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Dissertation apologue

Publié le 08/03/2011

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apologue

Sujet : L’apologue vous semble-t-il être le moyen le plus efficace au service de la dénonciation ?

 

Il existe plus ou moins deux sortes d’argumentations : l’une est directe et l’autre est indirecte. L’apologue, qui a pour but d'enseigner tout en divertissant, fait souvent appelle à l’implicite et s’inscrit donc dans cette dernière catégorie. Mais on trouve également des formes plus directes comme l'essaie. L’apologue est-il la technique la plus efficace en terme de dénonciation ? Dans un premiers temps, nous allons voir que l’apologue est pertinent car il parvient à divertir le lecteur tout en ayant une visée didactique, comme le montre un article du Dictionnaire philosophique et les contes philosophiques de Voltaire ainsi que les Maximes de La Bruyère ; mais dans un deuxième temps nous verrons qu'il existe également d’autres techniques tel que l'essai ou le dialogue, comme ceux de Montaigne, qui s'attaquent plus directement aux sujets qu'ils traitent et sont également efficaces en terme de dénonciation.

 

 

Tout d' abord, le conte philosophique qui apparait vraiment au siècle des Lumières, notamment à travers les écrits de Voltaire, est un outils argumentatif très pertinent pour critiquer. Ce type d’apologue épouse la forme du conte à travers des personnages archétypes, plutôt simple, et un schéma actantiel. A la première lecture, on peut lui admettre un registre merveilleux mais l’implicite révèle souvent un registre polémique, comique et satirique. Ainsi, le récit dissimule des sujets plus complexe ; cette technique permet aussi à l’auteur d' éviter la censure. De la même manière, le conte philosophique comporte souvent une morale ce qui lui accorde encore une fois cette double visée : il ne cherche pas seulement à distraire mais aussi à instruire le lecteur et le pousse à philosopher. Dans Candide, de Voltaire, paru en 1759, le protagoniste éponyme de l'histoire remet en question la philosophie de l' Optimisme de Leibniz qui lui a été enseigné par le philosophe Pangloss. Le texte peut paraître un simple récit d’aventure, mais Voltaire l' enrichit de dialogue philosophique et montre l’absurdité de la théorie de l’Optimisme qui explique la présence du mal sur Terre par le fait qu’on vit dans « le meilleur des mondes possibles. » Un extrait qui illustre la double nature des contes philosophique est celui de l’Eldorado. En effet, cette utopie paraît fascinante et distrait le lecteur qui s’émerveille à l’étrangeté de la situation (comme le fait que ces habitants voient l’or comme une simple boue jaune.) Ce passage contient des caractéristiques divertissantes mais Voltaire utilise le principe de l'utopie comme une caractéristique à double sens. Elle propose un idéale que l’homme va tenter de reproduire mais permet également au lecteur de faire une critique de son propre monde. Ce passage de Candide nous montre la société tel qu’elle serait si nous n’attachions pas tant d’importance aux richesses financières et, en même tant, ridiculise cet amour exagéré qu’on lui accorde. Par ailleurs, un autre conte de Voltaire, Zadig, se construit autour d’une morale optimiste car malgré le fait que la majorité des actes bénéfiques de Zadig ne soit pas reconnus, il finit par épouser sa bien aimée et règne sur Babylone. De plus, la scène où Zadig rencontre l’ hermite, qui détient le livre de la Providence, dépeint un discours philosophique qui appel le lecteur à se questionner. A travers ce dialogue Voltaire dénonce le fanatisme, puisque sous prétexte qu’il épargne la race humaine de future criminelle l’ hermite devient lui-même un assassin. Ainsi, le conte philosophique est une forme d’apologue très efficace au service de la dénonciation car elle permet d’exprimer une opinion indirectement.

 

Cependant, d'autres formes d'apologue comme les maximes sont aussi des méthodes efficaces en terme de dénonciation. Comme l’énonce Horace, l’apologue réunis deux vertus « placere » (plaire) et « docere » (instruire) qui sont considérée généralement comme les deux visées de la Littérature puisqu’elle touche à la fois l’état affectif et l'état intellectuel. L' apologue est donc considéré comme une forme digne puisqu’il est le plus complet quand il s’agit de remplir la double fonction de la Littérature. La Bruyère adopte cette doctrine et fait apparaître dans des maximes comme De quelques usages un côté qui a pour but de plaire et où il reste dans l' abstraction, et un côté qui a pour but d'instruire et de faire passer un message. A travers un court texte, La Bruyère parvient à éduquer. Dans De quelques usages, l'auteur fait passer son message à l'aide d'une contradiction. En effet, il commence par affirmer que la torture est une belle invention et fait comprendre au lecteur, dans une deuxième partie, qu'il en ait tout le contraire. La présence de l'ironie permet de remplir les deux fonctions de l'apologue. Les fables sont également une forme efficace ; La Fontaine, par exemple, divise la fable en deux partie : le Corps et l’Âme. Le Corps étant la fable, qui a pour but de plaire, et l’Âme la moralité, qui a pour but d’instruire. Il utilise également des animaux comme des allégories afin de faire passer un message. Dans Le Corbeau et le Renard, le Corbeau incarne la prétention et le Renard la flatterie. L' histoire de la fable peut désennuyer et même provoquer le rire face au ridicule et à la naïveté du Corbeau. En revanche, la morale « tout flatteur vit aux dépens de celui qui l’écoute » remplit une fonction didactique en dénonçant la vanité.

 

Ainsi, l’apologue est un moyen efficace au service de la dénonciation car il mêle plaisir et instruction. Néanmoins, il existe d’autre forme d’argumentation tel l’essai et le dialogue qui peuvent très bien dénoncer des principes de manière plus directe.

 

Tout d'abord, l’essai est un texte court, centré autour d’une thèse qui exprime l’opinion du lecteur par des démonstrations claires. Cependant l’essai ne doit pas être traité dans sa totalité. Comme l’indique son nom il s’agit uniquement d’essayer de répondre à un sujet donner et d’y ajouter son point de vue marqué par des modélisateurs ainsi. Montaigne est le premier à utiliser ce terme comme titre pour ses écrits de 1572 à 1592. Un des thèmes qu’aborde Montaigne dans ces essais est la torture qu’il dénonce en défendant la thèse que « c'est une dangereuse invention que celles des géhennes. » En effet, il affirme que la torture est une épreuve qui teste la capacité à résister à la douleur. Montaigne, par le biais d’un texte argumentatif dénonce les châtiments corporels et la mort d' innocents. Il amène le lecteur à partager son point de vue et à prendre parti contre la torture. Les technique d’argumentation sont plus directe car les exemples sont concrets contrairement aux autres types d’apologue qui, en utilisant des situations métaphoriques, pourraient rendre la morale plus délicate à percevoir par le lecteur. D'autres auteurs, tel que Montesquieu, analysent différents fonctionnements politiques comme dans L’ Esprit des Lois. Un tel sujet fait appel a une certaine rigueur que l'on retrouve dans l’essai. En effet, pour démontrer ses thèses l'auteur doit s’appuyer sur des exemples historiques. Il s’inspire de gouvernements étrangers et parvient ainsi a établir des principes tel que la séparation des pouvoirs qui énonce que le pouvoir doit être divisé en trois catégories : législatif, judiciaire et exécutif. En énonçant ce principe, il est bien clair que Montesquieu tente de remettre en cause la Monarchie. Ainsi, l’essai, par une analyse rigoureuse soutenue d’exemples concrets peut dénoncer certains principes comme la torture ou le système politique.

 

Pour finir, une autre technique d’argumentation pertinente pour la dénonciation est le dialogue. Même si celle-ci peut se retrouver dans toutes les formes d’argumentation vues auparavant, c’est une technique propre à elle-même qui détient des caractéristiques uniques. Elle part du principe qu’on n’argumente jamais seul le principe de polyphonie. Ce principe existe depuis longtemps car il puise ses origines de la méthode socratique qui datte du Ve siècle avant J.C. Cette méthode consiste à enseigner aux élèves en leur posant des questions et à travers les débats qui en surgissent. Plus tard, son disciple Platon appellera cela la dialectique. Par ailleurs, Platon a écrit Protagoras, un dialogue riche qui peut se lire comme un essai philosophique : c'est un emploi directe de la dialectique de Socrate. En effet, il utilise plusieurs interlocuteurs pour former un débat et en tirer des conclusions. Du reste, Fontenelle reproduit cette idée dans son œuvre Dialogue des morts en 1638 où il fait interagir des philosophes de manière anachronique comme Socrate et Montaigne qui tiennent un débat. Fontenelle utilise aussi cette idée pour Entretien sur la pluralité des mondes dans lequel il cherche à vulgariser la science. Le genre épistolaire peut également reprendre ce principe du dialogue comme le fait Montesquieu dans ses Lettres Persanes. Il parvient à travers cet échange à montrer la diversités des points de vue et à dresser une satire de la société française. Grâce au dialogue, une chose qui pouvait auparavant paraître évidente peut être remise en cause : c’est un partage d’opinion, de point de vue et d’argument qui mène à une conclusion. Ainsi, même si le dialogue est maintenant une forme plutôt orale que écrite, il peut également être une technique de dénonciation qui peut entraîner des débats philosophiques.

 

 

En effet, l’essai et le dialogue sont tout aussi rigoureux en terme de dénonciation mais utilisent des techniques d'argumentation plus explicites.

 

En conclusion, l’apologue est certes une technique de dénonciation très pertinente comme le montre le conte philosophique de Voltaire ou encore les maximes de La Bruyère ; mais on remarque qu’il existe également d’autres techniques d’argumentations plus directes tel que l’essai et le dialogue. Cependant, qu’un auteur décide de dénoncer une cause indirectement par l’apologue ou directement par l’essai, la technique à ses limites. En effet, l’apologue en restant implicite s’expose au risque d'une mauvaise interprétation tandis que l’essai qui s’adresse à un publique plus éduqué réduit son influence. L’efficacité de l’apologue ou d'une méthode d’argumentation plus directe dépend donc du publique ciblé.

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