PIERRE-ALEXIS, VICOMTE PONSON DU TERRAIL, Rocambole, les drames de Paris, tome 2, 1859, page 76. — Péjoratif, par dérision. · Femme entretenue d'apparence bourgeoise. Dame du demi-monde. L'entreteneur de la dame (EDMOND DE GONCOURT, JULES DE GONCOURT, Journal, 1896, page 964 ). [Par allusion au roman de Dumas] Dame au(x) camélia(s). Vieilli. Il faudrait un rude limier pour trouver le rembucher d'une dame aux camélias (DENIS POULOT. Le Sublime, ou le Travailleur comme il est en 1870 et ce qu'il peut être. 1872, page 119 ). Croyez-vous toujours qu'il y a des dames au camélia (LOUIS ARAGON, Le Roman inachevé, 1956, page 221 ). [Par allusion ironique à la dame du Lac du roman de Lancelot] Dame du lac. Argot des gens de lettres, vieilli. Demi-mondaine qui cherche ses conquêtes au Bois de Boulogne, autour du lac : Ø 6. En désignant, sous le nom de cocottes, les élégantes du demi-monde, nous employons une expression vieillie, car depuis la dernière exhibition de Longchamp, ces charmantes dépensières s'appellent : les dames du Lac. PAUL AVENEL, Les Calicots, 1866, page 129. · Fille publique, souvent de luxe. Dame de petite vertu. Synonyme : prostituée. Aucune de ces « dames » [de la maison de prostitution] ne lui cherchait misère [à Élisa] (EDMOND DE GONCOURT, La Fille Élisa, 1877, page 45 ). Méfie-toi des dames de la rue, des dames qui font un métier de leurs charmes (GEORGES DUHAMEL, Le Jardin des bêtes sauvages, 1934, page 45 ). Ces messieurs-ci vivent du travail de ces dames-là (ALBERT CAMUS, La Chute, 1956, page 1477 ). · Petite dame (vieilli et populaire). Compagne attitrée et entretenue. Petites dames en chambre, modestes et jouant un rôle de veuve (ÉMILE ZOLA, Pot-Bouille, 1882, page 131 ). J' (...) ai appris que M. Xavier Frontenac, au vu et au su de toute la ville, entretenait une petite dame (FRANÇOIS MAURIAC, Le Mystère Frontenac, 1933, page 41 ). ß ) HISTOIRE et EXPRESSION LITTÉRAIRE. — [Emprunt à la théorie et au vocabulaire de l'amour courtois] Femme noble à laquelle se consacrait un chevalier. La dame de ses pensées; servir sa dame; porter le chiffre, les couleurs de sa dame. Synonymes : amie, maîtresse. Les accusations publiques d'inconstance, de félonie envers sa dame étaient suivies d'arrêts quelquefois sanglans (VICTOR-JOSEPH ÉTIENNE, DIT DE JOUY, L'Hermite de la Chaussée-d'Antin, tome 3, 1813, page 6 ). Le respect attendri du bon chevalier de la Manche pour sa dame Dulcinée (EUGÈNE MELCHIOR, VICOMTE DE VOGÜÉ, Les Morts qui parlent, 1899, page 149) : Ø 7. Le gentilhomme qui accomplit un exploit pour sa dame lui paraissait diminuer par là son exploit : il était choqué par ces fadaises, et détestait l'état d'esprit qui place l'homme, l'homme fort et raisonnable, sous la suprématie de la déficience féminine. HENRI DE MONTHERLANT, Les Bestiaires, 1926, page 417. · Par extension. Femme à laquelle un troubadour, un ménestrel offre ses hommages et son amour. Servir sa dame et sa patrie, C'est le devoir d'un troubadour (GUSTAVE NADAUD, Chansons, 1870, page 342 ). · Moderne, par ironie ou plaisant. Synonyme : dulcinée. La dame de mes pensées était une belle personne qui habitait la même maison que nous (RODOLPHE TOEPFFER, Nouvelles genevoises, 1839, page 478 ). Après avoir écrit cinq pages enflammées à la dame de son coeur (GUSTAVE FLAUBERT, La Première éducation sentimentale, 1845, page 67 ). — Usage rhétorique. Dame + abstraction personnifiée. Dame fortune, dame justice, dame nature. Dame convoitise en a rendu plusieurs traîtres à leurs souverains seigneurs (PROSPER DE BARANTE, Histoire des ducs de Bourgogne de la maison de Valois, tome 3, 1821-24, page 24 ). Dame police n'est pas très crédule de sa nature (FRANÇOIS VIDOCQ, Les Vrais mystères de Paris, tome 7, 1844, page 18 ). · Variante. Notre Dame la grammaire (VICTOR HUGO, Cromwell, 1827, page 35 ). Autre dame imposante, l'Histoire (PAUL VALÉRY, Lettres à quelques-uns, 1945, page 79 ). L'espoir de la victoire et d'une nouvelle grandeur pour « notre dame la France » (CHARLES DE GAULLE, Mémoires de guerre, 1954, page 132 ). b) RELIGION et SOCIÉTÉ RELIGIEUSE. a ) Notre-Dame. La Vierge Marie en tant que souveraine protectrice des hommes. Dame du ciel. Leurs grandes ailes [des anges] palpitent de joie à ce glorieux couronnement qui fait Dame du paradis l'humble servante du Seigneur (THÉOPHILE GAUTIER, Guide de l'amateur au Musée du Louvre, 1872, page 89 ). — Par métonymie. Église vouée à Notre-Dame. Notre-Dame de Paris. Les porches latéraux de Notre-Dame de Chartres, de la cathédrale de Bourges (EUGÈNE VIOLLET-LE-DUC, Entretiens sur l'architecture, 1872, page 238 ). ß ) Souvent au pluriel. Religieuse ayant prononcé ses voeux perpétuels et appartenant à un monastère ou à un couvent comportant une hiérarchie de ses membres. Les dames de la Visitation, du Sacré-Coeur. · Dame de choeur. Religieuse qui a sa place dans les hautes stalles du choeur (par opposition à novice et à converse). Synonyme : professe. Les dames de choeur vivaient en patriciennes (AURORE DUPIN, BARONNE DUDEVANT, DITE GEORGE SAND, Histoire de ma vie, tome 4, 1855, page 155 ). Les religieuses de tout âge, de tout air, de toute corpulence, les mères et les novices, les converses et les dames de choeur, les paysannes et les nobles (...) toutes gardant ce même air de restriction, de surveillance de soi et d'autrui contre l'infinie variété des périls (JOSEPH MALÈGUE, Augustin ou le Maître est là, tome 1, 1933, page 113 ). c) MYTHOLOGIE, FOLKLORE. Fée. Les fées étaient des dames aussi bien que les saintes; mais des dames voluptueusement parées (ANATOLE-FRANÇOIS THIBAULT, DIT ANATOLE FRANCE, La Vie littéraire, tome 3, 1891, page 246 ). Pour ces dames-fées qui sont trop rieuses (MAURICE BARRÈS, Mes cahiers, tome 10, 1914, page 255 ). · La dame du Lac. Fée protectrice de Lancelot. · La dame blanche. Être surnaturel dans les anciennes croyances celtes et allemandes. C'est la dame blanche qui passe sous les voûtes (VICTOR HUGO, Le Rhin, 1842, page 338) : Ø 8. Aussi peu qu'il soit habité des fées, chacun sent aux brouillards de son coeur sourdre les sources du celtisme. J'ai vu la dame blanche éternellement sous mes yeux, depuis ma petite enfance;... MAURICE BARRÈS, Mes cahiers, tome 9, 1912, page 295. d) Usuel. Personne adulte du sexe féminin. Une jeune, vieille dame; une dame âgée, entre deux âges. Synonyme : femme. L'almanach des dames (VICTOR HUGO, Correspondance, 1822, page 341 ). Son vieux coupé de dame dont les chevaux marchaient au pas (PAUL MORAND, Londres, 1933, page 168 ). SYNTAXE : Articles, confection, vêtements pour dames; coiffeur pour dames; compartiment de dames seules, toilettes de dames; faire des ouvrages de dame. · [Dans un langage courtois, aujourd'hui senti comme vieilli ou populaire] Être aimé des dames; plaire aux dames (Dictionnaire de l'Académie française. 1798-1932). Les graces d'un cavalier et de sa dame (JACQUES-HENRI BERNARDIN DE SAINT-PIERRE, Harmonies de la nature, 1814, page 297 ). Et ensuite il ne trouve rien de mieux à faire que d'aller vite occuper une place laissée libre! Au lieu de la laisser à une dame! (RAYMOND QUENEAU, Exercices de style, 1947, page 14 ). — Populaire ou familier. [Dans la formule de salutation] Messieurs dames. Ici,... ssieurs et dames, nous sommes à la hauteur de la galerie des rois (ROGER MARTIN DU GARD, Devenir, 1909, page 41 ). Bsoir msieurs dames, dit Pierrot (RAYMOND QUENEAU, Pierrot mon ami, 1942, page 169 ). · [Avec le démonstratif ces] Ces monsieur dame auront froid, dit l'aubergiste (MARCEL ARLAND, L'Ordre, 1929, page 315 ). Ces messieurs-dames exagéraient (ELSA TRIOLET, Le Premier accroc coûte deux cents francs, 1945, page 220 ). Remarque : Pour l'opposition ternaire « femme mariée, femme célibataire, monsieur », voir madame. 2. [Par opposition à demoiselle* B, personne non mariée] Femme mariée, et par extension femme d'un certain âge. a) Épouse de bourgeois fortuné ou appartenant à une classe sociale supérieure. Une belle, digne, noble dame; les dames de la bourgeoisie, de la ville. Les dames de Paris vous regarderaient comme une servante (GUY DE MAUPASSANT, Une Vie, 1883, page 243 ). Il était autre que tous ces gens-là, ces « messieurs », ces « dames », ces « riches » (JEAN GUÉHENNO, Jean-Jacques, 1950, page 161) : Ø 9. Une ville dont tous les habitants, même les plus pauvres, étaient des messieurs et des dames, et avaient droit à la soie noire, comme les citoyens romains à la toge. Et quelle capitale! VALÉRY LARBAUD, A. O. Barnabooth, 1913, page 207. — [Dans des syntagmes avec adjectif antéposé] · Belle dame. Il va d'ailleurs beaucoup dans le monde (...) chez les belles dames (JEAN GUÉHENNO, Jean-Jacques, 1952, page 281 ). [En appellatif] Votre serviteur, belle dame! (HONORÉ DE BALZAC, Un Homme d'affaires, 1845, page 414 ). · Grande dame. Voilà un homme (...) qui aura fait rire toute une génération de grandes dames et de grisettes (JULES FLEURY-HUSSON, DIT CHAMPFLEURY, Les Aventures de Mademoiselle Mariette, 1853, page 221 ). Il ne songe pas que les lettres de la jeune et belle grande dame ont dû brûler les mains de sa vieille maîtresse (JEAN GUÉHENNO, Jean-Jacques, 1950, page 195 ). · Vraie dame. Il fallait aller chez une vraie dame, si l'on voulait peindre une dame (GEORGES-CHARLES, DIT JORIS-KARL HUYSMANS, L'Art moderne, 1883, page 42) : Ø 10. Cela se raidit, cela fait la fière, cela veut se conduire comme une vraie dame, prendre des responsabilités et cela jouait à la poupée hier encore et au premier chagrin cela courait se jeter dans les jupes de sa maman. JEAN ANOUILH, La Répétition ou l'Amour puni, 1950, IV, page 110. — Dame de la maison, du logis (vieux). Synonyme : maîtresse de maison. Je vous suppose interné dans un salon bourgeois et prenant le café, après dîné, avec le maître de la maison, la dame de la maison et ses demoiselles (CHARLES BAUDELAIRE, L'Art romantique, 1867, pages 458-459 ). La dame du logis a des rentes sur l'État, une comptabilité irréprochable, et, si elle tient à quelque chose, c'est à la considération (PAUL BOURGET, Nouveaux Essais de psychologie contemporaine, préface. 1885, page 33 ). b) [En style noble de petit bourgeois] Épouse de petit bourgeois. a ) HISTOIRE. [En parlant de femmes du peuple, membres de certaines corporations, qui, dans certaines circonstances, pouvaient être reçues à la Cour] Capable enfin de porter sans trembler la parole au Roi au nom des Dames de la Halle, Angélique Madou recevait Gigonnet avec un profond respect (HONORÉ DE BALZAC, Histoire de la grandeur et de la décadence de César Birotteau, 1837, page 347) : Ø 11.... et l'on voyait accourir par le Pont-Vieux les dames de la halle et des lavoirs, avec des broches, des pelles, des pincettes, des battoirs et des chaudrons d'eau de Javel;... ANATOLE-FRANÇOIS THIBAULT, DIT ANATOLE FRANCE, L'Île des pingouins, 1908, page 301. ß ) Usuel. Épouse. Synonyme : femme. — [Suivi d'un nom propre] · [Nom de famille] La dame veuve une telle (Dictionnaire de l'Académie française. 1835-1932). L'affaire du sieur Ragoulleau et de la dame Morin (HONORÉ DE BALZAC, Le Père Goriot, 1835, page 192 ). · [Prénom] Je n'ai pas revu dame Solange (GEORGES DUHAMEL, Les Maîtres, 1937, page 270 ). — [Avec un possessif] Vieilli, populaire ou régionalisme. M. Rastoil, sa dame et sa demoiselle, passeraient la nuit chez les Paloque (ÉMILE ZOLA, La Conquête de Plassans, 1874, page 1211 ). Voulez-vous me permettre de vous offrir... des bonbons, pour votre dame et votre demoiselle? (PAUL BERNARD, DIT TRISTAN BERNARD, Monsieur Codomat, 1907, I, 7, page 158 ). Des consommateurs se serrent la main sans se connaître, mais il y a des années qu'ils viennent là avec leurs dames (LÉON-PAUL FARGUE, Le Piéton de Paris, 1939, page 43 ). — [En appellatif] Familier. Synonyme : Madame. · [Dans des syntagmes, généralement avec le possessif ma] Vous êtes bien difficile à confesser, ma belle dame (HONORÉ DE BALZAC, Gobseck, 1830, page 414 ). Figurez-vous, ma pauvre chère dame (MARCEL ARLAND, L'Ordre, 1929, page 220 ). · [Suivi du prénom] Dame Jeanine, un vieux comme moi, tanné par les orages, ne se trompe pas (ÉMILE ZOLA, L'Ouragan, 1901, I, 1, page 458 ). « Pauvre, pauvre chère dame Thérèse... » (ROGER MARTIN DU GARD, Les Thibault, L'Été 1914, 1936, page 198 ). — Par analogie et généralement par ironie. [En parlant d'animaux dont le nom est féminin ou en parlant de la femelle] Dame belette. Par le chant du rossignol, j'ai vu la dame rossignol ivre d'amour et de chanson nocturne, s'abandonner à la danse aurorale des feuilles (JEAN GIONO, L'Eau vive, 1943, page 116 ). c) [Dans le langage d'un domestique] La patronne. En voyant son ancienne dame, la mère Archambauld se confondit en prévenances (ALPHONSE DAUDET, Jack, tome 2, 1876, page 272 ). Adèle elle-même tapait sur l'ancienne demoiselle de sa dame (ÉMILE ZOLA, Pot-Bouille, 1882, page 269 ). B.— JEUX. 1. Par métonymie. [Par référence à I A 1 a a ] Figure représentant une dame souveraine. a) JEU DE CARTES. Deuxième figure du jeu (après le roi, avant le valet), représentant une reine couronnée. Dame de pique, de trèfle. Synonyme : reine. Il a brelan de dames (Dictionnaire de l'Académie française. 1835-1878). Un jeu de cartes patriotique dans lequel aux rois, aux dames, aux valets de l'ancien régime, il substituait des Génies, des Libertés, des Égalités (ANATOLE-FRANÇOIS THIBAULT, DIT ANATOLE FRANCE, Les Dieux ont soif, 1912, page 16 ). Un peu jeune pour la dame de coeur [Angèle] , mais la dame de son tableau [à de Vere] n'a rien à voir avec la nourrice des jeux de cartes ordinaires (MICHEL BUTOR, Passage de Milan, 1954, page 170) : Ø 12.... ils jouèrent au whist, le soir, au café du Commerce, mais son oeil triste déshabillait la reine de trèfle ou la dame de carreau, tandis que le problème des jambes absentes dans ces figures à deux têtes embrouillait tout à fait les images écloses en sa pensée. GUY DE MAUPASSANT, Contes et nouvelles, tome 1, Bombard, 1884, page 973. SYNTAXE : Avoir une tierce, une quatrième, une quinte à la dame; avoir un quatorze de dames; écarter une dame; jouer une dame. — La dame de pique. Par métonymie familier les cartes, le jeu. Aimer, courtiser, peloter la dame de pique. Aimer les cartes. Être un parfait honnête homme (...) ennemi de la dame de pique (OCTAVE FEUILLET, Honneur d'artiste, 1890, page 65 ). Après la dame du comptoir assez dodue et fort appétissante, il consacrait ses loisirs à la dame de pique (Dictionnaire de la langue verte (HECTOR FRANCE) 1907). b) JEU D'ÉCHECS. Seconde pièce du jeu en valeur (après le roi), qui représente une reine couronnée et qui seule peut marcher en tous sens, à moins d'être arrêtée par une autre pièce. Dame blanche, noire. Synonyme : reine. Donner échec au roi et à la dame (Dictionnaire de l'Académie française. 1798-1878) : Ø 13.... mon fou était ici, mon cavalier là, j'ai fait échec à la dame. LE DOCTEUR. — Et moi, avec la tour, je prends la dame. ALEXANDRE DUMAS PÈRE, Richard Darlington, 1832, I, 1, page 23. — (Aller) à dame. Mener un pion jusqu'à la dernière rangée de cases de l'échiquier (côté adversaire) où il prend la valeur d'une dame (Confer Dictionnaire de l'Académie Française 1798-1878). 2. JEU DE DAMES. a) Au singulier ou au pluriel. Pièce du jeu. a ) Chacune des pièces rondes et plates du jeu, appelé pour cette raison, jeu de dames (infra b). Dame touchée, dame jouée (Dictionnaire de l'Académie Française). Synonyme : pion. Pour le jeu de dames à la polonaise, celui qui se joue encore actuellement, on se sert d'un damier à cent cases et l'on emploie vingt dames ou pions (HENRI-RENÉ D'ALLEMAGNE, Récréations et passe-temps, 1904, page 54 ). — (Aller) à dame. Mener un pion jusqu'à la dernière rangée de cases du damier (côté adversaire) où il prend une valeur spéciale et est surmonté d'un pion de même couleur, signalant cette valeur (infra ß ) : Ø 14. JACOBUS. — C'est à vous, madame. MADAME D'ERMEL. — Vous le faites exprès, hein? (...) une, deux, trois, et à dame! JACOBUS. — C'est inouï!... OCTAVE FEUILLET, Scènes et proverbes, 1851, page 258. · Par extension, au figuré, populaire et vieilli. Aller, partir à dame. Tomber (parce que l'acquisition d'une dame par un joueur laisse présumer la défaite de l'autre joueur). J'y ai mis un de ces trimball'ments qu'il en a été à dame (ARISTIDE BRUANT. 1901, page 106 ). ß ) Spécialement. Pion qui, étant allé à dame, a été surmonté d'un autre pion, et peut marcher en diagonale à toute distance. La dame se déplace comme le pion dans le sens des diagonales. De plus, elle a la faculté de franchir une ou plusieurs cases libres, pourvu que ce soit en ligne droite, et de reculer dans les mêmes conditions (RENÉ ALLEAU. 1964). b) Par métonymie, au pluriel. Jeu pratiqué à deux sur un damier* de 100 cases avec 20 pions blancs posés sur quatre rangées pour l'un des joueurs et 20 pions noirs pour l'autre. Les dames; dames à la polonaise; faire une partie de dames. Paisibles joueurs de dames et de dominos (VICTOR-JOSEPH ÉTIENNE, DIT DE JOUY, L'Hermite de la Chaussée-d'Antin, tome 2, 1812, page 236 ). Partant des points sur lesquels toute l'année ils étaient disséminés en tirailleurs ou comme des pions au jeu de dames (MARCEL PROUST, À l'ombre des jeunes filles en fleurs, 1918, page 675 ). Quand il ne jouait pas à la manille, c'était au billard ou aux dames (LOUIS ARAGON, Les Beaux quartiers, 1936, page 33 ). · Dames à la française (vieux ou aujourd'hui dans les pays anglo-saxons). Jeu pratiqué sur un damier de 64 cases avec 12 pions disposés sur trois rangées pour chaque joueur (Confer D'Allemagne, loco citato). · Par métaphore. Une partie de dames où les pions étaient des hypothèses politiques (ROGER MARTIN DU GARD, Les Thibault, L'Été 1914, 1936, page 133 ). — Par métonymie. Jeu de dames. Le damier et les pièces du jeu. Les chariots (...) sont chargés de tables de jeu de trictrac, de jeux d'échecs et de dames, de sixains de cartes (VICTOR-JOSEPH ÉTIENNE, DIT DE JOUY, L'Hermite de la Chaussée-d'Antin, tome 1, 1811, page 55 ). Ils étaient (...) installés sur leurs talons devant un jeu de dames (EUGÈNE FROMENTIN, Un Été dans le Sahara, 1857, page 114 ). Remarque : On aurait pu envisager une deuxième entrée pour le jeu de dames, mais les interférences sont si nombreuses qu'il a été jugé plus logique de rattacher ces emplois aux autres sens du mot dame1. 3. Par analogie (de I B 2 a a ) [Au trictrac et au jacquet] Chacun des disques dont on se sert pour jouer (analogues aux pions du jeu de dames, mais généralement de taille supérieure). Faire avancer les dames, placer une dame sur une flèche (Dictionnaire des jeux (RENÉ ALLEAU) 1964, au mot jacquet. ). Quand toutes les dames d'un joueur sont passées dans la case où étaient empilées, au début, celles de l'adversaire, elles sont retirées du jeu (Dictionnaire des jeux (RENÉ ALLEAU) 1954, au mot trictrac. ). C.— [Pour désigner d'autres éléments] 1. Dame(-)d'onze(-)heures. Plante dont les fleurs sont ouvertes de onze à quinze heures environ. Synonyme scientifique : ornithogale en ombelle. Elle [une fleur] s'appellera la Dame d'onze heures (GABRIELLE COLLETTE, DITE COLETTE, Paysages et portraits, 1954, page 255 ). 2. [Dans des expressions désignant une bouteille ou divers contenus] — Dame-Jeanne. Confer ce mot. — Dame blanche (argotique). Bouteille de vin blanc. Une dame blanche! dit Gugusse au patron (...) Et du meilleur! (LORÉDAN LARCHEY, Dictionnaire historique d'argot, 1878, page 132 ). — Dame verte. (populaire). Absinthe. On a un peu calomnié la pauvre dame verte (LES EXCENTRICITÉS DU LANGAGE FRANÇAIS (LORÉDAN LARCHEY) Nouveau Supplément. 1889, page 78 ). Tombé dans la misère par suite d'un trop grand amour pour la dame verte (LES EXCENTRICITÉS DU LANGAGE FRANÇAIS (LORÉDAN LARCHEY) Nouveau Supplément 1889, page 78 ). 3. ART CULINAIRE. Dame blanche. Dessert consistant en glace à la vanille nappée de crème au chocolat (Confer Cuisine moderne et vieilles recettes, Tournay, 1962, page 169). II.— Interjection, familière, vieillie. [parfois sous la forme dam] . A.— [Exclamation marquant la surprise, l'assentiment du locuteur (par rapport à une chose ou à une assertion)] Mais, dame oui, dame non. Synonymes : parbleu, pardi. Dam, je ne sais pas, monsieur (LUDOVIC HALÉVY, Un Mariage d'amour, 1881, page 173 ). Dame! (...) petit mot, tout gros de sous-entendus, d'arrière-pensées, de potins (JEAN RICHEPIN, Césarine, 1888, page 190) : Ø 15. « Formidable!... C'est vous qui faites la cuisine, mademoiselle? » — « Dame! » — « Mes compliments! » La fille daigna sourire. ROGER MARTIN DU GARD, Les Thibault, L'Été 1914, 1936, page 399. — [Exclamation renforçant une déclaration] Dis donc, Fanny, te rappelles-tu un déjeuner ici (...) c'est loin, dam! (ALPHONSE DAUDET, Sapho, 1884, page 28 ). Mais sa mort, dame! il l'a soignée, rien n'y manque (GEORGES BERNANOS, Journal d'un curé de campagne, 1936, page 1193) : Ø 16. — Parce que je voulais crever assez vite dame! tout simplement! et nom de Dieu! bien sûr que non que je veux point mourir! LOUIS-FERDINAND DESTOUCHES, DIT CÉLINE, Voyage au bout de la nuit, 1932, page 395. B.— [Interjection dont l'emploi supposant une relation logique entre ce qui précède et ce qui suit, donne à l'énoncé une valeur de conclusion ou sert de charnière du discours] Dame! à force de poser au poitrinaire, on finit par se figurer qu'on l'est réellement (ALPHONSE DAUDET, Les Femmes d'artistes, 1874, page 55 ). Remarque : Dans la documentation on trouve 2 attestations de bé dame! : " eh bien, dame! " Bé dame, alors, c'est le plus malin des deux qui roule l'autre! (Joris-Karl Huysmans, Soeurs Vatard, 1879, page 126). Bé dame! Eh bien, oui (Rougé, Folklore de la Touraine, 1943, au mot dame). Dictionnaire général de la langue française au Canada (Louis-Alexandre Bélisle) 1957 atteste également " Bédame! Bien dame! " STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 12 258. Fréquence relative littéraire : XIXe. siècle : a) 13 534, b) 24 974; XXe. siècle : a) 23 776, b) 12 899.