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Bourguiba, Habib

Publié le 06/04/2013

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1   PRÉSENTATION

Bourguiba, Habib (1903-2000), artisan de l’indépendance de la Tunisie et premier président de la République tunisienne (1957-1987).

2   LE COMBATTANT POUR L’INDÉPENDANCE
2.1   Un militant de la première heure

Né à Monastir dans une famille de la petite bourgeoisie tunisienne, Habib Bourguiba quitte la Tunisie au début des années 1920 pour poursuivre des études de droit à Paris — la Tunisie est sous le protectorat de la France depuis 1881. De retour à Tunis en 1927 et nourri d’ardents sentiments nationalistes, il exerce la profession d’avocat et pratique un militantisme actif. Membre du Destour, parti de l’indépendance tunisienne, il collabore à plusieurs publications nationalistes avant de fonder en 1932 son propre journal, l’Action tunisienne. Ses prises de position originales en faveur d’une Tunisie indépendante, moderne et laïque s’opposent rapidement à l’aile la plus traditionaliste et islamique du Destour. Dès 1934, Bourguiba provoque la scission du parti en fondant le Néo-Destour avec un groupe de jeunes militants favorables comme lui à l’instauration d’un État laïque.

2.2   Les années de lutte et de prison

À l’instar des autres dirigeants du Néo-Destour, sa lutte anticolonialiste vaut à Bourguiba d’être poursuivi par les autorités françaises, arrêté et interné à plusieurs reprises, notamment à la suite des grèves et des émeutes de 1938 à Tunis. Libéré en 1942 par les Allemands, il refuse de se ranger du côté des puissances de l’Axe. Toutefois, à la libération de la Tunisie (1943) par les Alliés, il est placé en résidence surveillée par les autorités coloniales. Il parvient à s’échapper et quitte clandestinement la Tunisie pour l’Égypte. De retour d’exil, il intensifie les appels à la lutte et, après une campagne d’agitation, il est de nouveau arrêté en 1952 et assigné à résidence en métropole jusqu’en 1954. Alors que la Tunisie connaît durant ces années une vague d’incidents et d’attentats terroristes et que le président du Conseil Pierre Mendès France proclame sa volonté d’émanciper le peuple tunisien, le chef populaire du Néo-Destour s’impose comme un interlocuteur privilégié dans les négociations qui mènent à l'autonomie interne de la Tunisie, en 1955. Après son retour triomphal en Tunisie, le 1er juin 1955, il écarte du Néo-Destour son principal rival, Salah ben Youssef, et se retrouve naturellement à la tête du pays lorsque celui-ci acquiert son indépendance en mars 1956.

3   LE PÈRE DE LA TUNISIE MODERNE

Désigné président du Conseil après la victoire écrasante du Néo-Destour aux élections législatives d’avril 1956, Bourguiba fait destituer le bey. La monarchie est abolie et la République est proclamée le 25 juillet 1957. Investi des pouvoirs de chef de l’État, Bourguiba entreprend d'audacieuses réformes dans un pays de tradition musulmane, interdisant la polygamie, accordant le droit de vote et d'éligibilité aux femmes et substituant un droit civil au droit coranique. Convaincu du rôle de l’éducation dans la lutte contre le sous-développement, il promeut la démocratisation de l’enseignement. Sur le plan politique cependant, fort de sa légitimité de « Combattant suprême « de l'indépendance, il exerce un pouvoir autocratique, appuyé sur un parti unique, qui quadrille toute la société civile. Pour le père de l’indépendance, le processus d’édification d’une Tunisie moderne ne saurait supporter aucune forme de contestation : le multipartisme, la liberté de la presse et les syndicats sont interdits.

Dans le domaine économique, face aux problèmes sociaux auxquels est confronté le pays, le président Bourguiba tente la voie du socialisme autoritaire — en 1964, le Destour est rebaptisé Parti socialiste destourien (PSD). Toutefois, la tentative de collectivisation de l’économie échoue, et, dès 1969, la Tunisie s’ouvre à la libéralisation.

4   UN HOMME D’ÉTAT DE STATURE INTERNATIONALE

De même que sa politique de laïcisation et de modernisation de l’État, profondément novatrice, lui vaut un rayonnement international, le président tunisien ne manque pas de se distinguer sur le terrain de la politique étrangère. Hostile au panarabisme égyptien, il fait cependant entrer la Tunisie dans la Ligue arabe en 1958, mais en lui conférant une position très modérée. Si, au lendemain de l’indépendance, les relations entre la France et son ancien protectorat sont sujettes à des conflits sporadiques, notamment en raison du soutien apporté par la Tunisie aux nationalistes algériens ou lors de l’évacuation de la base navale de Bizerte, en 1961, elles s’améliorent considérablement lorsque Bourguiba s'affirme comme un partisan de la coopération avec l'Occident et de la paix au Proche-Orient. Le discours historique qu’il prononce à Jéricho, en Cisjordanie, en 1965, dans lequel il préconise la normalisation des rapports avec Israël, lui vaut l’hostilité de l'Égypte de Nasser. Par la suite, toutefois, la nécessité de resserrer les liens avec les pays arabes l’emporte. Après que Bourguiba condamne les accords de Camp David (1978), Tunis devient le siège de la Ligue arabe en 1979, puis celui de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) en 1982. Ce choix panarabe ne remet cependant pas en cause les bonnes relations de la Tunisie avec ses partenaires occidentaux.

5   DÉRIVE ET FIN DU RÉGIME DE BOURGUIBA

Réélu au suffrage universel direct en 1959, 1964, 1969 et 1974, alors qu’il est à chaque fois l’unique candidat à sa propre succession, Bourguiba devient président à vie par un amendement de la Constitution de 1975. Cette révision constitutionnelle n’est pas sans provoquer l'hostilité d'une partie du peuple tunisien, exaspéré par la flambée des prix et la montée du chômage. Le régime de Bourguiba sort affaibli du bras de fer sanglant avec les syndicats lors des émeutes populaires de janvier 1978, tandis qu’il doit faire face à la montée de l’islamisme radical et à des tentatives de déstabilisation provenant de son puissant voisin libyen, le général Kadhafi.

En 1981, sentant son pouvoir vaciller, Bourguiba parie sur la démocratisation, en acceptant le multipartisme et en accordant l'autonomie à la puissante centrale syndicale UGTT (Union générale des travailleurs tunisiens). À la suite des « émeutes du pain « de décembre 1983 et janvier 1984, provoquées par des conditions économiques de plus en plus difficiles, le président lance une campagne contre la corruption et pour le redressement économique. Ces tentatives d’ouverture démocratique sont toutefois abandonnées, et le « Combattant suprême « apparaît toujours plus marqué par l’âge et affaibli par la maladie, tandis que le pays est paralysé par les rivalités et les luttes qu’entraîne la question de sa succession. Le Premier ministre qu’il a lui-même désigné en octobre 1987 pour contrer la menace islamiste, Zine el-Abidine Ben Ali, le destitue le 7 novembre 1987, pour « incapacité de gouverner «. Profondément diminué, l’ancien président vit reclus dans sa ville natale de Monastir jusqu’à sa mort, le 6 avril 2000. Le peu d’égards porté par le pouvoir en place à l’organisation des funérailles nationales du père de la nation est vécu comme une atteinte à la mémoire collective par une majorité de Tunisiens.

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