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Commentaire de l'arrêt : CEDH, 14 novembre 2002, Mouisel c/ France

Publié le 24/08/2012

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L'arrêt Mouisel c/ France reprend des acquis jurisprudentiels mais il inaugure aussi une évolution en ce qu'il énonce que «  la santé de la personne privée de liberté fait désormais partie des facteurs à prendre en compte dans les modalités d'exécution de peine privative de liberté, notamment en ce qui concerne la durée du maintien en détention. «  Il s'agit là de la reconnaissance par la Cour de la nécessité d'élever les standards de protection des personnes détenues et d'une nouvelle application du principe dégagé par l'arrêt Selmouni selon lequel «  le niveau d'exigence croissant en matière de protection des droits de l'homme implique (…) une plus grande fermeté dans l'appréciation des atteintes aux valeurs fondamentales des sociétés démocratiques «.

« Ce droit à des conditions de détention conformes à la dignité humaine implique que « les modalités d'exécution de la peine ne soumettent pas l'intéressé à une détresseou à une épreuve d'une intensité qui excède le niveau inévitable de souffrance inhérent à la détention (…) »Dans cet arrêt elle ajoutait qu'« outre la santé du prisonnier c'est son bien -être qui doit être assuré de manière adéquate ».

Ainsi dans l'arrêt Price c/ R-U de 2001, laCour a considéré que la détention de la requérante handicapée des quatre membres dans des conditions inadaptées à son état de santé (elle souffrait du froid etrisquait d'avoir des douleurs à cause de la dureté et de l'inaccessibilité de son lit+ difficulté à se laver). Dans l'affaire Mouisel, la Cour prend tout d'abord acte des modifications introduites dans la législation française s'agissant de la possibilité de libérer des personnesmalades. La loi du 15 juin 2000 a modifié dans le CPP, l'article 729 qui prévoit une libération conditionnelle possible sur décision du JAP « pour nécessité de suivre untraitement », quelques jours plus tard, un rapport de l'assemblée nationale fait par une commission d'enquête sur la situation dans les prisons françaises reprendra lescritiques sur le fait qu'aucune libération anticipée n'était possible pour les malades en phase terminale hormis la procédure de grâce médicale. Une autre introduction importante : la loi dite « Kouchner » du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé.

Est inséré l'article720-1-1 CPP qui prévoit une suspension de peine « quelque soit sa nature ou la durée de la peine restant à subir pour les condamnés dont il est établi qu'ils sontatteints d'une pathologie engageant le pronostic vital ou dont l'état de santé est durablement incompatible avec le maintien en détention ».

Cette évolution étaitnécessaire car la grâce médicale n'était que très rarement accordée par le Président de la République comme le soulignait le rapport de l'Assemblée nationale.

Deplus, le Comité des ministres du Conseil de l'Europe insistait sur la nécessité d'une modification par sa Recommandation du 8 avril 98 relative aux aspects éthiques etorganisationnels des soins de santé en milieu pénitentiaire. La Cour note que les dispositifs procéduraux instaurés par les lois du 15 juin 2000 et du 4 mars 2002 suppléent le recours en grâce médicale et peuvent constituerdes garanties pour assurer la protection de la santé et du bien être des prisonniers.

Cependant, ces mécanismes n'étaient pas accessibles au requérant : ses demandes degrâce ont été rejetée et la libération conditionnelle ne lui a été appliquée qu'en 2001. Par contre M.

Papon a pu bénéficier de la suspension de peine : dans un arrêt de la CA de Paris du 18 septembre 2002 confirmée en 2003 parla Chambre criminelle,son état de santé a été jugé incompatible avec son maintien en détention. Pour tomber sous le coup de l'article 3, un mauvais traitement doit atteindre un minimum de gravité.

Dans l'affaire Mouisel, la CEDH va estimer qu'au vu desrapports médicaux établis, l'état de santé du requérant fut jugé de plus en plus préoccupant et inadapté à la prison sans que des mesures particulières ne soient prisespar les autorités pénitentiaires.

La Cour considère qu'il aurait pu s'agir d'une hospitalisation mais aussi de tout autre placement dans un lieu où le condamné aurait étésous surveillance en particulier la nuit. En ce qui concerne les conditions de transfert ( menottage), la Cour rappelle que si « le port des menottes ne pose pas de problème avec l'article 3 lorsqu'il est lié àune détention légale et n'entraîne pas l'usage de la force(…), c'est notamment à condition qu'il n'excède pas ce qui est raisonnablement considéré comme nécessaire.

»Elle effectue un contrôle de proportionnalité entre l'état de santé du requérant et le risque qu'il présente pour la sécurité publique.

En l'espèce, compte tenu du faibleétat de dangerosité du requérant en phase terminale d'une leucémie, le port des menottes était disproportionné au risque de fuite et ce, malgré ses antécédentsjudiciaires. Dès lors, les autorités nationales n'ont pas assuré une prise en charge de l'intéressé lui permettant d'éviter un traitement inhumain et dégradant, son maintien endétention a porté atteinte à sa dignité et lui a causé une souffrance au- delà de celle que comportent inévitablement une peine d'emprisonnement et un traitement anti-cancéreux.

M.

Mouisel a subi un traitement inhumain et dégradant. L'arrêt Mouisel c/ France reprend des acquis jurisprudentiels mais il inaugure aussi une évolution en ce qu'il énonce que « la santé de la personne privée de libertéfait désormais partie des facteurs à prendre en compte dans les modalités d'exécution de peine privative de liberté, notamment en ce qui concerne la durée du maintienen détention.

»Il s'agit là de la reconnaissance par la Cour de la nécessité d'élever les standards de protection des personnes détenues et d'une nouvelle application du principe dégagépar l'arrêt Selmouni selon lequel « le niveau d'exigence croissant en matière de protection des droits de l'homme implique (…) une plus grande fermeté dansl'appréciation des atteintes aux valeurs fondamentales des sociétés démocratiques ». ARRETS POSTERIEURS : - Arrêt Henaf c/ France 27/11/2003 : il s'agissait d'un détenu âgé et malade qui avait été attaché à son lit d'hôpital alors que deux policiers avaient été spécialementplacés devant la chambre du requérant .La cour a conclu à un traitement inhumain et a évoqué la qualification de torture étant donné le niveau d'exigence croissanten matière de protection des droits de l'homme. -Arrêt Sakkopoulos c/ Grèce 15/01/04 : cet arrêt est intéressant car la Cour dégage clairement trois éléments pour examiner la compatibilité d'un état de santé avec lemaintien en détention :- la condition du détenu-la qualité des soins dispensés-et l'opportunité de maintenir la détention au vu de l'état de santé du requérant. »

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