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Le bonheur est-il une affaire privée ?

Publié le 05/02/2004

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Ne suis-je pas le seul à pouvoir dire si je suis heureux ou non ? Un jugement extérieur sur ma situation risque d'en fausser le sens, d'en méconnaître certains aspects, quelle que soit la sympathie que l'on manifeste à mon égard. Si le sentiment du bonheur relève ainsi de la subjectivité, en va-t-il de même lorsqu'il s'agit d'atteindre le bonheur ? Peut-être la société pourrait-elle m'aider dans ma quête, ne serait-ce qu'en me procurant des conditions favorables au bonheur. Mais si, allant plus loin, la société prétend définir ce que doit être tout bonheur, et donc le mien, ce dernier peut-il être authentique ?

« [III - Une affaire privée, et difficile] [A.

Aucune société ne rend l'homme heureux]La divergence entre les exigences de l'organisation sociale et les espoirs individuels est, si l'on en croit Freud, d'unenature telle qu'aucune société n'est organisée pour rendre l'homme intégralement heureux.

Si le bonheur doitconsister en la satisfaction de toutes les pulsions de l'inconscient, l'homme est en effet condamné à ne jamais êtreheureux, puisque son intégration dans un corps social détermine nécessairement le refoulement de ses pulsions lesplus profondes, et donc sa frustration. [B.

L'aliénation]Mais le social est dangereux aussi en ce qu'il proposerait des satisfactions trompeuses.

Depuis Rousseau, et toutparticulièrement lorsqu'on a analysé la société dite « de consommation », philosophes et sociologues déplorentl'aliénation du sujet par les tentations que lui impose le monde marchand : la surenchère dans l'« avoir »,l'acquisition toujours renouvelable d'objets sans réelle valeur de satisfaction, finissent par occulter totalement l'«être » et son aptitude au bonheur.

L'homme moderne, s'il est bien, comme le dit Rousseau, « toujours hors de soi »,ignorerait la réalité du « privé ».

Dans de telles conditions, définir le bonheur comme « affaire privée » serait plusnostalgique que réaliste. [C.

Les conflits entre « affaires privées »]De plus, il va de soi que, même si l'on admet que le bonheur comme « affaire privée » reste concevable ou possible,on se heurte au problème de l'harmonisation des bonheurs individuels : comment garantir que la quête de l'un nevienne pas gêner celle d'un autre, ou la nier ? Il apparaît ainsi que le corps collectif, même si on ne doit pas enattendre un réglage des conduites susceptibles d'aboutir au bonheur, doit néanmoins se préoccuper d'interdire cellesqui pourraient avoir tendance à se considérer comme disposant de tous les droits au bonheur, et seules légitimes.On supporterait difficilement, même si l'exemple est caricatural, qu'un sadique atteigne à titre très privé son bonheur en massacrant ses partenaires, sans provoquer de réaction de la société...

Si l'on admet l'existence d'un « droit aubonheur » (non codifiable), on doit admettre aussi que ce droit, comme tous les autres, doit être équitablementpartagé entre tous : la libertéprivée » qui peut s'y exercer ne peut, une fois de plus, qu'être soumise aux lois générales de la collectivité. Conclusion La réflexion sur le bonheur ne peut faire abstraction du caractère social de l'homme, en sorte que, même si l'onsouligne le caractère privé du bonheur, on se trouve obligé de tenir compte, dans sa quête, de la présence desautres.

Réduire la sphère privée à : « Il faut cultiver son jardin » paraît terne lorsqu'il y va du bonheur, et l'on doitpar ailleurs se demander si un bonheur peut être authentique en s'accomplissant dans l'ignorance totale des autres.. »

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