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Le Baron perché

Publié le 29/03/2013

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Paru en 1957, ce roman appartient à une trilogie. Il vient après Le Vicomte powfendu (1952), et précède Le Chevalier inexistant ( 1959). Dans la préface destinée aux trois ouvrages, Calvino écrivait: « Je rassemble en ce volume trois hi stoires que j ' ai écrites dans la décennie 1950-1960 et qui ont en commun le fait d 'être invraisemblables et de se dérouler en des époques lointaines et en des pays imaginaires. «

 

« « Le baron Arminius poussa son cheval jus que sous les arbres.

» EXTRAITS La leçon de latin dans un parc Le lendemain, comme il faisait beau, on décida que Côme reprendrait ses leçons avec l'abbé Fauchelafleur.

On ne spécifïa pas comment.

Le Baron invita simplement et quelque peu brusquement l' Abbé ( « Au lieu de rester là à regarder les mouches, l' Abbé ...

»)à partir à la recherche de mon frère, et à lui faire traduire un peu de Virgile.

Ensuite il eut peur d'avoir mis l' Abbé dans un trop grand embarras, et me commanda: -Va dire à ton frère qu'il doit se trouver au jardin dans une demi-heure pour sa leçon de latin.

Il le dit du ton le plus naturel qu'il put, un ton qu'il avait résolu d'adopter : Côme pou­ vait bien vivre dans les arbres, tout devait continuer comme avant.

Et la leçon eut lieu.

Mon frère installé à califourchon sur une branche d'orme, les jambes pendantes, et l' Abbé au­ dessous, assis sur un petit tabouret, répé­ taient en chœur les hexamètres.

Au cœur du royaume Côme se tenait volontiers dans les feuillages ondulés des chênes verts (qu'en parlant de notre parc j'ai pompeusement nommé des yeuses, sans doute sous l'influence du très noble langage paternel) ·; il aimait leur écorce crevassée qu'il enlevait par plaques, du bout des doigts, quand il était préoccupé, non pour faire le mal, mais comme pour aider l'arbre dans son long labeur de renouvellement.

De même, il écaillait l'écorce blanche des platanes et mettait à nu des couches de vieil or moisi.

Il aimait le tronc bossué del' orme, dont chaque loupe pousse, avec de tendre reje­ tons, des touffes de feuilles dentelées et des samares de papier.

Mais on n'y circule pas facilement; les branches remontent, sifïnes et si serrées qu'elles ne permettent guère de passer.

Le vert paradis des amours Quand ils étaient las, ils allaient dans certains refuges cachés au sein des arbres les plus touffus : hamacs qui les envelop­ paient comme un cornet de feuilles, pa­ villons suspendus aux tentures flottantes dans le vent, couches de plumes.

Le génie de Violette se donnait libre cours dans tout cet apparat.

Partout où la marquise se trouvait, ell e avait le don de créer autour d'elle le bien­ être, le luxe et des commodités complices qui semblaient fort compliquées mais qu'elle ob­ tenait avec un facilité miracu­ leuse : tout ce qu'elle voulait devait se réaliser, à tout prix et sur-le-champ .

Les rouges-gorges venaient se poser et chanter sur ces al­ côves aériennes .

De grands papillons vanesses pénétraient par couples entre les courtines et s' entre-poursuivaient là.

Par les après-midi d'été, lors­ que le sommeil surprenait les deux amants couchés l'un près del' autre, un écureuil entrait r pour chercher quelque chose à grignote1: caressait leur figure de sa queue en panache ou leur mordillait un orteil.

Ils fermèrent mieux leurs rideaux ; mais une famille de loirs rongea le plafond de leur pavillon, et leur tomba dessus un beau jour.

Traduit de l'italien par Juliette Bertrand, Le Seuil, 1980 Né à Cuba en 1923 et mort à Sienne en 1985 , ltalo Calvino s'est d'abord signalé par une œuvre inspirée de la Résistance : L'Esprit nouveau (1952), puis il a écrit des romans marqués par le néo­ réalisme italien de l'époque , mais empreints de fant ais ie et d'humour.

« [Côme et Violette] s'aimaient suspendus dans le vide, en s'étayant et s'agrippant aux branches.

» NOTES DE L'ÉDITEUR « L'allégorie de l'ob servateur à la fois détaché des hommes et mêlé à leur s problèmes et à leurs espoirs est évide nte et permet à l'auteur une subtile médiation sur le s déceptions qu'inflige l'histoir e à un esprit existant.

Cette situation toute particulière permet également à Italo Calvino d'emp loyer à fond les inépuisables réserves de so n humour .

L'action du Barone rampante se situe avant, pendant et après la Révolution française et on aura reconnu que nous sommes, une nouvelle fois, allégoriquement, dans la crise des idéaux de la Résistance et de la Libération tels qu'ils s'expriment dans le roman itlali en.» Antoine Ottavi, La littérature italienne contemporaine, PUF, 1981.

« N'y-a-t'il pas quelque chose de Don Quichotte et de Robinson dans ce héros, cet enfant qui se révolte contre l'autorité paternelle, se réfugie dans les arbres et décide un jour de ne plus jamais en redescendre? Philosophe, amoureux de la nature, amoureux tout court, il reste en prise avec l 'histoire de son pays, l'histoire du monde même ? » Daniel Soulié, metteur en scène del 'adaptation d'un spectacle de marionnettes inspiré du Baron perché , interview de A.

Héliot, Le Quotidien de Paris, lüjanvier 1992.

1 Gamm a 2, 3, 4, 5 ill.

d e Kathrin Gloo r, Einaudi , 19 72 « Cet écureuil de la plume.

» Cesare Pavese à propos de Calvino.

CALV IN002. »

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