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ACTES ADMINISTRATIFS - EXÉCUTION FORCÉE - T. C. 2 déc. 1902, SOCIÉTÉ IMMOBILIÈRE DE SAINT-JUST - Rec. 713, concl. Romieu (S. 1904.3.17, concl. Romieu, note Hauriou; D. 1903.3.41, concl. Romieu) - Commentaire d'arrêt

Publié le 13/06/2011

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Sur la recevabilité de l'arrêté de conflit : Cons. qu'aux termes de l'art. 8 de l'ordonnance du 1er juin 1828 le délai de quinzaine dans lequel doit être élevé le conflit court du jour de l'envoi fait au préfet du jugement rendu sur la compétence; Cons. que si, d'après l'extrait du registre de mouvement, la copie de l'arrêt du 13 août 1902, qui a rejeté le déclinatoire, a été adressée le 14 août par le procureur général, il n'en résulte pas que le préfet du Rhône n'ait pas eu connaissance de cet arrêt de la cour de Lyon lorsqu'à la date du 13 août il a pris l'arrêté de conflit qui vise la décision intervenue conformément à l'art. 9 de l'ordonnance du ler juin 1828; que, dès lors, l'arrêté de conflit susvisé est recevable; Sur la validité de l'arrêté de conflit : Cons. que, par son arrêté en date du 26 juill. 1902, le préfet du Rhône a ordonné l'évacuation immédiate de l'établissement formé à Lyon, rue des Farges, n° 22, par la congrégation des soeurs de Saint-Charles et prescrit l'apposition des scellés sur les portes et les fenêtres de l'immeuble; Cons. qu'en prenant cet arrêté d'après les ordres du ministre de l'intérieur et des cultes le préfet a agi dans le cercle de ses attributions, comme délégué du pouvoir exécutif, en vertu du décret du 25 juill. 1902 qui a prononcé la fermeture dudit établissement par application de l'art. 13, § 3, de la loi du 1er juill. 1901 : Cons. qu'il ne saurait appartenir à l'autorité judiciaire d'annuler les effets et d'empêcher l'exécution de ces actes administratifs; que l'apposition des scellés, ordonnés comme suite et complément de l'évacuation forcée des locaux, et le maintien temporaire desdits scellés ne constituent pas un acte de dépossession pouvant servir de base à une action devant l'autorité judiciaire; que, par suite, la demande formée au nom de la société propriétaire de l'immeuble dont il s'agit tendant à obtenir la levée des scellés apposés pour assurer l'exécution des décret et arrêté précités ne pouvait être portée que devant la juridiction administrative, seule compétente pour apprécier la légalité des actes d'administration et pour connaître des mesures qui en sont la conséquence; que, de ce qui précède, il résulte que la cour d'appel de Lyon, en se déclarant compétente a violé le principe de la séparation des pouvoirs; Cons., d'autre part, qu'après avoir rejeté le déclinatoire la cour a, dans le même arrêt, passé outre au jugement au fond; qu'elle a ainsi méconnu les prescriptions des art. 7 et 8 de l'ordonnance du lei juin 1828;... (Arrêté de conflit confirmé).

« publique l'exige; quand la maison brûle, on ne va pas demander au juge l'autorisation d'y envoyer les pompiers ».L'existence de sanctions pénales ne modifie en rien cette conséquence de l'urgence.

L'urgence valide ainsi, à elleseule, des mesures qui seraient autrement illégales : comme le dit un arrêt du Conseil d'État du4 juin 1947, Entreprise Chemin (Rec.

246), « dans des circons-tances exceptionnelles les autorités administrativespeuvent prendre des mesures dépassant les limites de leurs attributions normales en vue de pourvoir d'extrêmeurgence aux nécessités du moment ».

Cette idée que l'urgence provoque « une sorte de renversement des valeursjuridiques » (Mestre) est à la base de toute la jurisprudence sur les pouvoirs de guerre et les circonstancesexceptionnelles.

Il va sans dire que le juge examinera dans chaque cas s'il y avait effectivement urgence ou périlimmédiat (cf.

C.

E.

22 nov.

1946, Mathian, Rec.

278; S.1947.3.41, note Mestre; J.

C.

P.

1947.II.3377, concl.

Célier;— T.

C.

8 avr.

1935, Action française; — T.C.

19 mai 1954, Office publicitaire de France, Rec.

703; J.

C.

P.1954.II.8382, note Rivero).B) En l'absence de texte ou d'urgence, l'exécution forcée des décisions administratives n'est licite que lorsque lesquatre conditions suivantes sont réunies.a) Il faut avant tout qu'il n'y ait aucune autre sanction légale : cette condition, placée en troisième lieu seulementpar Romieu est, en réalité, la condition essentielle de la légalité de l'exécution d'office.

Comme l'a dit le commissairedu gouverne-ment Léon Blum, dans ses conclusions sur l'affaire Abbé Bouchon (C.

E.

17 mars 1911, Rec.

341, concl.Blum), « l'exécution administrative n'est justifiée en principe que par la nécessité d'assurer l'obéissance à la loi etl'impossibilité de l'assurer par tout autre procédé juridique ». La sanction légale excluant l'exécution d'office est avant tout la sanction pénale.

C'est à elle que pensait Romieu : «si la sanction pénale existe, l'exécution forcée administrative n'existe pas, en dehors des cas d'urgence, de sécurité,que tout le monde est d'accord pour réserver ».

C'est parce que la loi du 1er juill.

1901 supprimant les congrégationsne comportait aucune sanction pénale que l'emploi de la contrainte fut jugé licite; c'est parce que les règlements depolice sont sanctionnés par l'art.

R.

26-150 du code pénal que leur exécution forcée est en principe impossible.

Leprincipe a trouvé récemment des applications célèbres.

L'exécution d'office des réquisitions civiles intervenues envertu de la loi du 11 juill.

1938 sur l'organisation de la nation en temps de guerre a été jugée illégale, sauf le casd'urgence, l'art.

31 de cette loi prévoyant des peines d'amende et de prison à l'encontre de ceux qui auront désobéiaux ordres de réquisition.

Quant aux réquisitions de logement prévues par l'ordonnance du 11 oct.

1945, leurexécution forcée a été considérée pendant plusieurs années comme illégale et constituant — sauf cas d'urgence —une voie de fait justifiant la compétence judiciaire, la jurisprudence ayant estimé que les sanctions pénales de la loidu 11 juill.

1938 étaient applicables aux réquisitions effectuées en vertu de l'ordonnance de 1945 (T.

C.

30 oct.1947, Barinstein, Rec.

511; S.

1948.3.1, note Mestre; D.

1947.476, note P.

L.

J.; R.

D.

P.

1948.86, note Waline; J.C.

P.

1947.II.3966, note Fréjaville); mais la Cour de cassation ayant pris une position contraire et estimé que lespénalités prévues par la loi du 11 juillet 1938 ne pouvaient, en raison du principe de l'interprétation étroite destextes en matière pénale, être appliquées à de telles réquisitions (Cass.

crim.

11 mai 1949, S.

1949.1.129, note P.de F.

R.; D.

1949.261, rapport Pépy), le Tribunal des Conflits revint sur sa jurisprudence, et décida « qu'à défaut detoute sanction pénale les prescriptions de ladite ordonnance (du 11 oct.

1945) ne peuvent rester lettre morte; que,dans ces conditions, l'administration a pu légalement procéder...

à l'exécution forcée de l'ordre de réquisition »...

(T.C.

12 mai 1949, Dumont, Rec.

596; R.

D.

P.

1949.371, note Waline; J.

C.

P.

1949.II.4908, note Fréjaville).Le Conseil d'État a fait une application nouvelle et extensive de ces principes en décidant qu'un règlement considérécomme légal par le juge de l'excès de pouvoir et assorti de sanctions pénales ne peut faire l'objet d'une exécutionforcée par la voie administrative, alors même que les tribunaux judiciaires ont refusé d'appliquer ces sanctions par lemotif que le règlement serait illégal (7 mai 1971, Ministre de l'économie et des finances et ville de Bordeaux c.Sastre, Rec.

334, concl.

Gentot; J.

C.

P.

1971.1.2446, chr.

Loschak; R.

D.

P.

1972.443, note Waline).Allant plus loin que Romieu, la jurisprudence actuelle considère que ce n'est plus seulement l'existence d'unesanction pénale, mais la possibilité d'user de tout autre procédé légal pour obtenir l'obéissance du récalcitrant, quiexclut l'action d'office.

Il en est ainsi de la possibilité d'exercer une action judiciaire quelconque (C.

E.

12 mars 1909,Commune de Triconville, Rec.

275, concl.

Chardenet : « il appartenait au préfet, chargé, comme délégué de lapuissance publique, d'assurer l'exécution de la loi, de faire cesser cette occupation illégale et, à défaut de touteaction judiciaire pouvant être exercée par le réprésentant de l'autorité, il a pu, sans excéder ses pouvoirs, mettre ledesservant en demeure de quitter le presbytère, sous peine d'y être contraint par la force ») ou d'obtenir le mêmerésultat par des voies de droit différentes (C.

E.

23 janv.

1925, Anduran, Rec.

82; D.

1925.3.43, concl.

Josse :illégalité de l'apposition des scellés sur une minoterie alors que le résultat recherché aurait pu être obtenu par lasuspension des livraisons de blé ou l'exercice du droit de réquisition).

L'arrêt Abbé Bouchon du 17 mars 1911(précité) résume cette jurisprudence par une formule particulièrement large : « à défaut de toute autre procédurepouvant être utilement employée ».b) « Il faut que l'opération administrative pour laquelle l'exécution est nécessaire ait sa source dans un texte de loiprécis », autrement dit que l'acte administratif à exécuter soit pris en application d'un texte législatif précis.c) « Il faut qu'il y ait lieu à exécution forcée », c'est-à-dire que l'exécution de l'acte se soit heurtée à unerésistance certaine ou du moins à une « mauvaise volonté caractérisée » (concl.

Célier précitées).d) « Il faut que les mesures d'exécution forcée tendent uniquement, dans leur objet immédiat, à la réalisation del'opération prescrite par la loi », c'est-à-dire qu'elles ne doivent pas aller au delà de ce qui est strictementnécessaire pour assurer l'obéissance à la loi : il ne faut pas que, sous prétexte d'assurer par la contrainte l'exécutiond'une décision légale, l'administration aille en réalité au delà de ses pouvoirs.

Il y a là l'application d'une idéecourante en matière de police : les décisions de police ne sont légales que dans la mesure où elles sont «indispensables pour assurer le maintien ou le rétablissement de l'ordre public » (T.

C.

8 avr.

1935, Action française ). II.

— Sanctions de l'emploi illégal de l'exécution d'office.

Diverses hypothèses doivent être distinguées :. »

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