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Dada - peinture.

Publié le 15/05/2013

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Dada - peinture. 1 PRÉSENTATION Dada, mouvement artistique et littéraire international apparu à la faveur du chaos provoqué par la Première Guerre mondiale et dont la volonté de protestation contre la société contemporaine s'illustre par une remise en question profonde de la valeur accordée à l'oeuvre d'art et au geste créatif de l'artiste. 2 À ZURICH, ON DANSE AU CABARET VOLTAIRE Dada voit simultanément le jour à Zurich et à New York au cours de l'année 1915. À Zurich, où la guerre les a poussés à se réfugier, des artistes venus de différents pays d'Europe, notamment d'Allemagne et de Roumanie, se rassemblent autour d'un même sentiment de révolte à l'égard de la civilisation occidentale qu'ils jugent responsable du conflit. Ils s'appliquent dès lors à ébranler l'un de ses fondements, la valeur suprême accordée à l'art -- leur but étant de tuer l'art sans annuler pour autant la pratique artistique. À ses débuts, le groupe réunit les poètes Hugo Ball, Richard Huelsenbeck et Tristan Tzara ainsi que les peintres Jean Arp, Sophie Taeuber, Marcel Janco, Arthur Segal, Christian Schad, Otto Van Rees et Hans Richter. L'ouverture à Zurich du Cabaret Voltaire, café transformé en lieu de spectacles et d'expositions, le 5 février 1916, marque la naissance officielle du mouvement. Son nom, dada, est choisi au hasard dans un dictionnaire allemand-français par Hugo Ball et Richard Huelsenbeck et apprécié pour « la qualité primitive de sa sonorité infantile, avec ce que cela impliquait de ' départ à zéro '«. Le mot évoque également des sujets déconcertants, il signifie « oui oui « en roumain, « cheval à bascule « et « marotte « en français, et possède un réel pouvoir suggestif tel qu'une marque commerciale ou un slogan. Il a surtout pour vocation de symboliser la volonté de dérision et de subversion qui anime le groupe dès ses débuts. Les soirées du Cabaret Voltaire puis, à partir de 1917, de la galerie dada, mêlent improvisations musicales, jeux théâtraux, concerts de bruits, déclamations de textes et pratiques spontanées de danses. Artistes et poètes s'y livrent à une activité créative débridée, confectionnant euxmêmes masques, costumes ou encore marionnettes. Le groupe s'y essaye à l'invention de nouvelles formes de poésie et d'art, fondées sur la recherche d'expressions brutes et primitives, dégagées des liens du sens et de la logique commune. Les poètes Hugo Ball et Richard Huelsenbeck inventent un nouveau langage nourri d'onomatopées, de bruits, de rythmes et de suites incohérentes de phonèmes, donnant ainsi naissance au poème sonore (Hugo Ball, Karawane, 1917). Les peintres Jean Arp et Marcel Janco s'inspirent quant à eux de formes naturelles primitives pour créer des reliefs abstraits, simples ou élaborés, équivalents plastiques de leurs écrits poétiques dans lesquels se mêlent danse des mots et déconstruction surprenante. Une nouvelle forme de provocation est trouvée lorsque le hasard est introduit comme principe fondateur dans la réalisation des oeuvres. Tristan Tzara, en poésie, interpelle son auditoire sur la nature incertaine du langage en déclamant des compositions hasardeuses ; Jean Arp et Sophie Taeuber, dans leurs créations faites de papiers collés, expérimentent ce concept fondé sur la spontanéité et le refus de toute intention esthétique préexistant à l'oeuvre (Jean Arp, Carrés disposés selon les lois du hasard, 1916, The Museum of Modern Art, New York). La grande inventivité du groupe s'illustre également dans la diversité des supports d'expression employés, comme en témoignent les broderies, tissages et têtes de bois tourné peintes réalisés par Sophie Taeuber (Tête dada, 1918, Centre Pompidou, musée national d'Art moderne, Paris). L'importance majeure accordée à l'écrit (textes, correspondances, imprimés, tracts, papillons, revues) se manifeste notamment par une savante recherche typographique. Au cours de sa période d'activité suisse, outre les poèmes, le mouvement publie les revues Cabaret Voltaire et Der Zeltweg, dont les numéros uniques paraissent respectivement en 1916 et 1919, et la revue Dada, publiée jusqu'en 1919 à Zurich, puis à Paris, dans laquelle apparaît « le Manifeste dada 1918 « rédigé par Tristan Tzara. Ce texte, présenté selon le style dada (composition typographique et mise en page bouleversées), est un appel au rejet du monde ancien, affirme que « Dada ne signifie rien «, proclame « la révolte contre le carnage et pour la vie «, et constitue un évènement pour la renommée internationale du mouvement. 3 NEW YORK ET LES MACHINES À DADA Parallèlement à l'effervescence zurichoise, un groupe d'esprit dadaïste se développe à partir de 1915 à New York autour d'artistes français ayant fui la guerre à l'image de Marcel Duchamp, Francis Picabia et Jean Crotti. Les artistes américains Man Ray, Morton Schamberg, Paul Haviland et le poète Walter Arensberg, également mécène, se joignent à eux. Le mouvement prend vie à la faveur de la voie nouvelle initiée par Marcel Duchamp au cours des années précédentes. Dès 1912, alors qu'il se trouve au Salon de l'aéronautique à Paris en compagnie de Fernand Léger et de Constantin Brancusi, Marcel Duchamp reste fasciné devant une hélice d'avion pour prononcer ensuite : « C'est fini la peinture, qui fera mieux que cette hélice ? « Cette fascination pour le progrès technique lui fait remettre en cause les principes communément admis concernant l'oeuvre d'art dès 1914 avec ses ready-made, tel le Porte-bouteille, en réalité un objet du quotidien de fabrication industrielle mué en oeuvre d'art du simple fait du choix et de l'intervention de l'artiste. Au printemps 1917, à l'occasion de la première exposition de la Société américaine des artistes indépendants à New York, Marcel Duchamp -- sous le pseudonyme de R. Mutt car il est membre du jury -- provoque un nouveau scandale en exposant l'oeuvre baptisée Fountain (« Fontaine «, 1917), un urinoir renversé daté 1917 et signé R. Mutt. Marcel Duchamp au cours de la même période se consacre également à l'une de ses oeuvres majeures, entamée dès 1915 et qui l'occupe jusqu'en 1923, le Grand verre ou la Mariée mise à nu par ses célibataires, même (Museum of Art, Philadelphie). L'activité de Dada à New York est également marquée par les oeuvres de Man Ray qui produit des collages, des peintures au pistolet (aérographies), et des assemblages énigmatiques d'objets usuels ( Self-Portrait, 1916, Fondation Marconi, Milan). En 1915, est créée la revue 291 -- nommée ainsi en référence à l'adresse de la galerie d'art du photographe Alfred Stieglitz --, à laquelle Marcel Duchamp puis Francis Picabia viennent apporter leur dynamisme. Également fasciné par la modernité, Francis Picabia insuffle à la revue un véritable style d'abstraction « mécanomorphe « puis fonde au cours d'un séjour effectué en 1916 à Barcelone la revue 391, qui joue un rôle majeur dans le mouvement Dada, et dans laquelle paraissent notamment des poésies de sa main. De retour à New York en 1917, il continue la publication de 391 tout en réalisant des peintures consacrées au monde des machines. Dans ses oeuvres, la froideur technique des dessins quasi industriels vient se heurter à des portions de textes, titres décalés, phrases énigmatiques et absurdes, qui créent le non-sens (Parade amoureuse, 1917, Guggenheim Museum, New York). Francis Picabia entre en contact avec Tristan Tzara et le groupe Dada de Zurich en 1919, peu de temps avant que celui-ci n'éclate et se dissémine à travers l'Europe, et plus particulièrement en Allemagne et en France. À New York les derniers développements de Dada s'achèvent avec la publication par Marcel Duchamp et Man Ray de l'unique numéro de la revue New York Dada en avril 1921. Le climat conservateur qui règne aux États-Unis au sortir de la guerre se montre peu favorable au déploiement de Dada ; « Dada ne peut pas vivre à New York « écrit Man Ray dans une lettre adressée à Tristan Tzara en 1921. 4 QUE FAIT DADA À PARIS ? L'éclosion du dadaïsme parisien, que semble préfigurer la publication des revues SIC (voir Pierre Albert-Birot) et Nord Sud (voir Pierre Reverdy), devient effective à l'arrivée en 1920 de Tristan Tzara dans la capitale. Celui-ci vient y rejoindre Francis Picabia qui y poursuit la publication de sa revue 391 dans laquelle paraissent notamment des textes de Jean Arp ou Georges Ribemont-Dessaignes. Ces deux personnalités prennent part au mouvement tout comme Paul Éluard et les membres du groupe de la revue Littérature -- fondée en 1919 -- André Breton, Philippe Soupault et Louis Aragon, qui finissent quelques années plus tard par délaisser Dada pour donner naissance au surréalisme. Entre 1920 et 1921, le dadaïsme parisien s'illustre par de nombreuses manifestations placées sous les signes du militantisme social et de l'anarchie, et se soldent le plus souvent par des échecs publics. Les dadaïstes ont des tenues vestimentaires et un registre de langue qui s'accordent mal à un auditoire composé d'ouvriers. De plus, lors de ses prestations, le groupe se montre désorganisé et s'en remet au hasard, provoquant les rires et la confusion dans le public. Ces manifestations sont pourtant des demi-succès pour le groupe qui parvient une fois de plus à faire scandale, allant jusqu'à soulever le doute dans les esprits et créer la méfiance sur la nationalité incertaine du mouvement : Dada appartient-il à l'ennemi ? Francis Picabia publie au cours de cette période les textes Jésus-Christ Rastaquouère (livre-manifeste écrit en 1920), Unique Eunuque (livre poétique aléatoire qui se lit à l'envers et à l'endroit publié en 1920) et produit de nombreuses oeuvres comme la Danse de Saint-Guy. Tabac-Rat (1919-1920, Centre Pompidou, musée national d'Art moderne, Paris) qui représente un cadre vide seulement traversé de quelques fils et agrémenté d'étiquettes, et Chapeau de paille (1921, Centre Pompidou, musée national d'Art moderne, Paris) dans lequel est inscrite la mention « M... pour celui qui le regarde ! «. En 1919, Marcel Duchamp repousse une nouvelle fois les limites de la provocation avec l'oeuvre L.H.O.O.Q. (collection particulière), du nom de l'inscription dont il orne une reproduction du tableau de la Joconde dans laquelle Mona Lisa apparaît dotée d'une barbiche et d'une moustache dessinées par l'artiste. Man Ray, arrivé dans la capitale en 1921, crée lui aussi ce qui est dénommé par Marcel Duchamp un « ready-made aidé « avec Gift, un fer à repasser à la semelle hérissée de clous (1921, collection Morton Neumann, Chicago). L'artiste américain développe à la même époque une technique de photographie, le photogramme, une invention qui lui permet de réaliser des images abstraites (Rayographies) en plaçant des objets sur des surfaces sensibles à la lumière. L'année 1921 est marquée par une exposition des oeuvres de Max Ernst et par la publication du tract-manifeste « Dada soulève tout « qui proclame notamment que « Dada connaît tout. Dada crache tout « et qui s'attaque en partie au futurisme -- accentuant un peu plus les querelles qui les isolent des milieux avant-gardistes. De nombreuses brouilles entre Tristan Tzara et André Breton jalonnent la fin de l'aventure Dada à Paris, notamment au cours de la soirée de la revue de Tzara le Coeur à barbe, en juillet 1923, pendant laquelle la bande de Breton sabote la représentation de la pièce le Coeur à gaz de Tristan Tzara. 5 LA RÉVOLTE DADA EN ALLEMAGNE Le dadaïsme allemand, marqué par la poursuite d'objectifs politiques, voire révolutionnaires, prend tout son essor au lendemain de la guerre. C'est à Berlin, où un Club dada est fondé en 1918 -- en même temps que se forment d'autres clubs après la révolution de novembre --, que la contestation politique se montre la plus vive, comme le démontrent les oeuvres du groupe formé par Richard Huelsenbeck, venu de Zurich dès 1917, Raoul Hausmann, Hannah Höch, Johannes Baader, John Heartfield et George Grosz. Pour mener leur protestation contre le régime de Weimar et manifester leur anti-militarisme, la technique du photomontage -- dont l'invention est disputée entre Raoul Hausmann, Hannah Höch et John Heartfield -- se révèle un outil puissant. Ces oeuvres, faites de photographies, de lettres et de mots découpés dans des journaux et des revues, s'appuient sur la confrontation, souvent violente, des images et des mots. Refusant le statut d'artistes, John Heartfield et George Grosz revendiquent une production mécanique à l'exemple de celle effectuée par les ouvriers d'usines. Raoul Hausmann, fondateur de la revue Die Strasse (« la Rue «) en 1916, auteur de poèmes abstraits élaborés à l'aide d'une typographie visuellement frappante (dite « optophonétique «) tels que « FMSBW «, crée durant cette période le célèbre assemblage l'Esprit de notre temps appelé aussi Tête mécanique (1919, Centre Pompidou, musée national d'Art moderne, Paris). Les dadaïstes berlinois, pour lesquels la tête est associée aux décapitations de la Révolution française, voient en cette sculpture, constituée d'une marotte de coiffeur et de divers objets de rebut, le symbole d'une ère nouvelle, et la choisissent comme emblème. George Grosz livre quant à lui des oeuvres virulentes sur la violence de la grande ville dont Le coupable reste inconnu (1918, Art Institute, Chicago), et dans laquelle est fustigée la banalisation du crime. En 1920, a lieu à la Galerie Otto Burchard la Erste Internationale Dada-Messe (« Première Foire internationale Dada «) qui rassemble près de 200 oeuvres. Cette exposition vient renforcer la visibilité mondiale du mouvement mais inquiète les critiques d'art et les autorités allemandes ; certains dadaïstes sont ainsi victimes de perquisitions et d'accusations. La fin du groupe, qui est également à l'origine de la revue Der Dada, date de 1923, année où Raoul Hausmann réalise son dernier collage ABCD (Centre Pompidou, musée national d'Art moderne, Paris). Un autre foyer du dadaïsme allemand se développe à Cologne entre 1918 et 1922 grâce à l'action de Jean Arp, Max Ernst et Johannes Baargeld. Jean Arp et Max Ernst créent des collages élaborés à partir de catalogues d'achats par correspondance qu'ils baptisent FaTaGaGa, terme signifiant « Fabrication de Tableaux Garantis Gazométriques «. Johannes Baargeld se consacre pour sa part à la publication du périodique Der Ventilator. Dès sa parution en 1919, le journal affiche un engagement politique socialiste et contestataire rapidement censuré par les autorités britanniques qui occupent alors la ville ; le journal poursuit sa publication sous une apparence plus discrète mais néanmoins subversive. À Hanovre, le mouvement Dada s'incarne en la personne de Kurt Schwitters qui, empêché de participer au Club dada de Berlin en raison des liens qu'il entretient avec les expressionnistes de la galerie Der Sturm et de l'usage d'un nom personnel de fabrication, fonde son propre mouvement baptisé « Merz «. Ce terme inventé, construit à partir du mot Commerzbank, mot découpé à l'occasion de la réalisation d'une oeuvre, lui sert dès lors à désigner les oeuvres de tous types qu'il produit. Kurt Schwitters crée des collages à partir d'objets destinés au rebut (journaux, tickets de tramway, napperons en papier, etc.) assemblés sur des toiles peintes avant de produire des oeuvres de plus petite taille constituées de papiers collés. Il rédige également des poèmes dont il soigne particulièrement la présentation visuelle par le biais d'un minutieux usage de la typographie. Créateur de la revue Merz qui parait à partir de 1923, et dont le premier numéro est consacré à De Stijl, Kurt Schwitters participe la même année à une tournée De Stijl-Dada en Hollande avec son ami Theo Van Doesburg. Ce dernier se livre, sous le pseudonyme de I.K. Bonset, à des activités dadaïstes -- en particulier à la publication de la revue Mécano --, tout en se consacrant à son rôle de propagateur du néoplasticisme. 6 DERNIERS DÉVELOPPEMENTS ET POSTÉRITÉ DU MOUVEMENT DADA Le succès des remises en cause exprimées par Dada entraîne la création de groupes dans plusieurs autres pays tels que l'Italie (malgré la domination du futurisme), la Belgique, la Tchécoslovaquie, la Hongrie mais aussi la Yougoslavie et le Japon, où l'esprit du mouvement s'incarne dans le mot « Mavo «. Dans ses derniers développements, le dadaïsme s'intègre progressivement aux tendances constructivistes des années 1920, à la suite d'un rapprochement initié lors du Congrès international Constructivisme-Dada qui se tient à Weimar en septembre 1922. Mouvement international, Dada ne peut comme on l'a vu se résumer ni à un style ni à un ensemble de techniques. Il est une entreprise de protestation et de subversion qui dépasse les frontières : marqué par sa dimension activiste, il s'appuie sur une production foisonnante de tracts, d'affiches, de revues, de poésies et de livres remarquables par leurs recherches typographiques. Il manie et réinvente le langage et toutes les formes d'expression plastique, fait usage de matériaux bruts ou voués au rebut, emploie slogans, photomontages et performances publiques pour exprimer son nihilisme et son iconoclasme. Il repousse les limites, bouscule, choque et témoigne avant tout d'un fantastique esprit de révolte à l'encontre de l'ordre établi. Toutes ces stratégies novatrices, pétries d'audace, de liberté et de provocation, sont à l'origine de plusieurs courants artistiques apparus en Europe et aux États-Unis après la Seconde Guerre mondiale tels que le néodadaïsme de Robert Rauschenberg ou le mouvement Fluxus. Microsoft ® Encarta ® 2009. © 1993-2008 Microsoft Corporation. Tous droits réservés.

« groupe de la revue Littérature — fondée en 1919 — André Breton, Philippe Soupault et Louis Aragon, qui finissent quelques années plus tard par délaisser Dada pour donner naissance au surréalisme.

Entre 1920 et 1921, le dadaïsme parisien s’illustre par de nombreuses manifestations placées sous les signes du militantisme social et de l’anarchie, et se soldent le plus souvent par des échecs publics.

Les dadaïstes ont des tenues vestimentaires et un registre de langue qui s’accordent mal à un auditoire composé d’ouvriers.

De plus, lors de ses prestations, le groupe se montre désorganisé et s’en remet au hasard, provoquant les rires et la confusion dans le public.

Ces manifestations sont pourtant des demi-succès pour le groupe qui parvient une fois de plus à faire scandale, allant jusqu’à soulever le doute dans les esprits et créer la méfiance sur la nationalité incertaine du mouvement : Dada appartient-il à l’ennemi ? Francis Picabia publie au cours de cette période les textes Jésus-Christ Rastaquouère (livre-manifeste écrit en 1920), Unique Eunuque (livre poétique aléatoire qui se lit à l’envers et à l’endroit publié en 1920) et produit de nombreuses œuvres comme la Danse de Saint-Guy.

Tabac-Rat (1919-1920, Centre Pompidou, musée national d’Art moderne, Paris) qui représente un cadre vide seulement traversé de quelques fils et agrémenté d’étiquettes, et Chapeau de paille (1921, Centre Pompidou, musée national d’Art moderne, Paris) dans lequel est inscrite la mention « M… pour celui qui le regarde ! ».

En 1919, Marcel Duchamp repousse une nouvelle fois les limites de la provocation avec l’œuvre L.H.O.O.Q. (collection particulière), du nom de l’inscription dont il orne une reproduction du tableau de la Joconde dans laquelle Mona Lisa apparaît dotée d’une barbiche et d’une moustache dessinées par l’artiste.

Man Ray, arrivé dans la capitale en 1921, crée lui aussi ce qui est dénommé par Marcel Duchamp un « ready-made aidé » avec Gift, un fer à repasser à la semelle hérissée de clous (1921, collection Morton Neumann, Chicago).

L’artiste américain développe à la même époque une technique de photographie, le photogramme, une invention qui lui permet de réaliser des images abstraites (Rayographies) en plaçant des objets sur des surfaces sensibles à la lumière.

L’année 1921 est marquée par une exposition des œuvres de Max Ernst et par la publication du tract-manifeste « Dada soulève tout » qui proclame notamment que « Dada connaît tout.

Dada crache tout » et qui s’attaque en partie au futurisme — accentuant un peu plus les querelles qui les isolent des milieux avant-gardistes.

De nombreuses brouilles entre Tristan Tzara et André Breton jalonnent la fin de l’aventure Dada à Paris, notamment au cours de la soirée de la revue de Tzara le Cœur à barbe, en juillet 1923, pendant laquelle la bande de Breton sabote la représentation de la pièce le Cœur à gaz de Tristan Tzara. 5 LA RÉVOLTE DADA EN ALLEMAGNE Le dadaïsme allemand, marqué par la poursuite d’objectifs politiques, voire révolutionnaires, prend tout son essor au lendemain de la guerre.

C’est à Berlin, où un Club dada est fondé en 1918 — en même temps que se forment d’autres clubs après la révolution de novembre —, que la contestation politique se montre la plus vive, comme le démontrent les œuvres du groupe formé par Richard Huelsenbeck, venu de Zurich dès 1917, Raoul Hausmann, Hannah Höch, Johannes Baader, John Heartfield et George Grosz.

Pour mener leur protestation contre le régime de Weimar et manifester leur anti-militarisme, la technique du photomontage — dont l’invention est disputée entre Raoul Hausmann, Hannah Höch et John Heartfield — se révèle un outil puissant.

Ces œuvres, faites de photographies, de lettres et de mots découpés dans des journaux et des revues, s’appuient sur la confrontation, souvent violente, des images et des mots.

Refusant le statut d’artistes, John Heartfield et George Grosz revendiquent une production mécanique à l’exemple de celle effectuée par les ouvriers d’usines.

Raoul Hausmann, fondateur de la revue Die Strasse (« la Rue ») en 1916, auteur de poèmes abstraits élaborés à l’aide d’une typographie visuellement frappante (dite « optophonétique ») tels que « FMSBW », crée durant cette période le célèbre assemblage l’Esprit de notre temps appelé aussi Tête mécanique (1919, Centre Pompidou, musée national d’Art moderne, Paris).

Les dadaïstes berlinois, pour lesquels la tête est associée aux décapitations de la Révolution française, voient en cette sculpture, constituée d’une marotte de coiffeur et de divers objets de rebut, le symbole d’une ère nouvelle, et la choisissent comme emblème.

George Grosz livre quant à lui des œuvres virulentes sur la violence de la grande ville dont Le coupable reste inconnu (1918, Art Institute, Chicago), et dans laquelle est fustigée la banalisation du crime.

En 1920, a lieu à la Galerie Otto Burchard la Erste Internationale Dada-Messe (« Première Foire internationale Dada ») qui rassemble près de 200 œuvres.

Cette exposition vient renforcer la visibilité mondiale du mouvement mais inquiète les critiques d’art et les autorités allemandes ; certains dadaïstes sont ainsi victimes de perquisitions et d’accusations.

La fin du groupe, qui est également à l’origine de la revue Der Dada, date de 1923, année où Raoul Hausmann réalise son dernier collage ABCD (Centre Pompidou, musée national d’Art moderne, Paris). Un autre foyer du dadaïsme allemand se développe à Cologne entre 1918 et 1922 grâce à l’action de Jean Arp, Max Ernst et Johannes Baargeld.

Jean Arp et Max Ernst créent des collages élaborés à partir de catalogues d’achats par correspondance qu’ils baptisent FaTaGaGa, terme signifiant « Fabrication de Tableaux Garantis Gazométriques ».

Johannes Baargeld se consacre pour sa part à la publication du périodique Der Ventilator. Dès sa parution en 1919, le journal affiche un engagement politique socialiste et contestataire rapidement censuré par les autorités britanniques qui occupent alors la ville ; le journal poursuit sa publication sous une apparence plus discrète mais néanmoins subversive.

À Hanovre, le mouvement Dada s’incarne en la personne de Kurt Schwitters qui, empêché de participer au Club dada de Berlin en raison des liens qu’il entretient avec les expressionnistes de la galerie Der Sturm et de l’usage d’un nom personnel de fabrication, fonde son propre mouvement baptisé « Merz ».

Ce terme inventé, construit à partir du mot Commerzbank, mot découpé à l’occasion de la réalisation d’une œuvre, lui sert dès lors à désigner les œuvres de tous types qu’il produit.

Kurt Schwitters crée des collages à partir d’objets destinés au rebut (journaux, tickets de tramway, napperons en papier, etc.) assemblés sur des toiles peintes avant de produire des œuvres de plus petite taille constituées de papiers collés.

Il rédige également des poèmes dont il soigne particulièrement la présentation visuelle par le biais d’un minutieux usage de la typographie.

Créateur de la revue Merz qui parait à partir de 1923, et dont le premier numéro est consacré à De Stijl, Kurt Schwitters participe la même année à une tournée De Stijl-Dada en Hollande avec son ami Theo Van Doesburg.

Ce dernier se livre, sous le pseudonyme de I.K.

Bonset, à des activités dadaïstes — en particulier à la publication de la revue Mécano —, tout en se consacrant à son rôle de propagateur du néoplasticisme. 6 DERNIERS DÉVELOPPEMENTS ET POSTÉRITÉ DU MOUVEMENT DADA Le succès des remises en cause exprimées par Dada entraîne la création de groupes dans plusieurs autres pays tels que l’Italie (malgré la domination du futurisme), la Belgique, la Tchécoslovaquie, la Hongrie mais aussi la Yougoslavie et le Japon, où l’esprit du mouvement s’incarne dans le mot « Mavo ».

Dans ses derniers développements, le dadaïsme s’intègre progressivement aux tendances constructivistes des années 1920, à la suite d’un rapprochement initié lors du Congrès international Constructivisme-Dada qui se tient à Weimar en septembre 1922.

Mouvement international, Dada ne peut comme on l’a vu se résumer ni à un style ni à un ensemble de techniques.

Il est une entreprise de protestation et de subversion qui dépasse les frontières : marqué par sa dimension activiste, il s’appuie sur une production foisonnante de tracts, d’affiches, de revues, de poésies et de livres remarquables par leurs recherches typographiques.

Il manie et réinvente le langage et toutes les formes d’expression plastique, fait usage de matériaux bruts ou voués au rebut, emploie slogans, photomontages et performances publiques pour exprimer son nihilisme et son iconoclasme.

Il repousse les limites, bouscule, choque et témoigne avant tout d’un fantastique esprit de révolte à l’encontre de l’ordre établi.

Toutes ces stratégies novatrices, pétries d’audace, de liberté et de provocation, sont à l’origine de plusieurs courants artistiques apparus en Europe et aux États-Unis après la Seconde Guerre mondiale tels que le néodadaïsme de Robert Rauschenberg ou le mouvement Fluxus. Microsoft ® Encarta ® 2009. © 1993-2008 Microsoft Corporation.

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