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Le but de l'éducation est il de supprimer le naturel?

Publié le 08/03/2011

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Le but de l’éducation est-il de supprimer le naturel ?

 

                Le but de l’éducation est d’apprendre, pour un enfant par exemple, les mœurs de sa civilisation, les bonnes manières de celle-ci, par le biais le plus souvent des parents, ou équivalent. Mais par la suite il devra parvenir à une certaine autonomie, et être capable de se faire ses propres réflexions et opinions.  Si ces mœurs ne sont pas transmis, ou mal, la société se chargera de mettre cette personne à l’écart. En effet, elle sera considéré comme « mal éduquée », donc barbare, peut être même un animal. Car un barbare est la représentation d’une bête, n’ayant pas de réflexion, étant resté à l’état de nature. Il suppose souvent une violence qui n’est pourtant pas présente gratuitement dans la nature, mais bel et bien apporté par des êtres s’opposant aux règles inculquées par son éducation, en les méprisant. Manquer d’éducation, ce serait donc suivre notre nature animale, première, omettant par là même toute forme de culture, de civilisation. Dès lors, nous pouvons nous demander si le but de toute éducation n’est pas de supprimer le naturel en l’homme, de détruire, ou au moins de camoufler, en d’autres termes, ces instincts qui empêchent l’homme de s’humaniser. Le problème est que toute création humaine émane d’une faculté originelle. Dans ce cas, dépasser son animalité n’est-il pas le propre de l’homme ? L’éducation ne serait-elle pas une forme de libération face aux contraintes de la nature ?

                L’homme, depuis toujours, modifie la nature et l’adapte à ses besoin. Sans se contenter de s’abriter sous les grottes, les hommes préhistoriques les ont décorées, ont peint leurs façades. Ils ont pour cela rassemblé des plantes, mélangés leurs pigments… Ils ont fait du feu afin de cuire leur viande et taillé des pierres pour la découper. Avant l’écriture, qui semble être la base de la culture, l’être humain s’adonnait déjà a nier la nature en la transformant, créant ainsi son propre monde, faisant de la nature une alliée capable de le servir dans ses besoins. Après, avec le travail, les études, l’homme s’est forgé une éducation beaucoup plus poussée, allant bien au delà de ses simples instincts naturels. Ainsi, on comprend que le but de l’éducation, chez l’homme, est de faire de l’homme un être culturel. Par ce biais de l’éducation, il réprime ses instincts naturels, faisant un travail sur lui-même et non plus uniquement sur la nature. L’éducation fera de lui un être savant respectant les règles de sa société, comme les règles de sa langue, son langage, les relations à entretenir avec les autres, comment parler à un adulte autrement qu’à un enfant…  Ce sont là des actes proprement culturels, et le fait que ces mœurs et ces bonnes manières varient d’un pays à l’autre le prouve.                                                                                                                                                              Un homme, éduqué, perd donc tous ses instincts naturels, pour n’être plus qu’au service de la société, et non avec la nature. Car la nature elle-même est dépossédée par les sociétés de nos jours qui l’utilisent en la respectant de moins en moins. L’éducation fait d’un de l’homme un Homme, en le civilisant. Elle supprime le naturel. Cependant, son but n’est pas vraiment celui de perdre tout lien avec sa nature. Les enfants ne sont pas éduqués pour perdre leur nature, mais pour leur permettre de s’adapter aux évolutions de l’espèce humaine dans ses mœurs et ses sociétés. Si, à l’état de nature, « l’homme est un loup pour l’homme », selon  Hobbes, c’est en revanche parce que les hommes sont éduqués qu’ils peuvent vivre en société. Le but de l’éducation ne serait donc pas de supprimer le naturel, mais d’abord de permettre une coexistence pacifique des hommes. Etre civilisé, c’est d’abord posséder les capacités de vivre avec d’autres. Ainsi, la suppression du naturel, des instincts primaires de l’homme, ne serait que la condition nécessaire du but réel que poursuit l’éducation véritable, à savoir développer en l’homme sa sociabilité. Ainsi, un homme devient un Homme en perdant son naturel. Comme le dit Rousseau : « On façonne les plantes par la culture, et les hommes par l'éducation. Tout ce que nous n'avons pas à notre naissance et dont nous avons besoin étant grands, nous est donné par l'éducation. »

             La question se pose alors de savoir quelles sont ces qualités innées, naturelles, chez l’homme. Et ce qu’il advient de ce dernier si elles ne sont pas développées. Le cas de Victor de l’Aveyron doit alors être évoqué. En effet, dans les années 1800, un jeune enfant est retrouvé dans les bois. Il y a toujours vécu, loin des hommes, à l’état sauvage, et n’a alors reçu aucune éducation. Il sera recueilli par le professeur Jean Itard. Ce dernier écrira un livre expliquant ses démarches avec Victor, dans le but de lui apporter une éducation. Victor ne marchait alors qu’à quatre pattes et se nourrissait exclusivement de plantes.  L’homme « à l’état zéro » comme le dit Itard,  était enfin connu. Cet enfant ne parvenait pas, malgré les efforts des scientifiques, à parler, ou à communiquer. Tout d’abord insensible à toute chaleur ou froid, il distingua au fur et a mesure de sa vie entre quatre murs les différences de température. Ses autres  sens également s’étaient développés d’une manière différentes que chez les hommes éduqués. Il avait par exemple un odorat très développé tandis qu’il ne réagissait pas à un bruit fort à ses côtés. Au fur et a mesure de son travail avec lui, Jean Itard réussira à lui faire faire quelques progrès, mais Victor ne parviendra jamais à parler, et à être inséré dans la société. Il ne prenait pas part à cette dernière, prouvant qu’elle ne lui était pas indispensable. Il avait vécu une douzaine d’années dans les bois sans aide humaine, et ne pouvait plus s’accompagner de cette dernière. De nos jours, à un stade ou cette société délaissant la nature s’est instaurée et  a conquis  les moindres espaces, la tendance pourtant revient à la nature. La nourriture biologique est promulguée, le maquillage encense les teints « nudes », c'est-à-dire « naturels ». Un retour vers la nature, délaissée mais pourtant mère vers laquelle on finit par revenir. Ainsi, à l’éducation la nature impose ses limites. Malgré tous leurs efforts pour l’éloigner, la nature semble plus forte et toujours présente. Ainsi le proverbe si vieux qu’on ne peut le dater : « Chassez le naturel, il revient au galop. »

               Cependant, par l’éducation, l’enfant apprend à parler, à communiquer avec autrui, et donc à vivre avec lui. Aux temps les plus anciens, ils faisaient déjà cela, sans langage codifié, mais les hommes vivaient en tribus. Victor ne se sociabilisera pas car il n’avait jamais, auparavant, été en contact avec un autre humain, même sauvage comme lui. Il apparaît dès lors qu’éduquer, c’est développer ce qui constitue, selon Aristote, la nature humaine, laquelle consiste dans la sociabilité : « La cité est du nombre des choses qui sont dans la nature, (…) l’homme est naturellement un animal politique, destiné à vivre en société » dit-il dans Politique. L’homme n’apprend à être humain qu’en développant ses facultés proprement humaines, sa nature, ses qualités innées, et c’est bien ce que permet l’éducation. Elle ne supprime donc pas le « naturel » en l’homme si, par ce terme, nous entendons ce qui le définit en tant qu’être humain. Au contraire, elle le rend actuel, le développe.                  L’éducation, au sens large, est la mise en œuvre de méthodes et de procédés propres à assurer la formation et le développement d’un être humain. En ce sens, éduquer, ce n’est pas seulement élever et instruire, mais former l’enfant, le conduire vers la société, vers l’âge adulte, développer ses facultés aussi bien pratiques que théoriques. Ainsi, Cicéron écrit, dans Tusculanes : « Un champ, si fertile soit-il, ne peut être productif, et c’est la même chose pour l’âme sans enseignement ». Les bases permettant à chacun d’être éduqué sont présente en tous les hommes, mais si elles ne sont pas développées, elles resteront inertes. Un enfant livré lui-même ne peut en effet distinguer le bien du mal. Sans forcément parlé de mal fait à autrui, il peut se faire du mal en tentant des expériences, comme les jeunes enfants obligés de se rendre à l’hôpital car ils se sont enfoncés de petits objets dans le nez, les oreilles…  Sa conscience ne se développera qu’au fil des expériences, expériences guidées par les divers éducateurs qui l’entourent, et le mettront en garde sur ce qu’il faut ou ne faut pas faire, pour son bien. « L’homme ne peut devenir homme que par l’éducation. Il n’est que ce qu’elle le fait. » Kant signifie là que l’éducation a pour but l’accès à l’autonomie, ce qui suppose qu’elle vise non pas la négation de ce qui est inné en l’homme, mais le développement de facultés qui à l’origine ne sont en lui qu’en puissance. Eduquer, n’est ainsi pas supprimer le naturel, mais éveiller les dispositions naturelles de l’enfant. Celui qui manque d’éducation n’a pas encore appris à développer ses capacités, aussi bien morales que cognitives. Le but de l’éducation est alors de développer la nature de l’homme, l’essence de celui-ci, qui est d’être un être de culture. Ce faisant, elle nie le naturel au sens biologique, puisque l’homme n’est homme qu’en dépassant son animalité. Reste que ce dépassement ne peut être total, il n’est que refoulement. L’homme a beau être de culture, il restera toujours un organisme biologique, un corps. Ses pulsions ou instincts ne peuvent donc être supprimés, mais seulement refoulés, atténués. L’éducation semble par conséquent refouler, et non supprimer le naturel. Conclusion L’éducation a donc pour but de faire changer l’humain en Homme. Elle tend à cela en dévelloppant ses facultés proprement humaines, qualités innées mais n’existant à l’origine qu’à l’état de capacités. L’homme est le seul être possédant la culture, pouvant transformer la nature selon ses vœux, dépassant ce qu’il est originairement : l’éducation vise à faire de lui un être culturel. Mais ce n’est pas encore supprimer sa nature, son essence, car si tel est ce qui constitue l’homme, il est dans sa nature d’être un être de culture. Reste que les cultures divergent et que nous avons du mal à savoir ce qui est conforme ou non à l’homme. Peu être est cela, cette capacité à former des cultures différentes, et à s’y adapter, par exemple les grands voyageurs.  Sartre affirme ainsi que l’homme n’est que ce qu’il se fait, qu’il n’y a pas de nature humaine si ce n’est d’être un être libre et de se construire soi-même.

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