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Claude Lévi-Strauss Anthropologie Structurale Chapitre 17: « Place De L'anthropologie Dans Les Sciences Sociales Et Problèmes Posés Par Son Enseignement »

Publié le 17/01/2011

Extrait du document

Objet de cette étude:

L'anthropologie sociale tend à se confondre dans un vaste ensemble de recherches dont l'appartenance aux sciences sociales n'est nullement évidente. L'anthropologie ne se distingue pas des autres sciences humaines et sociale par un sujet d'étude qui lui serait propre.

Qu'est ce que l'anthropologie?

Lévi-Strauss part d'une première définition qui consisterait à considérer l'anthropologie comme une certaine conception du monde ou une certaine manière originale de poser les problèmes, l'une et l'autre découverte à l'occasion de l'étude de phénomènes sociaux qui rendent manifestes certaines propriétés générales de la vie en société, dont l'anthropologie fait son objet. 

L'anthropologie est une trop jeune science pour que son enseignement ne reflète pas les circonstances locales et historiques qui sont à l'origine de chaque développement particulier. Donc un rapport général sur l'enseignement de l'anthropologie serait condamné soit à déformer les faits en les rangeant dans des cadres arbitraires, soit à se dissoudre dans des exposés historique qui seraient différents pour chaque pays.  

L'anthropologie est une science en devenir dont l'autonomie n'est pas encore universellement reconnue, il ne suffit pas de définir l'ensemble au milieu duquel l'enseignement de l'anthropologie immerge mais il faut aussi chercher à saisir son orientation et les grandes lignes d'évolution. 

 

Coup d'œil sur la situation actuelle: 

Selon Lévi-Strauss, il existe trois grandes modalités d'enseignement de l'anthropologie: 

l'enseignement dispensé par des chaires dispersées

Modalité très répandue. Un pays ou une université qui décide d'organiser un enseignement anthropologique commence généralement par créer une chaire. Si la situation est plus favorable, d'autres chaires sont agrégées à la première et tendent à s'organiser en institut ou département.

l'enseignement dispensé par des départements

Modalité qui parait idéale. Répond à deux nécessité d'étude: les cours sont bien articulés et correspondent aux différents champs ou aspects de la recherche; et la préparation graduelle aux diplômes.

Mais ce système pose problème: dans un pays à la structure académique rigide et traditionnelle, la distinction « sciences « et « lettres « oblige la création de 2 département, un d'anthropologie sociale et culturelle et le second d'anthropologie physique. Cependant, cette distinction entraine une mauvaise spécialisation des étudiants car trop hâtive, et une culture générale insuffisante. D'où la création de la troisième formule: les instituts.  

l'enseignement dispensés par des institut ou des écoles à caractère inter ou extra facultaire.

Il prend l'exemple de l'Institut d'Ethnologie de Paris. Celui-ci s'attache à regrouper et à comparer des enseignements universitaires existant. Il dépend de trois facultés: lettres, droit et science.  C'est la formule la plus satisfaisante, selon Lévi-Strauss, mais elle soulève tout de même un problème. L'autonomie de l'institut doit souvent être payée par un abaissement de statut en comparaison avec les enseignements conçus sur un type plus traditionnel. 

L'anthropologie a beaucoup de difficultés à résoudre les problèmes posés par son enseignement sur la base des expériences acquises. Une perspective dynamique, vers quoi elle tend, permettrait de dégager les principes qui doivent présider à son enseignement.

Le cas de l'anthropologie physique:

Une question de compétence se pose d'abord. L'anthropologie est-elle une science sociale? Oui, sans doute, puisqu'elle s'occupe de groupement Humain. Mais en tant que science de l'Homme ne se confond-elle pas avec les sciences dites humaines? Et l'anthropologie physique ne relève-t-elle pas des sciences naturelles?

L'anthropologie physique s'occupe de l'évolution de l'homme à partir de formes animales, de sa distribution actuelle en groupe raciaux, distingués par des caractères anatomiques ou physiologiques. => Est-ce vraiment une étude naturelle de l'Homme?

Si l'on répondait oui, selon Lévi-Strauss, se serait oublier que les phases qui ont différenciés les races d'Homo Sapiens se sont déroulées dans des conditions fort différentes de celles qui régi le développement des autres espèces vivantes (langage, techniques, transmission, enseignement...). Dès que l'homme a acquis le langage, il a lui-même déterminé les modalités de son évolution biologique (de façon plus ou moins inconsciente). En effet, toute société humaines modifie les conditions de perpétuation physiques par un ensemble de règles (prohibition de l'inceste, polygamie...), en se conformant à des règles une société favorise certains types d'unions et en exclut d'autres.

L'anthropologie qui tenterait d'interpréter l'évolution de la race humaine comme si elle était le résulta de condition naturelle arriverait à une impasse comme si un zoologue voudrait expliquer la différenciation actuelle des chiens par des considérations purement biologiques ou écologiques sans tenir compte de l'intervention de l'espèce humaine.

Ainsi, Lévi-Strauss en déduit que même si l'anthropologie fait appel à des connaissances et des méthodes dérivées des sciences naturelles, elle entretient des rapports étroits avec les sciences sociales. L'anthropologie physique se ramène alors à l'étude des transformations anatomiques et physiologiques résultant de l'apparition de la vie en société, du langage, d'un système de valeur ou de la culture.

 

Ethnographie, ethnologie et anthropologie:

Ethnographie: Selon Lévi-Strauss, premier stade de la recherche. Il s'agit d'observation, de description et de travail de terrain (field work). La monographie est le type même de l'étude ethnographique. L'ethnographie englobe les méthodes et les techniques se rapportant au travail sur le terrain, au classement, à la description et à l'analyse de phénomène culturel particulier. Dans le cas des objets matériels, ces opérations se poursuivent généralement au musée qui peut être considéré comme le prolongement du terrain.

Ethnologie: premier pas vers la synthèse. Sans exclure l'observation directe, elle tend à des conclusions étendues et il est difficile de  les fonder exclusivement sur une connaissance de première main. 

Cette synthèse peut s'opérer dans 3 direction:

géographique (connaissances relatives aux groupes voisins)

historique ( reconstitution du passé d'une population)

systématique (isolation d'une technique, coutume ou institution pour lui donner une attention particulière)

L'ethnologie comprend l'ethnographie comme sa démarche préliminaire et la prolonge.

Pendant longtemps et dans de nombreux pays, cette dualité se suffisait à elle-même, c'est pourquoi le terme d'anthropologie été pas ou peu employé, il s'est trouvé limité à l'anthropologie physique. Selon Lévi-Strauss, partout où nous rencontrons les termes « anthropologie sociale et culturelle «, ils sont liés à une seconde et dernière étape de la synthèse prenant pour base les conclusions de l'ethnographie et de l'ethnologie. Il existe entre l'anthropologie et l'ethnologie, le même rapport entre cette dernière et l'ethnographie.

Pour Lévi-Strauss, « ethnographie, ethnologie et anthropologie « ne constituent pas 3 discours différents, ou 3 concepts différents d'une même étude. Ce sont, en fait, 3 étapes ou 3 moments d'une même recherche et la préférence pour tel ou tel de ces termes exprime seulement une attention prédominante tournée vers un type de recherche, qui ne saurait jamais être exclusif des deux autres.

Anthropologie sociale et anthropologie culturelle:

Si les termes d'anthropologie sociale ou culturelle visaient à distinguer certains champs d'étude de ceux de l'anthropologie physique, ils ne soulèveraient pas de problèmes. Mais la prédilection respective de la Grande-Bretagne pour le premier et des États-Unis pour le second, montrent que l'adoption de chaque terme correspond à des préoccupations bien définies.

Si l'on veut s'en tenir au sens même des termes « culturel « et « social «, la différence n'est pas très grande non plus. La notion de culture est d'origine anglaise (Tylor), elle se rapporte aux différentes caractéristiques existant entre l'homme et l'animal (opposition nature/culture). Les coutumes, croyances et institutions apparaissent comme des techniques parmi d'autres; techniques qui sont au service de la vie sociale et la rendent, comme les techniques agricoles rendent possibles la satisfaction de besoins de nutrition par exemple. L'anthropologie sociale se réduit à un seul chapitre de ce qui fonde l'anthropologie culturelle. 

Le terme d'anthropologie sociale a fait son apparition en Angleterre pour désigner la chaire occupée  par J.G.Frazer, qui s'intéressait  fort peu aux techniques mais surtout aux croyances, coutumes et institutions. La signification profonde de ce terme est apparue avec A.R.Radcliffe-Brown qui définit son objet d'étude comme étant les relations sociales et la structure sociale. C'est le groupe qui est mis au premier plan, c'est à dire l'ensemble des formes de communication qui fondent la vie sociale.

Il n'y a pas de contradictions entre les deux perspectives: pour appuyer sa réflexion il prend l'exemple de Durkheim qui démontre qu'il faut étudier les faits comme des choses (cela correspond à l'anthropologie culturelle) et quelques années plus tard, son neveu, Mauss, et Malinowski apportent la vue complémentaire que les choses sont des faits sociaux (anthropologie sociale).

On pourrait donc dire que l'anthropologie culturelle et l'anthropologie sociale couvrent le même programme, l'une partant des techniques et des objets pour aboutir à cette « super-technique « qu'est l'activité sociale et politique rendant possible et conditionnant la vie en société; et l'autre, partant de la vie sociale pour descendre jusqu'aux choses sur quoi elle imprime sa marque, et jusqu'aux activités auxquelles desquelles elle se manifeste.

Que l'anthropologie se prône « sociale « ou « culturelle «, elle aspire toujours à connaitre l'homme total, envisagé dans un cas à partir de ses productions et dans l'autre à partir de ses représentations. 

L'anthropologie est souvent mis en constellation avec les disciplines telles que la psychologie et la sociologie (anthropologie sociale), la géographie (perspective anthropologie culturelle), la linguistique et l'archéologie ( les deux). Dans tout les cas il s'agit seulement de différence de point de vue et non d'objet. 

Il semble y avoir aujourd'hui dans le monde un accord presque unanime pour utiliser le terme « anthropologie « à la place d'ethnographie ou d'ethnologie comme le plus apte à caractériser l'ensemble de ces trois moments de la recherche. 

Anthropologie et folklore:

Folklore: désigne les recherches, qui tout en relevant de la société des observateurs, font appel à des méthodes d'enquêtes et des techniques d'observation du même type que celles auxquelles on a recours pour des société très éloignées. Les études folkloriques relèvent soit par leurs objets soit par leur méthodes de l'anthropologie. 

Anthropologie et science sociales:

L'anthropologie ne saurait accepter de se laisser détacher soit des sciences exactes et naturelles (anthropologie physique) soit des sciences humaines (géographie, linguistique, archéologie...). Si elle devait choisir elle se proclamerait science sociale car cela souligne un caractère qui tend à être commun à toutes les disciplines car même en science on tient de plus en plus compte des implication sociales des découvertes ou de leurs signification anthropologique. 

Pour l'anthropologie la formule de l'institut ou de l'école regroupant dans une synthèse originale, autour d'enseignements propres, ceux qui seraient donnés dans les trois facultés( science, lettres et droit), fournit la seule solution satisfaisante. C'est le sort des jeunes sciences de s'inscrire difficilement dans les cadres établis; elle a les pieds sur les sciences exactes, elle est adossée au sciences humaines et elle regarde vers les sciences sociales.

L'équivoque qui domine les rapports entre sociologie et anthropologie tient dans l'ambigüité qui caractérise l'état actuel de la sociologie. Son nom la désigne comme la science de la société, science qui couronne toute les autres sciences sociales. Mais depuis l'échec des grandes ambitions de l'école durkheimienne, elle n'est plus cela nul part. Dans certains pays (Europe occidentale et Amérique latine) la sociologie s'inscrit  dans la tradition d'une philosophie sociale où la connaissance de recherches complètes accomplies par d'autres vient seulement étayer les spéculations. Dans les pays anglo-saxons, la sociologie devient une discipline spéciale qui s'inscrit sur le même plan que les autres sciences sociales (étude des rapports sociaux dans les groupes contemporains sur une base expérimentale, et ne se distinguant pas de l'anthropologie que ce soit par sa méthode ou son objet. 

La sociologie s'efforce de faire la science sociale de l'observateur(application plus commode et qui permet de dégager des propriétés plus rigoureuses  , l'anthropologie cherche la science sociale de l'observé.  

Missions propres à l'anthropologie:

Objectivité: Atteindre l'objectivité, en inculquer le goût et l'enseigner est le première ambition de l'anthropologie.

Définition de l'objectivité en anthropologie: comme dans toutes les sciences sociales il s'agit d'une objectivité qui permet à celui qui la pratique de faire abstraction de ses croyances, de ses préférences et de ses préjugés, mais il s'agit d'atteindre une formulation valide pour un observateur objectif mais aussi pour tous les observateurs possibles. Cette recherche d'objectivité totale ne peut se dérouler qu'à un niveau où les phénomènes conservent une signification humaine et restent compréhensibles  _ intellectuellement et sentimentalement _  pour une conscience individuelle. C'est là l'objectivité recherché par les anthropologues. Les réalités à quoi prétendent les sciences économiques par exemple ne sont pas moins objectives mais elles sont abstraites et ne peuvent s'appliquer à l'expérience vécue du sujet. L'anthropologie se veut science séméiologique, elle se situe au niveau de la signification (d'où un contact étroit avec la linguistique). 

Totalité: seconde ambition: elle voit, dans la vie sociale, un système dont tous les éléments sont organiquement liés. Elle reconnait qu'il est indispensable de morceler certains phénomènes pour en approfondir la connaissance. Quand l'anthropologie cherche à construire des modèles c'est dans l'idée de découvrir une forme commune aux diverses manifestations de la vie sociale. (notion de fait social total ou de pattern).

Signification: le domaine anthropologique consiste dans les sociétés non civilisés, sans écriture, pré ou non mécanique, tout ces qualificatifs dissimulent une réalité positive: ces sociétés sont fondées sur des relations personnelles, sur des rapports concrets entre individu. 

Le critère de l'authenticité: Nos relations avec autrui ne sont plus, que de façon occasionnelle et fragmentaire, fondées sur cette expérience globale. Nous sommes reliés à notre passé, non plus par une tradition orale qui implique un contact vécu avec des personnes (conteurs, prêtres, sages...) mais par des livres entassés dans des bibliothèques. Et sur le plan du présent, nous communiquons avec l'immense majorité de nos contemporains par toutes sortes d'intermédiaires qui élargissent sans doute nos contacts, mais leurs confèrent en même temps un caractère d'inauthenticité. L'immense révolution instaurée par l'invention de l'écriture a apportait à l'humanité tant de bienfaits, certes, mais il ne faut pas omettre qu'elle lui a aussi retiré quelque chose d'essentiel. Mais les sociétés modernes ne sont pas totalement inauthentiques. Ce qui permet à l'ethnologue de se trouver sur un terrain familier quand il étudie un village, une entreprise ou un « voisinage de grande ville «, c'est que tout le monde y connait tout le monde, ou à peu près. Les enquêtes sur les communautés menées en France sous le patronnage de l'UNESCO  ont été très révélatrices à cet égard: autant les enquêteurs se sont trouvés à leurs aises dans un village de 500 habitants, dont l'étude ne demandait aucune modification de leur méthode classique, autant, dans une ville moyenne, ils ont eu le sentiment de rencontrer un objet irréductible. Pourquoi? Parce que trente mille personnes ne peuvent constituer une société de la même manière que 500, en effet, la communication n'est pas principalement établie entre des personnes, ou sur le type de la communication interpersonnelle, la réalité sociale des « émetteurs « et des « receveurs « disparait derrière la complexité des « codes « et des « relais «. 

La plus importante contribution de l'anthropologie, selon Lévi-Strauss, aux sciences sociales est d'avoir introduit cette distinction capitale entre deux modalités d'existence sociale: un genre de vie perçu à l'origine comme traditionnel et archaïque (sociétés authentiques), et des formes d'apparitions plus récente, dont le premier type n'est pas absent mais où des groupes imparfaitement et incomplètement authentiques se trouvent organisés au sein d'un système plus vaste, lui-même frappé d'inauthenticité.

En même temps, que cette distinction explique et fonde l'intérêt croissant de l'anthropologie pour les modes de relations authentiques dans les sociétés modernes, elle montre les limites de sa prospection. 

L'organisation des études anthropologiques: 

Pour résoudre le problème de l'objectivité, qui lui est imposé par le besoin d'un langage commun pour traduire des expériences sociales hétérogènes, l'anthropologie, commence à se tourner vers les mathématiques et la logique symbolique. En effet, notre vocabulaire courant qui est le produit de nos propres catégories sociales, et insuffisant pour formuler des expériences sociologiques très différentes. Il faut donc recourir aux symboles. 

Science séméiologique en second lieu, c'est vers la linguistique qu'elle se tourne pour deux raisons: d'abord parce que seule la connaissance de la langue permet de pénétrer un système de catégories logiques et de valeurs morales différents de celui de l'observateur et parce que la linguistique est capable d'enseigner le moyen de passer de la considération d'éléments en eux-mêmes privés de signification à celle d'un système sémantique  et de montrer comment le second peut s'édifier au moyen du premier. En troisième lieu, étant donné que l'anthropologie est sensible aux interrelations (économique, juridique, politique, morale, esthétique, religieuse) des divers types de phénomènes sociaux, elle se rapproche des autres sciences sociales qui ont la même perspective totale. Enfin, s'attachant essentiellement à ces formes de vie sociale définies par une authenticité qui se mesure à l'étendue et à la richesse des rapports, l'anthropologie se sent proche de la psychologie avec qui elle entretient des contacts.

Pour Lévi-Strauss, il ne s'agit pas d'écraser les étudiants sous cette masse de connaissance que demanderait la satisfaction intégrale de toutes les exigences du à l'anthropologie, mais il souhaite tout de  même mettre en exergue le fait que certaines conséquences pratiques peuvent résultées de cette complexité:

 

1) L'anthropologie est devenue une discipline trop diversifiée et technique pour que l'on puisse recommander des enseignements sur une seule année. Il serait dangereux de penser que l'on prépare des jeunes gens à partir sur le terrain avec des connaissances aussi superficielles. Une introduction à l'anthropologie ne fait pas plus un anthropologue, qu'une introduction à la physique ne fait un physicien. Car il n'est pas question de transformer tout le monde en anthropologue. Si un médecin , juriste par exemple a besoin d'un complément de formation en anthropologie celle-ci doit être dispensée méthodiquement et de façon poussée et en ayant un rapport avec le champ d'activité de la personne.

2)On ne peut former un anthropologue en 1 année. Pour Lévi-Strauss, trois années de théories minimum sont indispensables. L'anthropologie est trop souvent reléguée au rang d'enseignement d'appoint

3)L'ensemble des matières comprises sous le couvert de l'anthropologie est trop complexe pour ne pas exiger une spécialisation. D'après lui il devrait existait une base d'enseignement commun que l'on délivrerait en première année et la spécialisation suivrait les années suivantes (Voir page 431 pour le programme détaillé proposé par l'auteur).

4)L'étude de l'anthropologie implique des lectures étendues (manuels, ouvrages théoriques, monographies...). Pour lui, les cours et travaux pratiques devraient être complétés par des lectures obligatoires et contrôlées par des procédés pédagogiques (résumé, exposé...). Ce qui implique que toute université devrait posséder une importante bibliothèque où les ouvrages devraient figuré au moins 2 fois; et que les étudiants devraient posséder une connaissance suffisante dans au moins une langue étrangère choisie parmi celle qui sont le plus fréquemment utilisées dans la production anthropologique de ces dernières années. Il recommande également une politique de traduction systématique des textes car chaque auteur tend à employé une terminologie qui lui est propre et le sens des principaux termes n'est pas fixé. Enfin, il préconise aux établissements d'enseignement l'utilisation de moyens de diffusion comme les projections fixes, les films documentaires, les enregistrements linguistiques ou musicaux (il souligne l'initiative du centre internationale du film documentaire ethnographique)

5)Il trouve utile que ces trois années de formation soient suivies par une voir deux années de stages.

Enseignement et recherche: 

Formation des maitres: Pour Lévi-Strauss, nul ne devrait prétendre pouvoir enseigner l'anthropologie, sans avoir au préalable effectuer une recherche importante sur le terrain. Le passage sur le terrain est obligatoire et nécessaire, car l'on ne peut pas enseigner qu'à partir d'ouvrages.

Formation de chercheurs: Pour appréhender les formes de vie sociale qu'il essai d'étudier, le chercheur doit reconstituer pour son compte la synthèse qui les caractérise, c'est à dire qu'il ne se contente pas de les analyser en éléments, mais qu'il les assimile dans leur totalité, sous forme d'une expérience personnelle: la sienne. C'est par la nature même de la discipline et par son objet que l'anthropologue a besoin de l'expérience de terrain. Pour lui elle n'est ni un but de sa profession, ni un achèvement de sa culture, ni un apprentissage technique. Elle représente un moment crucial de son éducation. De ces considérations découlent plusieurs conséquences.

Le rôle des musées d'anthropologie:

La pratique de la profession d'anthropologue qui implique que l'enquêteur entre en contact avec un milieu que sa constitution internet et sa situation dans le monde rendent fragile et instable, exige une qualification préliminaire et celle-ci ne peut être obtenue que sur le terrain. L'apprentissage du diagnostic ne peut se faire que par le diagnostic même, mais pour réussir il faut suivre un contact prolongé et personnel avec un maitre. Quels sont les moyens pratiques d'assurer au futur chercheur une expérience du terrain « sous contrôle «? Lévi-Strauss en distingue trois.

Les travaux pratiques: On doit souligner son caractère provisoire. Ces stages hâtifs sont parfois néfastes, dans la mesure où ils n'autorisent que les procédés d'enquêtes les plus superficiels et sommaires ( antiformation).

Les stages extérieurs: il s'agirait de stages de plus longues durée dans des instituts, institutions ou établissements qui fonctionnent au niveau de ces relations interpersonnelles et de ces situations globales (administration municipale, services sociaux...). Cependant, cela pose un inconvénient car les chercheurs seraient sous la responsabilité de personnes extérieurs à l'anthropologie c'est à dire incapable de dégager la portée théorique des expériences quotidiennes.

Les musées d'anthropologie: Rôle des musées comme prolongement du terrain par le contact avec les objets (texture, odeur, forme...), le classement, l'identification, l'analyse de pièces de collections, la communication indirect avec les milieux de provenance des objets etc etc tout cela constitue une expérience d'une richesse que l'on ne peut sous-estimer. Pendant fort longtemps les musées d'anthropologie ont été conçus à l'image des autres établissements du même type, c'est à dire un ensemble de galeries où sont conservés des objets. Or l'évolution de l'anthropologie comme science, ces réflexions sur son objet, l'affinement de ses méthodes et les transformations du monde moderne poussent à modifier cette conception. Ainsi il ne saurait s'agir exclusivement de recueillir des objets mais surtout de comprendre des hommes et de décrire voir analyser des formes d'existence auxquelles l'observateur participe de la façon la plus étroite. Leur mission de conservation est susceptible de se prolonger mais il faut souligner qu'il est de plus en plus difficile de recueillir des arcs et des flèches, des colliers etc, mais il devient de plus en plus facile d'étudier des langues, des croyances, des attitudes et des personnalités. En effet, aujourd'hui les hommes voyagent dans tous les sens, cette multiplication des contacts amène une homogénéisation de la culture matérielle et l'on peu ainsi dire que ce sont les hommes qui tendent à remplacer les objets.

Anthropologie théorique et anthropologie appliquée:

L'anthropologue est l'astronome des sciences sociales: il est chargé de découvrir un sens à des configurations très différentes (par l'ordre de grandeur et d'éloignement)de celles qui l'avoisinent directement. Il n'y a donc pas de raison de limiter l'intervention de l'anthropologue à l'analyse et à la réduction de ces distances externes, il pourra aussi être appelé à fournir sa contribution à l'étude de phénomènes intérieurs à sa propre société mais qui se manifestent avec le même caractère de distanciation.

Selon l'auteur, si la place de l'anthropologie dans les sciences sociales était reconnue, si sa fonction pratique parvenait à se dégager, de nombreux problèmes essentiels se trouveraient en voie de solution. Il rappelle que toute personne appelée à vivre en contact avec des sociétés très différente de la sienne (administrateur, militaire, diplomate...) doit posséder une formation anthropologique car il en résulte parfois des difficultés génératrices d'incompréhension et de préjugés: seule l'anthropologie permet cette distanciation sociale. 

Enfin, il soumet l'idée que l'épanouissement des musées d'anthropologie en laboratoire consacrés à l'étude des phénomènes sociaux fournirait la solution appropriée aux problèmes de formation professionnelle des anthropologues. Le double aspect, théorique et pratique, des études trouveraient leur justification et leur fondement dans l'avènement de la profession à des missions nouvelles. Car l'anthropologie réclamerait vainement une reconnaissance que ses conquêtes théoriques devraient suffire à lui valoir, si dans le monde malade et anxieux qui est le nôtre, elle ne s'employait pas aussi à démontrer à quoi elle sert.

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