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Commentaire d'arrêt du Conseil d'Etat 21 Décembre 2007 (droit)

Publié le 08/07/2012

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droit

2- Une construction juridiquement autonome

Ce qui a été recherché, dixit le commissaire du gouvernement, est « la cohérence avec la qualification d’activité civile donnée aux agents commerciaux alors que ceux-ci ne disposent pas nécessairement d’un véritable mandat de représentation «. Pourtant, nous l’avons vu, c’est parce qu’ils agissent sur la base d’un contrat de droit civil (le mandat) que les agents commerciaux exercent une activité non commerciale. Les intermédiaires de placement de produits financiers sont assimilés à une activité civile par la proximité de leur activité à celle des agents commerciaux et non pas par un rattachement propre au droit civil. Voilà qui traduit « l’absence d’identité entre la notion fiscale et la notion juridique d’activité commerciale « selon l’expression de Maurice Cozian. La notion fiscale n’est pas l’homogène et certaines qualifications peuvent tendre à la confusion ce qui constitue un risque au regard de la sécurité juridique. 

droit

« d’agents commerciaux ?2- L’assimilation ou non de l’activité des époux à celle d’agents commerciaux Le commissaire du gouvernement Célia Vérot a soulevé dans ses conclusions deux difficultés à cette assimilation.- L’absence de mandat est l’unique moyen du pourvoi.

Toutefois, le commissaire du gouvernement signale qu’au regard de la jurisprudence la détention d'un mandatn'est pas un élément nécessaire de la reconnaissance de l'activité d'agent commercial (Cass.

com., 27 févr.

1973, n° 71-14.741, Sté « Compagnie européenne decrédit pour l'industrie et le commerce » : Juris-Data n° 1973-097100 ; Bull.

civ.

1973, n° 100). - Un autre argument non soulevé par les époux était que l'activité de placement de produits financiers ne pouvait être purement et simplement assimilée à celle d'agentcommercial.

L'article L.

134-1 du Code de commerce, dont l’application est d’ordre public, dispose que « le statut d'agent commercial ne s'applique pas auxpersonnes dont l'activité fait l'objet d'une réglementation particulière, comme celle des intermédiaires financiers qui est régie par les articles L.

519-1 et suivants duCode monétaire et financier (Cass.

com., 18 févr.

2004, n° 02-17.468 : Bull.

civ.

2004, IV, n° 32, p.

30) ».Ce dernier argument c’est avéré solide puisque le Conseil d’Etat ne fait plus allusion dans son arrêt aux agents commerciaux, il admet la spécificité de l’activitéd’intermédiaire en placement de fonds financiers.Toutefois il leur reconnaît tout de même une forme de mandat les rapprochant suffisamment des agents commerciaux pour justifier leur assujettissement à un régimecivil.

Cela va dans le sens de l’autonomie des règles de qualification du droit fiscal.II – Une décision allant dans le sens de l’autonomie du droit fiscalCette décision met en évidence la part d’autonomie du droit fiscal notamment dans les libertés qu’il prend avec les conceptions du droit civil (A).

Autonomie qui peutsusciter une certaine confusion auprès des contribuables (B). A- Les libertés prises avec les conceptions du droit civil Le Conseil d’Etat déclare que la société « se livrait à une activité à caractère non commercial alors même qu’elle n’était pas habilitée à conclure au nom de sesmandants »1- La reconnaissance d’un mandat incompatible avec les règles du droit civil Le Conseil d’Etat mentionne des « mandants » alors même qu’il précise que la société n’était pas habilité à conclure en leur nom.Le commissaire du gouvernement Célia Vérot reconnaît la difficulté à caractériser un mandat dès lors que le régime des agents commerciaux (article L134-1 du codede commerce) n’est pas applicable.D’après elle les contrats conclus par la SARL ne revêtaient pas les caractéristiques du mandat : ils ne « comportaient pas de clause d'exclusivité ou de lien desubordination, le mandat était limité à la mise en relation avec des clients à l'exclusion de tout acte de gestion, de manipulation de fonds, et la société était dénuée detout pouvoir pour signer des actes ou engager ses clients ».Le pourvoi soutient d’ailleurs qu'en « principe, un contrat de mandat ne peut avoir pour objet que l'accomplissement d'actes juridiques, il ne peut pas porter seulementsur la réalisation d'actes matériels » (Cass.

1re civ., 27 mai 1959 : D.

1959, jurisp.

p.

524, note Savatier.

- J.-Cl.

Civil code, art.

1984 à 1990, Fasc.

10).Certains auteurs vont jusqu’à rapprocher les intermédiaires financiers des courtiers, justement parce qu’ils ne détiennent pas de mandat.Malgré tout cela, qui était bien précisé dans les conclusions du commissaire du gouvernement, le Conseil d’Etat a retenu en l’espèce une forme de mandat.

Enreconnaissant un caractère civil à l’activité d’intermédiaire de placement de produits financiers il l’a rapproché, même sans littéralement l’y assimiler, de l’activitéd’agent commercial.2- Une construction juridiquement autonomeCe qui a été recherché, dixit le commissaire du gouvernement, est « la cohérence avec la qualification d’activité civile donnée aux agents commerciaux alors queceux-ci ne disposent pas nécessairement d’un véritable mandat de représentation ».Pourtant, nous l’avons vu, c’est parce qu’ils agissent sur la base d’un contrat de droit civil (le mandat) que les agents commerciaux exercent une activité noncommerciale.

Les intermédiaires de placement de produits financiers sont assimilés à une activité civile par la proximité de leur activité à celle des agentscommerciaux et non pas par un rattachement propre au droit civil.Voilà qui traduit « l’absence d’identité entre la notion fiscale et la notion juridique d’activité commerciale » selon l’expression de Maurice Cozian.

La notion fiscalen’est pas l’homogène et certaines qualifications peuvent tendre à la confusion ce qui constitue un risque au regard de la sécurité juridique. B- Une autonomie parfois source d’insécurité juridique rendant trouble la situation des contribuables 1- Une complexité source de confusion.Le cas des intermédiaires commerciaux illustre bien les difficultés du droit fiscal à tracer une frontière nette entre la sphère civile et la sphère commerciale.Le raisonnement adéquat n’est pas toujours à la portée du contribuable.

Peut être doit-on comprendre ainsi le choix de regrouper sous une même qualification desactivités semblables telle l’intermédiation en placement de produits financiers et celle d’agent commercial plutôt que d’appliquer strictement des critères juridiquesabstraits.Cependant le même raisonnement aurait pu être tenu en rapprochant aux placement de produits financiers l’activité de courtage.Sans être arbitraires, les qualifications du droit fiscal peuvent se révéler difficiles à appréhender.

D’autant plus qu le seul risque n’est pas l’erreur du contribuablemais l’altération du comportement que l’on cherche à lui faire adopter.2- Le risque d’un résultat contraire au but poursuivi.L’impôt est souvent utilisé par les politiques pour tenter de favoriser un certain type de comportements.C’est le cas en l’espèce, la raison d’être du régime de faveur de l’article 44 sexies est d’encourager la création de sociétés commerciales et d’en faciliter le débutd’exploitation.

En rendant peu lisible son utilisation par une catégorie d’assujettis on risque au mieux de la décourager, privant ainsi d’effet la mesure incitative etrisquant de nuire à des contribuables de bonne foi.Pour conclure sur les difficultés de qualification, le conseil des impôts s’est exprimé dans les années 90 sur la qualification « d’entreprise nouvelle » égalementnécessaire pour l’application de l’article 44 sexies et qui pose elle aussi des difficultés.

Le conseil a observé que « le taux élevé de redressements constitue en lui-même un inconvénient sérieux des régimes favorables aux entreprises nouvelles, non seulement du point de vue de la moralité fiscale mais aussi de celui desentreprises qui font l’objet de redressements, lesquels, malgré leur bien fondé au regard des textes, entraînent de graves difficultés de trésorerie, sinon la disparitionpure et simple de l’entreprise »(D.F, Droit et Patrimoine 1996 n°34 p.19 « l’exonération fiscale des entreprises nouvelles »).Les risques d’un lourd redressement s’étendant sur des années incitent à la prudence les catégories d’entrepreneurs peu certains de la qualification de leur activité.Une mesure fiscale sensée encourager les entreprises peut ainsi en venir à les mettre en danger du fait de certaines imprécisions.. »

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