Devoir de Philosophie

ÉPINGLE, substantif féminin.

Publié le 31/01/2016

Extrait du document

 

ÉPINGLE, substantif féminin.  

A.—  Petite tige de métal pointue d'un côté et terminée par une tête de l'autre. Pointe, tête d'épingle; attacher quelque chose avec une épingle. Il s'est enfoncé une épingle dans le doigt (Dictionnaire de l'Académie française. ).  La cheminée servait de coiffeuse : des brosses d'ivoire, une pelote à épingles (ROGER MARTIN DU GARD, Les Thibault, L'Été 1914, 1936, page 465 ). La religieuse de garde, les pointes de sa cornette relevées par une épingle (MAURICE DRUON, Les Grandes familles, tome 1, 1948, page 35 ). À chaque bonne action, nous perforions d'un coup d'épingle les contours du dessin tracé à l'encre violette (SIMONE DE BEAUVOIR, Mémoires d'une jeune fille rangée,  1958, page 32 ). 

—  Spécialement. 

1. Épingle anglaise, de nourrice, de sûreté. Petite tige recourbée formant ressort dont l'extrémité pointue se loge dans un crochet ou protège-pointe qui la maintient. Son veston fermé par une épingle anglaise, pour cacher l'absence de linge (ANDRÉ GIDE, Journal,  1933, page 1167 ). Son corsage déchiré, rafistolé avec une épingle de nourrice (LOUIS ARAGON, Les Beaux quartiers,  1936, page 149) : 

Ø 1.... elles vont faire leur marché (...) après avoir rattaché avec des épingles de sûreté, sur leurs enfants, les guenilles multicolores qu'elles ne songent jamais à rapiécer.

PAUL MORAND, Londres,  1933, page 167. 

2. Épingle de chapeau, de cravate. Épingle de parure dont la tête est une pierre ou un bijou. Épingle de diamant Je mettrai aussi ton camée et mon épingle de cravate (GEORGES DUHAMEL, Le Notaire du Havre,  1933, page 145 ).  Par ellipse. La chemise était ornée d'une épingle à camée blanc et bleu (HONORÉ DE BALZAC, Une Ténébreuse affaire,  1841, page 44 ). Le cou serré dans un mouchoir de soie noire agrafé d'une épingle à gros cabochon d'or ciselé (MAXENCE VAN DER MEERSCH, L'Empreinte du dieu,  1936, page 149 ). 

3. Épingle à cheveux. Fil d'acier replié par le milieu de manière à former deux branches parallèles. L'Anaïs prit une épingle à cheveux dans son haut chignon de fil blond (MARCEL AYMÉ, La Jument verte,  1933, page 157 ). 

·    Locution.  [En parlant d'un virage]  En épingle, en épingle à cheveux. Très resserré. Route en épingle. L'idyllique et fraîche vallée où l'on accède après vingt détours en épingle (ALBERT T'SERSTEVENS, L'Itinéraire espagnol,  1963, page 252 ). 

·    Par analogie.  Virage très resserré. C'est juste au virage, dans l'épingle à cheveux [la scierie] , au bord de la route (JEAN GIONO, Un Roi sans divertissement,  1947, page 9 ). 

4. Épingle à linge. Pince formée de deux morceaux de bois (ou de plastique) maintenus serrés par un ressort métallique. Synonymes : pince à linge, fiche. 

B.—  Au figuré. 

1. Locutions. 

a) [Par référence à la pointe des épingles] 

—  Coups, piqûres d'épingle. Petites offenses malveillantes qu'on inflige à quelqu'un. Les coups d'épingle de l'existence; se venger à coups d'épingle. Après les coups d'épingle, le coup de massue (VICTOR HUGO, Préface de Cromwell,  1827, page 25 ). Dans ces vies de province, où il y a tant de tracasseries, de persécutions, d'ambitions chétives et de coups d'épingle (CHARLES-AUGUSTIN SAINTE-BEUVE, Causeries du lundi, tome 8, 1851-62, page 362) : 

Ø 2. Vous connaissez trop mes sentiments (...) pour que sans attacher quant à ce qui vous concerne la moindre importance à de pareils coups d'épingle...

PAUL VERLAINE, Correspondance, tome 3, 1869-96, page 236. 

—  (Tuer, blesser, etc.) à coups d'épingle(s). En faisant souffrir inutilement. [P.] qui semblait prendre à tâche de torturer son complice, comme on dit vulgairement, à coups d'épingles (EUGÈNE SUE, Les Mystères de Paris, tome 8, volume 4, 1843, page 296 ). Si son fils le battait, il [le vieux Fouan] souffrirait moins que d'être tué par sa fille à coups d'épingle (ÉMILE ZOLA, La Terre, 1887, page 300 ). 

—  Être comme une pelote d'épingles. Être de mauvaise humeur. 

b) [Par référence à la petite taille, au peu de valeur des épingles de couture] 

—  Chercher une épingle dans une botte de foin, de paille (confer aiguille I A c). 

—  Une épingle ne tomberait pas par terre. [S'emploie pour laisser entendre qu'il y a une foule très dense]  Mais dans l'église on étouffait. Elle était si remplie de gens de Rochefort, de Latour et de Tauves, qu'une épingle ne serait pas tombée à terre (HENRI POURRAT, Gaspard des Montagnes,  1931, page 126 ). 

—  Tirer son épingle du jeu. Se dégager adroitement d'une situation délicate. Pour le présent, ça va trop mal, il n'y a qu'une chose à faire, qui est de tirer mon épingle du jeu (PAUL CLAUDEL, Un Poète regarde la croix,  1938, page 39 ). Pièces et billets bleus s'échangent sur les tables : il semble que chacun retire son épingle du jeu (FRANCIS PONGE, Le Parti pris des choses, 1942, page 53 ). 

—  Ne pas valoir une épingle. Ne rien valoir du tout. Cela ne vaut pas une épingle; je n'en donnerais pas une épingle (Dictionnaire de l'Académie française. ). 

c) [Par référence à la fonction des épingles en couture] 

—  Être tiré à quatre épingles. Être vêtu avec un soin méticuleux. Tu as toujours été belle, ondulée, tirée à quatre épingles, élégante, brillante (JEAN COCTEAU, Les Parents terribles,  1938, I, 2, page 195 ). Beaucoup de ménagères, pas du tout tirées à quatre épingles ce soir de veille de fête sainte (BLAISE CENDRARS, Bourlinguer,  1948, page 251 ). 

d) [Par référence aux épingles de parure] 

—  Monter (quelque chose) en épingle. Donner sciemment à un événement une répercussion, une audience exagérée. Monter un scandale en épingle. Ce qu'il faut bien monter en épingle, c'est le côté humanitaire de tout le truc (GEORGES DUHAMEL, Cécile parmi nous,  1938, page 30 ). N'empêche que l'avocat monterait aussitôt l'histoire en épingle et essaierait d'ameuter l'opinion (MARCEL AYMÉ, La Tête des autres,  1952, page 60 ). 

—  Argot. Avoir son épingle au col. Être ivre Après quatre verrées de verte, j'avais mon épingle au col (LES EXCENTRICITÉS DU LANGAGE FRANÇAIS  (LORÉDAN LARCHEY) Supplément.  1880). 

2. Au pluriel, vieux, populaire. 

—   Gratifications pécuniaires que l'on accorde aux femmes en échange de quelque service. C'est pour les épingles des filles (Dictionnaire de l'Académie française. ). 

—   Ce qu'on donne à une femme lorsqu'on a conclu quelque marché avec le mari. Ce sont les épingles de madame (Dictionnaire de l'Académie française. ).  Pour épingles du marché, j'ai voulu avoir l'honneur de votre connaissance (GUILLAUME-VICTOR-ÉMILE, DIT ÉMILE AUGIER, Ceinture dorée,  1855, II, page 359 ). 

STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 996. Fréquence relative littéraire : XIXe.  siècle : a) 872, b) 1 841; XXe.  siècle : a) 1 844, b) 1 395. 

 

Forme dérivée du verbe \"épingler\"

 épingler

ÉPINGLER, verbe transitif.  

A.—  [Le complément désigne une chose]  Attacher, retenir avec une/ des épingle(s). Épingler une photo au mur; épingler un ourlet; épingler un fichu, un foulard, une écharpe; épingler une cocarde. Les hommes jettent leurs vestes, les femmes épinglent leurs robes (JOSEPH DE PESQUIDOUX, Chez nous,  1921, page 134 ). Il a fait de petits rouleaux avec des pièces de 1 et 2 francs, il épingle les billets par liasse et il recolle ceux qui sont en loques (MARCEL PAGNOL, Marius,  1931, II, 1, page 95 ). Il épingla donc à son revers son insigne de guide de montagne (JOSEPH PEYRÉ, Matterhorn,  1939, page 63 ). 

—  Par métaphore. L'on entend dans l'ombre une petite pluie épingler d'acier froid les vitres de son coeur (GEORGES RODENBACH, Le Règne du silence, 1891, page 135 ). Nous nous contenterons d'épingler quelques exemples vivants sur les grandes directions de recherche (EMMANUEL MOUNIER, Traité du caractère,  1946, page 78 ). 

B.—  [Le complément désigne une personne] 

1. Rare.  Attacher à quelqu'un son épingle (son bijou). Mme.  Vernet le boutonne [son mari] , l'épingle, le peigne (JULES RENARD, L'Écornifleur,  1892, page 1 ). 

2. Au figuré, populaire.  Arrêter (quelqu'un), faire prisonnier (quelqu'un). Le Caporal épinglé (titre d'un ouvrage de Jacques Perret, 1947). Les Boches se gourent sur nos relèves, dit Jaffelin. Mais si jamais ils viennent à savoir l'heure, on s'ra gentiment épinglés (MAURICE GENEVOIX, La Boue,  1921, page 212 ).  

STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 76. 

Liens utiles