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Analyse et résumé : Lorenzaccio d'ALFRED DE MUSSET

Publié le 22/02/2012

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Quand il écrit Lorenzaccio, Musset n'a que vingt-quatre ans. Il a donc à peu près l'âge de son héros, il en partage également la maturité précoce, la certitude d'avoir déjà tout connu, tout compris de la vie. A cet égard, Lorenzaccio est le contraire d'un roman d'apprentissage ; c'est le drame de la désillusion. Pour sauver Florence, Lorenzaccio doit se perdre. Il a sacrifié sa pureté à la cause de la liberté. Florence est souvent personnifiée et se confond avec la noble figure de Marie Soderini, la mère de Lorenzo, horrifiée par les crimes de son fils. Catherine, la tante de Lorenzo, est la seule à croire encore en lui. Malgré la réputation méritée de celui qui est devenu l'incarnation même du mal, elle continue à chérir l'image de l'ancien Lorenzo, celui qui voulait imiter les héros de Plutarque.
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« La tragédie de l'homme doubleQuand il écrit Lorenzaccio, Musset n'a que vingt-quatre ans.

Il a donc à peu près l'âge de son héros, il en partageégalement la maturité précoce, la certitude d'avoir déjà tout connu, tout compris de la vie.

A cet égard,Lorenzaccio est le contraire d'un roman d'apprentissage ; c'est le drame de la désillusion.Pour sauver Florence, Lorenzaccio doit se perdre.

Il a sacrifié sa pureté à la cause de la liberté.

Florence estsouvent personnifiée et se confond avec la noble figure de Marie Soderini, la mère de Lorenzo, horrifiée par lescrimes de son fils.Catherine, la tante de Lorenzo, est la seule à croire encore en lui.

Malgré la réputation méritée de celui qui estdevenu l'incarnation même du mal, elle continue à chérir l'image de l'ancien Lorenzo, celui qui voulait imiter les hérosde Plutarque.Le génie de Musset consistera à adapter les éléments de l'intrigue aux structures mentales mises en jeu dans lesrelations entre les personnages.le.

Ainsi, Catherine reste pour Lorenzaccio le seul fil concret qui le rattache à sa pureté perdue.

C'est par elle qu'ilse vengera d'Alexandre de Médicis et réussira le crime patriotique qui doit donner un sens à sa vie.

Alexandre laconvoite et il a demandé à son favori d'organiser secrètement un rendez-vous galant avec Catherine.Mais Lorenzo sait très bien que son acte n'aura aucune conséquence politique.

Il l'accomplira donc uniquement pourlui-même, comme un acte gratuit dont la seule utilité est de sauver une femme encore pure du déshonneur.

Mais,même sur ce plan, il ne garde aucune illusion.

Il sait que si les choses suivaient leur cours, Catherine se laisseraitcorrompre comme les autres.Lui-même n'est-il pas définitivement marqué par le mal qu'il a dû contracter pour donner le change ? Son masque estdésormais devenu son seul visage.

Le vice est pour lui une seconde nature.

Il tuera donc Alexandre pour rendre unultime hommage à un idéal qui a révélé son inconsistance à l'épreuve des faits.Tout au long de la pièce, Lorenzaccio est, en effet, partagé entre le présent et le passé.

Dans l'esprit de sa mère etde sa tante, il retrouve l'image de l'adolescent idéaliste, fervent, humaniste, épris d'art et de culture.

Mais il sait quedésormais il ne peut échapper à l'emprise des plaisirs auxquels il a pris goût auprès d'Alexandre, personnage brutal,immoral et sensuel qui utilise son pouvoir uniquement pour satisfaire ses caprices sadiques.Lorenzaccio sera donc enfermé dans un cercle sans issue car il se rendra indigne de cet idéal par fidélité à son idéal.A cet égard, il apparaît comme une victime de ses illusions humanistes et comme l'illustration vivante du mot célèbrede Napoléon à Erfurt : « La politique, c'est le destin.

»Mais Musset pour autant ne fait pas oeuvre démonstrative et didactique, il montre son personnage de l'intérieur,dans ses contradictions intimes, en protégeant toujours ses zones d'ombre.

Le drame d'un homme et d'une époqueacquiert de ce fait même une signification transposable dans d'autres contextes.Ce n'est pas seulement la politique qui est en cause, mais le passage obligé de la théorie à la pratique.

L'expériencede Lorenzo montre bien l'inévitable prostitution qui accompagne la réalisation de toute idée, la souillure que lacontamination du réel impose aux rêves d'harmonie et de justice.Lorenzaccio sait désormais que ces rêves étaient condamnés dès le moment même où il a décidé de les mettre enpratique.

Mais il sait aussi que s'il avait renoncé à prendre part à la mêlée il se serait disqualifié plus encore vis-à-visde lui-même.

Cette double impossibilité ne découle pas d'un choix personnel, elle est inhérente à la nécessité duchoix.Le drame de l'homme double révèle donc la tragédie de la condition humaine.

C'est par cette conscience del'absurde que Lorenzaccio est un héros qui nous est proche, un héros dont le désespoir existentiel traduit bien avantla lettre la crise des valeurs d'où est sortie notre modernité.Pris en étau entre un idéal perçu comme mensonger et une réalité monstrueuse, il se trouve dans une situation sansissue.On pourrait croire que la sphère de l'art constitue le moyen de résoudre cette contradiction, mais Lorenzaccio ladénonce comme un alibi de l'injustice aussi illusoire que les grandes idées politiques et sociales. L'art et la politiqueLa question du sens de l'art est abordée avec une cinglante ironie dans la scène au cours de laquelle Lorenzoaccable le peintre Tebaldeo de sarcasmes.

On y trouve en germe les thèses des idéologues et des moralistes qui, auXXe siècle, mettront en cause la fonction mystificatrice de l'art dans la société.

Lorenzo exprime déjà les argumentsdes détracteurs du culte de l'art pour l'art envisagé comme un alibi du vice, de la corruption et de l'injustice.Quand Tebaldeo expose la théorie romantique selon laquelle la beauté naît de la souffrance, il paraphrase une idéeformulée par Musset lui-même qui s'exclamait dans les Nuits que « les chants les plus douloureux sont les chants lesplus beaux».Tebaldeo dit dans le même esprit que « l'enthousiasme est frère de la souffrance».

Et il ajoute :«Je plains les peuples malheureux, mais je crois en effet qu'ils font les grands artistes.

Les champs de bataille fontpousser les moissons, les terres corrompues engendrent le blé céleste.

»Musset se donne à lui-même la contradiction à travers la voix de Lorenzo refusant un culte de l'art et de la beautéqui s'exerce au profit de l'oppression et du mensonge.

Pourtant il semble que le point de vue de Lorenzo dépasse laposition strictement éthique des écrivains qui, de Rousseau à Tolstoï, ont condamné l'art au nom de la vertu et lareligion de la beauté au nom du respect des valeurs morales. TROIS MYTHESCe que Lorenzo dénonce dans l'individualisme aveugle et farouche du jeune peintre ce n'est pas tant l'amoralitéinconsciente que l'inconscience même qui sous-tend cette amoralité, c'est le pouvoir d'illusion des grandes idées. »

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