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Citation Georges Duhamel: "le Cinéma Est Un Divertissement D'ilotes ..."

Publié le 05/12/2010

Extrait du document

Etre bon spectateur ou bon lecteur, c’est être capable de puiser dans l’intimité de la rencontre avec l’œuvre le sens nécessaire à la conduite de la vie. Le sens du monde dans lequel nous vivons peut se trouver dans l’art. Au cinéma, nous pouvons nous demander dans quelle position se trouve le spectateur. Le cinéma est-il envisagé comme un lieu de « divertissement «, un « passe-temps « pour des personnes « ahuries par leurs besognes et leurs soucis « ou bien comme un lieu de réflexion face à des êtres en action ? L’œuvre cinématographique doit-elle se conquérir alors qu’elle se donne entièrement à nous par le biais des images qui nous sont imposées ? Pour Georges Duhamel, le cinéma est « sans tréfonds, sans réserves «, il se donne à un public « d’illettrés « pour nous laisser « immobiles « et « appesantis «. Le cinéma est alors remis en cause par sa popularité. Quelle est alors la fonction du cinéma ? Quelle est sa spécificité par rapport aux autres arts ? Pour répondre à cela, il s’agira d’abord d’envisager le cinéma comme un lieu de divertissement avant de l’analyser comme un lieu de réflexion pour l’homme qui s’identifie aux personnages pour enfin noter sa spécificité par rapport aux autres arts : le cinéma est un art du mélange des arts. 

 

     Le cinéma est avant tout un lieu de divertissement, et en cela nous pouvons donner raison à  Georges Duhamel. En effet, le cinéma est bien un « passe-temps «, un endroit où l’on se rend pour de divertir, pour voir autre chose. Des personnages en action nous distraient de nos préoccupations quotidiennes, le temps d’un film. Le spectateur, celui qui regarde, se concentre alors sur la vie de personnages fictifs, il est donc en position de voyeur. Il s’immisce dans leur vie, et plonge dans leur univers. L’intelligence s’efface alors devant l’instinct et les perceptions. L’affect du spectateur est alors bien plus sollicité que son intellect. Tout est mis en œuvre pour que le spectateur s’identifie au personnage principal, même dans les cas les plus improbables. Par exemple, dans Dracula de F.F. Coppola, le personnage éponyme est humanisé, il n’apparait pas toujours sous forme de vampire, notamment quand il rencontre Mina en Angleterre : il apparait sous les traits d’un homme séduisant. Il semble si humain que l’on en oublie presque que c’est un vampire et Mina ne s’aperçoit pas de suite de son caractère étrange. Dans l’œuvre de Bram Stoker, Dracula était le personnage le plus absent. Il n’est pas narrateur, on le connait seulement à travers les témoignages des autres personnages, notamment celui de Jonathan Harker au début de l’œuvre. Cela rajoute donc au caractère étrange et inquitant à la fois du vampire, celui qui effraie, celui qui est inconnu. L’incroyable échappe à la rationalisation par le langage des personnages les plus érudits comme le Docteur Seward. Le choix de Coppola d’humaniser Dracula n’est pas anodin : c’est aussi une volonté d’apprivoiser le spectateur, de le rendre plus réceptif à la condition du vampire, qui s’est damné par amour pour Elizabetha. Cette liberté prise sur le scénario change considérablement la perception que l’on peut avoir du personnage qui est devenu vampire dans un désir de vengeance, dans un rejet de Dieu à cause de l’injustice de la mort de sa femme. Le comte a donc une réaction pour le moins humaine et à laquelle le spectateur peut facilement s’identifier. Sa compassion pour le vampire le prend en otage par l’affect et il délaisse les préjugés sur les vampires « buveurs de sang «, damnés, sans foi ni âme grâce aux images qui lui ont été donnés. Le spectateur s’identifie et oublie, diverti par les images de la vie d’un personnage fictif. 

     Le recul de l’intellect par l’appel fait à l’affect du spectateur au cinéma est en effet très fort, notamment parce que le spectateur est dans une position passive à cause des images qui lui sont imposées. Le spectateur n’a pas le temps pour la réflexion, en quelque sorte il subit. Les images sont imposées à son esprit sans qu’il ait le temps de rationnaliser les faits qui lui sont exposés. En ce sens le cinéma « ne soumet notre esprit (…) à nulle épreuve «. L’image fait appel à un imaginaire collectif tandis que le spectateur est aliéné par ce qu’il voit. Ainsi, dans le film Carmen de Saura, le spectateur ne prend pas le temps de définir clairement les limites du film et de la mise en scène du ballet au sein du film. L’enchainement rapide des images et la frontière volontairement floue entre ces deux mondes, celui du film et celui de la mise en abime au sein du film, sont à l’origine de questions pour le spectateur, questions auxquelles il ne peut pas répondre pendant le film. Les images s’enchainent, le spectateur ne peut faire appel à son intelligence pour rationnaliser ce qu’il voit le temps de la représentation. En ce sens, nous pouvons dire que les images sont aliénantes. 

     Le spectateur adhère à ce qui lui est présenté, aux images qui lui sont exposées. Le défilé d’images ne permet pas le recul que l’on peut avoir avec l’œuvre littéraire. Au cours d’une lecture, nous avons la possibilité de nous interrompre le temps d’une réflexion, nous pouvons relire certains passages dont nous avons mal saisi le sens. Au cinéma, l’on ne peut s’arrêter, les images s’enchainent sans que le spectateur puisse faire autre chose que regarder. Comme le dit justement Proust dans Le Temps retrouvé, « une simple vision cinématographique s’éloigne d’autant plus du moi qu’elle prétend se borner à un simple défilé «. Le cinéma, c’est l’art de l’addition d’images, il est « mouvement «. Ainsi, toutes les clefs de compréhension sont données au spectateur dans un enchainement d’images sans que le spectateur puisse tout percevoir au cours d’un premier visionnage.  En ce sens, l’œuvre cinématographique est « sans mystère, sans détours, sans tréfonds, sans réserves «. Elle nous donne tout d’un seul coup alors que l’œuvre littéraire doit se conquérir étape par étape, il y a un cheminement. Pour le lecteur, l’exercice critique d’une œuvre littéraire se fait tout au long de la lecture alors que pour le spectateur il ne peut se faire durant le film. Il ne peut conquérir l’œuvre cinématographique : elle s’impose à lui avant de lui laisser le temps de la réflexion. 

 

     Cependant, le cinéma, loin d’être un « divertissement d’ilotes «, laisse le temps la réflexion. L’originalité de l’œuvre cinématographique se trouve bien là : le spectateur ne peut exercer son esprit critique qu’au-delà de l’espace-temps du film. L’exercice critique est remis à plus tard, en fonction des souvenirs que le spectateur en a conservés. Il se peut se faire pendant le film, étant trop absorbé par l’enchainement des images, mais il a tout le loisir de le faire dans un second temps. De plus, afin que l’exercice critique soit le plus profitable, il faut revoir le film pour se détacher du simple scénario pour se concentrer sur tous les détails qui ont pu nous échapper dans un premier temps. Comme dans tous les arts, que ce soit en musique, en littérature, en peinture, une deuxième appréciation permet de mieux juger en s’éloignant de nos affects qui jouent un rôle important au cours du premier temps. Nos impressions, nos réactions par rapport à notre vécu font que nous ne réagissons pas aussi objectivement que possible dans un premier temps. Ce n’est pourtant pas une spécificité cinématographique. Ainsi, en regardant Thérèse Raquin de Carné, chacun peut réagir différemment à la solitude du personnage éponyme. Son envie de liberté est compréhensible, mais le spectateur peut se demander pourquoi elle reste autant enchainée à sa condition si elle a vraiment envie d’y échapper compte tenu du fait qu’elle avoue son inclination pour Laurent à son mari. Sa volonté de le quitter est-elle si forte ? Elle ne cesse de regarder par la fenêtre tout au long du film, elle contemple l’ailleurs, la liberté et toutes les possibilités qu’offre l’extérieur de cette maison oppressante, mais même pour consommer sa passion pour Laurent elle le conviera dans cette maison qui l’enchaine. Ces questionnements ne peuvent avoir de réponse durant le film. Le spectateur doit se le réapproprier au-delà de l’espace-temps de la représentation cinématographique afin d’avoir la possibilité d’y répondre. 

     De plus, le cinéma entraine l’identification du spectateur. Il y a en effet une réflexion humaine derrière les images, une quête identitaire. Le spectateur, étymologiquement celui qui regarde, voit des personnages en action évoluer dans un décor et mener sa vie. Ainsi, il vit par procuration les expériences plus ou moins réelles des personnages. Le cinéma est donc une expérience humaine, au même plan que la littérature, quoique sous une forme différente. Le lecteur est plongé dans l’intimité d’un personnage dont il connait les pensées les plus secrètes et vit à travers lui ses expériences personnelles tandis que le spectateur se trouve en position de témoin oculaire de la vie d’un personnage. La façon d’envisager l’expérience est différente mais l’expérience est la même : le lecteur comme le spectateur vit au travers d’un personnage une expérience nouvelle qui pourra lui servir d’enseignement, une expérience par procuration dont il pourra tirer les bienfaits comme s’il l’avait vécue. C’est la part psychologisante du cinéma qui est alors en jeu. C’est différent du théâtre où les corps sont en action devant le spectateur mais le cinéma reproduit le plus possible cette proximité, par l’intermédiaire des gros plans par exemple. En effet, c’est ce que nous pouvons constater dans le Nosferatu de Murnau. Au début du film, lorsque Hutter avoue à Ellen qu’il doit partir, un gros plan est fait sur elle. Son expression peut être en quelque sorte interprétée comme une prolepse : visage inquiet, sans sourire et résigné; elle semble savoir ce qu’il va se passer et effectivement par la suite elle a des prémonitions. Sa résignation affichée annonce son sacrifice, elle donne sa vie pour sauver les autres personnages, dont son mari, Hutter. L’expressivité de son visage la rend proche du spectateur qui a l’impression de lire en elle sans passer par l’intermédiaire d’un dialogue. Elle semble si proche grâce à l’œil de la caméra que le spectateur sent à ce moment précis que quelque chose de tragique est sur le point de se produire. Le spectateur vit alors une expérience nouvelle, celle du sacrifice, un sacrifice salvateur pour autrui. Le personnage de l’intériorité est le plus expressif et, par le biais à la fois de l’admiration et de la compassion l’on peut dire que l’expérience du personnage d’Ellen est enrichissante pour le spectateur du point de vue humain et social, elle accomplit en effet une action noble dans un but purement altruiste. La proximité est alors réalisée à dessein, le cinéma offre la possibilité d’un apprentissage de la vie, d’une expérience nouvelle vécue à travers un personnage auquel on s’identifie. En ce sens, nous pouvons affirmer que l’expérience cinématographique est faite pour tous, qu’elle a un but pour chacun de nous, bien qu’elle soit à chaque fois très personnelle. Le cinéma est donc loin d’être un art élitiste mais un art qui a un message personnel pour tous les spectateurs qui rescénariseront le film à leur façon, qui puiseront dans l’œuvre le sens de leurs actes. Pas seulement un « divertissement « mais un lieu d’apprentissage de la vie, le cinéma n’est pas non plus réservé aux « ilotes « et aux « illettrés «, sa portée ne peut se limiter à cela.

 

     Le cinéma, bien plus qu’un lieu d’apprentissage est aussi un art, un art du mélange des arts. Tout d’abord, nous pouvons remarquer que le cinéma s’inspire d’œuvres littéraires. De très nombreux films sont des adaptations plus ou moins fidèles d’œuvres littéraires. D’ailleurs, les titres sont souvent conservés. C’est par exemple le cas pour Thérèse Raquin de Carné, adaptation du roman éponyme de Zola. De grandes libertés ont été prises dans cette adaptation qui, dès le générique se dit seulement « inspirée de l’œuvre de Zola «. En effet, les libertés prises sont telles qu’un personnage est ajouté, celui du marin Riton, ce qui change l’intrigue, mais aussi la vision que l’on peut avoir des personnages principaux qui sont alors considérés comme des victimes de chantage au lieu d’être les meurtriers repentants du roman. Bien que ces libertés aient été prises, cela reste une adaptation de roman, d’une œuvre éminemment littéraire d’un grand auteur de la littérature française. Le cinéma s’inspire beaucoup de la littérature. En ce sens, nous pouvons donc affirmer que le cinéma utilise un art à ses propres fins, mais aussi que le cinéma est un art à part, qui rend plus accessible au public des œuvres littéraires en donnant son interprétation personnelle. Rendre plus accessible des œuvres littéraires est un but noble qui rend ses lettres de noblesse au cinéma qui ne peut être réduit comme le disait Georges Duhamel, à un « divertissement d’ilotes «. De plus, le cinéma emprunte des topos de la littérature, des motifs symboliques redondants, donnant accès au spectateur à cela à travers l’image, de façon visuelle. Nous pouvons penser au tunnel par exemple, symbole du passage en littérature. Par exemple, dans le film Dracula de F.F. Coppola, le tunnel est un marqueur du passage de Jonathan Harker en Transylvanie. Son voyage au château du comte va le marquer à tel point qu’il perdra momentanément la raison. L’expérience du merveilleux le traumatise et devient une étape dans sa vie ; cette expérience fait de lui un autre homme. Le motif littéraire du tunnel comme lieu de passage vers un autre monde est donc repris visuellement par le cinéma aux mêmes fins qu’en littérature. 

     Ensuite, le cinéma est dépendant du son et donc de la musique. L’art de la musique est omniprésent au cinéma. Dans certains films, la musique peut être un élément central participant de la dynamique même du film. C’est le cas dans le film Carmen de Saura. En effet, la danse et la musique sont incorporées dans le film comme des éléments moteurs de la tragédie espagnole. Antonio, directeur d’une compagnie de danse, met en scène l’opéra Carmen de Bizet. La musique participe de la tragédie même, et dépasse donc le statut de simple accompagnement. Musique, danse et tragédie sont les éléments essentiels du film, et sa force réside dans ce mélange. La musique de l’opéra de Bizet est à l’origine du spectacle de danse qui donne lieu à la rencontre entre Antonio, un chorégraphe, et une jeune danseuse, répondant au nom de Carmen, comme dans l’opéra. La musique est donc un élément essentiel du film de Saura, celle de l’opéra si connu de Bizet. Danse et musique sont donc deux arts fortement usités dans ce film.

     Le cinéma est donc l’art du mélange des arts. Littérature, danse, musique sont autant d’arts repris par le cinéma. Cependant, dans certains films, l’art même du cinéma est pris comme référence, certains films faisant un clin d’œil à un autre. C’est par exemple le cas dans le film Dracula de F.F. Coppola. En effet, au moment où Mina et Lucy courent dans le labyrinthe, cela peut nous faire penser au film Shining de Stanley Kubrick. Les références culturelles sont donc très importantes dans un film, et ne pas les voir ne remet pas en cause la compréhension du film, seulement, elles ajoutent de l’intérêt au film, qui n’est donc pas réservé à des « ilotes « ou des « illettrés « mais à des spectateurs cultivés. Le cinéma est donc un art éminemment référentiel, dont les subtilités nous échappent parfois. L’œuvre cinématographique est donc une œuvre à conquérir, une œuvre à revoir pour percevoir tout ce que nous n’avons pas décelé une première fois. 

     Toutefois, ce qui fait du cinéma un art à part entière, c’est qu’il est une mise en scène de la vie et une quête de sa beauté profonde. Le cinéma nous permet de « goûter consciemment la beauté profonde de la minute qui passe « nous dit Delluc. Des impressions de beauté fugace et éternelle marquent le spectateur, projeté dans le passé par le tournage qui n’est plus, et dans le futur, dans le devenir durable de l’œuvre. Entre passé et futur, le spectateur se retire du présent des affaires quotidiennes, libre de contempler et d’éprouver le sens de la vie. L’intemporalité des images touche un regard universel, et c’est là que réside toute la grandeur du cinéma. Et devant cette grandeur, l’homme est petit, ainsi nous pouvons nous sentir « immobiles «, « paralytiques « ou « appesantis «. Le cinéma met en scène des problèmes éternels comme le temps ou la beauté et le spectateur entre au cinéma pour cela. Il sait qu’il en sortira grandit, fort de son expérience nouvelle, ou bien appesanti après une contemplation de la vie qui le fera réfléchir.

 

     Finalement, nous pouvons dire que l’œuvre cinématographique est un art intégral, mettant en scène tous les arts. C’est une œuvre anthropologique, qui non seulement nous divertit mais donne lieu à des réflexions sur l’existence humaine et nous fait vivre une expérience unique, notamment par le mélange des arts. Les images de corps en action sont une expérience unique qui nous font réfléchir sur notre propre existence. Le cinéma ne peut être considéré comme un simple « passe-temps d’illettrés « qui requiert une « molle adhésion « du spectateur. Le cinéma est un art qui doit se conquérir parce qu’il multiplie les références culturelles à d’autres arts, parce qu’il met en scène des hommes dans lesquels nous nous reconnaissons. L’exercice critique du spectateur ne peut être éteint au cinéma, il est simplement remis à plus tard. L’adhésion des images qui nous sont imposées ne sont qu’une partie du pacte cinématographique, le spectateur a ensuite la liberté d’adhérer pleinement ou pas à ce qui lui a été donné de voir.

« le spectateur vit au travers d’un personnage une expérience nouvel\ le qui pourra lui servir d’enseignement, une expérience parprocuration dont il pourra tirer les bienfaits comme s’il l’avait \ vécue.

C’est la part psychologisante du cinéma qui est alors en\ jeu.

C’est différent du théâtre où les corps sont en action devant le s\ pectateur mais le cinéma reproduit le plus possible cette proximité\ , par l’intermédiaire des gros plans par exemple.

En effet, c’est ce \ que nous pouvons constater dans le Nosferatu de Murnau.

Au début du film, lorsque Hutter avoue à Ellen qu’il doit partir, un gros plan\ est fait sur elle.

Son expression peut être en quelque sorte interpr\ étée comme une prolepse : visage inquiet, sans sourire et résigné; elle\ semble savoir ce qu’il va se passer et effectivement par la suite el\ le a des prémonitions.

Sa résignation affichée annonce son sacrifi\ ce, elle donne sa vie pour sauver les autres personnages, dont son mari, Hutter.

L’expressivité de son visage la rend proche du spect\ ateur qui a l’impression de lire en elle sans passer par l’intermé\ diaire d’un dialogue.

Elle semble si proche grâce à l’œil de la \ caméra que le spectateur sent à ce moment précis que quelque ch\ ose de tragique est sur le point de se produire.

Le spectateur vit alors une ex\ périence nouvelle, celle du sacrifice, un sacrifice salvateur pour autrui.

Le personnage de l’intériorité est le plus expressif et\ , par le biais à la fois de l’admiration et de la compassion l’\ on peut dire que l’expérience du personnage d’Ellen est enrichissante pour le sp\ ectateur du point de vue humain et social, elle accomplit en effet une action noble dans un but purement altruiste.

La proximité est alors r\ éalisée à dessein, le cinéma offre la possibilité d’un\ apprentissage de la vie, d’une expérience nouvelle vécue à travers un pers\ onnage auquel on s’identifie.

En ce sens, nous pouvons affirmer que l’expérience cinématographique est faite pour tous, qu’elle \ a un but pour chacun de nous, bien qu’elle soit à chaque fois trè\ s personnelle.

Le cinéma est donc loin d’être un art élitiste \ mais un art qui a un message personnel pour tous les spectateurs qui rescénariseront le film à leur façon, qui puiseront dans l’œ\ uvre le sens de leurs actes.

Pas seulement un « divertissement « m\ ais un lieu d’apprentissage de la vie, le cinéma n’est pas non plus ré\ servé aux « ilotes « et aux « illettrés «, sa porté\ e ne peut se limiter à cela. Le cinéma, bien plus qu’un lieu d’apprentissage est aussi un a\ rt, un art du mélange des arts.

Tout d’abord, nous pouvons remarquer que le cinéma s’inspire d’œuvres littéraires.

D\ e très nombreux films sont des adaptations plus ou moins fidèles d\ ’œuvres littéraires.

D’ailleurs, les titres sont souvent conservés.

C’\ est par exemple le cas pour Thérèse Raquin de Carné, adaptation\ du roman éponyme de Zola.

De grandes libertés ont été prises dans cet\ te adaptation qui, dès le générique se dit seulement « inspi\ rée de l’œuvre de Zola «.

En effet, les libertés prises sont telles\ qu’un personnage est ajouté, celui du marin Riton, ce qui change \ l’intrigue, mais aussi la vision que l’on peut avoir des personnages principaux q\ ui sont alors considérés comme des victimes de chantage au lieu d’être les meurtriers repentants du roman.

Bien que ces liberté\ s aient été prises, cela reste une adaptation de roman, d’une œ\ uvre éminemment littéraire d’un grand auteur de la littérature fr\ ançaise.

Le cinéma s’inspire beaucoup de la littérature.

En \ ce sens, nous pouvons donc affirmer que le cinéma utilise un art à ses propres f\ ins, mais aussi que le cinéma est un art à part, qui rend plus accessible au public des œuvres littéraires en donnant son interpr\ étation personnelle.

Rendre plus accessible des œuvres littérai\ res est un but noble qui rend ses lettres de noblesse au cinéma qui ne peut ê\ tre réduit comme le disait Georges Duhamel, à un « divertissement d’ilotes «.

De plus, le cinéma emprunte des topo\ s de la littérature, des motifs symboliques redondants, donnant accè\ s au spectateur à cela à travers l’image, de façon visuelle.

N\ ous pouvons penser au tunnel par exemple, symbole du passage en littérature.

Par exemple, dans le film Dracula de F.F.

Coppola, le tu\ nnel est un marqueur du passage de Jonathan Harker en Transylvanie.

Son voyage au château du comte va le marquer à tel p\ oint qu’il perdra momentanément la raison.

L’expérience du merveilleux le traumatise et devient une étape dans sa vie ; cette ex\ périence fait de lui un autre homme.

Le motif littéraire du tunnel\ comme lieu de passage vers un autre monde est donc repris visuellement p\ ar le cinéma aux mêmes fins qu’en littérature.

Ensuite, le cinéma est dépendant du son et donc de la musique.

L’\ art de la musique est omniprésent au cinéma.

Dans certains films, la musique peut être un élément central participant de l\ a dynamique même du film.

C’est le cas dans le film Carmen de Saur\ a. En effet, la danse et la musique sont incorporées dans le film comme \ des éléments moteurs de la tragédie espagnole.

Antonio, directeur d’une compagnie de danse, met en scène l’opéra Car\ men de Bizet.

La musique participe de la tragédie même, et dépa\ sse donc le statut de simple accompagnement.

Musique, danse et tragédie s\ ont les éléments essentiels du film, et sa force réside dans ce\ mélange.

La musique de l’opéra de Bizet est à l’origine d\ u spectacle de danse qui donne lieu à la rencontre entre Antonio, un chorégraphe, et une jeune danseuse, répondant au nom de Carmen, co\ mme dans l’opéra.

La musique est donc un élément essentiel du film de Saura, celle de l’opéra si connu de Bizet.

Danse et mus\ ique sont donc deux arts fortement usités dans ce film. Le cinéma est donc l’art du mélange des arts.

Littérature, \ danse, musique sont autant d’arts repris par le cinéma.

Cependant,\ dans certains films, l’art même du cinéma est pris comme référ\ ence, certains films faisant un clin d’œil à un autre.

C’est\ par exemple le cas dans le film Dracula de F.F.

Coppola.

En effet, au moment où Mina et \ Lucy courent dans le labyrinthe, cela peut nous faire penser au film Shining de Stanley Kubrick.

Les références culturelles sont d\ onc très importantes dans un film, et ne pas les voir ne remet pas en\ cause la compréhension du film, seulement, elles ajoutent de l’int\ érêt au film, qui n’est donc pas réservé à des « il\ otes « ou des « illettrés « mais à des spectateurs cultivés.

Le cinéma es\ t donc un art éminemment référentiel, dont les subtilités no\ us échappent parfois.

L’œuvre cinématographique est donc une œuvre à c\ onquérir, une œuvre à revoir pour percevoir tout ce que nous n’\ avons pas décelé une première fois.

Toutefois, ce qui fait du cinéma un art à part entière, c’e\ st qu’il est une mise en scène de la vie et une quête de sa bea\ uté profonde.

Le cinéma nous permet de « goûter consciemment la bea\ uté profonde de la minute qui passe « nous dit Delluc.

Des impressions de beauté fugace et éternelle marquent le spectateur, \ projeté dans le passé par le tournage qui n’est plus, et dans l\ e futur, dans le devenir durable de l’œuvre.

Entre passé et futur\ , le spectateur se retire du présent des affaires quotidiennes, libre\ de contempler et d’éprouver le sens de la vie.

L’intemporalité \ des images touche un regard universel, et c’est là que réside t\ oute la grandeur du cinéma.

Et devant cette grandeur, l’homme est petit, a\ insi nous pouvons nous sentir « immobiles «, « paralytiques «\ ou « appesantis «.

Le cinéma met en scène des problèmes éterne\ ls comme le temps ou la beauté et le spectateur entre au cinéma po\ ur cela.

Il sait qu’il en sortira grandit, fort de son expérience nou\ velle, ou bien appesanti après une contemplation de la vie qui le fer\ a réfléchir. Finalement, nous pouvons dire que l’œuvre cinématographique es\ t un art intégral, mettant en scène tous les arts.

C’est une œ\ uvre anthropologique, qui non seulement nous divertit mais donne lieu à de\ s réflexions sur l’existence humaine et nous fait vivre une expérience unique, notamment par le mélange des arts.

Les images d\ e corps en action sont une expérience unique qui nous font réfléchir sur notre propre existence.

Le cinéma ne peut être\ considéré comme un simple « passe-temps d’illettrés «\ qui requiert une « molle adhésion « du spectateur.

Le cinéma est un art qui doit s\ e conquérir parce qu’il multiplie les références culturelles\ à d’autres arts, parce qu’il met en scène des hommes dans lesquels nous nous \ reconnaissons.

L’exercice critique du spectateur ne peut être éteint au cinéma, il est simplement remis à plus tard.

L’adh\ ésion des images qui nous sont imposées ne sont qu’une partie d\ u pacte cinématographique, le spectateur a ensuite la liberté d’adhé\ rer pleinement ou pas à ce qui lui a été donné de voir.. »

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