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Argent Et Malheur

Publié le 11/09/2006

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De nos jours, l’argent est devenu un symbole du matérialisme social : c’est un élément vital pour tout Homme désirant vivre en société, ou du moins survivre. Dans notre société actuelle, l’argent se révèle être une des préoccupations majeures des individus. Pourquoi cherchons-nous à avoir de l’argent ? Est-ce un moteur inconditionné du bonheur ? La plupart du temps, le bonheur est défini comme étant une satisfaction absolue de tous nos désirs. Ainsi, assouvir tous ses désirs suppose de posséder assez d’argent pour acquérir tout ce que l’on veut. L’excès d’argent et donc de plaisirs et de jouissances mène souvent bien vite à l’ennui : avec l’argent nous pouvons posséder rapidement tout ce que l’on veut. Les chosent perdent bien vite de leur valeur et les hommes fortunés courent toujours plus vers de nouvelles activités pour essayer de retrouver des sensations. Dans ce cas, la frontière entre bonheur et malheur est très perméable : l’argent est le moyen du malheur bien plus que celui du bonheur. L’argent suffit-il à être heureux ? Chacun de Zola dans L’Argent, Molière dans L’Avare, et Simmel dans La philosophie de l’Argent, souligne le rapport de l’homme à l’argent, et illustre bien le fait que l’argent engendre plus facilement le malheur de l’être que son bonheur. Certes l’argent est un des moyens d’accès au bonheur par l’acquisition de libertés individuelles. Toutefois, sa possession a des effets indéniables sur l’action humaine et est responsable du développement de certains traits de caractères traduisant une usure profonde de l’âme. Pour autant, l’argent peut se révéler être un des principal destructeurs des relations sociales.

 

L’argent, comme intermédiaire d’échanges et du fait de sa facilité de transport, à permis l’essor de la liberté des individus face aux choses mais aussi face aux personnes qui les entourent. Pouvant être converti constamment en objets de toutes sortes, l’argent permet donc à l’homme d’assouvir ses désirs et ses besoins, lui permettant en conséquence d’atteindre son bonheur. La vie d’Harpagon est centrée autour de sa casette. Son touché, son odeur, sa simple existence, installe en lui un état de plénitude que nulle autre chose ne peut permettre. Saccard lui trouve sa stabilité, son énergie, son inspiration dans le monde financier, dans l’univers de la Bourse. Le simple fait de rêver des millions qu’il pourrait acquérir le rend heureux et fédère sa vie. L’argent peut donc, par sa seule présence, donner aux hommes un sentiment de réconfort et de bonheur absolu. L’argent fait rêver, et permet aussi aux rêves de se réaliser. Bien que l’argent ait été originalement conçu pour favoriser les échanges au sein des sociétés, et permettre à tout un chacun de prendre son propre envol ; il est de nos jours un moyen qui définit le pouvoir et la place de dans un large groupe de personnes. Celui qui a l’argent peut imposer sa volonté à ses semblables. Il est écouté sinon entendu, craint à défaut d’être respecté. Certaines scènes de l’Avare traduisent bien l’image qu’une personne aisée peut avoir d’une autre ayant une situation financière moins aisée que la sienne. Ainsi, La Flèche utilise certains termes familiers pour désigner l’usurier : « Ma foi, Monsieur, ceux qui empruntent sont bien malheureux, et il faut essuyer d’étranges choses lorsque l’on est réduit à passer, comme vous par les mains des fesse-mathieux «. L’entreprise de ce genre de discours montre bien la distinction faite entre les riches et les pauvres. Simmel traduit cette idée dans son livre par l’emploi du terme « superadditums «. On observe par exemple une pratique économique et sociale très courante : on ne prête qu’aux riches.

 

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Si l’argent favorise la vie de certaines minorités, l’argent favorise aussi leur oppression : il est facile de mettre à nu un détenteur d’argent. Simmel souligne bien la fragilité de ce qu’il appelle « aristocratie de l’argent «, en soulignant son exposition constante à un déclassement social. Au début de L’Argent, Saccard sort d’une période de crise financière. Il a perdu sa fortune et par conséquent sa place de choix dans la société. Quand il fait son entrée chez Champeaux, lieu de rassemblement des adeptes de la Bourse, il ne possède plus rien, les gens qu’il connait l’accueillent froidement ou font semblant de ne pas le connaître : c’est un homme ruiné ; or dans le monde hostile de la Bourse, une mauvaise passe financière se solde par l’éloignement de toutes personnes s’étant présentée comme « amie «. Sur le même schéma, la débâcle finale de la Banque Universelle fait replonger Saccard dans la pauvreté et la déchéance. Il passe du sommet du bonheur à fraîcheur des cachots de la conciergerie ; et de nouveau tous ceux qui l’admiraient et qui s’étaient construit une richesse grâce à lui l’abandonnent. L’argent est le moteur d’un bonheur illusoire qui ne tient qu’à des préceptes matérialistes ne s’inscrivant pas dans toutes les valeurs qui mènent au bonheur. Il est souvent à l’origine de l’émergence de certaines passions responsables de l’usure et de la déchéance de l’âme humaine.

 

L’argent peu avoir une influence néfaste chez certains individus, particulièrement l’être fragile traversant une rude épreuve ou ayant subit un changement brutal et radical dans sa vie. Il génère l’émergence de passions intérieures fortes qui se traduisent au quotidien par des comportements excessifs et dévastateurs. L’avarice est un des plus grands maux associé à l’argent. Elle traduit un attachement excessif à l’argent. L’avare accumule et retient ses richesses comme si elles étaient essentielles ; vitales. L’avare est fasciné par l’argent dans la mesure où il lui permet d’acquérir tout bien possible: il est en complète adulation devant lui. Ca devient le moyen d’acquérir pouvoir et puissance. Saccard rêve des millions qui coulent à flots. Il rêve surtout qu’à se moment là, le tout Paris sera à ses pieds. L’avare pense économiser dans le but de toujours avoir de l’argent de côté en cas d’imprévus. Ainsi, il s’interdit toutes dépenses mêmes les plus rudimentaires et les plus nécessaires de la vie. L’avare se prive d’engagement, d’action, d’acquisition. Il renonce par conséquent à sa liberté. Son attachement est tellement grand qu’il élève l’argent au rang de seul maitre auquel il livre sa vie, ses pensées, l’essence de son existence même. Ainsi, nous pouvons remarquer chez les avares l’apparition de traits de caractères traduisant une certaine paranoïa et une forte instabilité de l’être. Harpagon se sent constamment épié. La seule idée qu’une tierce personne soit au courant, par simple mégarde de sa personne, qu’il a en sa possession dix milles écus, le rend nerveux. Gundermann, lui, aime retenir et conserver l’argent. Il aime le savoir en sécurité six pieds sous terre. Les avares aiment le secret, le mystère, la dissimulation, le soupçon, la violence verbale et physique. Harpagon n’hésite pas à injurier Valère voire même à le corriger en lui infligeant des violences physiques, dans le cas où ce dernier dépense plus que le strict nécessaire. Dans la même continuité que l’avare, on retrouve le prodigue, qui lui dépense sans compter. A l’image de Cléante, le fils d’Harpagon. Il perd en dépensant, en n’épargnant pas. Le seul fait d’acheter lui apporte un sentiment de puissance, de pouvoir. Le prodigue selon Simmel « s’attache au moment où s’effectue la dépense de l’argent, quel qu’en soit l’objet ; l’attrait de ce moment l’emporte chez le prodigue sur une estimation adéquate de l’argent d’une part et des objets d’autre part «. Dépenser est synonyme de bonheur. Seulement, c’est un bonheur ponctuel qui s’envole dès que l’achat ou la dépense 2

 

à été faite. De ce fait, le prodigue va toujours chercher à dépenser plus jusqu’au point où les objets n’auront plus aucunes valeurs à ses yeux et que leur image deviendra terne et fade : le prodigue plongera alors dans un tourbillon d’angoisse et de questionnement par rapport à sa vie. D’autres personnes elles, ne faisant preuve ni d’avarice ni de prodigalité, compromette leur existence pour le seul motif d’acquérir de l’argent. Le seul mobile de l’humanité devient par ces comportements : l’argent. Pour acquérir une somme d’argent, aussi infime soit elle, un ouvrier se vend à la journée, et n’hésite pas à livrer sa femme et ses enfants. Pour de l’argent, les fabricants peuvent restreindre leurs investissements dans la confection du produit fini, pouvant mettre en péril la sécurité et la vie d’autres personnes. L’argent comme objet de fascination et de passion, acquiert ainsi une valeur anéantissante qui lui confère un pouvoir dévastateur des relations sociales, et même des rapports familiaux.

 

Pour être heureux, l’homme doit se sentir aimé, protégé, soutenu, compris. Seulement, les rapports à l’argent interfèrent bien souvent dans les rapports reliant divers individus entre eux. Dans un premier temps, l’argent intervient de façon marquante dans le destin des filles, notamment lorsqu’il s’agit de mariage. En effet, l’argent apparait comme une transaction commerciale puisque la dot définie le mariage que la fille pourrait contracter. Plus la dot est élevée, plus la situation que le mariage peut offrir à la jeune fille sera meilleure. La comtesse de Beauvilliers et sa fille qui vivent dans la stricte restriction quotidienne afin de conserver un montant important pour la dote de la jeune femme. Aussi, au sein d’une relation conjugale, l’argent peut se poser comme un rempart au bonheur du couple. Dans l’Avare, Valère et Cléante expérimente le poison que l’argent peu amener à une relation entre deux individus. Bien qu’ils soient unis par une passion amoureuse et qu’ils soient unis par le désir tenace de construire un bonheur durable, leur système de valeurs diffère quand il se rapporte à l’argent. Cléante est inactif, dépensier, futile. Il recourt aux hasards du jeu pour se procurer les moyens de satisfaire sa passion. Valère se montre plus réfléchi, il n’hésite pas à mettre sa fortune entre parenthèses, à travailler dans un emploi de domestique, à se contenter de peu. D’autre part, l’argent peu empoisonner les relations familiales. Afin de protéger son secret, Harpagon n’hésite pas à mentir à ses propres enfants Cléante et Elise. Il les considère comme ses ennemis, qui n’hésiteraient pas à le trahir si l’occasion se présente. Ces deux derniers, finissent par se transformer en personnes fourbes et intrigants, arrivant même au point de souhaiter la mort de leur père. Toujours dans l’Avare, Cléante, à la merci de son emprunteur, qui n’est nul autre que son père, est obligé d’accepter les conditions établies pour l’obtention du prêt, et n’hésite donc pas à cet effet d’exprimer sa rancœur « Voilà où les jeunes gens sont réduits par la maudite avarice des pères ; et on s’étonne, après cela, que les fils souhaitent qu’ils meurent «. L’argent entraine des pulsions contre nature. Il est le principal responsable de l’immoralisme à l’origine de la destruction des relations de confiance.

 

En guise de conclusion, l’argent favorise la liberté individuelle, les échanges entre individus, et la réalisation du progrès de l’humanité permettant ainsi à l’homme d’atteindre son bonheur. L’excès d’argent, de plaisir et de jouissances mène souvent bien vite à l’ennui. Néanmoins, l’or est devenu le 3

 

sens et le but de toute vie, de toute pensée, de toute action. Cet or, on le pourchasse non pour assurer son existence ni celle de sa famille, ni pour donner réponse à des questions existentielles, mais pour amasser des millions par amour pour le veau d’or. Il engendre en conséquence l’émergence de passions dévastatrices, qui dégradent progressivement l’essence même de l’âme humaine. C’est d’autre part un véritable poison des relations sociales et familiales. L’argent semble bien constituer un obstacle au bonheur, mais il reste toutefois un mal nécessaire sans lequel la vie ne peut avancer.

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