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Le devenir historique n'est-il qu'irrationalité ?

Publié le 20/01/2005

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 Doit-on se contenter de constater l'irrationalité apparente du devenir historique? Cette position semble résulter d'une paresse intellectuelle: nous ne prenons alors pas la peine de chercher si il existe une raison plus profonde au désordre apparent. Doit-on alors tenter de rendre raison du devenir historique? Là encore cette position pose problème: peut-être n'inventons-nous par là que des fictions, destinées à conjurer la peur que peut produire en l'homme le constat de l'irrationalité du réel. Il faudrait alors bien plutôt assumer notre position première, à savoir que le devenir historique n'est qu'irrationnel, quelque soit la déception ou l'angoisse causées par ce constat.  

« les facultés et en particulier de la raison.

Cependant, un soupçon pèse sur cette explication.

En effet, comme Kantl'affirme lui-même, le constat d'un règne du hasard a quelque chose de « désolant », non seulement pour lephilosophe mais également pour tout individu.

Il est à la fois décevant pour l'esprit qui cherche à comprendre etangoissant pour l'homme qui vit dans l'histoire, de constater que le devenir historique.

Mais dans ce cas, n'est cepas cette déception et cette angoisse qui nous pousse à trouver du sens à ce qui n'en possède pas? Toutetentative de rationalisation de l'histoire ne serait alors que construction de fiction.

Assigner une raison et une fin àl'histoire a effectivement quelque chose de rassurant… Peut-être alors serions nous plus proche de la vérité si nousrenoncions à notre désir de rationalité et si nous assumions ce chaos « désolant » que semble être le devenirhistorique.

II) Le devenir historique n'est qu'irrationalité: - Aussi décevant que cela puisse paraître, nous devons nous en tenir à ce que l'observation nous impose:l'irrationalité du devenir historique.

En ce domaine, la littérature semble plus proche de la réalité, que la philosophiequi cherche à rationaliser ce qui n'a pas lieu de l'être.

Ainsi, dans Candide , Voltaire dénonce avec ironie la vision philosophique du monde et de son devenir que défend le sage Pangloss (qui figure la conception leibnizienne del'histoire).

En effet, pendant tout le récit, Pangloss défend envers et contre tout le principe selon lequel « tout estau mieux dans le meilleur des mondes », qui est une manière d'appliquer à l'histoire un principe de raison: tout peuts'expliquer selon le principe du meilleur.

Or, en évoquant des situations qui démentent manifestement ce principe (enparticulier la guerre, évoquée dans toute son absurdité), Voltaire fait ressortir le ridicule de la position de Pangloss:il apparaît comme un fou qui s'accroche à un système malgré son inadéquation patente avec la réalité.- La seule conception valable du devenir historique semble donc être celle qui renonce à lui appliquer unequelconque rationalité.

Ainsi Schopenhauer, au chap XXXVIII des Suppléments au Monde comme Volonté et comme Représentation explique pourquoi l'histoire (cette fois au sens de discipline) ne peut être une science: justement parc que son objet, l'histoire (comme devenir) est absolument irrationnel.

En effet, l'histoire (comme discipline) estcondamnée à « ramper sur le terrain de l'expérience », l'historien ne peut que prendre acte de la multiplicité desfaits advenus, sans pouvoir en déduire aucun principe, ni a fortiori rien prévoir.

Ainsi comme le dit Shakespeare dansHamlet , « le monde est une histoire racontée par un fou, pleine de bruit et de fureur ». Transition : Une conception objective de l'histoire nous impose de reconnaître qu'elle n'est que chaos et irrationalité.

Ce constata un corollaire épistémologique: il rend vain toute entreprise de l'historien pour constituer sa discipline commescience.

Cependant, c'est peut être en repensant le travail de l'historien que nous pourront trouver une réponsesatisfaisante à notre question.

En effet, si l'historien ne découvre pas une rationalité qui serait réellement cachéederrière le chaos apparent, nul doute par contre que par la mise en récit des évènements, il leur donne un sens etpermet leur compréhension.

III) Par le travail de l'historien, l'homme transcende l'irrationalité du devenir et donne un sens à sonhistoire: L'historien ne découvre pas la rationalité cachée du devenir historique, mais il tente a posteriori de donner du sensaux évènements.

Sans doute le devenir nu est en lui-même irrationnelle, mais le fait même de le mettre en récit enpropose une interprétation, au sens de création de cohérence et assignation d'un sens.

D'où le rôle primordial del'historien: celui-ci ne se contente pas de relever les faits passés.

Il les interprète, et son interprétation conditionnenotre compréhension actuelle de l'histoire et donc la manière dont nous envisageons de la poursuivre.

Ainsi Dubyexplique, dans le Dimanche de Bouvines, comment une victoire ancienne et oubliée De Philippe Auguste sur une coalition germanique a brusquement pris une importance aux yeux des historiens du XIXème.

Ils étaient en effetalors en mesure de lui donner un sens pertinent dans le contexte actuelle: à l'aube de la première guerre mondiale,cet évènement est devenu la première victoire de la France sur l'Allemagne et le symbole de prochaines victoirespossibles.

Un mémorial a même faillit être érigé à Philippe Auguste à cette époque.

Ainsi nous pouvons dire que leshistoriens donnent véritablement une rationalité au devenir historique: ils créer rétrospectivement le sens desévènements passés, en les inscrivant dans une structure qui construit leur cohérence avec le présent.

L'histoire estdonc à concevoir comme une mise en récit au sens où l'évoque Ricoeur dans Temps et récit I: la mise en récit est une manière de nous réapproprier le temps en lui donnant un sens.

Conclusion: Le devenir historique ne serait qu'irrationnel sans le travail de l'historien, qui ne cesse d'interpréter et de redécouvrirle passé pour lui donner un sens toujours plus riche.. »

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