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CALVIN

Publié le 02/09/2013

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calvin
 
1509 -1564
RAREMENT les historiens de la littérature accordent à Calvin la place à laquelle il peut prétendre parmi les auteurs du xvie siècle français. L'auteur de l'Institution chrétienne a suscité trop de contro-verses et d'incompréhensions pour figurer d'emblée, comme il le devrait, parmi les plus grands écrivains de notre pays. Et pourtant, le sinistre portrait du dictateur de Genève, du brutal théolo¬gien de la prédestination ou de l'insensible bourreau de Servet, où certains se sont plus à le recon¬naître, est aussi peu ressemblant que possible.
Calvin est né à Noyon le 10 juillet 1509. Issu d'une famille de petite bourgeoisie, il en hérita l'ambition et le goût de l'étude. Il se peut aussi que son ascendance picarde soit pour quelque chose dans son sens inné de la logique. A peine âgé de quatorze ans, et déjà pourvu d'un bénéfice ecclésiastique, il se rendit à Paris pour se préparer à la carrière théologique où son père souhaitait le voir entrer.
Du collège de la Marche où il ne fit que passer, il ne retint que l'amitié de Mathurin Cordier. A Montaigu, il suivit les leçons du logicien Coronel et du nominaliste John Mair pendant près de cinq ans. De là datent ses premiers contacts avec les Pères de l'Eglise et les docteurs scolastiques dont il devait garder un souvenir fort précis. Mais sa curiosité n'y trouva pas de quoi se satisfaire. Par l'intermédiaire de quelques amis, il entra en contact avec les humanistes en renom qui lui découvrirent un monde nouveau, en lui communiquant leur passion pour les auteurs de l'anti¬quité. Pendant cinq ou six ans, il se maintient dans le sillage d'Erasme et de Budé; il lit aussi des écrits de Lefèvre, de Luther et de Mélanchthon, mais sans y prendre goût. Le rétablissement des bonnes lettres lui paraît alors plus urgent que la réforme de l'Eglise. En 1529, son père l'oblige soudain à abandonner la théologie pour le droit. A la Faculté d'Orléans, il se met à l'école de Pierre de l'Estoile, tout en apprenant le grec. Quelques mois plus tard, il est à Bourges pour entendre l'Italien Alciat expliquer les Pandectes dans le plus pur esprit humaniste. Sans relâche, il lit et travaille, au point d'y gâter sa santé. Du moins gardera-t-il toujours, de ses études juri¬diques, ce besoin du terme propre et de la définition précise que l'on retrouve dans tout ce qu'il écrira. Car le voici à pied d'oeuvre et, après un nouveau séjour à Paris — qui le mit en contact avec l'helléniste Danès et l'hébraïsant Vatable — il se sent enfin de force à publier son premier ouvrage, un commentaire du De Clementia de Sénèque (1532). Il s'y montre comme un humaniste de bonne venue, érudit à souhait, avec tout juste cette pointe de pédantisme qu'exigeait son époque.



calvin

« doctrines protestantes et une apologie à l'adresse de leurs détracteurs.

Dès la seconde édition (1539), il en fit un véritable manuel de dogmatique destiné à guider le lecteur dans l'étude des Ecritures, et à lui montrer comment y trouver le Christ dont la communion est pour Calvin le fondement de toute religion.

D'édition en édition, l' Institution connut un succès croissant et finit par s'imposer, sous la forme définitive qu'elle reçut en 1559-1560, après maints remaniements et surtout après sa traduction en français (1541), comme l'exposé dogmatique le plus original de la Réforme de langue française.

Elle compte parmi les trois ou quatre livres les plus répandus au xv1e siècle et parmi ceux dont l'influence fut le plus durable.

Les idées théologiques exposées par Calvin ne suffisent pas à expliquer pareil rayonnement.

Sans doute se distinguaient-elles par leur clarté, leur précision, un sens de la mesure qui ne pouvait laisser insensible un lecteur français.

Puisant amplement dans saint Augustin, Luther et Bucer, Calvin avait su n'en retenir que ce qui était conforme à son esprit et lui paraissait en accord avec sa conception de !'Ecriture.

D'où une unité qui n'est pas celle d'une logique rigide mais qui procède de la personnalité même de l'auteur.

A cela s'ajoutent les qualités littéraires de l'ouvrage auxquelles les adversaires eux-mêmes n'ont pu se dérober.

Le latin de Calvin est d'une correction, d'une concision, d'une élégance qui sur­ prennent, même quand on le compare à la langue des meilleurs humanistes.

En français, il sait garder la même brièveté un peu hautaine qui n'exclut ni la vivacité ni l'ampleur.

Il connaît toutes les ressources de la langue et n'hésite pas à rompre, quand il le faut, sa gravité habituelle par des traits pittoresques ou mordants et par des comparaisons souvent heureuses.

Avec Rabelais et Montaigne, Calvin est l'un des créateurs de la prose française moderne.

L'âge pèse peu sur ses écrits qui restent à la portée immédiate du lecteur contemporain.

L'Institution de 1536 ne fut qu'un début dans la voie nouvelle; désormais se succèdent, d'année en année, les commentaires bibliques, les écrits de polémique, les mémoires, les sermons, sans compter une correspondance à laquelle le réformateur consacre une partie de ses nuits.

Les cinquante-huit volumes des œuvres complètes attestent, mieux que tout commentaire, l'énormité de ce labeur incessant.

Au retour d'un ultime voyage à Paris, Calvin voulut regagner Bâle par Genève.

Il y trouva Farel qui l'obligea à rester auprès de lui pour l'aider à organiser la nouvelle Eglise genevoise.

Les soucis de l'action concrète s'ajoutent dès lors pour Calvin aux travaux intellectuels.

Les premières tentatives sont du reste vouées à l'échec.

Chassé de Genève, Calvin répond à l'appel de Bucer qui le place à la tête de l'Eglise française de Strasbourg.

De 1538 à 1541, il écrit, prêche, fait des cours à l'école de Sturm, voyage à travers l'Allemagne pour assister aux colloques destinés à refaire l'unité de l'Eglise.

Surtout, il approfondit ses connaissances théologiques au contact de Bucer.

Bientôt il va reprendre, en regimbant, le chemin de Genève, où Magistrat et population le rappellent avec insistance.

Dès son retour, il donne sa charte à l'Eglise genevoise et en fixe la doctrine (1541-1542).

Mais les rapports avec le Magistrat restent tendus pendant de longues années.

En même temps, le réformateur conseille et organise les Eglises qui, peu à peu, se consti­ tuent dans les diverses provinces de France; au besoin, il intervient avec tout le poids d'une auto­ rité que prouve le succès de ses écrits répandus par une nuée de propagandistes et de colporteurs.

On vient à lui d'ailleurs aussi, d'Italie, de Hongrie, d'Ecosse et des Pays-Bas.

Lorsqu'il meurt, le 27 mai 1564, il dispose d'une puissance spirituelle telle que peu d'hommes en ont connue.

Modeste sous d~s dehors autoritaires, il ne veut, jusqu'au bout, connaître d'autre gloire que celle de ce Dieu à qui il n'avait cessé de rapporter l'ensemble de son œuvre.. »

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