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DERNIER, -IÈRE, DER, adjectif et substantif.

Publié le 08/01/2016

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DERNIER, -IÈRE, DER, adjectif et substantif.  

I.—  Qui est après tous les autres. 

A.—  [Par référence à l'espace; en parlant d'un inanimé concret]  Qui se situe après tous les autres. Dernier étage; dernière marche. Le dernier échelon de l'escalier (JULES JANIN, L'Âne mort et la femme guillotinée,  1829, page 171 ). Sur la dernière terrasse, tout en haut (GUY DE MAUPASSANT, Contes et nouvelles, tome 2, La Légende du Mont Saint-Michel, 1882, page 1256) : 

Ø 1. De temps en temps une petite fille blanche se fraie un passage jusqu'aux degrés de l'estrade, grimpe, se fait bousculer et reléguer aux derniers rangs par Mademoiselle, crispée de ces retards et qui ronge son frein sous sa voilette,...

GABRIELLE COLLETTE, DITE COLETTE, Claudine à l'école,  1900, page 302. 

—  Locution adverbiale au figuré. En dernier lieu, par ellipse en dernier. Après tout le reste, enfin. (Quasi-)synonyme : dernièrement. Derrière les premiers plans, des prolongements pleins de secret. Augustin aperçut en dernier lieu les lourds rideaux noirs revêtant la fenêtre (JOSEPH MALÈGUE, Augustin ou le Maître est là, tome 2, 1933, page 417 ). 

B.—  [Par référence au temps] 

1. [En parlant d'un inanimé abstrait, en particulier d'une division chronologique]  Qui vient après tous les autres. La dernière moitié du quatorzième siècle et la première moitié du quinzième (FRANÇOIS GUIZOT, Histoire générale de la civilisation en Europe depuis la chute de l'Empire romain jusqu'à la Révolution française, leçon 2, 1828, page 8 ). Le temps (...) changea avec le dernier quartier de la lune (JULES VERNE, Le Tour du monde en quatre-vingts jours,  1873, page 91) : 

Ø 2. La licence ès lettres lui prit [à Augustin] les deux derniers mois de l'année scolaire; une situation agréable et fructueuse dura jusqu'en fin de septembre et il eut encore quinze jours à donner aux siens.

JOSEPH MALÈGUE, Augustin ou le Maître est là, tome 1, 1933, page 287. 

2. [En parlant d'une personne ou d'un groupe de personnes] 

a) Qui arrive après tous les autres : 

Ø 3. La forme de son idéal [à Minna] était loin d'être fixée. Tantôt elle rêvait d'épouser un lieutenant, tantôt un poète dans le genre sublime et correct, à la Schiller. Un projet démolissait l'autre; et le dernier venu était toujours accueilli avec le même sérieux et une égale conviction.

ROMAIN ROLLAND, Jean-Christophe, Le Matin, 1904, page 187. 

—  Emploi comme substantif. Permettez-moi au moins de ne pas être le dernier à vous féliciter (ÉMILE HERZOG, DIT ANDRÉ MAUROIS, La Vie de Disraëli,  1927, page 69) : 

Ø 4. C'est ainsi qu'après avoir aperçu la première les vérités de ce qu'on appelle maintenant le darwinisme, la France a été la dernière à s'y rallier.

ERNEST RENAN, L'Avenir de la science,  1890, page VII. 

·    Proverbe. Aux derniers les bons. \" Ce qui reste de quelque chose après que les autres ont choisi est souvent le meilleur \" (Dictionnaire de l'Académie Française). 

b) [En parlant d'un membre d'une famille]  Qui est né après les autres. Dernier fils, rejeton. 

—  Emploi comme substantif. Synonyme : dernier-né. Mon petit dernier a la rougeole (CAVÉ ET DITTMER DITS MARQUIS DE FOUGERAY, Les Soirées de Neuilly, Une Conspiration de province, tome 1, 1827, page 152 ). Une mioche de neuf mois, Désirée, la dernière de Philomène (ÉMILE ZOLA, Germinal,  1885, page 1221 ). 

C.—  [Par référence à une suite comptable et ordonnée; en parlant d'un inanimé concret]  Qui prend rang après tous les autres. Dernier numéro; dernière édition; édition dernière. Le dernier morceau de la dernière sonate (HYPPOLYTE-ADOLPHE TAINE, Notes sur Paris,  1867, page 329) : 

Ø 5.... l'admirable ordonnance de certaines pièces de Baudelaire, telles que « l'Irréparable » et « le Balcon », où le dernier des cinq vers qui composent la strophe est l'écho du premier... 

GEORGES-CHARLES, DIT JORIS-KARL HUYSMANS, À rebours,  1884, page 156. 

Remarque : On rencontre dernier, en emploi substantival masculin dans le domaine des jeux (par ellipse par exemple de élément). Mon dernier. Dernière syllabe ou dernière partie d'un mot d'une charade qu'il faut deviner. Mon tout sur mon premier fait ouïr mon dernier [charade sur le mot pinson] (Grand dictionnaire universel du XIXe.  siècle (Pierre Larousse)). 

D.—  [Par référence à une échelle, à une hiérarchie de valeurs]  Qui vient après les autres dans un classement. Les animalcules qui composent la dernière classe du règne animal (JEAN-BAPTISTE LAMARCK, Philosophie zoologique, tome 1, 1809, page 206) : 

Ø 6. Et cependant, il serait inexact de dire que j'aie été tout à fait un mauvais élève; inégal plutôt, à surprises; un jour premier, dernier le lendemain, mais restant en somme dans une moyenne acceptable, avec toujours, à la fin de l'année, les prix de version.

JULIEN VIAUD, DIT PIERRE LOTI, Le Roman d'un enfant,  1890, page 216. 

—  Emploi comme substantif. J'aime mieux être le dernier dans ta maison que le premier ailleurs (ERNEST RENAN, Souvenirs d'enfance et de jeunesse,  1883, page 69 ). 

·    Locution verbale. Arriver, être bon dernier. Être classé nettement derrière les autres. Chacun arriva bon dernier (PAUL VERLAINE, Œuvres complètes tome 3, Dédicaces, 1890, page 95 ). 

II.—  Après lequel il n'y en a pas d'autres; après lequel il n'y a plus rien. 

A.—  [Par référence à l'espace]  Qui occupe une position extrême dans l'espace. Aller aux dernières limites de la mer gelée (FRANÇOIS-RENÉ DE CHATEAUBRIAND, Les Natchez,  1826, page 242) : 

Ø 7.... la chapelle de la Trinité, qui est comme au bout du monde breton. Au pied de la dernière et extrême falaise, elle pose sur un seuil de roches basses, tout près des eaux, et semble déjà appartenir à la mer.

JULIEN VIAUD, DIT PIERRE LOTI, Pêcheur d'Islande,  1886, page 252. 

—  Au figuré. Les dernières limites de la sobriété (JEAN-ANTELME BRILLAT-SAVARIN, Physiologie du goût ou Méditations de gastronomie transcendante,  1825, page 310 ). Il s'était élevé jusqu'aux dernières limites de l'insulte (JULES VERNE, L'Île mystérieuse,  1874, page 262 ). 

·    Locutions verbales. Être à la dernière extrémité; porter, pousser, réduire à la dernière extrémité, aux dernières extrémités; lutter, résister jusqu'à la dernière extrémité*; pousser dans ses derniers retranchements*. 

—  JEUX.  vieux, emploi substantif masculin  \" Chacune des deux ouvertures de la galerie d'un jeu de paume qui sont les plus éloignées de la corde \" (Dictionnaire de l'Académie Française). 

B.—  [Par référence au temps] 

1. [En parlant d'un inanimé abstrait, en particulier d'une division chronologique]  Qui marque le terme ultime. J'étois certain de n'aimer qu'elle jusqu'au dernier instant de mon existence (STÉPHANIE FÉLICITÉ DUCREST DE SAINT-AUBIN, COMTESSE DE GENLIS, Les Chevaliers du Cygne, tome 1, 1795, page 132 ). Ces derniers beaux jours d'automne (GEORGES-CHARLES, DIT JORIS-KARL HUYSMANS, L'Art moderne, 1883, page 37) : 

Ø 8. J'ai appris cet après-midi par Jean-Louis que l'on avait jusqu'au 5 avril dernière limite pour remettre les articles sur Valéry, pour le numéro du Divan. 

CHARLES DU BOS, Journal,  1922, page 70. 

—  Locutions. 

a) Locution à valeur adjectivale. De (la) dernière heure. Qui survient au dernier moment. Un changement de dernière heure (ROGER VAILLAND, Drôle de jeu,  1945, page 128 ). 

b) Locution adverbiale. 

·    En dernière analyse*. 

·    À la dernière minute. Tout à fait à la fin, au dernier moment (souvent avec un aspect de précipitation). Mes devoirs, toujours faits à la dernière minute, à la diable (JULIEN VIAUD, DIT PIERRE LOTI, Le Roman d'un enfant,  1890, page 92 ). 

·    Pour la dernière fois, une dernière fois. Sans que cela puisse jamais se reproduire. Je pensai : « Je le vois pour la dernière fois » (JEAN-PAUL SARTRE, La Nausée,  1938, page 203 ). 

·    Pour la première et (la) dernière fois. Pour une fois unique, une fois pour toutes. Pour la première fois de sa vie peut-être, pour la première et dernière fois (GEORGES BERNANOS, L'Imposture,  1927, page 510 ). 

·    En dernier résultat*. 

c) Locutions verbales. 

·    Avoir le dernier mot, par ellipse (vieux), avoir le dernier (Dictionnaire de l'Académie Française). Avoir la dernière réplique; par extension l'emporter dans une discussion ou un débat. Avec le diable on a toujours grand tort d'engager la conversation, car, de quelque manière que l'on s'y prenne, il veut toujours avoir le dernier mot (ANDRÉ GIDE, Journal,  1917, page 621 ). 

·    C'est/voici mon dernier mot. C'est/voici ma détermination, sur laquelle je ne reviendrai pas. Voici mon dernier mot, Norine. J'épouse la petite (MARCEL PAGNOL, Fanny,  1932, I, 2e.  tableau, 4, page 84 ). 

·    Mettre, donner la dernière main à quelque chose Apporter les ultimes retouches ou ajouts à une oeuvre pour la fignoler ou l'achever. Mettre la dernière main à ma traduction (...) de Xénophon (PAUL-LOUIS COURIER, Lettres de France et d'Italie,  1808, page 768 ). 

·    Rendre le dernier soupir*, rendre les derniers devoirs*. 

Remarque : On rencontre dernier en emploi substantival masculin dans le domaine des jeux de société (par ellipse par exemple de rang). Avoir le dernier (vieux.) Être touché le dernier par un autre joueur. Ne vouloir jamais avoir le dernier (Dictionnaire de l'Académie Française 1798-1878). 

SYNTAXE : a) Dernier + inanimé concret Dernier asile, baiser, évangile*, hoquet, lien, rayon (de soleil), reflet, refuge, regard, repas, sommeil*, train; dernière convulsion, crise, demeure*, étape, étincelle, lueur, parole, syllabe, trace. b) Dernier + inanimé abstrait Dernier coup de, effort, entretien, espoir, hommage, voeu; dernière aventure, chance, entrevue, espérance, illusion, ressource, tentative, ressort (voir ressort2 ); dernières dispositions, instructions, recommandations, volontés*. c) Dernier + inanimé abstrait marquant une division chronologique. Dernier dimanche, matin, moment, soir; dernière heure*, dernière seconde; dernières heures. 

2.  [En parlant d'une personne] 

a) Qui existe encore après la disparition de tous les autres membres de sa famille. Dernier survivant Le dernier représentant de cette famille (PIERRE-ALEXIS, VICOMTE PONSON DU TERRAIL, Rocambole, les drames de Paris, tome 4, 1859, page 397) : 

Ø 9. Cette maladie prévue et cette mort certaine donnaient un charme de plus à cette petite créature, la dernière des Pomaré, la dernière des reines des archipels tahitiens.

JULIEN VIAUD, DIT PIERRE LOTI, Le Mariage de Loti,  1882, page 28. 

b) [Avec un substantif à forte valeur affective]  Après lequel on ne peut trouver personne de valeur comparable. Brutus et Cassius furent les derniers des [vrais] Romains (Dictionnaire de l'Académie française.  1798-1932). Le dernier poète de la patrie de Virgile chantait le dernier guerrier de la patrie de César (FRANÇOIS-RENÉ DE CHATEAUBRIAND. Mémoires d'Outre-Tombe, tome 2, 1848, page 662 ). Les vertus chrétiennes de ce dernier des barons féodaux [Condé] (JULES LEMAÎTRE, Les Contemporains, 1885, page 190 ). 

3.  [En parlant d'un inanimé]  Le plus récent, le plus proche du moment actuel. Promenade, faite dimanche dernier en compagnie de Forain (EDMOND DE GONCOURT, JULES DE GONCOURT, Journal,  1882, page 155 ). Une grande maison carrée (...) bâtie au commencement du siècle dernier (ÉMILE ZOLA, Germinal,  1885, page 1194) : 

Ø 10. Une oeuvre (...) n'est jamais achevée. Il y a instabilité essentielle du jugement qui compare l'état dernier et l'état final, le novissimum et l'ultimum.

PAUL VALÉRY, Littérature,  1930, page 45. 

—   Par ellipse le dernier (de) + nom propre.  La dernière oeuvre de. Le dernier de Maupassant Un livre formidable (MARCEL AYMÉ, La Mouche bleue,  1957, page 38 ). 

—  Emploi comme substantif. Mme.  Achille m'écrit des lettres incompréhensibles, la dernière dément toujours la précédente (GUSTAVE FLAUBERT, Correspondance,  1879, page 225 ). 

—  Locution adverbiale. Ces derniers temps, ces temps derniers, dans ces derniers temps. Il n'y a pas longtemps. Synonymes : dernièrement, récemment. Un livre (...) réimprimé ces temps derniers (PAUL CLAUDEL, Correspondance [avec André Gide] , 1911, page 160 ). Mme.  Beauchamp menait dans ces derniers temps une vie très... distraite (GEORGES BERNANOS, Un Crime,  1935, page 773 ). 

4. [En parlant d'un animé ou d'un inanimé]  Ce dernier, cette dernière. Ce, cette (dont on vient de parler en dernier lieu). Ce dernier argument, détail, trait; ces derniers mots. Ce dernier moyen a pour but d'éventer les fluides (GEORGES-CHARLES, DIT JORIS-KARL HUYSMANS, Là-bas, tome 2, 1891, page 177 ). 

—  Emploi comme substantif.  Celui-ci, celle-ci (dont on vient de parler). Au nombre de ces derniers : 

Ø 11. Et Auguste, la mine maussade, sans transition, offrit à Octave d'entrer chez eux. Ce dernier, pris à l'improviste, hésitait, était sur le point de refuser, en songeant au peu d'importance de la maison.

ÉMILE ZOLA, Pot-Bouille,  1882, page 182. 

SYNTAXE : 1. Dernier est antéposé. a) Dernier + inanimé concret Dernier roman; dernière récolte, rencontre, séance, session, visite. b) Dernier + inanimé abstrait Dernière aventure, entrevue, guerre; les derniers événements, ces dernières vacances. c) Dernier + inanimé abstrait marquant une division chronologique. Le dernier automne, demi-siècle, hiver, séjour; ces derniers jours; dernière semaine; ces dernières années, heures. 2. Dernier est postposé. Inanimé abstrait marquant une division chronologique + dernier. L'an, dimanche, l'été, l'hiver, jeudi, le mois dernier; ces jours derniers; l'année, la nuit, la saison, la semaine dernière. 

C.—  [Par référence à une quantité, à une suite comptable] 

1. [En parlant d'un inanimé concr]  Après lequel il n'y a plus rien. Votre tête répond de son dernier cheveu [à Richard] (VICTOR HUGO, Cromwell,  1827, III, 2, page 193 ). Allumer une dernière cigarette (MAURICE BARRÈS, Un Homme libre,  1889, page 201) : 

Ø 12. J'admirais beaucoup mon oncle, le capitaine, tant parce qu'il avait brûlé la dernière cartouche française à Waterloo que parce qu'il apprêtait de ses propres mains, à la table de ma mère, des chapons à l'ail,...

ANATOLE-FRANÇOIS THIBAULT, DIT ANATOLE FRANCE, Le Crime de Sylvestre Bonnard,  1881, page 286. 

—  Jusqu'au dernier + substantif. Ils avaient déjeuné, mangé leur pain jusqu'à la dernière miette, et bu leur vin jusqu'à la dernière goutte (GUY DE MAUPASSANT, Contes et nouvelles, tome 1, Petit soldat, 1885, page 188 ). Lutter jusqu'au dernier sou et jusqu'à la dernière goutte de sang (ÉMILE ZOLA, La Débâcle,  1892, page 508 ). 

—  Emploi comme substantif. On n'avait pas hissé de pavillon parce qu'on n'en avait plus; les cafards avaient mangé le dernier (JULIEN VIAUD, DIT PIERRE LOTI, Mon frère Yves,  1883, page 347 ). 

SYNTAXE : Dernière bouchée, bouteille, gorgée; dernières cartouches*. 

2. [En parlant d'une personne]  Rare, postposé.  Après lequel il n'y en a plus d'autre. L'héroïque courage de l'empereur Constantin dernier (EUGÈNE DELACROIX, Journal,  1823, page 21 ). 

D.—  [Par référence à une échelle de valeurs; souvent avec une valeur intensive] 

1.  [En parlant d'un inanimé]  Qui occupe une position extrême; le plus haut, le plus fort, le plus grand. Synonymes : intense, suprême, ultime. Ses yeux exprimèrent l'agonie d'une anxiété dernière (PAUL BOURGET, Le Disciple,  1889, page 192 ). Ce coup de coude (...) fut comme le cinglement, la poussée dernière qui le décida (ÉMILE ZOLA, L'Argent,  1891, page 46) : 

Ø 13. Oui, la rencontre des bouches est la plus parfaite, la plus divine sensation qui soit donnée aux humains, la dernière, la suprême limite du bonheur.

GUY DE MAUPASSANT, Contes et nouvelles, tome 1, Le Baiser, 1882, page 607. 

Ø 14.... sous Louis-Philippe, (...) l'on vit enfin l'enrichissement se proposer sans vergogne et sans fard comme suprême leçon, vérité dernière, moralité définitive d'un demi-siècle d'expériences politiques et sociales.

PAUL VALÉRY, Variété II,  1929, page 110. 

—  Locution adverbiale. Au dernier degré*; au dernier point*. 

—  Locutions verbales. Être du dernier bien, du dernier mieux, par ellipse être du dernier avec quelqu'un. Être intime avec lui (confer bien2 B 2 b). S'abandonner aux, commettre les derniers excès*; obtenir les dernières faveurs (d'une femme) (confer faveur); être de la dernière importance*; essuyer, subir les derniers outrages*. 

SYNTAXE : Le dernier supplice*; le jugement dernier*; la dernière énergie, insolence, évidence, tentative; fins dernières (confer fin). 

2. En particulier. 

a)  [En parlant d'un inanimé]  Le plus élevé dans l'échelle des valeurs. Dernier chic, cri*; dernière élégance. Toile (...) goudronnée à la dernière mode de la Cour (THÉOPHILE GAUTIER, Le Capitaine Fracasse,  1863, page 96 ). Des soies (...) vendues (...) comme la dernière nouveauté de Paris (ÉMILE ZOLA, La Terre, 1887, page 189 ). 

Remarque : Dans ces emplois figés, restreints au domaine de la mode, la valeur temporelle de dernier (confer supra II B 3) est également sensible. 

—  Le dernier mot de. Le comble de : 

Ø 15.... un restaurant du Palais-Royal, jadis fameux, aujourd'hui démodé, mais que le docteur Sarrasin continuait de considérer comme le dernier mot du raffinement parisien.

JULES VERNE, Les Cinq cents millions de la Bégum,  1879, page 24. 

b) [En parlant d'une personne ou parfois d'un inanimé abstrait]  Le plus bas dans l'échelle des valeurs, le plus vil, le plus méprisable : 

Ø 16. Il [Jésus] semble quelquefois railler, en vérité.

Songez qu'il a choisi la dernière cité

Du dernier peuple, et, dans la cité tout entière,

Une femme et, parmi les femmes, la dernière!

EDMOND ROSTAND, La Samaritaine,  1897, 3e.  tableau, 1, page 136. 

—  Emploi comme substantif. Une salope qui a traîné avec le dernier des cochons (ÉMILE ZOLA, La Terre,  1887, page 293 ). 

·    Le dernier des derniers, la dernière des dernières. Le/la plus méprisable de tous. À l'heure présente, les derniers des derniers savent très bien faire « remuer des gens communs » (EDMOND DE GONCOURT, JULES DE GONCOURT, Journal,  1889, page 928) : 

Ø 17. Si je faisais une chose pareille, je n'oserais plus regarder personne dans les yeux, je me croirais la dernière des dernières, je serais une vraie fille des rues! et c'est vous qui me proposez ça?

MARCEL PAGNOL, Fanny,  1932, I, 2e.  tableau, 6, page 106. 

·    C'est le dernier à qui... C'est à lui moins qu'à tout autre que... C'est le dernier homme à qui je me confierais, à qui je voudrais demander un service (Dictionnaire de l'Académie française.  1835-1932). 

·    Le dernier de mes soucis (familier). Le moindre, le cadet* de mes soucis. Le petit rentier déclara tout net qu'il ne s'intéressait pas au coeur et que même le coeur était le dernier de ses soucis (ALBERT CAMUS, La Peste,  1947, page 1447 ). 

Remarque : 1. Place de l'adjectif dernier. a) Quand son sens le rattache à la série des adjectifs ordinaux, dernier est généralement antéposé; il peut également être attribut. b) Quand il a une valeur de superlatif, il est généralement antéposé, sauf dans une langue plus soutenue ou dans quelques syntagmes figés (confer supra II D 1). c) Quand il a une valeur temporelle, sa place joue un rôle discriminatif : antéposé, il marque la fin d'une série (confer supra I), postposé, il marque l'antériorité immédiate; dans certains emplois figés du domaine de la mode, la valeur superlative l'emporte et dernier est antéposé (confer supra II D 2 a). 2. On rencontre dans la documentation le dérivé par apocope der, adjectif et substantif, argotique et populaire a) [Correspond à dernier I]  Qui est après tous les autres. [Invitée par le renard, la cigogne] radina, fonça à tout berzingue, N'étant jamais la der pour la foire et la bringue (MARCUS, 15 fables, 1947, page 5). b) [Correspond à dernier II] Le (la) der des der. Le tout dernier, la toute dernière. Le der des der. Le tout dernier verre, la toute dernière tournée. Eux, fanfarons, s'étaient remis à boire : la tournée du gagnant, puis « le dernier »; puis « le der des der » (ROLAND DORGELÈS, Croix de bois, 1919, page 188). La der des der(s). La dernière guerre, celle après laquelle il n'y en aura plus. On ne peut avoir tous les ans une guéguerre, la der-des-ders à annoncer comme vacances (BLAISE CENDRARS, Bourlinguer, 1948, page 302). Nous avons fait la der des der, voilà la vérité. Vainqueurs ou vaincus, c'est du pareil au même (JEAN-PAUL SARTRE, Mort âme, 1949, page 71).  Jeux (belote). Dix de der. Gratification de dix points qui s'obtient en faisant la dernière levée. Belote, rebelotte et dix de der (DICTIONNAIRE ALPHABÉTIQUE ET ANALOGIQUE DE LA LANGUE FRANÇAISE  (PAUL ROBERT ) Supplément 1971). 

STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 39 939. Fréquence relative littéraire : XIXe.  siècle : a) 59 486, b) 59 165; XXe.  siècle : a) 57 943, b) 52 545. 

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