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ENVERS2, substantif masculin

Publié le 29/01/2016

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ENVERS2, substantif masculin. À L'ENVERS, locution adverbiale.  

I.—  Substantif masculin. 

A.—  [En parlant d'une chose concrète]  Côté qu'on ne voit pas au premier abord. Antonyme : endroit. 

1. [En parlant d'une chose fabriquée par l'homme]  Face non destinée à être vue, par opposition au beau côté. Synonymes : dessous, derrière, dos, mauvais côté, mauvais endroit. Le jardinier, un long couteau à la main, (...) faisait le signe de la croix sur l'envers du pain bis (RENÉ TARDIVAUX, DIT BOYLESVE, La leçon d'amour dans un parc,  1902, page 30 ). Pas de plafond, on touchait de la main l'envers des tuiles brunes (MAXENCE VAN DER MEERSCH, L'Empreinte du dieu,  1936, page 116) : 

Ø 1.... il courut à la cheminée, détacha un petit portrait en miniature pendu près de la glace, et, le retournant, passa sa manche sur le carton poussiéreux qui en formait l'envers. 

JULES VERNE, Les Cinq cents millions de la Bégum,  1879, page 46. 

—  En particulier. 

a) Envers d'une étoffe, d'un vêtement, d'un ouvrage de tapisserie. Côté intérieur (où apparaissent les coutures ou les fils de la trame). Synonymes : dessous, revers, mauvais côté. De l'envers de sa veste, il tira un portefeuille (HENRI POURRAT, Gaspard des Montagnes,  1931, page 273 ). Je tripote toutes mes doublures... ma culotte... envers... endroit... (LOUIS-FERDINAND DESTOUCHES, DIT CÉLINE, Mort à crédit,  1936, page 224) : 

Ø 2.... un manteau qu'elle ne reconnaissait pas, (...). Mais le manteau étant hors d'usage, Françoise l'avait fait retourner et exhibait un envers de drap uni d'un beau ton.

MARCEL PROUST, À l'ombre des jeunes filles en fleurs,  1918, page 649. 

·    Locution figurée. 

L'envers du décor, des tapisseries. La situation réelle, les ressorts véritables d'un acte. Tous les souverains aiment à connaître l'envers des tapisseries, et savoir les véritables motifs des événements que le public regarde passer bouche béante (HONORÉ DE BALZAC, Spendeurs et misères des courtisanes,  1847, page 494 ). 

L'envers et l'endroit. Tous les aspects, tous les détails d'une réalité (examinée dans tous les sens, sous tous ses aspects, sur toutes les coutures). Mon petit, en littérature, chaque idée a son envers et son endroit (HONORÉ DE BALZAC, Les Illusions perdues,  1843, page 422 ). 

·    Locution prépositive. À l'envers de, Sur le côté intérieur de. C'était à l'envers du velours le coton sans magnificence (LOUIS ARAGON, Le Roman inachevé,  1956, page 146 ). 

·    Étoffe sans envers (moderne), à deux envers (vieux). Étoffe de très belle qualité, dont l'envers est aussi beau que l'endroit. Synonyme : (pour un vêtement) réversible. Dauphines sans envers en pièces, points de Gênes et d'Alençon (VICTOR HUGO, Les Misérables, tome 2, 1862, page 613 ). 

·    Locutions verbales figurées. 

L'envers vaut l'endroit [En parlant des beaux côtés cachés, des dessous de quelqu'un, de quelque chose]  Elle a une nuque qui n'est pas si mal. Mais est-ce assez? « L'envers vaut l'endroit », disent les petits tailleurs (HENRI DE MONTHERLANT, Pitié pour les femmes,  1936, page 1146 ). « Pourquoi conserver des opinions hors d'usage? Confiez-les-nous! L'envers vaut l'endroit » (JULIEN GREEN, Journal,  1938, page 140 ). 

Faire de son envers l'endroit. Se retourner complètement, changer totalement de point de vue. Synonyme : faire volte-face. J'ai fait de mon envers l'endroit, je me suis retourné comme un gant (GEORGES BERNANOS, Monsieur Ouine,  1943, page 1560 ). 

·    Par analogie et au figuré. Médaille sans envers. Réalité sans côté déplaisant Les rapports humains devraient se réduire à des parties d'échecs. Sauf pour la camaraderie! Ça, c'étaient de véritables rapports humains, une médaille sans envers (ELSA TRIOLET, Le Premier accroc coûte deux cents francs,  1945, page 261 ). 

b) Envers d'un feuillet. Synonymes : dos, verso; antonyme : recto. L'envers blanc d'une étiquette (MARCEL PROUST, Du côté de chez Swann, 1913, page 51 ). J'avais noté neuf choses à lui dire, sur l'envers d'une carte de visite (HENRI DE MONTHERLANT, Le Songe,  1922, page 191 ). 

·    Par métaphore. À l'ombre des journaux délirants d'appels aux sacrifices ultimes et patriotiques, la vie, strictement mesurée, farcie de prévoyance, continuait et bien plus astucieuse même que jamais. Tels sont l'envers et l'endroit, comme la lumière et l'ombre, de la même médaille (LOUIS-FERDINAND DESTOUCHES, DIT CÉLINE, Voyage au bout de la nuit,  1932, page 92 ). 

2. [En parlant d'une chose naturelle]  Côté opposé à celui qui est exposé à la lumière ou au regard. Quelques beaux papillons, (...) portant, à l'envers des ailes, une grosse macule nacrée (ANDRÉ GIDE, Voyage au Congo,  1927, page 685 ). L'envers des nuages du côté qui regarde le zénith (JOSEPH MALÈGUE, Augustin ou le Maître est là, tome 2, 1933, page 12 ). 

B.—  Au figuré.  [En parlant d'une réalité, des choses de la vie] 

1. Aspect qui n'apparaît pas à première vue, qui n'est pas saisissable, palpable; le côté caché, mystérieux. 

—  Par extension, péjoratif.  Les aspects que l'on cache, les petits côtés peu brillants, honteux ou ridicules. Synonyme : les dessous. Flaubert et ses amis aimaient à se figurer les dessous, l'envers de la vie rouennaise (ALBERT THIBAUDET, Réflexions sur la littérature,  1936, page 170 ). 

—  En particulier, emploi absolu, rare. Homme à deux envers. Homme double, hypocrite, ambigu dans ses opinions, contradictoire dans son comportement. Synonymes : fourbe, trompeur. Un autre être existait encore, en lui : cet esprit se dédoublait, et, après l'endroit apparaissait l'envers de l'écrivain, un fanatique religieux et un prophète biblique (GEORGES-CHARLES, DIT JORIS-KARL HUYSMANS, À rebours,  1884, page 206 ). 

2. Aspect opposé à celui qui devrait normalement se présenter à la vue, forme superficielle voilant la réalité profonde de quelque chose. Pour ce qui est de ton échec, dis-toi bien que « nous ne voyons jamais que l'envers de notre destinée » (HENRI, ALBAN FOURNIER, DIT ALAIN-FOURNIER, Correspondance [avec Jacques Rivière] , 1905, page 36 ). Je pense que le temps n'est que la forme matérielle de la pensée et comme l'envers d'une activité créatrice à laquelle il ne tient qu'à moi d'être intérieurement lié (JOE BOUSQUET, Traduit du silence,  1935-36, page 189 ). 

a) [Par opposition au dedans, au fond des choses, à la réalité intérieure] :

Ø 3.... l'universelle gravité des corps, dont nous sommes tant frappés, n'est que l'envers ou l'ombre de ce qui meut réellement la nature. Pour apercevoir l'énergie cosmique « fontale », il faut, si les choses ont un dedans, descendre dans la zone interne ou radiale des attractions spirituelles.

PIERRE TEILHARD DE CHARDIN, Le Phénomène humain,  1955, page 294. 

b) [Par opposition à l'au-delà, à la réalité supérieure] :

Ø 4. Heureux ceux qui croient qu'au-dessus de l'ordre de la politique règne l'ordre de la charité, que l'histoire visible est l'envers de la véritable histoire et qu'il existe un autre Royaume que les royaumes de ce monde meurtrier! 

FRANÇOIS MAURIAC, Le Baîllon dénoué,  1945, page 458. 

3. Aspect opposé complémentaire (d'une réalité, envisagée sous sa double forme). Aucun mot ne possède un sens unique (...). Tout mot a pour envers une idée générale, ou du moins généralisée (RÉMY DE GOURMONT, Esthétique de la langue française, 1899, page 315 ). Les massifs d'arbres (...) prenaient des teintes noir olive, et semblaient l'envers de quelque couleur (JOSEPH MALÈGUE, Augustin ou le Maître est là, tome 2, 1933, page 24) : 

Ø 5. Un ouvrage bien complet ne doit pas avoir besoin qu'on le réfute. L'envers de chaque pensée doit y être indiqué, de manière que le lecteur saisisse d'un seul coup d'oeil les deux faces opposées dont se compose toute vérité.

ERNEST RENAN, Drames philosophiques, Le Prêtre de Nemi, 1885, page 526. 

—  Par extension.  [Dans la locution figée, c'est l'envers de la médaille, \" toute médaille a son revers \"]  Toute chose a son mauvais côté, son aspect désagréable. L'envers de la gloire. Synonymes : rançon, contrepartie. Plus il était seul, plus il s'obstinait à avoir raison; c'était l'envers inévitable de ses qualités souveraines de fermeté, d'élan et de confiance (JEAN JAURÈS, Études socialistes,  1901, page 60 ). Il semble que mon bonheur soit l'envers du malheur des autres, que je ne sois capable d'être heureux qu'aux frais d'autrui (GEORGES BERNANOS, La Joie, 1929, page 586) : 

Ø 6.... les enfants n'y pensent pas plus [à l'état présent chèrement acquis] qu'à l'air qu'ils respirent; en revanche, ils seront sensibles à des désagréments qui ne sont que l'envers des avantages douloureusement conquis pour eux.

HENRI BERGSON, Les Deux sources de la morale et de la religion, 1932, page 312. 

·    Compensation. Le droit de grâce n'a pas d'envers : le roi, qui peut gracier le banqueroutier frauduleux, ne rend rien à la victime dépouillée (HONORÉ DE BALZAC, La Maison Nucingen, 1838, page 653 ). 

4. Aspect contradictoire, sens contraire, inverse de quelque chose. 

a) de ce qui est. L'envers de la vérité. Obligé, comme les grands poètes comiques, comme Molière et Rabelais, de considérer toute chose à l'endroit du pour et à l'envers du contre, il était sceptique, il pouvait rire et riait de tout (HONORÉ DE BALZAC, Les Illusions perdues,  1843, page 237) : 

Ø 7. « Un cheval, je le savais, vient au monde les antérieurs d'abord : la naissance, c'est le premier saut. (...) (Dans une contraction violente, Querelle a chassé autre chose de son ventre, une forme oblongue, le début de la tête). (...) j'avais l'impression qu'une présence envahissait l'écurie, et c'était brutal, étincelant, l'envers de la mort, son échec. La mort de la mort, la vie. LA VIE ».

CHRISTINE DE RIVOYRE, Le Petit matin, Paris, Livre de poche, 1968, page 162. 

b) de ce qui devrait être (l'aspect négatif, péjoratif ou caricatural). L'envers du bon sens (= le non sens). Léo. —  Je ne sais pas si c'est un drame ou un vaudeville. De toute manière c'est un chef-d'oeuvre. Georges. —  Un chef-d'oeuvre de monstruosité. (...) Léo. —  Tu as gagné l'envers du gros lot, mon pauvre Georges (JEAN COCTEAU, Les Parents terribles,  1938, I, 8, page 218 ). L'éloquence et son envers, le verbalisme (EMMANUEL MOUNIER, Traité du caractère,  1946, page 124 ). 

II.—  À l'envers,  locution adverbiale ou locution adjectivale. 

A.—  Du mauvais côté, du côté qui n'est pas destiné à être vu (le côté le moins beau en dehors). Antonymes : à l'endroit, du bon côté, dans le bon sens, correctement. 

1. Sens devant derrière. [En parlant d'une étoffe, d'un vêtement]  Le côté de devant étant placé derrière. Il a mis ses bretelles à l'envers. Il ne retrouve pas l'une de ses chaussettes (LOUIS FARIGOULE, DIT JULES ROMAINS, Les Hommes de bonne volonté,  1938, page 236 ).  [En parlant d'un objet à deux faces]  La face retournée, le dos étant présenté à la vue. Des toiles appuyées à l'envers contre le pied des chevalets (HENRI MEILHAC, LUDOVIC HALÉVY, La Cigale,  1877, III, 3, page 111 ). 

2. Sens dessus dessous. 

a) Le côté intérieur à l'extérieur. Synonyme : retourné. Et il mit son gilet à l'envers, signe évident d'un violent combat intérieur (VICTOR HUGO, Notre-Dame de Paris,  1832, page 304 ). Dans sa précipitation, il lui arrivait souvent de la mettre à l'envers, ou sens devant derrière [sa perruque] (AURORE DUPIN, BARONNE DUDEVANT, DITE GEORGE SAND, Histoire de ma vie, tome 2, 1885, page 321 ). 

b) La tête en bas, la base au sommet. D'autres couraient, (...) comme pour chercher le vrai sens du tableau, déclarant qu'il était beaucoup mieux à l'envers (ÉMILE ZOLA, L'Œuvre,  1886, page 307 ). 

B.—  En sens inverse, dans un sens contraire à la norme, à la perspective naturelle ou habituelle; dans le mauvais sens. 

1. En sens inverse (position, orientation). Mettre quelque chose à l'envers. Retourner quelque chose. Il rentre les chaises (...) et les met à l'envers au bord des tables (MARCEL PAGNOL, Marius,  1931, II, 4, page 124 ). Il est vraiment très tard, reprit-il en consultant à l'envers la montre posée sur mon bureau (JULIEN GRACQ, Le Rivage des Syrtes,  1951, page 245 ). 

2. En sens inverse (mouvement contraire). Celui-là qui faisait la valse les yeux fermés, à l'envers et à l'endroit (JEAN GIONO, Le Grand troupeau,  1931, page 185 ). J'essayai de vivre à l'envers. Entre neuf et dix ans, je devins tout à fait posthume (JEAN-PAUL SARTRE, Les Mots,  1964, page 165) : 

Ø 8. Abraham, Isaac et Jacob, c'est-à-dire, en remontant, avec lui. Et comme à l'envers, Jacob, Isaac, Abraham. Sem et Noé. Mathusalem, Enoch. Seth, Adam.

CHARLES PÉGUY, Victor-Marie, comte Hugo,  1910, page 741. 

3. Au figuré.  Dans un sens anormal, paradoxal, opposé, contraire au bon-sens, au sens réel ou au sens naturel. 

a) À l'opposé du bon-sens (vers le non-sens, l'aberration). Les choses vont à l'envers. Cela va mal, en dépit du bon-sens. Des traditions de famille, qui, prenant l'honneur et la dignité à l'envers, lui imposaient l'oisiveté comme le premier, comme le plus saint des devoirs (JULES SANDEAU, Sacs et parchemins,  1851, page 38) : 

Ø 9. Quand Freycinet dit : « Je veux », Zurlinden répond : « Je ne veux pas », et dans un pays où tout est à l'envers, il est bien naturel que ce soit l'inférieur qui commande au supérieur docilement soumis.

GEORGES CLEMENCEAU, Vers la réparation,  1899, page 404. 

—  C'est le monde à l'envers. C'est aberrant Des lunettes noires à la fin de novembre, le monde à l'envers! (HENRI DE MONTHERLANT, Fils de personne,  1943, II, 2, page 295 ). C'est le monde à l'envers, plus de médecins que de malades (ALBERT CAMUS, La Peste,  1947, page 1312 ). 

b) À l'opposé du sens réel (d'un mot, d'une idée), à contre-sens. Interpréter des paroles à l'envers. Synonymes : mal, de travers (ou dans un faux sens). Ces journalistes, ils ne lisent pas même les documents qu'ils fourrent dans leurs serviettes, ou plutôt les lisent à l'envers. (...) Burty avait trouvé le moyen de commettre à peu près autant d'erreurs qu'il avait emprunté de mots à la courte note! (EDMOND DE GONCOURT, JULES DE GONCOURT, Journal,  1875, page 1086 ). De telles paroles (...) doivent en quelque sorte être lues à l'envers puisque leur lettre signifie le contraire de la vérité (MARCEL PROUST, À l'ombre des jeunes filles en fleurs,  1918, page 860) : 

Ø 10.... « pour égaler Dieu, devenir des créateurs, nous nous fîmes destructeurs; nous créâmes à l'envers, puisque nous ne pouvions créer dans le sens de l'avenir. Nous nous fîmes un univers de destruction,... »

ALBERT BÉGUIN, L'Âme romantique et le rêve,  1939, page 34. 

c) À l'opposé du sens commun. Il éprouvait ses émotions à l'envers, au contraire des autres (MARCEL JOUHANDEAU, Monsieur Godeau intime,  1926, page 128 ). 

d) À l'opposé du sens de la marche, de la progression; en rétrogradant Synonyme : à rebours. 

—  À l'envers de,  locution prépositive.  Tout au contraire de, à l'encontre de. Si nous allons vers la joie, qu'importe que cela soit ici-bas à l'envers de notre approximation corporelle? (PAUL CLAUDEL, Le Soulier de satin,  1929, 3e.  journée, 13, page 844) : 

Ø 11. De sorte qu'à l'envers de nous, qui commençons par les beaux jours et semblons d'abord papillons, pour traîner plus tard et languir, lui [le phénix] commence par les années sombres, et d'une longue vie obscure il surgit à la jeunesse où il meurt glorifié.

JULES MICHELET, L'Insecte,  1857, page 79. 

C.—  Par extension et au figuré.  [L'ordre étant bouleversé]  En tous sens, en grand désordre. Synonymes : sens dessus dessous, pêle-mêle, en pagaïe (familier), n'importe comment. 

1. En grand désordre (concret), dans un bouleversement total. Gérard (...) regardait avec terreur son domicile à l'envers sans trouver de chaise pour s'asseoir (JULES FLEURY-HUSSON, DIT CHAMPFLEURY, Les Aventures de Mademoiselle Mariette,  1853, page 184 ). Elle mettait la table à l'envers, s'arrêtant avec les assiettes pour tomber dans de grosses réflexions (ÉMILE ZOLA, L'Assommoir,  1877, page 477) : 

Ø 12. SCORONCONCOLO. 

Depuis que nous trépignons dans cette chambre, et que nous y mettons tout à l'envers, ils doivent être bien accoutumés à notre tapage. Je crois que tu pourrais égorger trente hommes dans ce corridor, (...) sans qu'on s'aperçoive dans la maison qu'il s'y passe du nouveau. 

ALFRED DE MUSSET, Lorenzaccio,  1834, III, 1, page 167. 

—  Par extension.  Dans une confusion extrême (trouble ou révolution). Car là-bas il y a la France tout à l'envers et ce pauvre petit roi je ne sais où comme il peut (PAUL CLAUDEL, Visages radieux,  1947, page 808) : 

Ø 13. Si la révolution venait et mettait à l'endroit ce qui était à l'envers et à l'envers ce qui était à l'endroit, elle saurait toujours se trouver sur ses pieds, elle ferait ce qu'il y aurait à faire,...

ROMAIN ROLLAND, Jean Christophe, Le Buisson ardent, 1911, page 1284. 

2. Dans une grande perturbation psychologique ou mentale, les sens ou la raison troublés. 

—  (Avoir) la tête, la cervelle, l'esprit, l'âme à l'envers. Être bouleversé, inquiet, agité, affolé ou excité; être un peu fou. On ne se comprend plus bien, la tête à l'envers d'embarras et de fièvre (HENRI POURRAT, Gaspard des Montagnes,  1925, page 158 ). Commencèrent des histoires d'hôtel meublé, de rendez-vous. Elle était folle, la tête à l'envers (LOUIS ARAGON, Les Beaux quartiers,  1936, page 279 ). 

—  Mettre la tête, l'esprit à l'envers à quelqu'un. Faire perdre la tête, rendre comme fou. Synonymes : remuer, chavirer, bouleverser, tournebouler :  

Ø 14. BROQUIN. —  Toujours dans le même état... toujours sur le point d'être mère pour la huitième fois... C'était annoncé pour hier soir, et ce matin rien encore. 

PROSPER. —  Ça doit lui mettre la tête à l'envers... à ce pauvre monsieur Camusot. 

HENRI MEILHAC, LUDOVIC HALÉVY, La Boule,  1875, III, 1, page 84. 

—  Se mettre la tête à l'envers. 

·    pour quelqu'un. Devenir amoureux fou. Si tu aimais une femme à te mettre pour elle l'âme à l'envers, et qu'il lui fallût de l'argent (HONORÉ DE BALZAC, Le Père Goriot,  1835, page 155 ). Se mettre la tête à l'envers pour une femme dont on n'a même pas bien remarqué les yeux! Mais d'où prenait-il qu'il se mît la tête à l'envers? Elle était comme toujours, sur ses épaules (LOUIS ARAGON, Les Beaux quartiers,  1936, page 291 ). 

·    pour quelque chose Perdre ses moyens, se rendre malade (figuré). Vous allez toujours au chagrin, vous ne savez qu'inventer pour vous mettre la tête à l'envers (ÉMILE ZOLA, La Conquête de Plassans, 1874, page 1178 ). Inutile de se mettre la ciboule à l'envers pour une telle bêtise (LOUIS ARAGON, Les Beaux quartiers,  1936, page 373 ). 

—  Se mettre à l'envers. Devenir comme fou sous l'effet d'une émotion violente. Confer les locutions figées : perdre la boule, la boussole, le nord; être aux cents coups; se ronger, se tourner les sangs. Pas la peine de te mettre à l'envers. Ce n'est pas grave. (...) Mais c'est sérieux. Il avait la poitrine faible (JEAN COCTEAU, Les Enfants terribles,  1929, page 41 ). 

3. Dans une grande perturbation physiologique. 

a) Avoir les yeux à l'envers. 

—   Anormaux, troublés. On lui parle, elle ne vous répond pas. C'est comme les gens qui couvent une maladie et qui ont les yeux à l'envers (ÉMILE ZOLA, Le Docteur Pascal,  1893, page 152 ). 

—   Révulsés. La face était pourpre; les yeux, à l'envers (ROGER MARTIN DU GARD, Les Thibault, La Mort du père, 1929, page 1275 ). 

b) Avoir le coeur à l'envers. Avoir mal au coeur, être écoeuré, barbouillé; se sentir mal. Aussi, quand la morte fut habillée et proprement étendue sur son lit, Lantier se versa-t-il un verre de vin, pour se remettre, car il avait le coeur à l'envers (ÉMILE ZOLA, L'Assommoir,  1877, page 655 ).  Au figuré. Rien que de le voir, j'en ai le coeur à l'envers. Il nous a tous trahis en même temps, Alice et nous autres (GEORGES DUHAMEL, Le Désert de Bièvres,  1937, page 231 ). 

 

STATISTIQUES : Envers1 et 2. Fréquence absolue littéraire : 4 290. Fréquence relative littéraire : XIXe.  siècle : a) 7 355, b) 6 263; XXe.  siècle : a) 4 403, b) 5 964. 

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