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ANALYSE DE LA CRISE ÉCONOMIQUE EN ESPAGNE

Publié le 08/10/2012

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espagne

 

Les causes de la crise économique en Espagne proviennent de deux sortes de facteurs. Certains sont d’ordre international, d'autres sont d’origine internes à l'économie espagnole.

La crise financière mondiale trouve son origine aux États-Unis et est due à quatre causes:

- la déréglementation excessive des marchés de capitaux.

- une augmentation de l'offre monétaire de la Banque Centrale.

- l'opacité des produits financiers.

- des exécutifs irresponsables et des agences de qualification inefficaces.

Une crise immobilière a eu lieu aux Etats-Unis, qui s’est caractérisée par le fait que beaucoup d’emprunteurs n’ont pas pu rembourser leurs hypothèques. Comme un bon nombre de ces hypothèques avaient été accordées à des gens non solvables, cela a provoqué le début d'un processus dans lequel les banques se sont retrouvées avec des portefeuilles remplis de contrats de prêts immobiliers qui ne pouvaient pas être refinancées et qui ne seraient jamais remboursés. Ce phénomène économique est désormais connu comme « la crise des hypothèques subprimes «.

Ces hypothèques extrêmement risquées s'étaient vendues et revendues entre agents financiers mélangées à d’autres produits, sous la forme de montages complexes particulièrement opaques. La plupart des entités bancaires et financières internationales en ont proposé à leurs clients, étendant ainsi la crise au monde entier.

Pourquoi accordaient-t-on des hypothèques à des personnes non solvables? Cela a été fait pour deux raisons.

Tout d’abord, les organismes de prêt américains pensaient que les prix des appartements monteraient rapidement et de manière ininterrompue (comme cela avait été le cas pendant très longtemps) ; et si, le cas échéant, les emprunteurs ne remboursaient pas, la valeur augmentée de la maison ou de l’appartement couvrirait largement l'hypothèque. Mais à un moment donné, la demande s’est ralentie, « bulle speculative « immobilière a éclatée et les prix ont commencé à descendre. Les prêteurs se sont aperçus alors que les titres qu’ils détenaient en portefeuilles valaient bien moins que leur valeur faciale. Ensuite, ces hypothèques « pourries « se sont d’autant plus multipliées qu’elles rapportaient de substantielles commissions aux vendeurs et qu’aucun contrôle de solvabilité n’était pratiqué. De toutes façons, le risque était aussitôt transféré puisque ces hypothèques étaient revendues plusieurs fois de suite, inextricablement mélées à d’autres créances, dans des « paquets financiers «, sans aucune transparence, qui captaient la confiance de l’acheteur en raison simplement de la réputation des banques émettrices.

Il faut savoir que le système des hypothèques anglo-saxon est différent de l'Européen dans la mesure où le coût de la poursuite judiciaire de l’emprunteur défaillant est tel, aux Etats Unis, que les créanciers se contentent généralement de prendre le bien immobilier, pour solde de tout compte. Dans le système européen, par contre, la protection du prêteur est telle (et tellement bon marché) que non seulement

le créancier devient propriétaire du bien, mais si la valeur de revente ne couvre pas la totalité de la dette, l’emprunteur se voit saisir ses revenus, aussi longtemps que ne seront pas satisfaits, à la fois la dette et tous les frais.

Bien entendu, lorsque les emprunteurs américains ont commencé à ne pas pouvoir rembourser, ils ont rendu des biens immobiliers dont la valeur de revente était largement inférieure aux sommes avancées et les derniers détenteurs de ces créances, en Europe ou ailleurs, se sont retrouvés avec des moins-values énormes, sans aucun moyen recours puisqu’elles ne comportaient pas les mêmes garanties qu’ici.

Cette déstabilisation mondiale a provoqué trois sortes de conséquences : Premièrement, une grande méfiance envers les banques et entre les banques elles-mêmes. Les épargnants ont commencé à retirer leurs dépôts et les prêts interbancaires se sont ralentis. Cela a provoqué des problèmes de liquidité et, par voie de conséquence, beaucoup de banques ont eu des problèmes de solvabilité et ont frôlé la faillite. Ces problèmes ont commencé aux États-Unis mais, ont atteint aussi l’Europe. Dans l’ensemble de l'Union Européenne, il y a aussi eu une bulle spéculative immobilière, mais le marché les hypothèques étant plus règlementé en faveur du prêteur, la crise a pris un chemin quelque peu différent. Beaucoup d'entités financières européennes, et espagnoles en particulier, avaient recours aux capitaux bancaires américains. Or, les banques américaines n'ayant plus de liquidités, nos banques

s’en sont trouvé aussi affectées. Par ailleurs, la crise immobilière américaine a généré une méfiance en Europe, faisant tomber d’un seul coup le vent de folie spéculative à la hausse des prix des prix de l’habitat, et comme la croissance espagnole s’était construite casi-exclusivement sur le secteur du bâtiment, pendant des années, les retombées de la crise internationale sur ce pays ont été particulièrement sévères dès 2008.

Justement, la deuxième sorte de conséquences de la crise des subprimes, relève de particularismes propres au modèle de croissance espagnol. En effet, de 1996 à 2006, bien que les exportations et le tourisme aient significativement augmenté, le véritable moteur de l'économie espagnole avait été le bâtiment. Le secteur du bâtiment représentait, à ce moment-là en Espagne, 10% Produit Intérieur Brut (dans d'autres pays de notre environnement, il représentait à peine 6%). De toute la croissance espagnole des dernières années, 38% étaient, directement ou indirectement, liés au bâtiment. En effet, il fallait bien produire des appareils électroménagers, des meubles et toutes sortes de biens d’équipement pour satisfaire les besoins liés aux les nouvelles constructions.

Dans les années 2007 et 2008 l'Espagne a connu de fortes augmentations des prix du pétrole et des matières premières. Cela a causé quelques premiers problèmes, mais ils ont été à peu près surmontés dès 2009. Cela aurait dû probablement alerter les autorités, mais l’engouement pour l’habitat en propriété avait toujours été

tel (encouragé, il faut le dire, par des dégrèvements fiscaux et une politique de location très défavorable aux loueurs), que tout le monde pensait que la demande immobilière poursuivrait sa croissance, indépendamment des remous extérieurs. Et puis, outre les nouveaux couples qui avaient besoin de se loger, il y avait aussi les achats de la deuxième résidence sur la côte, les européens qui venaient à résider en Espagne pour des questions professionnelle ou pour prendre leur retraite, et aussi les immigrants qui étaient de plus en plus tentés de devenir propriétaires de leur logement.

Ainsi, malgré la hausse des coûts et la crise qui sévissait déjà outre-Atlantique, les prix continuaient de grimper, les achats à caractère patrimonial semblaient un bien meilleur investissement que les placements financiers et bancaires. Mais c’était oublier que l’économie espagnole est intimement liée aux autres économies de marché. Les banques et caisses d’épargne ont commencé à souffrir du même manque de liquidités que les autres banques européennes. La demande de logements touristiques a chuté et la dépense publique n’a pas su se resserrer à temps, creusant ainsi sont déficit jusqu’à des niveaux très difficilement supportables aujourd’hui. De plus, la bulle immobilière s’est trouvée renforcée par l’arrivée d’un grand nombre de spéculateurs internationaux en quête d’argent facile. Or ce type d’investisseur est parti aussi rapidement qu’il est arrivé, accentuant encore plus la chute du marché.

Les derniers temps, l'Espagne en

était arrivée a construire quelques 800.000 logements chaque année, alors que la demande réelle n’était probablement que de 300.000 ou 400.000. Actuellement, on recense près de 1 million de logements vides à vendre et les prix continuent de baisser.

Enfin, la troisième conséquence découle d’un autre facteur intrinsèquement espagnol : La productivité des entreprises a très peu augmenté ces dernières années. Dans un moment de crise internationale, cela met l'Espagne dans une situation de moindre compétitivité, par rapport aux autre pays. Les exportations s’en sont ressenties, puisque nos prix n'étaient pas compétitifs. En revanche, nous importions beaucoup. L’inévitable conséquence a été un déficit extérieur sans cesse croissant.

L’Histoire récente montre que quelle que soit l’orientation politique de ses gouvernants, l'Espagne a une croissance supérieure au reste du monde, dans les moments d’euphorie économique, mais ressent aussi davantage les crises, dans les moments difficiles. C’est la conséquence de sa structure économique particulière. L'Espagne croissait à 4% quand l'Europe crossait à 2% dans les meilleures années d'expansion économique généralisée. A l’inverse, quand la crise est survenue, l’ensemble des économies européennes est tombé de 3%, alors que l'Espagnole tombe de 4 ou 5 pour cent.

Pourquoi l’Espagne a-t-elle une faible productivité? La raison la plus évidente réside dans le faible développement des nouvelles technologies et la formation déficiente des travailleurs. Le taux de capital investi

par travailleur est largement inférieur à ce que connaissent les pays du nord de l’Europe. Or la croissance est indissociablement liée à l’investissement et à la formation des travailleurs et ceux-ci dépendent du degré de confiance des investisseurs dans la solidité des structures économiques d’un pays, ainsi que de la fluidité du crédit sur l’ensemble du tissu économique national. D’autre part, actuellement, un grand nombre des jeunes les mieux formés, soit partent à l’étranger, soit sont cantonnés dans des emplois d’une qualification inférieure à leurs titres, soit encore sont au chômage (45% des moins de 25ans n’ont pas de travail).

Les investisseurs étrangers préfèrent, soit les pays du nord de l’Europe, s’ils recherchent des technologies de pointe, soit les pays émergents, s’il veulent de la main d’œuvre non qualifiée. L’investissement des propres entreprises espagnoles est a son tour limité, pour un certain nombre d’entre elles par leurs difficultés à se faire payer par les établissements publics et les administrations, et pour d’autres par la limitation du crédit par les banques, qui préfèrent souvent la spéculation sur les marchés financiers à leur activité originelle de crédits à l’économie.

Enfin, en ce qui concerne les encouragements des pouvoirs publics à la création d’entreprise, ils sont totalement inexistants, ou tout au moins ils se limitent a une série de subterfuges destinés à faire émerger des capitaux dormants, au travers de l’Institut Officiel de Crédit (ICO).

En fait, une des caractéristiques

principales de l’Etat espagnol a toujours été la politisation, le favoritisme et la « fonctionnarisation « à outrance des instances de contrôle et d’orientation de l’économie, avec tout ce que cela comporte de rigidités, d’improvisation, de culte de la personnalité, de dépenses somptuaires et de gabegie. Il en va de même en matière de recherche fondamentale.

De plus un grand nombre de fonctions économiques ont été transférées aux Communautés Autonomes, sans aucun des bénéfices d’un Etat fédéral. Le résultat est une totale anarchie et un renvoi permanent de responsabilités entre les uns et les autres, au moment de stimuler l’économie.

Pour corser le tout, les plus grands syndicats sont financés par le gouvernement (plus de 21millions d’euros en 20210) et par conséquent sont totalement inexistants sur la scène sociale (moins de 20% des travailleurs espagnols adhère à un syndicat).

Malgré tout ce qui vient d’être dit, les perspectives de l’économie espagnole ne sont pas forcément désespérées. Les capacités de travail, d’inventivité et de débrouillardise du peuple espagnol ont permis que ce pays prenne une place honorable en occident, malgré la navrante collection d’incapables et d’indésirables, qui se sont succédé aux commandes de notre pays, depuis de XIXème siècle. Pour preuve de ce qui vient d’être dit, il suffit de considérer qu’à l’heure actuelle l’Espagne compte plus de 5 millions de personnes au chômage (20% de la population active), que tous les membres de plus d’un million de familles sont

sans travail et que l’Espagne ne dispose d’aucune politique d’insertion sociale et ne connaît pas les allocations familiales. Pour autant, on ne recense aucune révolte ni catastrophe sociale, individuelle ou collective. L’entraide généralisée et l’économie parallèle remplacent l’intervention de l’Etat (…qui par ailleurs ne cesse de s’en attribuer tout le mérite).

Le Gouvernement espagnol, qui a mis pas moins de 4 ans pour admettre que le pays était en crise, a fini par céder devant l’insistance des instances Européennes et a suivi le mouvement visant a garantir les dépôts bancaires. Il a aussi accepter de réorganiser le système des caisses d’Epargne (…avec beaucoup de réticences de la part de tous les partis car elles servaient de retraite dorée pour tous les anciens dignitaires politiques), cependant que la Banques Centrale est intervenu pour contrôler de plus près les comptes des banques commerciales. Cela a rassuré quelque peu les détenteurs de capitaux.

Face au manque de liquidités, la même Banque Centrale a fourni de la liquidité à de très bas taux d'intérêt en échange d’un plan volontaire de stabilisation du secteur bancaire à moyen terme. Heureusement, la crise financière en Espagne a été beaucoup moins virulente qu'aux États-Unis. Les banques commerciales ont donc retenu une partie des dividendes et ont constitué des réserves. C'était une chose dont ne disposaient pas les banque américaines.

La crise financière terminée en Europe et en Espagne. La méfiance disparue. Les banques désormais solvables.

Il n’y a plus de problème de liquidité, mais le crédit ne parvient toujours pas aux entreprises et aux particuliers. Dès lors, les têtes pensantes du Gouvernement ont pensé qu’il fallait favoriser la consommation interne. Puisque la crise avait provoqué une réduction de demande des ménages, les Pouvoirs publics se devaient de la remplacer, en mettant en place des programmes de dépense publique et de réduction des impôts. Une politique keynésienne dans le sens le plus académique du terme. Des dépenses publiques en routes, hôpitaux, trains à grande vitesse ou en création de centres technologiques, devaient générer un accroissement de la demande. C’est ainsi qu’un programme de subventions aux travaux publics municipaux a été mis en place dans la précipitation et s’est révélée catastrophique dans les résultas car elles n’ont servi, le plus souvent qu’à des réalisations inutiles et n’ont pas empêché la demande de continuer à chuter. La diminution de l'impôt sur les successions n’a servi à rien non plus.

Prenant ses désirs pour des réalités le Gouvernement espagnol ne cesse de répéter que la croissance est pour le trimestre suivant. Les faits sont pourtant têtus et la crise et le chômage continuent de s’aggraver. Espérons que les prochaines élections donneront un peu de répìt au peuple espagnol, ne serait ce que le temps de cet « état de grâce « qui suit d’habitude l’instauration d’un nouveau mandat électoral, en priant pour que cela soit suffisant pour être entraînés prochainement par la « locomotive « européenne...

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