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Analyse de l'Art Poétique. Chant I (Boileau)

Publié le 27/04/2011

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boileau

   But de Boileau en composant son poème. — Il ne définit pas la poésie, mais exige l'inspiration.—Nécessité et origine des règles; leur valeur fondée sur la raison universelle ; discussion.    La rime : elle est soumise à la raison ; elle est source de beautés. — Rôle de la raison : elle est hostile aux faux brillants, au burlesque, à l'emphase. Sévérité moins grande du P. Rapin. —- Préceptes sur la composition et le style. La versification : le repos de l'hémistiche, l'hiatus, l'harmonie.    La clarté de la pensée. — La pureté de l'expression. La lenteur dans le travail ; l'unité de la composition. Nécessité d'une critique éclairée. Beaucoup de ces préceptes ne sont pas particuliers à la poésie.    Le poème de Boileau se présente comme une œuvre assez courte, puisqu'elle n'a pas plus de 11000 vers, ordonnée avec soin, divisée en chants, dont chacun a son sujet bien déterminé.    Nous nous proposons, dans l'analyse raisonnée qui va suivre, d'examiner les idées exposées par Boileau, d'en voir le sens et la portée, de les discuter quand il y a lieu. Cette étude nous permettra de porter un jugement plus assuré sur l'ensemble de l'entreprise.    Il est bon d'abord de ne pas se méprendre sur l'intention du poète. Ce serait lui attribuer bien peu d'intelligence que de penser qu'il a voulu formuler les règles de la poésie pour apprendre à faire des vers. Qu'Horace ait songé à guider de jeunes apprentis, c'est possible, parce qu'il s'adressait aux Pisons qui avaient cette ambition ; mais Boileau, qui écrit pour tous ceux qui auront la curiosité de le lire, songe uniquement à diriger le goût du public selon des principes qu'il croit sûrs, qui sont déjà généralement admis, et qu'il a déjà fait triompher dans ses luttes antérieures. Si par surcroît, son code maintient dans la bonne voie quelque poète qui se lance dans une carrière si difficile, son travail méritera par là quelque estime de plus ; mais l'important est de formuler une doctrine et de nous apprendre à bien juger des ouvrages de son temps. S'il n'avait voulu que donner des règles techniques, comme on en trouve dans l'Art poétique de Sebilet, il se serait rangé à l'avis de Patru et n'aurait pas cherché à donner à son œuvre l'agrément de la forme poétique.

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« est antique, rédige son célèbre Arrêt Burlesque (1671) pour combattre dans les matières de science et dephilosophie la soumission exagérée à la doctrine péripatéticienne.

Tandis que se libère d'une tutelle servile la penséemoderne, en matière littéraire l'affranchissement n'est pas encore venu.

Si toutefois les partisans outrés des règlestémoignent d'une superstition étroite, un Boileau, aussi bien que les grands écrivains de sa génération, apporte unesoumission raisonnée et non aveugle.

Il les admet non par obéissance à une autorité reconnue, mais parl'acquiescement de sa raison qui les a examinées et trouvées bonnes. Or tout le monde se réfère au bon sens.

Mais on n'en fait pas toujours le même usage.

Il en est qui combattentl'autorité des anciens et leur tyrannie en s'abritant derrière lui.

Tel est le cas de l'abbé de Marolles qui écrit en 1671: « C'est un abus de s'imaginer qu'ils eussent tout vu ou qu'ils eussent écrit tout ce qu'ils ont su.

La meilleure règlede toutes pour l'invention et pour la conduite d'un poème est sans doute le bon sens ».

Tout autre est le point devue de Boileau, en même temps que celui de beaucoup de bons esprits.

C'est la raison qui a inspiré les ancienslorsqu'ils ont édicté leurs règles et c'est la même raison qui ne change pas qui nous les fait encore trouver bonnes. On notera le caractère philosophique et dogmatique de cette conception.

A aucun moment les critiques classiques(ni au 16e ni au 17e siècle) ne se sont demandé si certaines des règles qu'ils tiraient d'Aristote ou d'Horace avaientpour origine non pas les nécessités logiques de l'esprit humain, mais les conditions matérielles ou sociales danslesquelles se sont développées les diverses formes de la poésie.

Il est d'ailleurs résulté de ces ignorances despréceptes tantôt trop étroits, tantôt singuliers, pour ne pas dire absurdes, comme celui qui concerne l'ode : Chez elle un beau désordre est un effet de l'art. Il marque uniquement l'incompréhension des procédés de l'ode triomphale au Ve siècle av.

J.-C. Boileau cependant, s'il ne comprend pas toutes les règles qu'il formulera, n'a pas cette étroitesse des petits espritsqui condamnent au nom des règles toute hardiesse du génie. Il veut seulement leur observation intelligente.

S'il admet leur nécessité, il estime que, plus haut qu'elles, il fautplacer la raison qui les juge, les transforme parfois, en restreint la portée ; 1 art d écrire ne doit pas être réduit à unmécanisme stérile ; il faut savoir adapter les règles aux fins qu'on poursuit et il arrive que le comble de l'art soit defranchir les limites que les règles imposent. Sans doute Boileau admet que les règles sont fondées en raison.

On ne saurait supposer que les efforts des plusgrands génies n'aient abouti qu'à formuler des lois factices et fantaisistes et qu'on les ait imposées pour le plaisir debrider l'imagination des poètes.

Elles sont utiles puisque Boileau les enseigne.

Mais il n'est pas défendu de croire quela même raison qui les a trouvées peut les compléter ; une raison plus éclairée montre l'insuffisance de la règletraditionnelle, et la liberté apparente qu'on se donne n'est qu'une loi nouvelle qu'on n'avait pas su encore découvrir. Qu'il existe des règles, c'est chose évidente ; celui-là même qui renverse celles qu'il trouve établies avant lui s'enforge à son usage de nouvelles ; il a beau prétendre se libérer : aux chaînes qu'il brise, il en substitue d'autres :l'apparent désordre et l'obscurité cachent souvent un ordre subtil et fournissent de plus souples moyens de rendreartistiquement la complexité des choses. Il serait donc vain de combattre la notion de règle.

La question est de savoir si toute règle est immuable.

Boileau lecroyait, parce qu'à ses yeux la base en est la raison universelle. Ce point de vue est si éloigné du nôtre que nous ne pensons même plus que la raison soit la même en tout temps eten toute race.

L'idée de relativité l'emporte.

Avec le changement des conditions multiples dont l'art dépend, l'art lui-même et ses moyens changent.

Il est cependant certaines conditions qui varient peu dans l'ensemble de l'humanitéen quelque siècle qu'on se place, ou dans un pays donné, qui possède certaines façons propres de penser et desentir. Ainsi l'on peut admettre que l'idée d'ordre est commune à tous les hommes, comme aussi la nécessité del'arrangement des parties pour obtenir cet ordre. On considérera que l'esprit français ne se confond pas avec l'esprit anglais ou italien, et que pour le satisfaire,certains moyens seront préférables qui seront des règles permanentes dans un art français. Mais après cela, toutes les autres règles appartiennent à une époque, à une école, parfois même elles sont toutespersonnelles. Juger la valeur des règles de l'Art Poétique, c'est donc déterminer celles qui sont toujours et partout applicables,celles qui ne le sont que pour des Français, celles qui sont particulières à l'École classique dont Boileau est le porte-parole. Cette discussion préliminaire sur l'idée même de règles était nécessaire avant d'entrer dans l'examen de celles queBoileau formule successivement. La première que nous rencontrons (v.

27) est relative à la rime :. »

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